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- Quoi ! Vous les avez perdues ! aboya Zayn au visage du malheureux deuxième classe qui, à en juger par son air défait, aurait sûrement aimé disparaître sous terre.

- Oui, sergent-artilleur, avoua la jeune recrue en bondissant au garde-à-vous.

Espérant qu'une diversion l'aiderait à dominer sa fureur, Zayn se détourna du coupable. Son regard balaya la plage, située derrière eux. À perte de vue, dans la lumière du soleil couchant, s'étendait un paysage de collines, avec quelques tanks et jeeps autour desquels les marines s'affairaient comme des fourmis. De temps à autre, une mouette plongeait du ciel à la recherche de nourriture, évitant les pales des hélicoptères qui tournoyaient au-dessus du champ de manœuvres en un ballet parfaitement synchronisé.

La journée était terminée. C'était l'heure de rapporter le matériel à la base... mais aussi le moment qu'avait choisir le 2ième classe Josh pour venir avouer à son sergent qu'il avait égaré ses jumelles à infrarouge !

Zayn se retourna de nouveau vers son interlocuteur en le fusillant du regard.

- Soldat, reprit-il d'une vois glaciale, le corps des marines vous a fait confiance en vous prêtant ces jumelles. Savez-vous au moins que cet instrument coûte très cher ?

- Oui, sergent-artilleur.

En se rapprochant de l'accusé jusqu'à se trouver presque nez à nez avec lui, Zayn constata qu'un tic nerveux faisait tressauter un muscle de sa mâchoire. Encore un gamin, songea-t-il. Était-ce lui qui vieillissait, ou la marine qui recrutait des gosses de plus en plus jeunes, ces temps-ci ?

- Débrouillez-vous comme vous voulez, mais vous allez me remettre la main sur ces jumelles.

- Moi, sergent-artilleurs ?

- Et que croyez-vous ? Que je vais les chercher à votre place ?

- Non, sergent-artilleurs, dit l'autre en déglutissant bruyamment.

Zayn n'avait pas beaucoup à se forcer pour se montrer désagréable : il était réellement hors de ses gonds. S'il y avait une chose qu'il tenait en priorité à enseigner à ses hommes, c'était bien le sens des responsabilités. La perte du matériel faisait partie de ces fautes qu'il ne pouvait tolérer. S'il n'y prenait garde et s'il ne prenait pas toute suite le contrôle d'une telle situation, qui sait si, la prochaine fois, l'un de ces jeunes écervelés n'irait pas jusqu'à égarer son fusil. Il fallait que ces gosses comprennent qu'ils devaient prendre soin de leur équipement comme de la prunelle de leurs yeux s'ils ne voulaient pas, un beau jour, se retrouver piégés comme des rats par l'ennemi.

- Deuxième classe Josh, vous allez être ce soir l'homme le plus impopulaire de votre compagnie, railla-t-il sur un ton cinglant.

Avant de se retourner et de s'adresser à toute la compagnie :

- Tout le monde reste ici jusqu'à ce qu'on retrouve les jumelles perdues.

Un murmure de mécontentement parcourut la troupe, mais Zayn fit mine de n'avoir rien entendu. Ce soir, non seulement les hommes de la compagnie détesteraient le soldat Josh mais ils ne porteraient probablement pas non plus leur sergent dans leur cœur ! Qu'importe. Après tout, il n'était pas rentré dans les marines pour gagner des concours de popularité. Et puis, ces râleurs imaginaient-ils que ça lui faisait plaisir, à lui, de passer la nuit à parcourir les dunes de sables ? Lui aussi avait droit à une vie privée, comme tout le monde... Même si, pour le moment, la sienne était plutôt confuse.

- En route, ordonna-t-il aux hommes, décochant à chacun un regard perçant. Et je ne veux pas en voir un seul qui se tourne les pouces. Grimpez-moi les dunes les unes après les autres, fouillez-moi chaque recoin, soulevez-moi chaque brin d'herbe et chaque rocher, remuez chaque grain de sable s'il le faut, mais retrouvez-moi ces satanées jumelles. Personne ne quitte les lieux avant que je les aie récupérées.

Tandis que les hommes s'éloignaient, non sans avoir copieusement insulté le deuxième classe Josh, Zayn se tourna vers l'océan. Le vent frisquet soufflait à présent vers la terre et, à l'horizon, le soleil se confondait presque avec l'eau.

