Chapitre 22

[13:28]

Enola essuya le filet de sang qui commençait à couler lentement le long de son menton. 

- Tu as encore perdu, déclara une vois très calme.

- Je sais, répliqua t-elle en serrant les dents.

Ochako l'aida à se relever. Enola lâcha un juron en constatant l'état de son genou : ensanglanté.

- Tu feras mieux la prochaine fois, lui promit Uraraka en posant une main sur son épaule.

Enola s'en dégagea brusquement.

- Tu dis ça à chaque fois !, cracha t-elle.

Ochako poussa un long soupir et lui tourna le dos pour se remettre à marcher.

Enola grimaça au mouvement de sa jambe mais garda sa douleur pour elle et suivit son amie.

- Le souci, c'est que tu te focalises sur la tête de l'adversaire, lui expliqua Ochako en tournant la tête vers elle.

- En même temps, je peux pas te saquer, j'ai forcément envie de t'exploser la gueule, rétorqua Enola piquée au vif. 

- Tu peux pas saquer beaucoup de personnes, lui répliqua Ochako sur le même ton.

- En même temps, c'est pas de ma faute si vous êtes tous cons !

- Il y a des gens intelligents, répondit son amie d'un ton plus calme et adouci, et tu en fais partie.

- C'est ça ouais.

- Non non, je t'assure, tu es une jeune femme intelligente. Et ce n'est pas parce que tu es très colérique que cela signifie que tu es bête. Il y a des personnes qui sont très calmes mais stupides. Si tu t'énerves facilement, c'est parce que tu es de nature anxieuse.

- Anxieuse ?, s'exclama Enola en riant nerveusement, je vis ma best life !

- Peut-être, rétorqua Ochako, mais tu l'es.

- Mais comment tu fais rester calme tout le temps ?!

- J'ai appris à relativiser.

- Rela quoi ?

- Relativiser. Tu regarderas à la maison dans un dictionnaire.

- Pourquoi pas sur mon tél ?

- Il faut que tu perdes cette habitude, lui expliqua Ochako, le téléphone, ça te stresse plus que ça te détend. Tu as peru de tomber sur de mauvaises nouvelles.

- En même temps, comment veux-tu que les nouvelles soient bonnes quand on est dans une pareille merde et en plus, enfoncés jusqu'au cou dedans ?

- Ca va s'arranger, lui promit Ochako, donne juste un peu de temps à Anne.

- Tu dis ça à chaque fois merde !

Ochako ne répondit pas et Enola se tut aussi, la gorge serrée.

Cela faisait environ six semaines qu'elle avait rencontré Ochako. A vrai dire, ce n'était pas vraiment un hasard : Anne l'avait fait sortir de la J-House malgré le danger que cela représentait.

Enola lui avait demandé pourquoi la gardienne avait fait ça mais cette dernière ne s'était contentée que de secouer la tête et de faire demi-tour. Enola avait soupiré et s'était enfuie. Elle avait donc rencontré Ochako Uraraka qui semblait déjà au courant qu'elle rencontrerait Enola. Elle lui avait dit un peu plus tard que c'était Anne qui l'avait prévenue.

Anne était donc 100% avec les Anormaux mais Enola ne savait toujours pas pourquoi.

Ochako ne répondait pas à ses questions et se contentait de la loger, la nourrir, de lui tenir compagnie et de lui apprendre à s'améliorer en combat. Mais à priori, elle cachait beaucoup de choses à Enola ce qu'elle nee tolérait pas. Mais après tout, la confiance n'était plus valorisée.

Et puis, Ochako était gentille. Elle aurait pu l'abandonner. Mais elle est restée. "C'est bien l'une des premières", songea Enola en se rendant compte à quel point elle éprouvait de l'affection pour la jeune femme. En fait, était-ce seulement juste de l'affection ou plus ? De l'amitié ? Voir de l'amour ? Non, certainement pas de l'amour. Enola ne savait pas aimer.

Enola sentit son coeur redoubler d'allure quand Ochako ralentit pour trottiner à son allure.

- Tu me fais la tête ?, demanda doucement Uraraka.

- Hm.

"C'est pas une réponse mais elle se contentera de ça."

- Je prends ça pour un oui, soupira la châtaine.

- Non, râla Enola, j'ai juste trop la flemme de parler.

Ochako rit. Un rire cristallin. Un rire qui remplit le ventre d'Enola de papillons.

- La flemme d'articuler un seul mot ?

- Ouais.

- Tu vois, tu n'as plus la flemme !

Enola leva les yeux au ciel et son amie lui incita à presser l'allure ce qu'elle fit. Les deux châtaines accélèrent et filèrent parmi les arbres de la forêt. Cette petite course permit à Enola de se plonger dans ses pensées, ce qu'elle avait l'habitude de faire.

