Chapitre 30 : Une fin de soirée inattendue


« -Lenaaa ! Tu es magnifique ! BON SANG TA ROBE !!!

Je pose un doigt sur mes lèvres pour essayer de faire comprendre à Ivanna qu'elle doit baisser d'un ton, mais rien n'y fait. Tout le monde autour nous regarde comme si nous étions des illuminées en train de communiquer dans un langage intergalactique.
Pas très chic tout ça.

Elle se précipite vers moi telle une furie, prête à observer le moindre recoin de ma tenue. Elle me fait tourner, retourner, puis tourner une fois de plus lorsque je lui demande d'arrêter parce que j'ai le tournis.

Elle me lance un regard ébahi l'air de dire : « d'où elle sort cette robe ? »

-C'est lui, dis-je en pointant un doigt vers le visage fier de mon accompagnateur.

Ledit accompagnateur arbore un visage radieux, très heureux de ce qu'il ne cesse de qualifier de « prouesse vestimentaire ».

Ils peuvent tous parler. Face à eux, je ne vaux pas grand-chose. La seule chose qui diffère, c'est qu'il faut que je fasse un effort pour qu'on se mette à me dire que je suis radieuse et magnifique.

Ivanna est telle la représentation la plus commune d'Aphrodite, la déesse de l'amour. Elle porte une longue robe blanche ornée de dorures dans laquelle elle déambule comme si elle touchait à peine le sol. Ses longs cheveux blonds sont lâchés de part et d'autre de son visage, et elle porte une grosse bague à l'index –ce que nous lui avons offerte avec Juliette lorsqu'elle a obtenu son premier boulot.

Adam, quant à lui... Et bien, est-ce nécessaire d'en parler ?

Sa beauté me donne des papillons dans le ventre. Qu'importe ce qu'il met, il est toujours le symbole même de la luxure et de l'élégance. Même dans un costume entièrement noir de la tête aux pieds, il est d'un raffinement sans égal. Sasilhouette musclée et harmonieuse n'a rien à envier à celle de toutes les autres personnes présente, et je suis ravie de l'avoir ce soir à mes côtés. 

Ses cheveux sont soigneusement coiffés sur le côté, lui donnant un air absolument irrésistible. Sa barbe a été taillée soigneusement et le rajeunit de manière impressionnante. J'ai toujours pris l'habitude de le considérer comme un homme un peu plus mûr alors que dans la réalité, nous avons le même âge.

Je remarque également que nous sommes assortis –moi et ma robe de velours noir, lui et son costume de la même couleur.

Je suis certaine que tout était prémédité.

-Bonsoir, Ivanna, dit-il en n'oubliant jamais ses manières.

Ivanna semble alors réaliser sa présence. Elle croise ses bras et l'observe de haut en bas, comme si elle était en train de prendre une décision cruciale. Adam me lance un regard intrigué mais je lui réponds par un haussement d'épaules.

Nul besoin d'essayer de comprendre ce qui se trame dans la tête de ma meilleure amie : c'est quasiment impossible.

Au bout de quelques secondes, elle semble revenir à nous.

-Mouais... commence-t-elle en ayant l'air par trop convaincue. Okay, dit-elle en se retournant alors vers Adam. Vous marquez des points parce que putain de merde elle est canon.

Adam explose de rire.
Elle me lance un clin d'œil et un air ravi. Je suis sur le point de la réprimander lorsqu'une voix venue de derrière Ivanna m'interrompt.

-Je n'aurais pas dit aussi bien, annonce Peter avec un sourire enchanté. Lena, vous êtes magnifique.

Il s'avance vers moi et me tend une main que je serre en guise de bonjour. Il fait ensuite une accolade à Adam qui s'arrange pour que sa main ne quitte pas une seule seconde ma hanche.

Peter s'avance ensuite vers Ivanna et lui embrasse les lèvres dans un geste si romantique que l'envie me prend de détourner le regard. Adam m'observe discrètement, et je sens mes joues rougir.

-Merci, Peter, je lui lance une fois leur baiser échangé. Vous avez également fière allure dans ce costume, je suis impressionnée.

Un costume très simple bleu marine mais qui sied à merveille son teint d'ours en peluche. Peter est sur le point de répondre lorsqu'Ivanna le coupe, prenant Adam par le bras pour l'attirer plus loin. La main d'Adam se détache de mes hanches et j'ai l'impression qu'on m'a enlevé une partie de moi.

