13. Charlie
Mars.
La semaine passe en un éclair.
Je n'ai pas eu une minute à moi ces derniers jours. Ce stage me prend tout mon temps tout comme le rapport que je dois écrire, les révisions de mes examens finales et mes demandes d'admission pour une autre université. Je n'ai pas pu me retrouver seule un moment. Pauline est tout le temps sur mon dos depuis l'annonce de la grossesse. Elle ne me lâche pas et me harcèle pour que je dise la vérité à Carter. Ce n'est pas que je ne veux pas mais plutôt que je suis effrayée par sa réaction.
Ces derniers jours, il est très occupé avec les entraînements de basket alors je n'ai pas envie de le perturber avec une grossesse non prévue. Je ne sais pas si le moment idéal existe pour annoncer ce genre de nouvelles mais je me dis qu'à notre rencard ce serait pas mal. Dans deux jours, il saura. Dans deux jours, je le perdrai. Il m'en voudra de ne lui avoir rien dit avant mais surtout de prendre seule la décision de garder le bébé ou non.
Je n'ai toujours pas pris de décision. Un jour je le garde, un autre j'avorte. Avorter. Je hais ce mot. Il est tellement laid et péjoratif. Et dangereux. Une IVG n'est pas sans conséquences. J'ai peur de ne plus pouvoir avoir d'enfants après. Je sais que les risques sont très rares mais je ne peux m'empêcher d'être morte de trouille. Je n'aurais pas dû visiter tous ces sites sur les avortements. A cause d'eux, je n'ai pas pu dormir de la nuit.
- Regarde ce bébé comme il est trop mignon, me dit Pauline en me collant une photo de bébé dans un magazine devant les yeux.
Pourquoi est-ce que je lui ai demandé de m'accompagner à ma première échographie ?!
Je pose les yeux dessus et fonds immédiatement. Ce nourrisson est juste adorable et me donne envie de le noyer d'un océan de baisers.
- Très mignon, oui.
Je me demande à quoi ressemblerait notre enfant à Carter et moi. Il ou elle aurait certainement les cheveux foncés mais est-ce qu'il tiendrait de son père pour la couleur des yeux ou de moi ? J'aimerais qu'il lui ressemble. Un petit garçon avec les gênes d'un Bass sera assurément magnifique. Quoique je me dis que le physique n'est pas ce qui importe le plus. Le principal c'est qu'il ou elle soit en bonne santé. Si je comptais avorter, je ne penserais à son état de santé.
Bon sang, je n'ai aucune envie de me séparer de cet enfant !
Je suis effrayée et angoissée par cette échographie. J'ai à la fois peur d'entendre le coeur du bébé et de ne pas l'entendre. Les autres mères de la salle d'entente semblent si sereines que j'en viens à croire qu'elles sont toutes shootées au bonheur. Evidemment, leurs maris les ont accompagnées et leurs tiennent la main pour les rassurer. Elles en ont pas besoin. Je peux sentir leur impatience de rencontrer leur futur enfant.
Certaines ont déjà un ventre très arrondi qui donne envie. Elles doivent savoir le sexe du bébé ou vont l'apprendre aujourd'hui. Ce doit être tellement émouvant. Si je pouvais le savoir maintenant ce serait parfait. Je n'ai jamais été du genre patiente puis je crois que ma décision est déjà prise alors j'aimerais pouvoir commencer à m'organiser au mieux.
Mon Dieu, où est-ce qu'on va pouvoir vivre ? Il va falloir que je pense à lui acheter un berceau, des biberons, des couches, des vêtements, tout le nécessaire médicale et le reste. Je ne suis pas du tout prête à accueillir un enfant dans ma vie. Je vais être une mère abominable et mon enfant finira par me détester. Comment pourrais-je être une bonne mère alors que la mienne n'en a même pas été une pour moi ? Je ne peux pas faire ça à un bébé innocent.
- J'entends d'ici ton cerveau malade qui carbure à mort, lance Pauline en devinant mes pensées. Tu n'es pas tes parents, d'accord ?
- Tu crois que je vais être bien... qu'il va m'aimer ? murmuré-je.