D'habitude, il aimait venir là, faire des exercices. Il aimait regarder les nouvelles recrues s'entraîner et découvrir ce qu'était la noble mission de la marine américaine depuis plus de deux siècles : protéger le pays et ses citoyens. Il adorait inculquer aux jeunes les valeurs de l'armée. Devoir. Honneur. Camaraderie. Parfois, il s'amusait même beaucoup lorsqu'un soldat imprudent, se croyant plus malin que les autres, fonçait droit dans l'océan avec son tank.

Cette pensée fit naître un sourire sur ses lèvres. Aujourd'hui, contrairement aux autres fois, il n'avait eu aucun plaisir à faire des manœuvres, aucune satisfaction à se sentir membre de cette communauté dont il était pourtant si fier. Et cependant, rien n'avait changé autour de lui, les vagues venaient toujours mourir sur le sable et la musique de l'océan rythmait le temps, identique depuis des millénaires. Alors... ?

En réalité, si, quelque chose était tout de même différent : depuis une semaine, il se n'était pas passé une minute sans que ces pensées n'aillent vers Liam ! S'il avait l'impression d'en être arrivé à une trêve avec l'adorable bébé aux yeux noisette qui avait fait irruption dans sa vie quinze jours plus tôt, il en allait tout autrement avec son "baby-sitter"...

Les mains sur les hanches, respirant l'air à grandes bouffées, il se demanda pourquoi et comment il avait laissé le jeune homme prendre autant de place dans sa vie. Franchement, il n'y comprenait plus rien ! Jusqu'alors il avait toujours réussi à contenir ses conquêtes dans ce que les militaires appelaient une "zone neutre". Proche, mais pas trop. Intime, mais pas vraiment. Amants, mais pas amoureux. Et voilà qu'en un baiser, un incroyable baiser, Liam avait fait tomber toutes les barrières de protections qu'il avait construit autour de lui.

Pour l'heure, il avait sûrement intérêt à penser à autre chose, se dit-il. Et pour commencer, il devait rejoindre ses hommes qui avaient déjà pris de l'avance dans les recherches. Il s'apprêtait donc à se mettre en marche lorsqu'un bruit de moteur le surprit. Il se retourna : une jeep arrivait sans sa direction. Elle vint jusqu'à lui et Harry en descendit.

- Qu'est-ce qui se passe Zayn ? lui demanda, son ami, en regardant les soldats qui, au loin, se dispersaient en silence.

- Cet imbécile de Josh a perdu une paire de jumelles à infrarouge.

- Oh zut ! marmonna Harry en frappant de son pied dans une touffe d'herbe.

- Si la chance n'est pas avec nous, la nuit reste d'être longue.

- J'ai intérêt à appeler Louis pour lui expliquer ce qui se passe, dit Harry en sortant immédiatement son téléphone portable de la poche de son uniforme. Si je ne lui dis pas de ne pas m'attendre pour dîner, je suis un homme mort.

- Ce que c'est que d'être enchaîné ! se moqua gentiment Zayn.

Mais son amusement cessa soudain lorsqu'il réalisa qu'il avait, lui aussi, un coup de fil à passer...

Ah oui, ce temps était bel et bien révolu où il n'avait de comptes à rendre qu'à lui-même. Tout cela lui semblait si loin. Envolée la liberté. Disparue cette heureuse époque où il disposait de son appartement pour lui tout seul et pouvait agir à sa guise sans prévenir personne. À présent, avant de s'organiser, il devait tenir compte des impératifs d'un bébé et des obligations du jeune homme qui s'en occupait. Et, si Liam avait prévu autre chose ce soir, qu'allait-il faire ? s'interrogea-t-il, grimaçant à cette idée.

Il avait compté : il était sorti exactement trois fois au cours de la semaine précédente. Avec qui ?... Cela demeurait un mystère, car c'était lui qui avait rejoint son compagnon et jamais lui qui était venu le chercher chez le châtain. Réalisant brusquement qu'il était en train de perdre le fil de ses idées, Zayn se reconcentra sur ce qu'il avait à faire dans l'immédiat.

- Pourrais-tu me prêter ton téléphone ? demanda-t-il à Harry, dès que celui-ci eut terminé sa conversation avec Louis.