Je fixe le plus bel homme de la soirée s'éloigner de moi avec un pincement au cœur. 

-Peter, dit-elle en s'éloignant avec Adam, on va vous laisser sympathiser et je vais montrer à Adam notre table. Vous nous y rejoignez d'ici ... hmmm... cinq bonnes minutes ?

Niveau discrétion, on a connu mieux. Je lève les yeux au ciel mais Peter fait comme si de rien n'était.

-D'accord, mon cœur, répond-t-il en lui lançant le plus beau des sourire.

Je vois Adam tiquer sur ce surnom. L'instant d'après, son regard se plonge dans le mien et s'intensifie. 

Oh non, petit Marciello ! Que ça n'aille pas te donner des idées.
Je n'aime pas trop les surnoms.

Ivanna attrape violemment Adam par le bras et l'entraîne vers le fond, vers une table à l'abri de tous les regards. Pendant un instant, j'ai un pincement au cœur.
J'aimerais demander à Ivanna de faire attention à lui et qu'elle évite de trop le martyriser, mais je n'ai pas envie qu'elle se fasse des idées et monte sur ses grands chevaux.

La fête bat son plein. 

Sur le bord de la plage à quelques mètres, les gens se sont déchaussés et se déhanchent au rythme de la musique endiablée du DJ. Certaines personnes discutent, d'autres rigolent ; en soi, l'ambiance à l'air au beau fixe. 

Des tentures passent au dessus de nous, amas de blanc et de bleu rappelant les tonalités de la mer. Au loin, les vagues s'échouent sur la plage, inlassablement, libérant un bruit réformant et apaisant.
Il ne fait pas trop froid pour la saison, et la plupart des gens sont en manches courtes -bien que la nuit soit tombée depuis un bout de temps. Ils discutent, profitent de la soirée pour oublier leurs soucis quotidien.

Au fond, le buffet est remplit de nourriture, et les serveurs qui déambulent aisément à travers les convives sont tout le temps à court d'alcool.
Apparemment, les gens de cette classe sociale prennent plaisir à se soûler.

-Je sais ce qu'elle est en train de faire, m'annonce Peter en interrompant mes pensées.

Je sursaute au son de sa voix.

J'étais tellement obnubilée par les décorations et les gens que je n'ai pas pensé qu'il fallait que j'entretienne la conversation, oubliant presque sa présence.

Je mets quelques secondes à comprendre le sens de sa phrase. Lorsque ses paroles terminent leur cheminement dans mon cerveau, je me fige un instant.

Ivanna ? Ce qu'elle est en train de faire ?

A part qu'elle a conclut un marché avec Adam pour savoir ce qui n'allait pas chez Peter... Je me rappelle très vaguement l'avoir entendu parler de son impression que Peter lui cachait quelque chose et de sa volonté d'en savoir plus à ce sujet...

D'ailleurs, c'est très certainement de ça dont il parle. Mais comment est-il au courant ?

Un éclair de lucidité jaillit en moi. Se pourrait-il qu'Adam...

-Ne vous inquiétez pas, me rassure-t-il en voyant l'expression étonné sur mon visage, ce n'est pas Adam qui a vendu la mèche. Je suis juste assez perspicace en ce qui concerne la gente féminine, conclut-il en haussant les épaules.

Je hausse un sourcil et décide de commencer un travail d'investigation. Sous-entendrait-t-il qu'il a beaucoup d'expérience dans ce domaine ?

-Vous êtes donc un homme à femmes ?

Il me regarde, un peu étonné que j'ose lui poser la question aussi franchement.

De loin, j'observe Adam du coin de l'œil. Régulièrement, son regard fait de même et nos prunelles se rencontrent. Tous les deux, nous faisons comme si de rien n'était et poursuivons nos conversations tout en sachant très bien que je pense à lui, et qu'il pense à moi.

Il est si merveilleusement beau que le regard de toutes les passantes se jette sur lui. Son allure assuré, son style sans défaut, sa mâchoire carrée, ses prunelles sombres et passionnées, ce magnétisme hypnotisant qui ressort de lui... 

Qui ne craquerait pas ?
Qui y résisterait ?

-Au contraire, répond Peter en secouant la tête, m'obligeant à me reconcentrer sur notre conversation. Comme Adam, je n'ai eu que très peu de relations sérieuses car je sais ce que je veux, et surtout ce que je ne veux pas.