- Evidemment ! Charlie, tu es la personne la plus gentille au monde. Tu as le coeur sur la main et tu es quelqu'un de tenace. Je suis persuadée que tu feras une mère merveilleuse, me rassure-t-elle.
Je lui souris. Finalement, je suis heureuse qu'elle m'ait accompagnée. J'avais terriblement besoin d'une amie.
- Puis, n'oublie pas que ce bébé aura la meilleure tata au monde, ajoute-t-elle en me faisant un clin d'oeil.
Oh ça je ne risque pas d'oublier !
L'annonce de ma grossesse enthousiaste beaucoup plus Pauline que moi. Elle adore les enfants et ils lui rendent bien. Au collège, elle gardait les enfants de ses voisins, ils étaient fous d'elle. Je suis certaine qu'un jour elle fera une mère géniale et je suis heureuse que mon bébé puisse avoir une personne comme Pauline dans sa vie. La question de marraine ne se pose pas avec elle. Ce sera Pauline.
Je feuillette un énième magazine sur la maternité lorsque je tombe sur une photo d'un nourrisson dans les bras de son père, torse nu. Sans que je m'y attende, je sens une vague de désir parcourir mon corps. Je croise les cuisses pour me contrôler mais c'est peine perdue. Mes hormones sont au garde à vous. Je suis toute excitée sans le vouloir. En même temps, je n'ai pas eu de rapports sexuels depuis au moins trois mois. Il faut absolument que je fasse l'amour !
Malheureusement, je ne pense pas que ce soit possible avant un long moment. Lorsque Carter va apprendre que je suis enceinte, il va repousser et adieu ma libido.
- Charlie Walmont ? interroge une infirmière.
- C'est moi, je dis en me levant.
Pauline pose son magazine et se lève à son tour. L'infirmière grimace en la voyant m'accompagner. Ok, celle-ci est une conne à l'esprit étriqué. Nous la suivons jusqu'à une salle d'examen où je vais rencontrer pour la première fois mon bébé. Je m'installe sur la table d'examen attendant que mon docteur arrive.
Pauline regarde toutes les photos de bébés accrochées au mur. Tous sont des faire-part de naissance. Apparemment mon obstétricien a mis une tonne de bébés au monde. C'est assez rassurant. Je me sens en sécurité. C'est sûrement stupide mais j'angoisse tellement. Je n'ai vu qu'une seule fois le docteur Wade Collins, il m'a semblé beaucoup trop jeune pour avoir mis une trentaine de bébé au monde.
- Je vais me la jouer Ross et Rachel dans Friends mais lequel est le plus laid ? questionne Pauline en pouffant.
Je ricane. Je devrais répondre que tous les bébés sont beaux mais soyons honnêtes c'est faux. Certains sont difformes avec une grosse tête ou alors plein de poils sur le visage. Je les trouve mignons à partir de quelques mois. J'observe attentivement les photos puis trouve ce que je cherche.
- Le troisième en partant de la gauche, en haut... Il a plus de poils qu'un bébé singe, me moqué-je.
- Pauvre gosse, il part mal dans la vie. Je me demande la tête de ses parents pour qu'il ressemble à ça. Puis franchement, c'est quoi ce prénom à la con ? Blue. C'est complètement con d'appeler sa fille Blue !
- On dirait un prénom de Power Ranger, je surenchéris. Je suis sûre que leurs autres enfants s'appellent Red, Yellow et Greene ! La mère doit se taper des délires en les habillant de la même couleur que leur prénom. Pire que des Power Ranger, ce sont des télétubies qui chient des paillettes colorées et qui mangent des arc-en-ciel ! Il faut vraiment être ravagés pour appeler ces gosses de cette façon. Cette gamine va prendre cher à l'école...
- Certains parents sont irresponsables !
Nous rions ensemble ce qui me détend immédiatement. Mon angoisse s'est dissipée. Pas mon envie de faire pipi. Sérieux, pourquoi faut-il que la vessie d'une femme enceinte soit pleine pour effectuer une échographie ? La moindre pression sur mon ventre et j'explose pour recouvrir les murs de mon urine.
Mon Dieu, je suis affreuse !
- Si ton enfant est laid, tu l'aimeras quand même ? interroge mon amie.
- Je... Oui... Je l'aime déjà, je dis en touchant mon ventre.
