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Une patrouille de police arriva à l'entrée de la forêt de Saint-Amand. Quand ils y entrèrent, ils se ruèrent vers l'extérieur dans un flux d'agitation. Le capitaine, qui voulait toujours bien faire, empêcha de pénétrer cet endroit sombre et méfiant.

— Alors, je veux que cette partie aille vers le Nord, celle-là vers l'Est, et celle-ci, avec moi, vers l'Ouest ! ordonna le capitaine.

Après que ce dernier eut divisé l'équipe de manière égale, il poursuivit :

— Je veux que vous fouilliez de fond en comble la forêt ! Il ne faut surtout pas que Benoît Hernández nous échappe !

Il jeta un bref regard en direction de Cédric et ajouta :

— Et il faut retrouver Léa Vermandois ! C'est parti !

La nuit était déjà tombée. Il était aux alentours de vingt-deux heures. Les policiers lâchèrent les chiens, juste après les avoir fait sentir le foulard violet pourpre de Léa. Ils n'avaient plus qu'à éclairer leur passage et les suivre.

Cédric entendait uniquement leurs pieds piétiner les herbes mouillées et les feuilles séchées sur le sol.

Il était trois heures du matin, et les policiers n'avaient aucune trace de Léa, encore moins celle de Benoît. Vu le nombre incalculable de chemins que les chiens avaient empruntés, Léa était passée par plusieurs endroits. La fatigue, la grippe, le froid, tout envahissait Cédric.

Enfin, les chiens s'arrêtèrent devant une maison délabrée. Cédric se disait que peut-être qu'ils étaient là. Peut-être qu'enfin Cédric aurait retrouvé Léa. L'espoir le regagna. Il lui semblait que tout n'était pas perdu. Cédric vit une voiture garée juste à l'entrée. Le capitaine hurla à travers le porte-voix qu'il avait dans les mains depuis leur départ du commissariat :

— Vous êtes cernés, Benoît Hernández ! Rendez-vous, c'est terminé !

Une minute s'écroula, et aucun son ne les parvint. Il était donc temps de passer à l'action. Le capitaine fit le compte à rebours avant que les policiers ne se ruent à l'intérieur :

— Trois...

Le cœur de Cédric battait très fort.

— Deux...

De plus en plus fort.

— Un...

De plus en plus rapide.

— C'est parti !

Il mit un coup à la porte et ils se précipitèrent à l'intérieur.

— Léa ! appela-t-il, désespéré.

Il courut à sa recherche. Il parcourut toutes les pièces de la maison, sans avoir ne serait-ce que le moindre signe de présence humaine. Léa n'était pas là. Ou du moins, n'y étais plus : Cédric s'agenouilla vers le lit du salon et trouva une corde raide sur une tâche de sang séché. Il fit glisser ses yeux partout, comme si un miracle lui aurait apporté sa femme.

Cédric était anéanti. Non, c'était bien plus que ça, il avait l'impression qu'on lui enfonçait un couteau dans le cœur. Et cette blessure interne qu'avait provoqué ce coup l'affligeait, le dévorait et le consumait.

UNE SEMAINE PLUS TARD...


Alors que Cédric était sur le point de quitter la maison pour se rendre au poste de police, Camille fit irruption dans sa chambre, le visage blême, sans vie. Elle avait l'air très préoccupée. Elle voulait sûrement le solliciter pour l'aider à traverser la période difficile dans laquelle ils se trouvaient tous. Elle le joignit devant le miroir et lui demanda :

— Papa, tu crois qu'on retrouvera Maman ?

— Oui, mon cœur.

Cédric en doutait. Et il avait l'impression de se faire mal à lui-même et à Camille.

— Maman me manque terriblement ! lâcha-t-elle. Voilà, j'ai honte d'avoir agis comme une fille indigne envers elle. J'aurais dû la soutenir, comme elle l'avait toujours fait.

— Mais tu ignorais ce qui lui arrivait. Cesse de te faire souffrir inutilement. Tu n'en es nullement la cause.

— Oui mais je lui ai balancé des horreurs au visage. Des horreurs qui la marqueront peut-être à vie. Peut-être qu'elle ne me verra plus comme elle me voyait.

— Non, c'est faux. Léa a bon cœur et elle sait pardonner. Tout comme elle sait reconnaitre ses erreurs, elle sait reconnaitre celle des autres. Elle est loin d'être stupide et elle sait que l'erreur est humaine. Alors pourquoi en vouloir à quelqu'un à chaque fois qu'il commet la moindre faute ?

— C'est bien plus que ça Papa ! Certes, commettre une erreur est humain, mais insulter, voire humilier sa mère est inhumain. Papa, tu n'imagines pas le nombre de fois où je l'ai regardé en face et lui ai dit que je la détestais, que je la voulais morte...

Cédric obligea Camille à le regarder droit dans les yeux. Elle ajouta :

— Je voulais qu'elle meure, Papa ! Ce n'est pas rien !

Cédric vit quelques larmes s'échapper de ses yeux pour glisser le long de sa joue. Il prit la liberté de poser son doigt sur ses pleurs pour les capturer une à une.

— N'y pense plus, la consola-t-il.

— Papa, tu te rends compte que pendant qu'elle souhaitait mon bonheur, moi je souhaitais son malheur ?

— Arrête de te torturer. Parfois il faut savoir accepter ses erreurs, accepter qu'on soit loin d'être parfait, et continuer à aller vers l'avant malgré tout. Car ce n'est pas en ressassant le passé que le présent sera meilleur. Accepte pour une fois de détruire le pont qui te lie au passé.

— Comment ?

— Ma chérie...

Il entoura ses joues humidifiées à l'aide de ses mains et, en attachant son regard aux siens larmoyants, il la conseilla :

— Si tu veux oublier une erreur que tu as faite, commence par l'accepter. Dis-toi que tu n'es pas la première à avoir agi ainsi avec ta mère, et que tu es loin d'être la dernière. Arrête de te focaliser uniquement sur la partie négative des choses. Il est temps que tu saches que le fait se tromper n'est pas complètement péjoratif. Il peut aussi bien être positif.

— Pourquoi ?

— C'est en se trompant qu'on comprend. On ne peut que devenir meilleur après s'être trompé. Et puis, si tu veux que Léa te pardonne, il faut que tu te pardonnes avant tout. Ne l'oublie pas.

Camille ferma les yeux et Cédric déposa un baiser sur son front.

— Ne t'en fais pas ! Tout ira bien. Ta mère s'en sortira et nous redeviendrons la famille que nous étions autrefois... en mieux, même.

— Tu crois ?

— ... Oui.

Il lui adressa un large sourire pour la mettre en confiance, puis, quitta les lieux. C'est alors que le téléphone sonna. Il dévala les escaliers pour prendre à temps l'appel qui leur était adressé.

— Allô ? répondit-il.

— Cédric ?

— Mike ?

— J'ai une très mauvaise nouvelle. C'est à propos de Léa.

Ses doigts se figèrent. Son cœur se mit à battre plus fort, et plus rapidement. Il ne savait pas quoi répondre. Il ne savait plus s'il devait écouter l'annonce, ou tout simplement ne pas l'écouter. Pourtant, il avait besoin de l'entendre. Il avait cette nécessité de savoir ce qui était arrivé à sa femme.


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