Chapitre 1
Nael James était devant son ordinateur, encore étonné du mail qu'il venait de recevoir. Il ne connaissait absolument pas cette organisation et, quand il cherchait sur Google, il ne trouvait strictement rien. Sans compter que rien que le moment passé à effectuer les recherches lui faisait perdre un temps précieux. Il était en retard pour le travail. Ses petits patients l'attendaient. Il était éducateur de jeunes enfants. Déjà qu'avec tous les tatouages qu'il arborait, il passait légèrement pour quelqu'un de décalé...
Il allait sur ses trente-trois ans, toujours célibataire et apparemment incasable. Pourtant, c'était évident qu'il voulait des petites têtes blondes à lui, mais impossible de s'intéresser à une femme "comme ça". Alors, elles passaient toutes dans ses bras, dans ses draps, et ensuite, elles prenaient la porte dans le sens inverse. Parfois même, il écopait d'une gifle bien sentie. Peut-être était-il trop difficile. Ou peut-être n'était-il tout simplement pas fait pour ça. Il avait déjà eu une relation qui avait duré un petit peu plus longtemps. En réalité, à l'époque, il pensait qu'elle était la femme de sa vie. Et encore aujourd'hui, il avait le sentiment que personne ne pouvait l'égaler. Elle s'appelait Gabriella. Elle était morte il y avait plus de sept ans maintenant. Cancer. La plus belle merde de l'existence. Il était resté proche de sa belle-famille, encore aujourd'hui. Et il avait peur de s'autoriser à aimer de nouveau, comme si cela était une trahison envers elle. Ou envers eux. Ou tout simplement, c'était peut-être lui qui montait toute cette histoire en épingle et il n'était tout bonnement pas prêt. Mais sept ans, c'était long. Il faudrait bien qu'à un moment donné, il parvienne à aller de l'avant. Il le fallait.
Alors qu'il se rendait au travail, il fut frappé par une illumination. Elle était blonde, de grands yeux gris et une bouche pulpeuse. Une femme magnifique. Il l'avait vue de loin et la tentation de la suivre s'était insinuée en lui. Cependant, il ne pouvait pas. Il était déjà en retard. Cette ravissante apparition ne serait donc que cela. Et elle hanterait son esprit jour et nuit. Peut-être la reverrait-il ? Peut-être pas. Mais, alors qu'il pensait à cette beauté, un espoir naquit au creux de son cœur de pierre. Si infime qu'il ne le remarqua même pas.
Il secoua la tête puis s'en alla. Lorsqu'il arriva dans l'école pour enfants pluri-handicapés où il travaillait, tous ces adorables gamins lui sautèrent dessus. Il passa une main dans ses cheveux bruns coupés derrière les oreilles et eut ce petit sourire craquant qui lui allait si bien. Il se pencha vers l'un des petits bouts et le serra dans ses bras, la belle femme reléguée en arrière-plan.
— Coucou Tomas ! Comment ça va, petit gars ?
— Vion ! Vion !
— Tu veux faire l'avion ? D'accord !
Et il le fit voler au-dessus de sa tête, faisant rire la tête d'ange aux éclats, ce qui gonfla son cœur d'un amour inconditionnel.
Vers la fin de la journée, l'un de ses collègues vint lui proposer d'aller boire un verre. Ayant besoin de s'éloigner de ses pensées tourmentées, il s'empressa d'accepter, vu qu'Ethan était également son ami. Ce ne fut que lorsqu'ils se retrouvèrent au calme dans un pub anglais, qu'ils se mirent à parler à cœur ouvert.
— Comment va Sara ? lui demanda son ami.
— C'est qui, Sara ? questionna-t-il avec étonnement.
— Hmm... Eh bien, c'est la dernière fille que tu m'as présentée. J'avais espéré qu'elle dure un petit peu, celle-là.
— Non... Elle était jalouse. Ça ne pouvait pas marcher.
— C'est normal qu'une femme soit jalouse en sortant avec toi, Nael. Tes yeux et tes mains traînent partout.
— Et c'est mal ?
— Bien... Si tu souhaites te lancer dans une vraie relation, peut-être qu'il vaudrait mieux éviter.
Ethan grimaça. Son ami éclata de rire et lui donna une tape dans le dos, ce qui lui fit recracher la gorgée de bière qu'il venait de mettre en bouche.
— Salaud ! cracha-t-il.
— Tu ne l'as pas volée, celle-là ! Ami indigne. T'es censé être de mon côté.
— Pas quand tu fais des conneries.
— Je ne fais pas de conneries, je vis seulement l'instant présent. Parce que, tu sais... On n'est pas éternel.
— Arrête avec ça, Nael ! T'as toute la vie devant toi.
— Gabriella aussi pensait avoir toute la vie devant elle.
— Sauf que si tu passes ton temps à penser à elle et à la mort, tu ne profiteras jamais de la vie.
Il but à son tour une grande lampée de bière et tenta de changer de sujet.
— Et comment va Maëlys ?