Pauline sourit.
- De toute façon, mon bébé sera magnifique !
- Comme sa tata canon, rit-elle.
Je lève les yeux au ciel en gloussant.
Le docteur Collins entre enfin dans la salle un large sourire communicatif sur les lèvres. Je suis heureuse d'être tombée sur lui. Non seulement il est beau gosse mais il est aussi compétent. Je pourrais être gênée qu'il m'observe les parties intimes jusqu'à mon accouchement mais ça m'est égale. Je ne compte pas être plus que sa patiente bien qu'il soit très beau. A mon avis, c'est avec Pauline qu'il passera une nuit torride. Pas moi.
- Bonjour, Mlle Walmont. Comment allez-vous ?
- Bien à part que j'ai hâte que ça se termine pour aller aux toilettes, je plaisante.
Il sourit.
- Je vous promets que ça ne durera pas longtemps ! Soulevez votre tee-shirt, me demande-t-il.
Je m'exécute et relève mon haut jusqu'au bas de ma poitrine. Le docteur Collins applique du gel sur mon ventre plat. Je frissonne tellement il est froid. Ma grossesse ne se voit pas encore mise à part sur ma poitrine volumineuse. Mon ventre, lui, est encore tellement plat que je me demande si je suis vraiment enceinte.
- La vache, tu es plus mince que moi alors que t'as un gosse dans le bide ! balance Pauline, étonnée. C'est normal qu'elle soit aussi mince ? Je veux dire, ça devrait se voir, non ?
Le docteur Collins ricane.
- Toutes les grossesses sont différentes, répond-il. Certaines femmes perdent quelques kilos au tout début mais rassurez-vous dans quelques jours votre ventre va s'arrondir ! Vous êtes à 12 semaines de grossesse, tout va bientôt se voir. Généralement, les femmes voient leur corps changer au bout de la dixième semaine mais je vous l'ai dit, cela varie de grossesse en grossesse, explique-t-il.
C'est rassurant, ça me laisse quelques jours devant moi pour annoncer la nouvelle à Carter avant qu'il ne voit pas lui-même.
- Le papa n'est pas venu ? questionne-t-il.
- Non, je dis en baissant la tête. Il ne le sait pas encore... Je voulais être sûre.
C'est un mensonge mais il n'a pas besoin de le savoir.
Il passe la sonde sur mon ventre en silence puis regarde la machine qu'on appelle l'échographe. Les images qui défilent dessus me laissent perplexe. Je ne sais pas très bien ce que je regarde. Ce que je sais c'est j'en suis toute bouleversée.
Le Docteur Collins m'explique ce qu'on voit à l'écran. Le foetus comme il dit est très bien développé. Je n'arrive pas à croire que je suis en train de regarder mon bébé, de le rencontrer enfin. J'ai imaginé ce moment un tas de fois mais je ne m'attendais pas à être aussi émue.
Il est parfait. Deux jambes, deux pieds, deux mains, dix doigts, une tête, un petit corps, tout est en place. Je sens les larmes inonder mes yeux. Je ne peux détacher mes yeux de l'écran.
- Je ne vois pas encore le sexe du bébé mais tout le reste est en place. Il est en excellente santé et grandit normalement. Sa mère lui a crée un environnement très sain, sourit-il.
- Il est... Il va vraiment bien ? Vous ne voyez aucune anomalie ou...
- Tout va bien, me coupe-t-il, rassurant. Il se développe parfaitement. A la prochaine visite, nous pourrons déterminer la date d'accouchement et mesurer le foetus, puis peut-être connaître le sexe...
Oh bon sang, j'ai hâte !
- Est-ce que vous voulez entendre le coeur ?
- Oui, je réponds, excitée.
Le docteur Collins appuie je ne sais où mais d'un coup un son fort et régulier rempli la pièce. Ce son est très étrange mais surtout prenant. Je l'ai entendu une dizaine de fois dans des films ou des séries mais l'écouter en vrai est une sensation incroyable. C'est si puissant, émouvant, unique. C'est comme si ma vie prenait enfin sens, que tout mon monde tournait autour de ces battements de coeur. Il devient mon monde.