Pour le coup, il accapare toute mon attention.

-Comme Adam ? je demande en haussant un sourcil. Mais il a collectionné les conquêtes.

Ses fossettes se creusent lorsqu'il se met à sourire.

-C'est ce qu'il vous a dit ?

Il secoue la tête en souriant, comme s'il n'était même pas étonné par mes révélations.
Je cligne des yeux sans comprendre la situation.

Non, il ne me l'a pas dit comme ça. Mais lorsque j'ai parlé du nombre impressionnant de conquêtes qu'il a eu...

-Il n'a pas démenti.

Peter lève les yeux au ciel en marmonnant quelque chose sur son « incapacité à ne pas faire le malin ». Il passe une main dans ses cheveux parfaitement coiffés, les replaçant vers l'arrière.

-Et bien je peux vous garantir que ce n'est pas le cas, assène-t-il en me regardant droit dans les yeux. C'est quelqu'un de bien, Lena. Des fois, il fait quelques erreurs de parcours mais il faut toujours garder en tête qu'il ne cherche jamais à faire mal...

L'instant d'une seconde, j'ai l'impression étrange qu'il essaie de me faire passer un message –que malheureusement je n'arrive pas à capter. Devrais-je m'inquiéter de quelque chose en particulier ? Mais Peter ne me laisse pas l'occasion de lui poser la question, et enchaîne rapidement.

-Si vous voulez vraiment savoir, je sais qu'Ivanna se pose pas mal de questions à mon sujet en ce moment. Elle voit bien que je ne suis pas dans mon état normal, et elle s'en inquiète. La vérité c'est que... dit-il en laissant sa phrase en suspend.

Ah ! Il ne nie pas qu'il n'est pas dans son état normal.
La tension commence à monter à mesure que je vois la gêne s'installer dans son regard. S'il ose me dire qu'il veut la larguer pour ...

-... je suis amoureux pour la première fois de ma vie.

J'expire bruyamment et toute la tension dans mon corps s'échappe.
L'instant d'une seconde, deux sentiments combattent en moi et je ne sais lequel choisir.

Le premier est la joie. Finalement, il l'aime tout autant qu'elle l'aime –même si elle ne me l'avouera jamais. C'est ma meilleure amie et je suis si heureuse qu'elle puisse trouver l'homme de ses rêves ! Si heureuse qu'il l'aime si profondément et qu'il désire être avec elle.

Et le second, plus étonnant, s'impose en moi avec culpabilité : la jalousie. Cet homme en face de moi livre l'étendu de ses sentiments pour ma meilleure amie, et je n'ai rien trouvé d'autre que d'être jalouse !
Mais leur amour est si puissant ... Ça se voit à des kilomètres.
Chaque regard, chaque toucher, chaque inspiration ...

Ils suintent l'amour et je les envie.

-La connaissez-vous assez pour vous avancer de la sorte ? je demande, un peu plus piquante que je ne le devrais. Elle est certes magnifique, intelligente et si perspicace que je l'envie des fois... Mais elle possède également son caractère.

Un instant, je me demande si ce n'est pas uniquement la jalousie qui parle.

-Je sais bien, répond-t-il en souriant à ma remarque sur son caractère, et c'est ce qui me plait le plus chez elle. Ses réactions sont si imprévisibles... Avec elle, on ne sait pas de quoi demain sera fait ; c'est aussi simple que ça.

Il arbore un sourire béat sur son visage et mon cœur saigne. Tant d'amour...
Oui, je suis jalouse. Et je ne sais même pas pourquoi ! Moi, j'ai Adam. Enfin, je l'ai sans l'avoir... Il ne m'a jamais appelé sa petite-amie, ni dit à qui-que-ce-soit que je sortais avec lui. Peut-être a-t-il honte de moi ?
Peut-être cherche-t-il uniquement quelqu'un pour combler son lit les soirs de manque ?

Une plaie béante suinte de mon cœur, et je réalise que mon comportement avec Ivanna n'est pas le bon.

Elle est ma meilleure amie, elle l'a toujours été. Elle m'a toujours supportée, et elle mérite ce qui lui arrive. Je ne dois pas être si égoïste !

-Vous savez quoi, Peter ?

Je plonge mon regard dans le sien en sentant l'émotion monter.

