Chapitre 21 - Retour au QG
Jeudi 10 Octobre 1996 :
Je ne savais pas pourquoi j'avais gardé ça pour moi, pourquoi je n'en avais pas fait immédiatement part à Severus. En fait, depuis que j'avais surpris les deux Mangemorts comploter durant l'enterrement de mes parents, je ne lui avais quasiment pas adressé la parole. Le sorcier, prenant probablement mon mutisme pour une dépression, n'insistait pas mais je voyais bien que mon silence à son égard le rendait malade.
Je restai pendant un mois à Poudlard, dans les appartements privés de Severus. Un long mois, durant lequel je dus me battre corps et âme pour faire le deuil de mes parents. Chaque jour, je lisais le journal, afin de m'assurer qu'aucune autre attaque n'avait été dirigée contre ma famille - ou contre quiconque. Je ne dormais presque plus, tant mon esprit croulait sous l'angoisse. Je refusais tout contact physique avec Severus ; dès qu'il essayait de s'approcher de moi, ne serait-ce que pour me prendre la main, je le repoussais. Je voyais naître dans ses yeux une profonde détresse mais, étant comme il était, il gardait ses craintes pour lui.
Un matin, alors que Severus venait me trouver pour me donner quelques potions de soin que j'ingurgitais chaque jour docilement - bien que leur utilité me semblait très limitée, je brisai le silence que j'avais maintenu pendant si longtemps entre nous :
«-Severus, est-ce que tu sais que Tu-Sais-Qui prévoit d'exterminer toute ma famille ?»
Le concerné resta une bonne minute silencieux, ne s'attendant sûrement pas à ce que je parle et encore moins à ce que je pose cette question. Son regard tenta de sonder le mien, mais je gardai mes yeux rivés sur les draps, incapable d'affronter le visage du sorcier.
Un moment plus tard, il abandonna l'idée d'établir un quelconque contact visuel avec moi et, d'un geste lent, déposa sur la table de chevet la fiole qu'il tenait entre ses mains. Ensuite, il demanda, sans prendre la peine de camoufler l'étonnement qui faisait vibrer sa voix :
«-D'où est-ce que tu sors ça ?»
Je serrai les poings, en me remémorant la conversation que j'avais surprise le jour de l'enterrement de mes parents. J'hésitai quelques instants à lui dévoiler l'entière vérité, avant de céder, sachant qu'il ne répondrait pas à ma question si je ne répondais pas à la sienne.
«-J'ai entendu deux Mangemorts parler, durant l'enterrement de mes parents.»
La réaction de Severus fut sans appel et je pouvais aisément deviner la panique gagner son visage et tendre son corps. Je ne relevai pas pour autant les yeux sur lui.
«-Quoi ? s'exclama-t-il en esquissant un mouvement brusque dans ma direction. Et tu ne m'as rien dit ?»
Le mélange d'angoisse et de reproche perceptible dans le ton qu'il avait employé me glaça le sang et je répliquai, ignorant à mon tour son interrogation :
«-Ça ne répond pas à ma question.»
Ma voix froide me surprit autant qu'elle parut surprendre Severus, qui arrêta de gesticuler en face de moi. Je me mordis les lèvres, partagée entre la colère et les remords. J'entendis Severus soupirer, avant qu'il ne se résolve à me répondre, d'une voix presque lasse :
«-Non, je ne savais pas. Tu sais, je ne suis pas au courant de tous les plans du Seigneur des Ténèbres. Il n'est pas assez stupide pour dévoiler à tous ses Mangemorts le moindre détail de ses prochains assauts...»
Il laissa sa phrase en suspens pendant plusieurs secondes, ce qui m'obligea à compléter, dans un murmure :
«-Mais ? Je sens qu'il y a un mais.»
Le sorcier garda un moment le silence et je crus qu'il allait se rétracter. Néanmoins, il finit par expliquer, à demie-voix :
«-Mais... suite à tes doutes concernant l'implication des Mangemorts dans la mort de tes parents, je me suis renseigné et effectivement, c'est le Seigneur des Ténèbres qui a ordonné leur exécution.»
Sa déclaration me laissa un instant bouche bée. Ainsi, il me dissimulait des informations concernant la mort de mes parents. Quoi d'autre pouvait-il garder secret ? Je repensai malgré moi à la phrase prononcée par l'un des Mangemorts derrière l'église : «Le Seigneur des Ténèbres lui a ordonné de se rapprocher d'elle». Se pourrait-il qu'il me cache également des choses concernant la véritable nature de notre relation ? Cette simple idée suffisait à me rendre nauséeuse. Inspirant longuement, je m'enquis, tâchant vainement de ne pas laisser exploser ma frustration :
«-Pourquoi tu ne me l'as pas dit tout de suite ?