- Diable, que se passe-t-il ? Le sergent-artilleur Malik doit-il lui aussi aller au rapport ? s'esclaffa son ami.

- Ferme-la et passe-moi ton téléphone.

Harry tendit l'appareil, faisant cependant exprès de le tenir assez loin pour que Zayn ne puisse pas l'attraper.

-Dis-moi d'abord... En es-tu toujours à la première manche ou la partie a-t-elle continué sans que je le sache ? ironisa Harry.

Le souvenir du baiser revint instantanément à la mémoire de Zayn, tandis que son ami riait à gorge déployée, s'attirant les regards de tous les marines alentour.

- Qu'y a-t-il de si drôle ? bougonna Zayn

- Ta tête ! À te voir, on dirait bien que c'est encore lui qui a marqué le deuxième point.

- Tu dis n'importe quoi !

Faisant un pas en avant, Harry donna d'une main le téléphone à Zayn et, de l'autre, lui tapa amicalement dans le dos.

- Je serais curieux de revoir ce jeune homme qui te fait perdre les pédales, dit-il. Louis, lui, meurt d'envie de faire sa connaissance. Pourquoi ne viendrais-tu pas dîner à la maison avec ton châtain, un de ces soirs ? À moins qu'il ne refuse encore de sortir avec toi.

Liam n'accepterait jamais de l'accompagner, et c'était bien là que la pensée blessait ! Agacé, Zayn se défoula à voix basse dans quelques paroles peu aimables à l'égard d'Harry, qui auraient probablement déclenché une dispute si celui-ci avait pu les entendre.

- Ah, c'est donc ça, j'ai mis dans le mille ! Il refuse donc tes invitations, renchérit Harry, continuant clairement à provoquer Zayn. Les paris vont redoubler quand les gars vont savoir que la partie n'est pas encore jouée !

Génial ! Sa vie était maintenant devenue un sujet de rigolade sur la base militaire.

Oubliant Harry un instant, Zayn composa le numéro de Liam, à la fois anxieux et impatient d'entendre sa voix. Il répondit à la troisième sonnerie.

- Liam, c'est moi.

- Ah oui... bonjour.

Pourquoi, à ces simples mots, eut-il l'impression d'entre un sourire dans sa voix ?

- J'ai un problème, annonça-t-il, entrant tout de suite dans le vif du sujet.

- Ah bon ?

Il semblait inquiet, mais là encore, il se faisait peut-être des illusions.

- On a égaré du matériel et je suis bloqué ici avec les gars. Cela vous dérangerait-il de garder Sasha quelques heures de plus ?

- Pas du tout.

- Pas de rendez-vous galant, ce soir ? ne put s'empêcher de demander Zayn, un ton plus bas pour que Harry ne l'entende pas.

- Euh... non, pas ce soir. Je n'ai rien de prévu.

Cette réponse le déçut presque. Il aurait secrètement préféré que Liam lui dise qu'il allait renoncer à sortir avec son petit ami... exprès pour lui. Une pensée stupide, se dit-il aussitôt. L'essentiel n'était-il pas simplement qu'il accepter de le dépanner ?

- Vous comptez en avoir pour combien de temps ? demanda alors le châtain

Zayn soupira.

- Impossible à dire, malheureusement ! Jusqu'à ce que ces idiots retrouvent ce qu'ils ont perdu.

Le rire de Liam retentit dans l'écouteur.

- Je n'aimerais pas vous avoir pour patron, dit-il en plaisantant.

- Je vous promet de faire au plus vite et de rentrer dès que possible.

L'instant était venu où il allait devoir raccrocher, songea-t-il. Il allait donc à regret conclure cette conversation, lorsqu'un cri de surprise se fit entendre à l'autre bout de la ligne.

- Qu'y a-t-il ? Qu'est-il arrivé ? Répondez-moi, qu'est-ce qui ne vas pas ? demanda-t-il, se mettant aussitôt à bombarder Liam de questions.

- Rien de grave, rassurez-vous, s'empressa de le rassurer le châtain.

Puis, une seconde plus tard, il l'entendit ajouter d'une voix plus douce :

- Bravo, Sasha, tu es vraiment une grande fille !

- Qu'a-t-elle fait ?

- Elle a lâché le canapé pour faire un pas toute seule. Oh Zayn, si vous pouviez la voir, elle a l'air si fière d'elle !