-Je vous donne ma bénédiction, ou appelez ça comme vous le souhaitez, tant que vous savez que j'approuve totalement votre relation.

Le sourire de Peter s'élargit, et ses fossettes réapparaissent. La sincérité dans son regard me prouve que j'ai pris la bonne décision.

-Merci, répond-t-il en attrapant ma main entre les siennes. Ça compte vraiment beaucoup pour moi.

A notre table, Ivanna et Adam ont l'air d'avoir terminé leur discussion. Elle nous lance de grands signes de la main en nous invitant à la rejoindre.
Je lance un sourire poli à Peter qui me sourit à son tour, clôturant ainsi notre discussion.

Il me propose son bras pour m'accompagner jusqu'à notre table, et je l'accepte volontiers. Mais à peine ai-je fais deux pas que quelque chose me stoppe.
Ou plutôt que quelqu'un me stoppe. Une masse humaine se poste devant moi, barrant notre passage.

-Lena ! s'exclame l'homme en me prenant dans ses bras, écartant le bras de Peter loin de moi.

Ce dernier se tient alors sur ses gardes.

Marcus Johnson se tient droit devant moi, son infatigable sourire scotché à son visage séduisant. Tout son visage rayonne de bonheur alors que l'étonnement est peint sur le mien. Mon cœur se met à battre à tout rompre.
Que fait-il ici ?

-Bon sang, laisse-moi te regarder, dit-il en reculant de deux pas pour m'observer. Tu es radieuse !

Mon esprit refuse momentanément de fonctionner.
Il y a un moment de black out total pendant lequel je ne sais pas où je suis, ni avec qui je suis.

Lorsque je refais surface, la réalité s'impose à moi.

Marcus observe sans gêne mon corps qui me donne l'impression d'être nue. Stupide Adam ! Voilà maintenant que Marcus reluque ma poitrine bien trop longtemps pour que ça ne reste dans la limite du raisonnable.

En même temps, ça lui apprendra à me choisir une tenue si moulante.

-Mar... Marcus ? Qu'est-ce que tu ... ?

-Juliette l'a invité ! s'exclame Ivanna en surgissant de derrière Marcus. D'ailleurs, elle ne devrait pas tarder à arriver...

Je lui lance un regard perdu à ma meilleure amie qui se tord le cou pour essayer d'apercevoir Juliette.
Elle ne se rend pas compte qu'elle est sur le point de provoquer la troisième guerre mondiale.

-Oh, vraiment ? je réponds en tentant de m'éloigner un peu de Marcus qui a maintenant posé une main sur mon bras. C'est super...

-Oui, je trouve aussi ! dit-il en se rapprochant à mesure que je m'éloigne.

Et puis il s'arrête net. 

Au moment où je me dis que « Bon sang, il a enfin comprit par lui-même ! » je réalise qu'Adam vient d'arriver.
Il lance un regard noir à Marcus qui n'a donc pas eu d'autre choix que de comprendre qu'il ne fallait pas trop s'approcher de moi. L'homme au regard ténébreux s'avance à toute allure dans ma direction, l'air décidé. Jamais je n'avais perçu une détermination si puissante dans son regard, et le savoir me rend étrangement excitée. 

-Oh, bonsoir Adam, dit-il en se renfrognant. Tu es là, toi aussi ?

Adam ne me lance même pas un regard lorsqu'il m'atteint, passant une main possessive autour de ma taille. Il ne fait rien d'autre que fixer Marcus avec austérité.
Il se tient droit et relève la tête, comme si on lui avait demandé de montrer son plus beau profil. Voilà qui ne va pas arranger ma détermination à  rester indifférente en sa présence.

Bon sang, toute cette testostérone, c'est bien trop pour moi.

-Oui, crache-t-il en bombant le torse. J'accompagne Lena, ajoute-t-il en resserrant sa prise sur ma taille –geste qui n'échappe pas à Marcus.

Le visage de Marcus renfrogne, et il semble instantanément plus tendu.

Mes joues rougissent.
Je ne pourrais être plus gênée par cette situation. Tout ça parce que j'ai mis une robe moulante !
Ne vous disputez pas les garçons, dans la vie de tous les jours je suis on-ne-peut-plus banale.
Pour tout vous dire, je suis même dans la catégorie des filles transparentes.