-Elladora, tu es encore faible...»
À l'entente de cette excuse minable, je ne pus m'empêcher de lever la tête et je foudroyai le sorcier du regard.
«-Je ne suis pas faible ! vociférai-je, énervée que Severus ait recours à de si piètres ressources pour expliquer la raison qui l'avait poussé à ne pas me dire toute la vérité.»
Mon ton sembla froisser le sorcier qui répliqua, perdant patience :
«-Qu'aurais-tu fait de cette information ?
-Je saurais au moins de qui me venger ! rétorquai-je du tac-au-tac en soutenant son regard dans lequel se bataillait une myriade d'émotions.»
Severus sembla ennuyé par mon comportement et ne se gêna pas de me répondre sèchement :
«-On ne se venge pas de n'importe qui ! Et certainement pas du Seigneur des Ténèbres ! Pour l'instant, ce n'était que tes parents mais...»
Severus s'arrêta au beau milieu de sa phrase, prenant conscience de son erreur. Je clignai plusieurs fois des yeux, pas sûre d'avoir bien comprise.
«-Que mes parents ? Que mes parents ?
-Elladora..., murmura le sorcier en levant ses mains en signe de désespoir. Ce n'est pas ce que je voulais dire...»
Je vis dans ses yeux une tristesse infinie mais ma colère était telle qu'elle avait intégralement pris le pas sur mon empathie. Insensible à ses états d'âme, je déclarai, d'une voix blanche :
«-Je veux retourner travailler avec l'Union.
-Ella..., me supplia Severus.
-Maintenant.»
***
La façade du 12, Square Grimmaurd apparut devant mes yeux, aussi sombre et maussade que la dernière fois où j'y avais mis les pieds. Sans plus attendre, je m'élançai en direction de la porte d'entrée et pénétrai à l'intérieur de la bâtisse. Rattrapée par mes réflexes, je parcourus le hall d'entrée à pas de loup, n'ayant pas envie d'être accueillie par les cris atroces de Walburga Black. J'arrivai sans encombre au niveau de l'escalier menant à l'étage supérieur et, d'où j'étais, je pouvais entendre les voix atténuées de mes comparses provenant du salon. Ils devaient probablement être en pleine réunion.
Un grincement suivi de grommellements à peine perceptibles me fit tourner la tête en direction des escaliers, où je découvris un elfe de maison en piteux état nettoyer sans grand enthousiasme les marches en marbre avec un chiffon sale.
«-... bien bas, maugréait-il. Jamais Kreattur n'avait suivi les ordres de si horribles personnages, ah non ça, jamais. Kreattur n'a la foi qu'en sa véritable maîtresse, qui porte bien son rang - sa maîtresse qui a mis fin à la vie de ce scélérat au sang souillé, incapable de rendre honneur à sa famille et pactisant avec des Sang-De-Bourbes...»
Tout d'abord décidée à ignorer la désagréable créature, je me figeai en entendant ses paroles, puis vins me planter devant lui.
«-Hé ! le hélai-je alors qu'il entamait un éloge concernant celle qu'il appelait «sa véritable maîtresse» dans lequel il vantait son sang pur et son allégeance au rang supérieur. C'est de Sirius dont tu parles comme ça ?»
L'elfe se tourna lentement vers moi et m'accorda un regard plein de mépris avant de reprendre son travail, laissant sur chaque marche plus de crasses qu'il n'en nettoyait, tant son tissu était poisseux.
«-Et voilà maintenant qu'une Traître-À-Son-Sang ose parler à Kreattur, se remit-il à murmurer en me tournant ouvertement le dos. Mais Kreattur n'a pas entendu, non, il n'a pas entendu et il ne s'abaissera pas à répondre à un tel personnage...»
Lassée, j'abandonnai l'elfe de maison alors qu'il entamait une diatribe contre les Traîtres-À-Leur-Sang et autres abjectes personnes. Je rejoignis la porte du salon qui était légèrement entrouverte, me permettant de capter des brides de conversation auxquelles je ne parvenais pas à donner du sens... mais que je reliai sans aucun mal à leurs orateurs. Le cœur battant, je poussai la porte derrière laquelle se dévoilèrent mes compagnons de l'Union qui se tournèrent dans ma direction, d'un geste synchronisé. Je ne mis qu'une seule seconde à localiser la personne que j'avais entendu parler à travers la porte et celle-ci fut la première à réagir en me voyant plantée sur le pas de la pièce.
«-Elladora !»
Remus me prit dans ses bras et, si je restai un court instant surprise par son geste, je lui rendis finalement son étreinte, soulagée de le voir parmi les autres membres - et surtout vivant.
