Chapitre 16 - Hanse


Mercredi, 11h05.

Depuis le début de la semaine, le professeur Kim a invité ses élèves, tour à tour, à poser comme modèles pour le reste de la classe. Ce matin, alors que la dernière heure de cours de la journée démarre, Hanse pressent qu'il sera le prochain à devoir relever ce défi. Malgré tout, il tente vainement de se cacher derrière son chevalet, espérant bêtement que le professeur oubliera sa présence.

Cependant, une légère pression sur son mollet lui indique que Luna, elle, ne l'a pas oubliée.

— Hanse, si tu voulais te faire discret pour éviter de participer à mes cours, il aurait peut-être fallu éviter d'essayer de me piquer ma chienne, annonce le professeur Kim en riant, avant d'inviter Hanse à le rejoindre sur le devant de la classe.

— J'ai toujours préféré les animaux aux humains, j'y peux rien, souffle théâtralement Hanse en quittant son tabouret. Mais bon, elle en vaut la peine, elle est super mignonne. D'ailleurs, c'est cool que vous puissiez l'emmener en cours avec vous comme ça.

— Et oui, que veux-tu, quand ils ont vu mon CV, ils n'ont rien trouvé à redire concernant ma requête pour Luna. D'après le directeur Cha, elle pourrait même faire office de médiation et accentuerait l'envie de travailler auprès des étudiants.

Tandis qu'Hanse se faufile entre les chevalets pour rejoindre le devant de la classe, une légère sensation de stress vient doucement s'emparer de lui. Peu habitué à être le centre de l'attention, c'est avec une légère appréhension qu'il s'assoie sur le fauteuil destiné aux modèles. À partir de maintenant et pour l'heure à suivre, il sait qu'il ne devra pas bouger afin de permettre à toute la classe de pouvoir le dessiner convenablement.

Il s'installe alors le plus confortablement possible et commence à maintenir sa position. Cependant, il se permet tout de même de bouger ses yeux, faisant glisser son regard sur tous les élèves présents devant lui. Certains, comme Yejun, ne le regardent que très peu, de manière furtive et discrète de temps à autre, mais restent principalement concentrés sur leurs toiles. D'autres, comme Seungsik, observent avec attention les moindres détails de sa position avant de commencer à dessiner.

Lorsque son regard croise celui de Seungsik, une sensation de gène l'envahit peu à peu, tandis que ce dernier le fixe avec insistance durant d'interminables secondes. Il a beau savoir qu'il ne s'agit que d'un exercice, son regard perçant l'intrigue autant qu'il le déstabilise, alors très rapidement, il décide de baisser les yeux pour ne plus éprouver cette gêne.

— Quand vous aurez terminé vos portraits, vous viendrez me les déposer sur mon bureau face cachée. Et comme ça sera une première pour Hanse, il choisira les deux portraits anonymes qui auront le plus attiré son attention.

Toujours figé, Hanse se contente d'approuver la méthode d'enseignement de son professeur et tandis que les minutes défilent, son impatience a l'idée de découvrir tous ces portraits de lui le gagne peu à peu.

— On gagne quelque chose si on est choisi par l'intéressé ? demande curieusement Yejun en venant déposer son dessin à l'envers sur le bureau de son professeur.

— Si Hanse est d'accord, on pourait peut-être afficher les deux portraits sur le mur du fond, qu'est-ce que vous en pensez ?

Adressant un simple clin d'œil en direction de son professeur pour acquiescer à sa requête, Hanse observe à présent les autres élèves se lever à tour de rôle pour rendre leurs devoirs. Il sourit nerveusement en remarquant que Seungsik, toujours aussi studieux, est le dernier à quitter son chevalet.

Une fois tous les portraits mélangés et étalés sur le bureau du professeur, Hanse quitte son fauteuil, s'approche et observe avec attention tous les dessins qu'il trouve particulièrement réussis. Cependant, l'un d'entre eux le captive et attire irrémédiablement son attention. Il le désigne du doigt sans hésiter, puis choisit un second portrait.

— Junpyo, Seungsik, vous pouvez venir récupérer vos portraits et les afficher fièrement au mur. Bravo à tous les autres, vos dessins étaient super.

Hanse observe silencieusement Seungsik pendant qu'il accroche son dessin, mais lorsque ce dernier quitte le mur et retourne à son pupitre, son regard reste figé sur ce portrait de lui aussi beau que réaliste. Il est fasciné par la qualité de son travail, par le jeu d'ombre parfaitement maîtrisé, mais aussi par la quantité de détails retranscrits. Là où l'autre élève s'est contenté de dessiner son visage, il remarque que Seungsik, lui, a pris la peine de dessiner une partie de son buste.