Une larme coule sur ma joue tellement je suis chamboulée. J'ai toujours rêvé du moment où je construirai ma propre famille. C'est tout ce que j'ai toujours voulu. Et voilà qu'aujourd'hui, je le vis réellement. Ce n'est peut-être pas ce que j'avais prévu mais ça m'est égal. Je ne suis pas obligée d'être mariée ou d'avoir vingt-cinq ans pour avoir ma famille. Je sais que je ne suis pas seule. Pauline ne me laissera pas tomber.
Cette dernière prend ma main dans la sienne qu'elle serre pour me soutenir.
- Tu vas être la maman la plus géniale du monde, me dit elle en déposant un baiser sur ma joue.
Je lui souris.
Le docteur Collins m'imprime les différentes photos de l'échographie qu'il place dans un dossier pendant que je nettoie mon ventre du gel.
Maintenant que je suis certaine d'être enceinte, il va falloir que je l'annonce à ma famille, mes amis et surtout à Carter et sa famille. Je m'en veux de bouleverser autant la vie de Carter. C'est assez égoïste de ma part de vouloir le garder sans le consulter. Il me reste quelques semaines avant d'avorter mais pour être honnête j'en suis incapable. J'ai entendu le coeur de mon enfant, je ne peux plus le faire taire définitivement. Il est une partie de moi.
Pauline et moi sortons de la salle d'examen en plein discussion sur le sexe de mon bébé. Elle est persuadée que ce sera une fille tandis que je suis certaine que ce sera un garçon. Je ne l'explique pas, c'est comme un sixième sens. Dans un mois, je pourrai connaître le sexe. Je commencerai alors à acheter des vêtements de bébé et chercherai un nouvel appartement. Je ne vais pas virer Pauline de notre appartement, elle est chez elle.
Nous arrivons à l'accueil lorsque je crois reconnaître la silhouette d'une femme à la chevelure rouge. Elle se tourne vers moi me faisant perdre la parole.
- Lilliputienne ?
- Tante Greta ?
J'arrive pas à croire qu'elle soit devant moi, ici, dans ce service précis de l'hôpital. Mon oncle est avec elle mais aucune trace de mon cousin et de ma cousine. Tante Greta s'avance vers moi moulée dans une robe qui ne laisse aucun doute sur sa présence ici. Elle est enceinte. Elle aussi. Son ventre est beaucoup plus arrondi que le mien.
Alors c'est pour ça qu'elle était si absente et secrète ces derniers temps ?
Pauline me regarde, inquiète. Elle sait que j'aurais préféré ne pas annoncer la nouvelle de cette façon. J'ai vraiment la poisse. Pourquoi a-t-il fallu que mon oncle et ma tante consulte un docteur à Chapel Hill et non à Raleigh, là où ils habitent ?
- Qu'est-ce que tu fais ici, Lilliputienne ? Comment tu as su que j'avais un polichinelle dans le tiroir ? Je savais qu'elle avait des dons de voyance, dit elle en se tournant vers mon oncle.
- Je ne crois pas que ce soit pour toi qu'elle est ici, lui fais remarque Rob.
Ma tante hausse un sourcil sans comprendre. Rob lui désigne le dossier dans ma main qui porte mon nom. Les yeux de Greta s'ouvre en grand tout comme sa bouche.
- Oh mon Dieu !!!! Tu es enceinte, s'écrie-t-elle surexcitée.
Je n'ai même pas le temps de répondre qu'elle me prend dans ses bras toujours complètement exaltée. Je sens son petit ventre contre le mien et sourit. Je suis tellement heureuse pour elle et oncle Rob.
- C'est génial, on va pouvoir vivre nos grossesses ensemble, s'emballe-t-elle. Je suis enceinte de cinq mois et toi ?
- Trois.
- Le rêve ! Ils auront le même âge et... Petite cachotière, tu aurais pu me dire que tu avais prévu d'avoir des enfants avec ton basketteur. Où est-il, il n'est pas avec toi ? Il serait peut-être temps que je le rencontre. On pourrait aller dîner tous les quatre et...
- Chérie, l'interrompt Rob.
Enfin un qui a remarqué à quel point j'étais en panique par tout ce qu'elle vient de dire. Greta m'observe et comprend. Son expression de visage change immédiatement.