-Oh, c'est vraiment super... dit Marcus en décidant de ne plus accorder d'attention à Adam –qui pourtant le mitraille du regard. On va pouvoir passer la soirée ensemble, Lena !

Adam se refroidit instantanément. Tous ses muscles se contractent et ses mains se serrent en deux poings qu'il cache tant bien que mal.

Le sourire de Marcus est radieux –il me passe à l'esprit l'idée qu'il le fasse exprès, mais je chasse rapidement ces pensées. Ses yeux pétillent de joie en me regardant, et cela n'est pas pour faire plaisir à tout le monde.

Je passe une main dans le dos d'Adam pour tenter de le calmer, mais je sens sa colère jusque dans le bout de mes doigts.

Marcus, bonhomme ; t'as dit pile ce qu'il fallait pas.

Je me racle la gorge, à court de réponse.

-Oui... oui, vraiment génial.

C'est à cet instant que je réalise les yeux de Peter et Ivanna figés sur la scène qui se déroule devant leurs yeux. Peter semble préoccupé par l'expression d'Adam. Je l'observe une seconde et il me semble bien qu'ils communiquent tous les deux en silence.

Peter hoche très discrètement la tête, une fois, et Adam se détend un peu.

Ivanna semble alors prendre conscience de la troisième guerre mondiale qu'elle vient de déclencher. Elle me lance un regard alarmé avant d'annoncer :

-Venez tous, notre table est par-là ! en pointant la table du fond.

La pression redescend un peu. Je me dis qu'une fois là bas, nous allons tous nous mettre à discuter et que tout ira beaucoup mieux.
Je vois Juliette arriver au loin. Elle s'est arrangée plus qu'à l'habitude pour ce soir, et si c'est elle qui a invité Marcus, je sais qu'elle va passer la soirée à discuter avec lui.

Donc tout va bien se passer.

Je laisse Ivanna et Peter nous montrer le chemin. Marcus passe devant en rejoignant Juliette qu'il a également vue arriver. Ils s'enlacent rapidement avant de rejoindre la table.
Je suis sur le point de les suivre lorsqu'Adam me tire légèrement par le bras pour me stopper.

Lorsque je réalise l'angoisse mêlée de rage présente dans son regard, une boule d'anxiété se créé au fond de ma gorge...
Mêlée à une mini version de moi qui danse la salsa parce qu'il est très clairement en train de me faire une crise de jalousie. Et ça me fait craquer.

Ses longs cils lui procurent un regard ténébreux qui envoie des papillons dans mon ventre. Je succombe au charme qui émane de lui, perfection incarnée. Ses traits sont plissés et son visage est un masque de rigidité. Tous ses muscles sont tendus et son teint vire au rouge.

Il inspire un grand coup et ferme les yeux pour s'obliger à se calmer.
Lorsqu'il les rouvre, je ne suis pas convaincue qu'il se sente réellement mieux, mais je m'astreins à y croire. 

Il plonge son regard dans le mien avec une telle puissance que mon cœur s'arrête. C'est comme s'il me regardait pour la toute dernière fois de sa vie. Comme si ses yeux transperçaient les miens pour me toucher au plus profond de mon être. Comme s'il n'avait jamais été plus sérieux de toute sa vie.

-Premièrement, dit-il en prenant mon visage entre ses deux mains, tu ne lui parles pas. Deuxièmement, poursuit-il avec les mêmes accents autoritaires, tu ne le regardes pas. Et troisièmement, s'il ose mettre ses sales pattes sur toi ...

-Adam ! je m'exclame en levant les yeux au ciel. Arrête de me faire une crise de jalousie...

J'entoure son cou de mes deux mains et masse légèrement sa nuque en espérant qu'il arrive à se décontracter. Toute cette histoire prend des proportions énormes et je ne vois même pas pourquoi.
Je veux essayer de profiter de la soirée au maximum et oublier tous nos problèmes.

La jalousie, c'est mignon ; certes. Mais elle montre aussi un manque de confiance en l'autre. Or, moi, je lui fais totalement confiance et je veux qu'on ait une relation –ou appelez ça comme vous voulez– équilibrée.

Et puis, quand on regarde vraiment la situation, qu'est-ce que Marcus a fait de mal ?
Bon, c'est vrai il m'a reluquée avec pas trop de discrétion, mais Adam s'amuse aussi à le faire –et croyez moi, ce n'est pas qu'une ou deux fois par jour.