«-Tu es de retour ? lui demandai-je alors que nous nous séparions, mettant une distance plus raisonnable entre nous.»
Tout le monde nous écoutait mais, à cet instant, je ne prêtais attention qu'à Remus, de qui je voulais avoir des nouvelles.
«-Oui, pour le moment, m'expliqua-t-il, brièvement. Je suis venu faire un rapport à l'Union.»
Je me mis à le toiser de la tête aux pieds, comme une mère le ferait en retrouvant son enfant après une séparation plus ou moins longue.
«-Comment se passe ta mission ?»
Remus haussa les épaules, tout en esquissant un sourire qui se voulait rassurant.
«-Pas si mal.»
Pourtant, son apparence laissait clairement suggérer le contraire : son visage était pâle et émacié, une nouvelle cicatrice se dessinait le long de sa joue gauche, ses vêtements étaient plus piteux que jamais et sa silhouette était d'une maigreur maladive. Je levai les yeux sur son visage, afin d'obtenir des informations plus précises sur ce qu'il avait vécu parmi les autres loup-garous mais Remus fut plus rapide que moi et enchaîna, d'une voix grave :
«-Elladora... j'ai appris pour tes parents. Sache que je suis désolé.»
Je soutins son regard qui exprimait toute sa compassion et fus alors incapable d'ajouter quoi que ce soit. Un silence pesant avait envahi le salon et, heureusement, Alastor en profita pour intervenir, de son éternelle voix bourrue :
«-Lynch, je suis content de te voir enfin parmi nous.»
Je tournai la tête dans sa direction et lui adressai un signe de tête poli. L'ex-Auror eut la bonne idée de ne pas s'étaler en condoléances et autres paroles inutiles, se contentant de m'adresser un regard entendu.
Quittant le visage impartial de celui que beaucoup surnommait «Fol-Œil», mes yeux se posèrent sur la table sur laquelle avait été étalée une carte immense, annotée ça et là d'informations à l'encre rouge. Je m'avançai vers le document, me frayant une place parmi les autres membres.
«-De quoi s'agit-il ? interrogeai-je l'assemblée, piquée par la curiosité.»
Le sorcier s'empressa de répondre, en lançant à Remus un regard grave :
«-Durant son escapade avec les loup-garous, Remus a découvert quelque chose. C'est pourquoi il est aussitôt venu nous prévenir.»
Il se tourna vers le sorcier concerné afin de lui laisser la parole. Remus s'avança près de la table, afin de nous faire face.
«-Hier soir, j'ai entendu les loup-garous parler d'un futur plan du Seigneur des Ténèbres. Ils évoquaient une prochaine intervention en France, où un groupe de résistants se serait formé contre l'ascension de la Magie Noire. Ils comptent exterminer un à un les opposants, afin qu'une flamme de rébellion n'envahisse pas notre monde.
-Je me suis rendu au Ministère dans la matinée, poursuivit Kingsley en brandissant devant lui une liasse de documents officiels qu'il posa sur la table dans un bruit sec. J'ai récupéré toutes les archives que j'ai pu concernant les interventions ministérielles françaises durant ces trois derniers mois. Grâce à ça, nous avons pu localiser une aire, dans laquelle il est probable que le groupe de résistants opère.»
Alastor s'approcha de la carte qui représentait le territoire français et pointa du doigt les croix rouges qui avaient été tracées à certains endroits :
«-Les signes que vous voyez représentent les actions qui ont été dénombrées par le Ministère Français : combats, messages anti-Magie Noire, manifestations, sabotages, etc. Nous avons complété ces informations par les observations du gouvernement moldu, ce qui nous a permis de déterminer une région assez restreinte, où il y a de fortes chances que l'on retrouve ces rebelles.»
Le sorcier ensorcella une plume qui entreprit de tracer d'un trait élégant un cercle englobant la majorité des croix qui avaient été dessinées sur la carte.
«-Si on considère que le groupe se trouve quelque part dans ce cercle, il est fort probable que nous le trouvions dans la plus grande ville de cette région où ils peuvent mener à bien leurs actions, c'est-à-dire...
-... Lyon, finis-je dans un murmure, alors que la plume d'Alastor vint s'immobiliser au dessus du petit point indiquant la ville.
-Tu connais ? m'interrogea Hestia, tandis que mes yeux restaient obstinément fixés sur la carte.»
Je hochai la tête en signe d'approbation.
«-Oui. Lorsque la guerre a éclaté, ma famille a déménagé en France, afin de se mettre en sécurité. Nous avons habité à Lyon, durant de nombreuses années.»
Ma déclaration fut suivie d'un long silence. Chacun regardait la carte du pays limitrophe avec un mélange d'anxiété et d'excitation.