Zayn regretta aussitôt de n'avoir pas le pouvoir magique de se transporter en un instant auprès de sa fille. Des images lui vinrent à l'esprit du bébé avançant en trébuchant pour se relever. Qui aurait cru, un mois plus tôt, qu'un événement aussi ordinaire pût le rendre aussi heureux ? Sa vie n'était pas seulement différente, elle était aussi... incomparablement meilleure.

- C'est fantastique, dit-il, toujours un peu triste de devoir partager ce triomphe à distance, embrassez-la très fort pour moi. Et, Liam...

- Oui ?

Zut ! qu'allait-il dire ? "Vous aussi je vous embrasse " ?

- Non, rien.

- Eh bien, dans ce cas, à plus tard. Et surtout ne vous inquiétez pas pour l'heure de votre retour.

Après avoir remercié le châtain une dernière fois, Zayn pressa sur la touche de fin de communication, puis il rendit le téléphone à Harry, qui le prit sans un mot... Du moins pour le moment.

Car, peu après, Zayn comprit que son répit n'allait pas durer en voyant une lueur malicieuse passer dans les yeux de son ami.

- J'ai tout entendu... malgré moi, dit ce dernier d'un air faussement innocent. Sasha marche ?

Surpris, et soulagé, que la question ne concerne pas Liam, Zayn acquiesça d'un mouvement de tête, avant de déclarer avec une fierté qui l'étonna lui-même :

- Elle a fait un pas toute seule.

Incroyable ! Si, trois semaines plus tôt, quelqu'un lui avait dit qu'il se retrouverait dans la peau d'un père, il lui aurait ri au nez. Et maintenant, il était là, à bêtement s'attendrir !

- Revenons à nos moutons. Tu ne m'as toujours pas dit qui avait gagné la seconde manche, reprit Harry, au grand désespoir de Zayn qui venait de comprendre que son ami ne le lâcherait pas tant qu'il ne lui aurait pas répondu.

Il réfléchit donc un instant. Du baiser échangé avec Liam, il n'avait tiré qu'un sentiment de frustration. Incontestablement, dans cette manche-là, le point ne lui revenait pas. Pour autant, revenait-il au châtain ? Pas sûr.

- Zéro partout, dit-il. Balle perdue.

- Tu n'auras qu'à redresser le tir, la prochaine fois.

- Encore faudrait-il que j'aie l'occasion de récupérer le ballon.

- Tu l'auras, affirma Harry d'un ton confiant. Sous réserve, bien évidemment, que tu quittes ces lieux pour retourner sur le terrain de jeux, ajouta-t-il regardant au loin les hommes toujours en recherche.

Exacte. Il ne pourrait rien faire tant qu'il serait coincé ici. Merci imbécile, bougonna-t-il, pour lui-même en commençant à se mettre à la recherche à son tour.

Et il entendit Harry qui riait derrière lui.

Un léger coup sur sa porte sortit brusquement Liam de son sommeil à deux heures du matin. S'éveillant en sursautant dans le fauteuil où il somnolait, il cligna des yeux, secoua la tête pour retrouver des idées claires, se passa la main dans les cheveux et se leva pour aller ouvrir à Zayn. Un Zayn épuisé... mais toujours aussi séduisant.

- Désolé pour l'heure, s'excusa-t-il.

- Ne vous en faites pas pour cela, répondit Liam en le prenant par la main pour l'inviter à entrer. Mais il est si tard, qu'il vaudrait mieux que vous me laissiez Sasha pour la nuit. Elle dort à poings fermés et ce serait ridicule de la réveiller.

Zayn poussa un soupir désespéré.

- Oui, merci, acquiesça-t-il spontanément.

Songeant aux pénibles heures qu'il avait dû passer à errer dans l'obscurité, l'estomac vide, Liam l'entraîna dans la cuisine où il le suivit sans résistance. Il se laissa faire de la même façon lorsqu'il l'obligea à s'asseoir à la table.

- Vous n'en pouvez plus ! Reposez-vous donc pendant que je vous prépare quelque chose pour vous retaper.
Zayn s'affala, les coudes sur la table et la tête entre ses mains.

- Avec plaisir murmura-t-il en adressant à son voisin un sourire reconnaissant.

Un sourire qui toucha Liam plus qu'il ne l'aurait cru. Ridicule d'être ému pour si peu ! se reprocha-t-il en silence, tandis qu'il commençait à préparer un petit repas.