- Oh ma Lilliputienne, tu ne lui as encore rien dit, c'est ça ? Cet enfant n'est pas prévu, réaliste-t-elle.
Une nouvelle fois, elle me prend dans ses bras mais pour me consoler. Je pleure sans que je comprenne pourquoi. Ok, tomber enceinte ne faisait pas partie de mes projets mais je suis heureuse de l'être et d'avoir rencontré mon enfant, alors pourquoi est-ce que je chiale ?
J'étais envahie par le bonheur de la nouvelle il y a dix minutes et maintenant je suis envahie par la peur d'être repoussée par l'homme que j'aime. Les hormones ne vont pas cesser de me jouer des tours ces prochains mois.
- Ca va aller, ma chérie, me rassure-t-elle. Tout va bien se passer. Ton Carter est fou amoureux de toi, il ne t'abandonnera pas.
J'en suis pas certaine mais je souris pour ne pas l'inquiéter.
- Tu sais que tu peux compter sur ton oncle et moi ?
- Oui. Je suis heureuse pour toi et oncle Rob. Depuis quand est-ce que vous le savez ? je demande pour changer de sujet.
- Trois mois. Je ne voulais pas en parler avant d'être sûre que tout se passe pour le mieux... Le coeur du bébé ne battait pas à la première échographie alors on a préféré ne rien dire. Mais tout va bien maintenant. Elle est en bonne santé !
- C'est une fille ?
- Oui ! Une autre petite folle dans la famille, glousse-t-elle.
Je pouffe de rire. Je ne peux la contredire. Il est vrai que les femmes de notre famille sont spéciales. Ma petite cousine commence déjà à présenter des signes de folies des gênes Walmont. Je suis persuadée qu'elle s'en sortira très bien dans la vie. Elle pourra compter sur moi enfin dans l'optique où je ne parte pas à l'autre bout des Etats-Unis pour le reste de mes études.
Mon oncle et ma tante nous invite à déjeuner pour fêter cette bonne nouvelle ensemble. Le fait de partager cette grossesse avec Greta me rassure. Elle sera elle aussi là pour moi. Puis, ça m'enlève un poids qu'ils le sachent déjà. Je ne savais pas bien comment l'annoncer. Reste à le dire à mon grand-père et ma grand-mère. Au téléphone, ce n'est pas la meilleure des solutions mais je ne me vois pas prendre un avion pour leur dire.
Pauline et moi rentrons à l'appartement en début d'après-midi. Elle me laisse un instant pour aller faire son jogging quotidien. Au déjeuner, je l'ai trouvé étrange. Elle regardait souvent son portable et s'agacer devant. Parfois, j'ai même cru qu'elle avait peur. J'ai essayé de lui en parler en rentrant mais elle est directement partie se changer pour courir. Je m'inquiète pour elle. Pauline ne parle jamais de sa vie en France et surtout pas de son ex. Quelque chose s'est passé avec lui. Il est hors de question que je la laisse se murer dans le silence.
Je me détends devant la télé lorsque j'entends deux coups derrière la porte. Je me lève en grognant.
C'est fou, on ne peut pas être tranquille cinq minutes dans cet appartement !
J'ouvre la porte et me retrouve devant une armoire à glace.
- Ryan, que me vaut le plaisir de ta visite ? je le taquine.
Il me fusille du regard puis sourit. Il ne me demande pas mon autorisation pour entrer puisqu'il passe le pas de la porte et se dirige immédiatement vers la cuisine. Je referme la porte en soupirant.
- C'est moi que tu es venu voir ou ta petite lionne adorée ? le titillé-je.
- Toi, évidemment ! Tu es ma poupée adorée.
Il se sert dans le frigo pour prendre une bière.
- Tu en veux une ? me demande-t-il.
- Sérieux ? Tu me proposes une bière qui vient de mon frigo, c'est trop généreux, ironisé-je.
- Ce qui est à toi est à moi, poupée !
Je roule des yeux face à l'insolence de ce type qui est accessoirement mon ami. Il part s'installer sur le canapé, change la chaîne de la télé pour mettre un match de football. Qu'est-ce que les mecs ont avec le sport ? Carter fait absolument pareil quand il vient ici. Aucun d'eux ne se préoccupent du programme que je regarde. Non, ils s'en foutent.