Les trous plus ou moins égaux de son pull rouge, dévoilant une infime partie des tatouages sur son torse, la manière dont ses longs cheveux tombent en cascade près de son tour de cou, l'épaisseur de l'anneau qu'il porte à la lèvre, chaque détail de son apparence retranscrits sur cette toile le fascine et le rend admiratif.

Mais alors qu'il se retourne dans sa direction dans le but de le féliciter pour son travail, il remarque que ce dernier a déjà commencé à quitter la classe, les yeux rivés sur son téléphone portable.


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Devant la façade de cette grande maison d'un style industriel éclairée par plusieurs lampadaires, Hanse vérifie sur son téléphone l'adresse que Serim lui a transmise. Aucun doute, il est au bon endroit et tandis qu'il s'apprête à sonner au portail, il aperçoit dans la pénombre, son ami qui arrive du fond du jardin.

— Hey, salut mec ! C'est cool que t'es pu venir aujourd'hui, annonce Serim en venant lui donner une tape amicale sur l'épaule.

— Je t'ai pas vu en cours ce matin, t'as encore séché ?

— Ouais, j'avais la flemme, laisse tomber. Viens, suis-moi, ajoute Serim en entraînant Hanse à sa suite. Ma mère est en voyage d'affaires pour encore plusieurs semaines, alors j'ai la baraque pour moi, mais je m'en fous pas mal, je préfère squatter le sous-sol que j'ai emménagé, tu vas voir c'est cool.

Dans le hall d'entrée de cette immense maison, Hanse regarde la décoration épurée et la taille des meubles présents ici et se sent aussi mal à l'aise que dans la nouvelle maison sur mesure de Woosung. Mais en arrivant à l'étage inférieur, il se sent beaucoup plus à sa place, dans ce petit espace plongé dans la pénombre.

Il descend les escaliers et attend que Serim allume une lampe posée sur une commode au fond du sous-sol pour pouvoir pleinement profiter de la découverte de cette pièce qu'il juge totalement à son goût. Malgré l'étroitesse de l'endroit, il remarque que son camarade de classe dispose d'un canapé en cuir troué par endroits, d'une table basse et d'un écran plat accroché au mur. Derrière le sofa, se trouve un bar avec diverses bouteilles déposées dessus et de l'autre côté, il aperçoit même une table de billard.

— Vas-y, pose ton cul, fait comme chez toi.

— Putain, c'est vraiment cool ici ! C'est pas mon beau-père qui me laisserait avoir un sous-sol aménagé comme ça, se plaint Hanse en s'affalant lourdement sur le canapé.

Hanse regarde son ami s'installer en tailleur au sol, face à lui, de l'autre côté de la table basse et sortir de quoi préparer son herbe d'une boîte en acier. Il se penche alors en avant et attrape le joint que ce dernier lui tend en souriant.

— Mec, savoure-le celui-là, c'est mon dernier.

— Merde, pourquoi ?

— J'ai investi dans un nouveau projet, explique Serim qui se relève et rejoint le bar pour ramener une bouteille de Soju avant de venir s'installer aux côtés d'Hanse sur le sofa. Tu veux tester ?

Curieux, il inspire longuement dans le joint avant de le tendre à Serim, en tournant la tête dans sa direction pour répondre à sa question, tandis que la fumée s'échappe d'entre ses lèvres durant plusieurs secondes.

— Ça dépend, c'est quoi ?

— C'est une nouvelle drogue qu'on appelle Virus, une petite pilule violette qui déboîte, rétorque Serim en sortant de sa poche un sachet rempli de pilules. Alors, t'en veut une ?

— J'vais d'abord finir de tirer sur le bédo, j'verrais après, répond Hanse en récupérant ce dernier des lèvres de Serim. Elle a quels genres d'effets cette drogue ?

Alors qu'il tire une dernière fois sur le cylindre fumant avant d'atteindre la partie cartonnée, Hanse regarde son ami avaler l'une de ses pilules avant de boire la moitié de sa bière d'une seule traite.

— Elle est douce, panique pas. Tu peux te sentir plus désinhibé et avoir un petit coup de chaud, mais elle va surtout te rendre bien stone et ça mon pote, crois-moi ça déboite plus que ton pétard. Vas-y, fait pas ta trouillarde et prends-en une ! ajoute Serim en secouant vigoureusement son sachet en direction d'Hanse.

Hanse décide alors de céder à la tentation et acquiesce d'un bref mouvement de tête. Au même instant, il voit Serim lui sourire en fouillant dans le petit sachet avant de s'approcher de lui. Il observe ce dernier venir placer la gélule contre ses lèvres, avant de les entrouvrir et de le sentir déposer le comprimé entre ses dents.

Il avale sans difficulté le cachet, mais accepte volontiers la bouteille de Soju que lui tend à présent son ami. Une fois la drogue ingurgitée, Hanse se demande à nouveau comment il pourra se passer d'herbe pour les prochaines semaines.