En soi, Marcus est très maladroit, mais il n'est pas méchant. En plus, c'est avec Adam que je suis ce soir, et pas avec lui. Marcus est avec Juliette, donc il se créé des problèmes tout seul.

-Marcus n'a rien fait de mal, je poursuis en descendant ma main sur son épaule pour essayer de le rassurer. Il veut simplement passer une soirée en compagnie de ses amis de lycée.

Adam se fige.
L'espace d'un instant, je me demande ce que j'ai bien pu faire de mal, sachant que je ne fais rien de plus qu'essayer d'apaiser la situation. 

L'expression dans son regard change alors du tout au tout. 
Plus aucune once de gentillesse. Juste du dédain. Seulement du dédain.

-Ouais, dit-il dans un souffle, ses « amis ».

Sa remarque me fait le coup d'un poignard dans le ventre. Je me rappelle très clairement le moment où j'ai révélé à Adam que Marcus était l'idole du lycée, et que je craquais pour lui sans qu'il ne m'adresse un seul regard.

Son allusion me fait clairement passer pour une moins que rien.
Je serre les dents et tente de cacher ma déception.

*

* *

« -Tu n'as pas dit un mot de la soirée. Quelque chose ne va pas ?

Je n'ai pas besoin de me retourner pour savoir que Marcus m'observe d'un air inquiet, attendant certainement depuis un moment de pouvoir venir me parler.

Je suis au buffet à l'opposé de notre table, faisant semblant de remplir une assiette de petits-fours depuis au moins cinq minutes. La vérité, c'est que je n'ai pas faim et que j'avais surtout besoin d'un bon bol d'air frais éloignée de notre groupe.

Je n'ai que trop conscience qu'Adam est au loin en train de nous observer, épier le moindre de nos gestes –et surtout ceux de Marcus. Je m'assure de garder une distance suffisante entre lui et moi pour éviter d'envenimer la situation, mais pour la première fois depuis le début de notre relation, je suis triste.

Triste parce que j'ai l'impression d'être enfermée dans une cage, dans laquelle tous mes gestes sont contrôlés. La jalousie est une chose que je comprends, et que je respecte. Mais à ce point ?
Est-ce que la passion que j'entretiens avec Adam est saine ?

Car c'est bien ce de quoi on parle. On parle de savoir si Adam est la personne qu'il me faut. A quoi est vouée notre relation ? Où est-ce que nous allons ?

Toutes ces questions m'ont taraudé l'esprit pendant toute la soirée, raison pour laquelle j'ai à peine sorti un mot. J'étais là, à côté d'Adam, à me sentir plus comme un objet qu'une réelle personne. Malgré ses quelques tentatives pour me faire entrer dans la conversation, ses regards inquiets et sa main posée sur mon genou, je n'ai pu m'empêcher de me sentir quelqu'un d'autre que la fille qui accompagne Adam.

L'expression inquiète reste figée sur le visage de Marcus. Des rides d'anxiété marquent son visage alors qu'il tente de s'approcher un peu plus dans la direction.
J'ai vraiment l'impression qu'il arrive trop facilement à lire en moi.

-Merci Marcus, mais tout va bien, je réponds en espérant que ça suffise à l'éloigner. J'ai juste beaucoup de boulot en ce moment, et la pression de la compétition...

-Oui, je comprends, me rassure Marcus en hochant la tête.

Je m'arrête, étonné que ça ait été si facile à lui faire comprendre. Avec Marcus, tout paraît si simple. Comme s'il suffisait d'un regard, d'une parole pour que le message passe entre nous.

Il passe une main dans ses boucles blondes avant de hausser les épaules, un regard compatissant dans les yeux.

-Ça ne doit pas être facile de savoir que l'ennemi sympathise uniquement pour pouvoir avoir le contrôle de la situation.

Mon cœur se stoppe momentanément.
C'est comme si on avait planté un pieu en plein dans ma poitrine. La chaleur monte en moi en même temps que la honte. 

-Pardon ? je demande, plus perdue que jamais.

Est-ce vraiment l'impression que je donne ? D'être la fille avec qui il couche pour qu'il puisse avoir l'avantage sur moi ?
Si je m'étais laissé aller à mes émotions, je me serais mise à pleurer, là, devant tout le monde.