Tout en allant et venant, il questionna Zayn pour soir comment il avait passé la nuit. Le temps de lui préparer un sandwich et de lui faire réchauffer de la soupe. Il en était arrivé à la conclusion de son histoire.

- On a fini par retrouver les jumelles dans une fosse où cet idiot avait pris position au cours de l'entraînement. Il les avait tout simplement oubliées quand sa compagnie avait été rappelée pour le rassemblement.

- En voilà un qui ne doit pas être près de recommencer, dit Liam, s'asseyant face à Zayn pour le regarder dévorer sa soupe avec appétit.

- Seigneur, j'espère bien que non.

Le bol fut vide en moins de temps qu'il ne faut pour le dire et Liam se leva pour le remplir de nouveau.

- Hmm, je ne savais pas que j'avais si faim, s'étonna Zayn, croquant maintenant dans son sandwich à belles dents.
- Vous voulez boire quelque chose ?

- Si vous avez une bière, je crois que je tomberais à genoux devant vous.

Liam se mit à rire, s'étonnant du plaisir que lui procurait cette rencontre en pleine nuit.

- Alors, apprêtez-vous à vous jeter à mes pieds, sergent, plaisant-t-il en sortant une canette du réfrigérateur.

- Ô Dieu qui comble le désirs des mortes, je vous adore ! s'exclama Zayn, pendant que le châtain posait sur la table ensemble la bière et un deuxième bol de soupe fumante.

« Je vous adore »... Même sous forme de plaisanterie, ces mots firent bondir le cœur de Liam.

- Méfiez-vous dit-il, s'efforçant de répondre sur le ton de l'humour, je pourrais bien m'habituer à ce que vous disiez des louanges tous les jours !

Zayn ouvrit sa canette, en avala une gorgée et ronronna :

- Après cela, je suis bien obligé d'avouer que vous avez mon adoration éternelle.

Recouvrant son bon sens après un effort, Liam songea qu'il avait intérêt à s'éloigner quelques instants. L'excuse était toute trouvée...

- Finissez votre repas. Pendant ce temps-là, je vais aller jeter un coup d'œil sur Sasha.

Zayn sentait bien que le plaisir qu'il éprouvait à se trouver là n'était pas seulement dû à la qualité de son dîner ! Quelque chose d'autre participait aussi largement à son bonheur : le simple fait de savoir que, un mois plus tôt encore, il serait rentré chez lui et se serait effondré sur son lit pour sombrer dans un sommeil puissant... Seul !

Rassasié, il se sentait maintenant beaucoup mieux. Bien sûr, voir Liam assis face à lui, le regard envahi par la fatigue, sans même parler de son T-shirt moulant et de son boxer tout autant, avait réveillé en lui un autre genre d'appétit. Un appétit qui couvait depuis qu'il avait emménagé à côté de chez le châtain et qui le torturait davantage de jour en jour.

Il terminait son sandwich lorsque le jeune homme revint dans la cuisine.

- Sasha dort comme un ange, annonça-t-il en souriant.

- Très bien. Je m'en vais, dit alors Zayn, faisant un mouvement pour se relever, il retomba automatiquement sur la chaise.

Bordel, il était cloué à la chaise. Où allait-il retrouver l'énergie pour traverser le pallier pour se rendre chez lui ?

- Venez avec moi, dit Liam, lui proposant son aide.

Il prit la main que le châtain lui tendait, se laissa hisser et, une fois debout, suivit le jeune homme en traînant des pieds jusque dans le salon. Là, n'ayant pas la force de résister à la pression qui s'exerçait dans son dos, il tomba comme une masse sur les cousins du canapé.

- Restez ici, quelques instants et reposez-vous, lui conseilla Liam.

Il lui accorda un sourire en guise de remerciement. En le regardant, il nota vaguement qu'à l'endroit où il se trouvait, il resplendissait. Mon Dieu, était-il fatigué au point de rêver éveillé ? Puis il vint s'asseoir sur un fauteuil, près du canapé, le bras sur l'accoudoir.

- Vous vous sentez-mieux ? lui demanda-il d'une voix douce.