— Oh, tu sais, elle me rend dingue, mec ! Le mariage approche et elle ne tient plus en place. Elle est tout excitée et m'envahit l'esprit avec ses histoires de centres de table, de housses de chaises et de nœuds de soie. Je fais semblant d'acquiescer mais, en vérité, je pige que dalle.
Nael ne put garder son sérieux. Entendre les soucis logistiques du mariage de son ami l'amusait grandement. Il s'imaginait à sa place et devinait l'horreur que cela devait représenter. Maëlys et Ethan étaient censés se marier en janvier, et lui devait être le témoin du marié.
— Dis-moi que t'as déjà ton costume, mec ? demanda Ethan.
— Mais oui, t'inquiète pas, mentit-il. Sinon, regarde le message que j'ai reçu aujourd'hui.
Il sortit son smartphone et fit défiler à l'écran sa boîte mail jusqu'à ce qu'il trouve le courriel en question. Puis, il lui tendit l'objet pour qu'il puisse lire. Les sourcils d'Ethan se haussèrent au fur et à mesure de sa lecture.
— Ça, pour être bizarre...
— Il faut que Maëlys et toi veniez ! le coupa-t-il. Ça pourrait être énorme !
— Je sais pas, mec.
— Allez, te fais pas prier ! Fais-le pour ton pote. Vous avez besoin de vous changer les idées, et moi aussi.
— Alors, en quoi tu comptes te déguiser ?
— Je ne sais pas encore. Faut que j'y réfléchisse. J'ai jamais été trop fana des déguisements.
— Tu ne peux certainement pas aller à ce genre de soirée sans un costume. Et non, t'exposer avec tes tatouages n'est absolument pas envisageable.
Nael éclata de rire, avant de reprendre son sérieux.
— On n'aura qu'à aller faire les boutiques tous les trois.
— Je me verrais bien en tueur en série, pensa Ethan à voix haute.
— Oh ouais, carrément, mec ! L'homme qui est devenu fou à cause de l'organisation de son mariage et qui s'est mis à tuer tous les invités pour éviter d'avoir à le célébrer.
Ethan rit à son tour et rétorqua :
— T'es malade, mec ! Tu sais ça ?
— Oui, mais c'est ça que tu aimes chez moi.
— J'en serais pas aussi sûr, si j'étais toi. Au fait, t'as remarqué la petite rouquine qui n'arrête pas de te dévorer des yeux, là-bas ?
— Non, où ça ?
Son ami lui indiqua l'emplacement du doigt. Il est vrai qu'elle était plutôt jolie. Il lui fit donc un clin d'œil, même si le cœur n'y était pas vraiment. Quelque chose en cette journée ne tournait réellement pas rond. Cependant, voulant se sortir cette blonde hypnotique de l'esprit, il interpella le serveur et lui demanda d'aller offrir un verre de sa part à la jolie jeune femme.
— Je crois que je vais te laisser t'amuser, mec. De toute façon, Maëlys est très certainement en train de m'attendre à la maison.
— Ça roule. À demain !
Ils se firent un check et Ethan quitta les lieux. Nael ne fut guère étonné de voir la jolie rousse se rapprocher avec le verre qu'il lui avait offert.
— La place est libre ? demanda-t-elle.
— Non. Puisqu'elle est prise par vous.
La jeune femme rougit jusqu'à la racine des cheveux et vint s'asseoir timidement sur la chaise à ses côtés.
— Nael, se présenta-t-il.
— Charlène, répondit-elle en lui tendant la main.
Il la lui serra et lui fit même un baise-main, ce qui la fit glousser comme une écolière. Rien que l'éternel jeu de drague le lassait déjà. Ils ne discutèrent d'ailleurs pas longtemps. Nael avait bien grand mal à se concentrer sur ce que lui disait la jeune femme. Il n'arrêtait pas de regarder vers l'extérieur.
— Vous attendez quelqu'un, peut-être ? demanda la jeune femme.
— Non, bien sûr que non. Je ne suis là que pour vo...
Sauf que, par la vitre, il vit passer une femme blonde. Il s'empressa de déposer un billet sur le comptoir et d'enfiler son manteau.
— Excusez-moi, je dois y aller. Je vous recontacterai !
— Vous n'avez même pas mon numéro, répondit Charlène.
Mais il ne l'écoutait déjà plus et se précipitait vers la sortie. Il tourna la tête en direction de là où était allée la mystérieuse jeune femme. Il courut, tentant de la rattraper. Il crut l'apercevoir, il bouscula les personnes sur son chemin, et finit par atterrir dans un cul de sac. Et personne aux alentours. Dépité, il reprit le chemin de sa voiture, lorsqu'il vit une femme blonde, de dos. Il se rapprocha et, tout doucement, il posa une main sur son épaule. L'inconnue se retourna.
— Oui ?
Ce n'était pas elle...
— Excusez-moi, je vous ai prise pour quelqu'un d'autre.
— Pas de problème.
Puis il s'en alla, prenant le chemin du retour pour rejoindre son appartement.
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