— Du coup, tu vas plus pouvoir me fournir en herbe ?

Avant que son camarade de classe ne lui réponde, il le regarde un peu surpris, tandis qu'il se redresse brusquement du canapé pour ôter son pull d'un geste vif. Alors que Serim revient s'affaler torse nu dans le canapé, Hanse détourne rapidement le regard de ce dernier.

— Il me reste un petit stock, on va dire... Hey, ça va, sois pas gêné ! T'as jamais vu un gars torse nu ou quoi ? ajoute Serim en riant tandis qu'il donne une tape sur l'épaule d'Hanse.

— J'suis pas gêné.

— Ah ouais ? Pourtant, t'as l'air d'un p'tit puceau d'un coup.

— Ta gueule, je t'ai dit que j'étais pas gêné ! Tu fais ce que tu veux, t'es chez toi, mec.

— Ok... Mais est-ce que tu serais gêné, si je faisais ça ?

Hanse n'a pas le temps de comprendre ce que Serim a voulu insinuer, qu'il sent ce dernier s'approcher de lui et glisser son visage afin de déposer un baiser dans son cou.

— Putain, tu fais quoi là ? s'écrit Hanse dans un léger mouvement de recul.

— J'sais pas, je m'amuse, c'est tout... Détends-toi un peu, mec, ajoute Serim dans un sourire malicieux. Tu sais, je pourrais potentiellement te filer le reste de mon stock et même te faire une remise si t'étais moins sur la défensive.

D'abord choqué par ces propos, Hanse se surprend à réfléchir un instant à sa proposition avant de rapidement secouer la tête de gauche à droite en signe de refus.

— Nan t'inquiète, c'est bon, j'ai pas besoin de tes remises.

— Comme tu voudras.

— Mais t'es pas hétéro, toi ? J'comprends plus rien là.

— J'aime le sexe, peu importe qui j'ai en face de moi... Quoi ? Tu vas me dire que si je commence à te toucher, tu vas pas te mettre à bander peut-être ? ajoute Serim en venant poser sa main au niveau de l'entrejambe d'Hanse.

Lorsque la main de Serim commence à exercer une forte pression sur le haut de ses cuisses, Hanse sent une énorme gêne l'envahir. Cependant, malgré son envie de lutter contre cette situation, il sent également une forme d'excitation à l'idée d'être touché pour la première fois sur cette partie de son corps.

Il commence alors malgré lui à se sentir bander dans son caleçon, sous les caresses de plus en plus insistantes de Serim. Son cœur s'accélère et sa respiration se saccade, mais lorsqu'il décide de repousser son camarade de classe, il voit ce dernier grimper sur ses cuisses. Alors qu'il s'apprête à dégager Serim de ses jambes, il se rend compte que ses bras s'engourdissent et que sa tête continue de tourner plus que de raison.

— Laisse-toi faire et profite un peu, murmure Serim en approchant son visage de l'oreille d'Hanse. Une pipe reste une pipe, peu importe qui te l'a fait. Mais t'inquiète, si t'es puceau je le dirai à personne. J'peux m'occuper de toi, je fais ça bien, tu sais.

— Nan, putain, j'ai pas envie, mec !

— Stress pas, j'vais pas te demander de me sucer aussi... J'suis cool comme gars, je vais juste m'occuper de toi, rétorque Serim en quittant doucement les cuisses d'Hanse.

Pris de panique, Hanse profite de voir Serim se décaler pour quitter le canapé. Dans son élan, il le bouscule et le fait tomber en arrière contre la table basse. Il s'empresse alors de quitter le sous-sol en montant les marches deux par deux, mais à chacun de ses pas, il sent son corps s'engourdir davantage.

Par chance, le lycée ne se trouve qu'à deux pâtés de maisons de la maison de Serim, alors Hanse se met à courir en quittant enfin la propriété des parents de Serim. Il arrive à se souvenir du trajet pour rejoindre les dortoirs de son lycée, mais lorsqu'il arrive devant le bâtiment, sa vision commence à se troubler.

Il titube, se tenant avec difficulté au mur qui se trouve devant lui et commence à marcher en direction des dortoirs. Par réflexe ou par habitude, il passe par l'arrière de l'aile B du bâtiment et tandis qu'il arrive bientôt au niveau de la porte, une vive douleur dans le ventre l'oblige à s'asseoir.

Alors qu'il est au sol, il est pris de vertiges et observe inerte, son corps secoué de spasmes incontrôlables. Incapable de lutter ou de bouger davantage, il se recroqueville sur lui-même tandis qu'une nausée aussi brutale que soudaine le force à régurgiter sur ses propres vêtements.

Dans un dernier élan de désespoir, il tente vainement de se redresser, mais rapidement ses jambes le lâchent et il atterrit à nouveau au sol. En tombant, sa tête heurte légèrement le mur et soudain ses yeux se ferment.

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