Je soupire puis le rejoins sur le canapé. Ryan a l'habitude de débarquer à l'improviste mais généralement c'est pour taquiner Pauline.
- Qu'est-ce que tu fais là, Ryan ?
Il ne me répond pas se contentant d'un grognement plaintif. L'homme des cavernes est de retour. Il est à fond sur son match à la noix. Agacée, je prends la télécommande et éteins la télé. Voilà, j'ai toute son attention. J'hausse un sourcil, attendant qu'il me réponde enfin.
- Je fuis une nana, avoue-t-il.
- Et tu ne peux pas la fuir chez toi ?
- Elle sait où j'habite. J'ai fait l'erreur de coucher avec une première année et maintenant elle me pourchasse partout sur le campus. Elle m'a suivie jusqu'à chez moi, m'envoie des messages h24 et mets des mots dans ma boite aux lettres. C'est une vraie psychopathe !
Sans m'en empêcher, j'éclate de rire tellement la situation est ridicule. Ca ne pouvait que tomber sur lui la nana psychopathe. De tous les mecs que je connais, il est le seul à qui il arrive des histoires pareilles.
- Si tu arrêtais de coucher avec n'importe qui, ça ne t'arriverait pas, lui fais je remarquer.
- Merci pour ton conseil, poupée, mais je crois que j'avais deviné tout seul, se vexe-t-il. Elle finira par comprendre.
- Et tu vas faire quoi pour qu'elle comprenne que tu ne veux pas d'elle ?
- Coucher avec une autre nana, l'emballer devant elle.
Je prends le coussin à côté de moi et lui jette à la figure. Ce mec est un mufle de première catégorie. Il me désespère.
- Tu vas lui briser le coeur, espèce d'abruti. Elle est peut-être un peu folle mais elle a un coeur alors ne te comporte pas comme un enfoiré ! Dis-lui que tu l'apprécies, qu'elle est sympa et tout mais que tu ne veux pas d'une relation sérieuse...
- C'est une excuse de merde ça, poupée !
- Elle est beaucoup mieux que ton plan de choper une autre nana devant elle. Fais-moi plaisir, arrête de coucher avec toutes ces filles et trouves en une bien ! Je croyais que tu étais prêt à avoir une relation sérieuse ?
- Je t'ai dit ça quand j'avais trois grammes, ça compte pas !
Je soupire. Que ce soit lui et Pauline, il est impossible de leur faire entendre raison. Je n'ai rien contre leur mode de vie mais je sens qu'ils font cela uniquement pour se protéger des sentiments qu'ils pourraient éprouver. Je sais qu'ils sont attirés l'un par l'autre. Il n'y a qu'à les observer pour s'en rendre compte.
- Tu m'as aussi dit que la petite lionne te plaisait bien, ça non plus ça ne compte pas ?
Ryan tourne la tête vers moi et me lance un regard si noir que j'aurais mieux fait de me taire. J'avais promis de ne plus en parler mais je n'ai pas tenu ma promesse. Je suis une amie désastreuse.
- Elle n'est pas intéressée par moi... Elle ne le saura jamais !
- Tu as tort, Ryan. Si elle passe son temps à se montrer aussi désagréable avec toi c'est que tu ne la laisses pas indifférente. C'est son mécanisme de défense, je révèle.
- Pourquoi aurait-elle besoin de se défendre face à moi ?
- Parce que tu es certainement le seul qui peut faire sauter toutes ses barrières !
Le visage de Ryan s'illumine. Enfin, il comprend comment fonctionne Pauline. Elle se fout des mecs avec qui elle couche parce qu'ils ne sont pas dangereux pour elle. Mais Ryan si. Il la bouscule dans ses retranchements, lui fait perdre ses moyens et ça c'est dangereux pour elle.
Allez un sur deux de convaincu c'est déjà pas mal !
Reste à faire ouvrir les yeux de Pauline, ce qui n'est pas une mince affaire. Elle est tellement têtue que je ne suis pas certaine d'y arriver...
Puis, surtout, il est bientôt temps d'annoncer la nouvelle au papa de mon bébé. Après le match, demain soir, il saura.
Souhaitez-moi bonne chance !
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