Est-ce qu'Ochako était une Anormale aussi ? Cela étonnerait Enola. Elle ne l'avait jamais vue à la J-House. Peut-être s'était-elle échappée il y a longtemps ? Enola ne savait depuis combien de temps tout avait commencé. A vrai dire, elle se rappelait de tout. Mais pas Ochako.

"C'est bizarre", songea t-elle, "Et je n'ai toujours pas retrouvé Emily.."

La détective était introuvable. Elle n'était pas à la J-House. Mais alors, où était-elle ?

"J'espère qu'elle n'a rien" 

Enola aurait voulu ne plus jamais éprouvé cette inquiétude pour quiconque. Elle s'était promis de ne plus jamais sociabiliser à nouveau. Elle était certaine qu'elle y arriverait. C'était sans compter sur Emily, Germaine, Olive et..et même Ochako. Même si dans la réalité, elles ne s'étaient vues qu'une ou deux fois. "Est-ce que quand on se réveillera, on se rappelera de tout ça ? Est-ce qu'Ochako va retrouver la mémoire ?"

Enola sentit son coeur se serrer quand elle se rendit compte que non. Si Ochako retrouvait la mémoire ici, dans cette réalité, elle oublierait toute sa vie d'avant, non ? Elle oublierait qu'elles étaient amies et elle ne croirait pas Enola quand celle-ci lui dirait qu'elles étaient proches. Mais pour autant, quand elles se réveilleront, Ochako oubliera ce lien qu'elles avaient.

Dans les deux cas, Ochako oubliera leur amitié. Et cela brisait Enola.

Mais aussi, où étaient tous ses amis ? Où était Germaine ? Et Olive ? Et Emily ? Et les autres ? Allaient-ils bien ? Heather ? June ? Tess ? Legolas ? Enola aurait voulu s'en assurer.

"Je souhaite de tout mon coeur qu'on retourne dans notre réalité. Et qu'Ochako se souvienne que l'on est amies parce que sinon..sinon je vais être d'une humeur excécrable."

- Enola ?

La châtaine secoua la tête et tourna la tête vers Ochako qui souriait.

Les deux filles s'arrêtèrent de courir.

- Oh désolée, je t'ai sortie de tes pensées ? 

- Oui. Mais qu'importe, que se passe t-il ?

- Tu as faim ?

Enola s'apprêtait à dire non mais son ventre se mit à gargouiller.

Elle baissa la tête en serrant les dents.

- Je pense que oui, reprit Ochako après avoir rit brièvement, on est bientôt arrivées à la maison. Tu veux manger quoi ce midi ? 

- Un truc qui nourrit bien comme ça, je mange pas à quatre heures et je peux partir en exploration.

Ochako la dévisagea avec un visage désapprobateur.

- On en a déjà parlé, Enola, la tança son amie, tu dois arrêter de louper le snack de l'aprem pour essayer de la retrouver. Ca va pas aider si tu manges pas. C'est pas parce qu'elle est introuvable que tu dois t'infliger ça.

- Tu peux bien parler !, rétorqua Enola, toi, tes seules connaissances sont en sécurité !

- Mes seules connaissances sont en prison, cracha Ochako, et ils ne sont pas en sécurité du tout !

- Au moins, ils ont un abri !

- Et toi donc !

- Mais arrête de me comparer à eux ! Je suis pas comme eux ! Tu peux pas arrêter deux secondes de les revoir en moi ?! Si je te fais pitié, dis-le simplement !

- Tu me fais pas pitié, sinon j'aurais pas accepté de t'héberger bordel ! Grandis un peu !

Le coeur d'Enola rata un battement et le silence s'abattit sur la forêt. Uraraka plaqua ses mains contre sa bouche.

- N-non, je suis désolée.

- Tais-toi, articula Enola d'une voix tremblante, je ne veux plus jamais entendre un son de ta bouche. 

Sur ces mots, elle fit demi-tour et se mit à courir. Ochako la poursuivit.

- Reviens !!

- Fous-moi la paix !

Enola accéléra l'allure et les larmes remplirent ses yeux. Mais elle refusait de les laisser couler.

Elle n'avait plus du tout faim.

- Enola !

- Laisse-moi !

- ENOL-ATTENTION !!

Enola se sentit être poussée et tomba au sol. Un corps s'affala sur elle.

- Ochako ?

Aucune réponse.

- Ochako ?!!

Elle se dégagea du dessous du corps et écarquilla les yeux.