Zayn marmonna un « oui » presque inaudible, tandis que son regard dérivait involontairement vers l'entre-jambe de son compagnon. Cette vue troublante sur la bosse cachée seulement par un fragile voile de tissu, lui donna le tournis. S'il s'était écouté... Mais non, cette nuit, aussi vif que fût son désir, il était incapable de bouger. Impossible de faire l'amour avec un corps en coton !
Quel dommage ! soupira-t-il, en proie à une lassitude grandissante. Il ferma les yeux toujours le regard vers les partie intime du jeune homme, lutta un instant pour rouvrir les paupières, mais déjà, il n'était plus de taille à remporter la bataille contre le sommeil...

Un léger sourire aux lèvres, Liam contemplait l'homme qui s'était endormi à côté de lui. Difficile d'expliquer ce qu'il ressentait, tant, même pour lui, c'était incompréhensible. Un mois plus tôt, il le fuyait comme la peste et, maintenant, ils étaient là, en proie à des sentiments de tendresse inattendue.

Pire encore... Le châtain avait éprouvé un réel plaisir à lui rendre service, à lui improviser un dîner tardif et à le regarder s'en régaler. Il s'était laissé envoûter par le son de sa voix dans le silence de l'appartement. En un mot comme en cent, sa seule présence avait suffi à le combler.
Finalement, il devait admettre que Zayn, n'était pas tout à fait celui qu'il avait imaginé. Il n'était pas seulement un homme à la parole facile et aux techniques de séduction bien adaptée. Depuis qu'un bébé était entré dans sa vie, il avait aussi prouvé qu'il avait d'autre qualités... Certes, il ne s'était pas non plus complètement transformé. Et tant mieux, après tout, songea Liam.

Le châtain avait tort de se laisser aller à cette attirance, il le savait. Et pourtant c'était plus fort que lui. Son sourire, le timbre de sa voix, la caresse de sa main et le goût de ses lèvres, tout en lui le fascinait.
Pour le moment, puisque le métis dormait, Liam ne risquait rien. Il se leva et s'approcha du canapé et, le plus doucement possible, lui glissa un oreiller sous la tête et lui couvrir le corps d'une couverture. Rassuré de le voir dormir, il se redressa, quand, à sa grande surprise, il sentit qu'une main s'emparait de la sienne...

Instantanément une grande chaleur l'envahit et sa respiration s'accéléra. Allait-il continuer à réagir de la sorte chaque fois qu'il le touchait ? se demanda le châtain. Ne s'y ferait-il donc jamais ?

Zayn n'avait pas ouvert les yeux, mais il tenait toujours la main de Liam serrée et, à présent, il essayait d'attirer le jeune homme vers lui.
En une fraction de seconde, Liam comprit que son désir était de l'avoir à ses côtés... allongé. « Sauve-toi. File dans ta chambre et ferme ta porte à clé », s'ordonna-t-il... Mais il n'en fit rien ! Bien au contraire, il s'assit sur un coin du canapé et resta là, le regard rivé sur leurs mains jointes, absolument fasciné. La paume de Zayn qui enserrait ses doigts était puissante et brûlante. Et c'était comme si toute cette chaleur se diffusait en lui, pour l'en imprégner et le marquer à tout jamais. Zayn le tira soudainement de nouveau par la main et, en même temps, se poussa sur les coussins pour lui faire de la place.

Comme un avertissement, le mot « DANGER » se mit aussitôt à clignoter en lettres fluorescentes devant les yeux de Liam. Il en aurait fallu beaucoup plus, cependant, pour atteindre sa raison.

Poussé par une force contre laquelle sa volonté ne pouvait rien, Liam s'allongea doucement à côté du métis. Dans son sommeil, celui-ci murmura alors quelques paroles indéchiffrables, à mi-chemin entre grognement et soupir, avant de se rapprocher de lui pour l'enfermer dans ses bras.

Liam retint sa respiration en attendant l'instant où il allait sentir les mains de Zayn s'égarer sur son corps... Le châtain savait maintenant ce qui allait se passer et il savait aussi qu'il ne résisterait pas à l'invitation...

Une invitation qui ne vint pas.

Réalisant que Zayn ne bougeait pas, il se lova contre lui et, la tête contre son torse, se laissa bercer par le rythme régulier des battements de son cœur, savourant simplement ce moment de paix et de bonheur. En tout cas, pour la première fois, il pouvait se laisser aller sans crainte dans les bras d'un homme.

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