-Cet Adam... continue Marcus en secouant la tête d'un air réprobateur. Je ne le sens pas. Tu sais, j'ai vraiment l'impression qu'il ne te mérite pas, et qu'il cherche juste à te faire tourner en bourrique pour avoir l'avantage sur toi.

Une fois de plus, ses mots ont l'effet d'un poignard sur moi.
Pour autant, il les prononce sans aucune once de méchanceté, et c'est peut-être pire. C'est bien la pitié qui le pousse à venir me parler.

Ma fierté en prend un coup, et mon moral –déjà pas au beau fixe– tombe au plus bas.

Néanmoins, je dois lui faire comprendre.
Je dois lui dire qu'Adam n'est pas comme ça.
Je dois essayer de le convaincre –et à moi aussi– qu'Adam n'est pas comme ça.
Qu'il ne se sert pas de moi.

Qu'il a vraiment des sentiments pour moi.

-Non, Marcus, je commence d'une voix cassante causée par la tristesse. Tu te trompes.

Mon ton est froid, glacial. Pour autant, je ne peux trouver aucune autre excuse à lui donner. Rien d'autre qu'un simple "tu te trompes".
Le regard de Marcus se remplit d'empathie en observant mon chagrin. L'inquiétude reprend alors sa place sur son visage.

-Excuse-moi, Lena, dit-il en attrapant délicatement ma main. Je me mêle de ce qui ne me regarde pas.

L'espace d'un instant, j'oublie tout ce qui est autour de moi.

J'oublie les gens qui pourraient nous regarder, j'oublie la tristesse au fond de mon cœur, j'oublie la compétition, et j'oublie Adam.

L'espace d'un instant, je me concentre uniquement sur la sensation de bien-être que me procure la chaleur des mains de mains de Marcus sur les miennes. Sur son air sincèrement gentil, et son sourire réconfortant. Sur ses yeux fixés sur moi comme si j'étais un être à part entière, un être qui méritait qu'on la regarde.

L'espace d'un instant, je ne remarque pas qu'Adam est posté à côté le moi, un regard sombre rivé vers nos deux mains entrelacées.

Je retire ma main comme si elle avait été brûlée, la cachant dans mon dos comme un enfant ayant été pris sur le fait.
Et je déteste cette sensation de lui devoir quelque chose, de savoir qu'il a ce pouvoir sur moi.

Adam arbore une expression indescriptible. Son regard est vide –et c'est presque pire que son regard noir. Il observe Marcus comme s'il était sur le point de lui coller son poing dans son visage. Il cligne plusieurs fois des yeux, incrédule.

L'espace d'un instant, j'ai l'impression de voir un autre homme devant moi.
Un homme effrayant.

-Tout se passe bien, Lena ? demande Adam d'une voix indescriptible.

Il fixe encore et toujours Marcus et pourtant, son regard parait étrangement lointain.
Son corps se raidit, et mes poils se hérissent.
Ma gorge devient sèche et je me met à blêmir.

-Oui, merci, je réponds d'une voix étranglée.

J'attrape la main d'Adam et tire un peu dessus pour essayer de le faire revenir à la réalité. Je voudrais juste qu'il me regarde. Je pourrais alors lui dire avec mes yeux que « tout va bien, ce n'est rien. Je suis ici, ce soir, avec toi. »

Mais au moment où Adam est sur le point de céder et plonger son regard dans le mien, Marcus se décide à parler.

-Nous discutions simplement du bon vieux temps, dit-il d'une voix sévère, comme s'il cherchait à me défendre.

Et la petite voix dans ma tête ne peut s'empêcher de constater une fois de plus :

Marcus, bonhomme ; t'as encore dit pile ce qu'il fallait pas.

Le sang d'Adam ne fait qu'un tour.
Ce n'est pas tellement qu'il ait osé répondre à Adam...Non.

C'est qu'il ait osé me défendre devant Adam.

Adam écarte ma main et vient se poster à deux centimètres du visage de Marcus. Le tableau est effrayant : deux hommes raidis par la colère se faisant face. L'un ne bouge pas, l'autre semble emplit d'une volonté de tout détruire. 

Adam ne tient plus sur place.

-Et si tu faisais la même chose, mais en dégageant ta main ? crache-t-il en plongeant un regard noir dans le sien.

Marcus ne bronche pas. Il ne dit rien, ne s'écarte même pas de peur. Il ne compte absolument pas lui faire du mal, ou se bagarrer avec lui ; ça se voit clairement. Mais il ne veut pas non plus céder, et reste sur ses appuis.
Lorsque je vois Adam commencer à s'agiter, je panique.