Son amie était sur le sol. La peau pâle, les cheveux couverts de terre. Mais surtout, avec une balle dans le dos. Une larme dévala la joue d'Enola.

- OCHAKO ! NOOONN !

Son cri provoqua un écho atroce qui résonna partout dans la forêt. 

Enola serra Uraraka contre elle. Le sang de la plaie coulait sur sa jambe mais elle s'en fichait. Elle était hypnotisée par ce trou, ce trou noir et rouge. Ce trou qui traversait son dos.

- Ochako..réveille-toi..

Heureusement, la balle n'avait pas transpercé son ventre. Cela signifiait qu'elle n'était pas assez profonde pour tuer son amie. Mais si elle n'agissait pas bientôt, Uraraka mourrait.

Elle sortit son couteau de sa poche et trancha son t-shirt. Puis à l'aide du tissu, elle protégea la plaie en entourant le morceau de t-shirt autour du corps de la victime.

Et elle se releva. Tourna la tête vers le tireur. S'élança vers lui et lui enfonça son couteau dans le ventre. Le plus profond qu'elle put. Le tireur, Hadès, ouvrit grand les yeux puis s'écroula contre Enola qui le repoussa aussitôt. Elle reprit son couteau et le rangea dans sa poche avant de courir vers Uraraka. Elle la souleva sur sol et la fit basculer sur son épaule. Et elle fila. 

Elle filait plus vite que le vent. "Je dois la sauver. IL FAUT LA SAUVER"

Ochako ne bougeait pas. Enola ne l'entendait même pas respirer. Le sang battait le plein à ses tempes et une migraine terrible envahit son crâne mais qu'importe.

Elle courut tellement vite qu'elle parvint à atteindre la maison en moins de cinq minutes.

Elle ouvrit la porte brutalement (qui était censée être fermée à clé) et fila dans la chambre et déposa Ochako sur le lit. Puis elle courit jusqu'à la trousse de secours et s'affola en constatant qu'elle était entièrement vide. "Les rats ! Les enfoirés ! Les connards de merde ! Ils ont fouillé dans la maison et ont tout pris pour qu'elle meurt ! Ils avaient tout prévu !"

Elle se figea soudain et ferma les yeux. "Si j'en crois mon ouïe..il y a quelqu'un."

Elle se retourna et se décala de justesse alors qu'un jeune homme se jetait sur elle. Il s'écroula sur le sol et Enola le maintint au poignets. Elle fronça les sourcils.

- Armin ?, s'étonna t-elle.

Ce dernier se débattit mais Enola lui tenait fermement les poignets.

- Lâche-moi !, cracha t-il en gigotant même si c'était inutile.

- Oh que non mon bonhomme, tu as failli me buter avec ta dague là !

- C'était mon but, rétorqua t-il, mais comme un con, j'ai oublié que t'as une super bonne ouïe.

- Ah ouais, c'est con ça, ironisa Enola, parce que là, t'es en position de faiblesse, mon gars.

- Comme si je savais pas !

Enola lui lâcha les poignets et Armin se releva aussitôt. Il la menaça avec sa dague.

- Maintenant, je vais te tuer et tu vas rien dire.

Enola leva les mains en l'air en pouffant.

- Pardon ? Tu crois vraiment que ça va se passer comme ça ?

- Tu n'as pas trop le choix. 

- Hm hm.

Armin fonça sur elle mais elle se décala à nouveau et le jeune homme tomba au sol.

- T'es vraiment une merde, déclara t-elle, ça te plairait pas de venir vivre avec nous ? 

Armin se redressa, piqué au vif, et fti volte-face pour se jeter sur elle. Enola chuta en arrière et Armin leva sa dague pour l'abattre sur la gorge de la jeune femme mais Enola lui retint le poignet.

- Alors c'est vrai.., murmura t-elle, t'as vraiment changé..

- Hein ?!

- Je ne te reconnais pas.

- Je comprends rien à ce que tu dis !

- Et tu as bien raison ! 

Enola serra fort son poignet et envoya valser Armin derrière elle sur le sol. Puis elle se releva et se mit instinctivement devant le lit où Ochako agonisait.

- Il est où le matériel de  la trousse de secours ?!

Armin lui faisait face, armé. 

- Et tu crois que je vais te le dire ?

- Si tu me le dis, je te laisse me tuer.

Armin réfléchit quelques secondes.

- D'accord. Il est sous le plancher, la première planche de la porte d'entrée. Mais tu as conscience que je la tuerai après toi ?

Enola plissa les yeux et sortit son couteau.

- Alors dans ce cas, je te tuerai et je récupérerai ce foutu matériel.

Armin serra sa dague dans sa main.

- J'aimerais bien voir ça.

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