Dedalus finit par poser la question qui brûlait sur chacune de nos lèvres :
«-Qu'est-ce qu'on fait, maintenant ?»
Alastor et Kingsley, qui s'étaient certainement déjà penchés sur la question, se lancèrent un regard complice puis, ce fut Kingsley qui prit la parole :
«-Il faut qu'on parvienne à entrer en contact avec le groupe de résistants et ce, avant que les Mangemorts ne leur tombent dessus. Une fois le contact établi, nous pourrions éventuellement unir nos forces ou du moins coordonner nos actions afin qu'elles soient plus efficaces.
-C'est la première fois que nous entendons parler d'un autre groupe qui résiste à la terreur imposée par Vous-Savez-Qui, poursuivit Alastor. Nous ne pouvons pas rater cette chance de gagner des alliés, cela pourrait être décisif dans le futur.
-Justement, se permit de glisser Betty alors qu'elle remettait d'un geste nerveux ses lunettes sur son nez. Ce n'est pas un peu trop beau ? Je veux dire... et s'il s'agissait d'un piège ?»
Alastor la toisa longuement du regard, puis ses yeux passèrent en revue chacun d'entre nous avant qu'il ne déclare :
«-Nous ne pouvons en effet pas exclure cette possibilité. Mais nous ne devons prendre le risque et essayer de les contacter.
-Dans ce cas, intervint Hestia, il va falloir être ingénieux. Les Mangemorts ont un train d'avance sur nous, ils sont peut-être déjà sur leurs pistes !»
Kingsley fit un geste dans sa direction, tout en hochant la tête en signe d'approbation.
«-Exactement. Nous allons devoir agir en toute discrétion. Il ne faut surtout pas que les Mangemorts comprennent que nous connaissons l'existence de ce groupe, sinon la couverture de Remus risque d'être découverte.»
Je lançai un regard à Remus et son regard croisa un instant le mien, avant que nous reportions notre attention sur Kingsley, qui continuait ses explications :
«-Il nous faut mettre sur le coup le moins de membres possible, sans quoi nos mouvements risquent d'être repérés.
-Qui ira ? demanda Remus, d'une voix prudente.»
Un court silence suivit sa question et ce fut Hestia qui relança la conversation, en se tournant vers moi :
«-Ça me paraît évident. Elladora, tu connais la ville et tu parles français. Tu es notre meilleur élément sur ce coup-ci.»
Je soutins son regard un instant, sans rien dire. J'avais plus que besoin de participer à une mission, cela me permettrait de prendre du recul pour mieux revenir. Mais, d'un autre côté, j'avais d'autres choses à régler : ma famille entière était menacée par les Mangemorts et je devais également avoir une discussion avec Severus. La voix d'Alastor me tira de mes pensées :
«-Elladora ? Qu'est-ce que tu en penses ?»
Lentement, je levai la tête dans sa direction et croisai son regard qui attendait à ce que j'exprime mon opinion sur tout ceci.
«-Je vais y aller seule, affirmai-je alors, d'une voix étonnament sûre d'elle.
-Quoi ? répliqua aussitôt Remus. Non, non, non. C'est hors de question que tu ailles seule là-bas ! Qui sait ce qu'il peut t'arriver ?»
Je me tournai vers lui, pas prête à flancher :
«-C'est la meilleure option. Alastor l'a très bien fait remarquer : moins nous serons à nous rendre en France, plus les risques d'exposition seront faibles. De plus, je n'ai qu'à prétendre que je rends visite à ma famille en France pour que mes mouvements ne soient pas suspects. Une fois les résistants repérés, il faudra établir rapidement un contact : s'ils ne savent pas parler anglais, ce ne sera pas un problème pour moi et peut-être me feront-ils plus rapidement confiance.»
Remus soutint mon regard et je tâchai de le rassurer du mieux que je pouvais, en luttant contre toute trace d'anxiété ou de peur. Je me tournai alors vers Alastor.
«-Tu es prête à courir ce risque, Elladora ? me demanda-t-il et sa question sonna à ce moment comme un ultimatum.»
J'inspirai longuement, avant de déclarer, d'une voix ferme :
«-Laissez-moi un jour.»
Alastor hocha la tête.
«-Très bien.»
☆☆☆
Hello les Botrucs ! Vous allez bien ?
Ça y est Ella va reprendre du service car oui, la vie continue et il faut bien surmonter son chagrin !
● Qu'avez-vous pensé de ce chapitre ? Du comportement de Severus ? Et de la réaction d'Elladora ?
● Quel va finalement être le choix d'Elladora ? Que va-t-il alors se passer ? Comment va réagir Severus ? Qui sont réellement ses résistants français ? La suite au prochain épisode... ^^
À la semaine prochaine et d'ici là, portez-vous bien !
PetitKoala
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