-Adam ! je m'exclame en le voyant bouger.

Je regrette instantanément d'avoir parlé. Je plaque mes deux mains sur ma bouche, comme si elles avaient le pouvoir d'effacer mes paroles.

Lorsque j'ai vu Adam s'agiter, j'ai cru qu'il allait frapper Marcus, ou ... je ne sais pas. Faire quelque chose de violent. Et je sais que Marcus n'aurait pas répondu. Ce n'est pas son genre.
Il fallait que j'intervienne.

Adam se retourne lentement vers moi.

Très lentement.

Trop lentement.

Son corps se crispe et je vois déjà que jamais je n'aurais dû ouvrir la bouche. Ses yeux pâlissent et ses mains se referment en deux poings.

Son regard est fou. Il semble être sous l'emprise de la confusion, et un nombre trop important d'émotions se mélangent en lui. Mais celles que je décèle suffisent à me couper le souffle.
L'incrédulité.
Le chagrin.
Et la trahison.

-Ne me dis pas, dit-il en détachant chacun de ses mots avec amertume, que tu le défends.

Je m'approche de lui pour essayer de lui faire reprendre raison.
Ivanna, Peter et Juliette nous ont maintenant rejoints. Peter se place derrière son ami en posant une main sur son épaule, comme pour l'astreindre au calme.

Il la dégage d'un coup d'épaule.

Bon sang, il n'a rien comprit ! Il n'a pas besoin de s'énerver, j'essaie juste de lui faire comprendre que Marcus n'a rien fait de mal. Nous ne faisions rien d'autre que discuter, et je suis libre de décider de mes faits et gestes. Je sais que je suis droite envers lui, même si rien ne m'y oblige.

Qui me dit qu'il ne profite pas de moi pour avoir l'avantage dans la compétition, comme l'avait laissé suggérer Marcus ?
Mon sang ne fait alors qu'un tour.

-Il n'a rien fait de mal ! je m'exclame en foudroyant Adam du regard. Tu laisses ta jalousie t'aveugler !

Son regard sur fige sur mon visage.

Et pour la première fois de ma vie, je peux affirmer avec certitude qu'Adam est en colère.
Très en colère.
Ses yeux chocolats s'assombrissent jusqu'à devenir aussi noirs que l'encre. Son visage se crispe, ses traits se tendent, et sa respiration semble erratique. Il sert la mâchoire, les pommettes aussi rouges que le sang. Ses épaules se carrent et la fureur qui ressort de lui me cloue sur place.

Non, il n'est pas juste en colère. Il est enragé.
Et sur le coup, cette rage lui fait perdre les pédales.

-Moi, jaloux de ça ? crache-t-il en lançant un regard dédaigneux en direction de Marcus.

Sa voix est dure, froide.
Jamais je ne l'ai vu dans cet état.
Jamais je n'aurais pu croire qu'il pourrait se mettre dans cet état.

Il tremble et semble ne plus pouvoir contrôler ses nerfs. Il passe une main dans ses cheveux, la folie l'ayant habité.

Et la seconde d'après, un déclic se produit en lui.



Adam m'ignore.
Il ne me regarde même plus.
Il ne fait absolument plus attention à moi.
C'est comme si je n'existais pas.


Rectification : je n'existe pas.


-Aller, dit-il avec amertume. J'en ai assez vu. »


Il tourne alors les talons et quitte la soirée. 


N'oubliez pas de voter ! 

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Alors là, ce Marcus, il a franchement tout compris ! ^^ Dans le rôle du boulet je lui accorde le premier prix ;)
Et la sortie d'Adam, vous en pensez quoi ? 

Alors qu'est-ce que vous avez pensé de ce chapitre ? Vous vous y attendiez ? ;)

Je voulais également vous informer que je risquais de poster plusieurs chapitres en même temps la prochaine fois, donc ne soyez pas étonnés ^^

J'accepte toutes les critiques constructives et tous vos avis en commentaire ! :D

Si vous avez des questions, ou juste pour me dire ce que vous avez aimé/pas aimé, ou si vous attendez la suite, c'est dans les commentaires ! ;)

N'oubliez pas de vous abonner si vous voulez encore plus d'histoires, bisous !! ♥☺
28/12/2018

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