58) Le prix de la liberté

✧ ೃ༄*ੈ✩

"Mattheo ! Oh mon dieu !"

Hermione avait crié tellement fort que les deux amants s'étaient écartés en sursautant. Elle semblait véritablement choquée, elle non plus n'en croyait pas ses yeux. Le revoir lui faisait le même effet que voir un fantôme. Elle le serra dans ses bras, heureuse de le retrouver.

"Ça fait des mois que je ne t'ai pas vu ! S'exclama Hermione.
- Des mois ? Répéta Flora.
- Oui, nous nous sommes vu à la réunion des anciens élèves de Poudlard.
- Organisé par mes soins, précisa t-il fièrement.
- Ah.
- Tu n'es pas venue, fit-il en la regardant.
- Non, en effet. Je... je n'ai pas envie de remettre mes pieds là-bas et..."

Le sujet était encore sensible. Ce que Flora ignorait, c'est que Mattheo avait proposé d'organiser cette soirée dans l'unique but de la revoir. Des heures durant, il avait surveillé la porte, espérant la voir passer le pas. Ce n'était jamais arrivé. À la fin de cette soirée, Mattheo avait eu le cœur horriblement lourd, comprenant que la femme de sa vie lui échapperait à tout jamais. Il n'avait pas réussi à forcer le destin.

"Peu importe, coupa court l'autre jeune femme pour éviter à son amie de se justifier plus que nécessaire. Je suis contente de te voir.
- Réciproquement.
- Ouh, pouffa Granger, tu t'es transformé en véritable gentleman.
- Si seulement !
- Je vous laisse entre... entre...vous. Bonne soirée."

Hermione fit un clin d'œil vraiment peu discret à sa meilleure amie, attrapant au passage une généreuse poignée de petits fours. Sentant le regard de Mattheo et de Flora sur elle, Hermione se senti obligé de préciser :

"C'est pour Ron !
- C'est ça, ouais, taquina Flora.
- Pas de bêtises, vous deux !"

Elle leur lança un regard faussement autoritaire avant de rejoindre son amoureux affamé, coincé dans une discussion sans fin avec une vieille tante.

Mattheo reposa à nouveau les yeux sur Flora. Aucun d'eux n'osaient bouger ou parler. Ils se regardaient intensément, confus, bouleversés. Le moindre mouvement risquait de faire disparaître son rêve éveillé.

"On peux aller faire un tour dans les jardins, proposa Mattheo, histoire d'être plus au calme.
- D'accord.
- Pas longtemps, c'est promis. Je te laisse profiter de ta soirée après ça."

Avant de partir en excursion, Flora remplit une assiette de petits fours. Elle n'avait rien avalé depuis ce matin et son ventre gargouillait comme un dragon. Elle ne tiendrait pas longtemps sans nourriture. Mattheo sourit, soulagé de la voir choisir avec minutie et plaisir son repas. Fut un temps où Flora ne pouvait rien avaler. Et lui non plus.

Le soleil se couchait très progressivement, le ciel se grisait mais le temps restait très doux et agréable. Un petit vent léger, presque insoupçonné, faisait virevolter quelques mèches de cheveux. L'été touchait à sa fin, faisant naître une nouvelle famille en son sein.

Assis sous un arbre, face à une somptueuse devanture florale, Mattheo jouait avec des brindilles d'herbes et Flora avalait nerveusement un énième petit four.

"Tu es resté en contact avec Harry, alors ? Demanda Flora en reposant l'assiette en carton dans l'herbe.
- Oui. On ne s'est pas vus régulièrement, raconta Mattheo, mais j'ai l'impression que je lui dois beaucoup.
- Vous avez beaucoup en commun, observa Flora. Vous êtes tous les deux orphelins, vous avez tous les deux été élevés par une tante ignoble et vous avez tous les deux tué Voldemort."

Mattheo fit les gros yeux. Belle entrée en matière.

Avec lui, Flora pouvait en parler. Il la comprenait mieux que personne, elle en restait persuadée.

Depuis un an, elle esquivait ce sujet, la défaite de Voldemort, et gardait ce sujet pour ses séances avec sa thérapeute.

"C'est vrai, admit Mattheo après un instant réflextif. Et lui se marie avec la fille qu'il aime.
- Toi aussi, bientôt."

Flora tourna la tête vers lui pour soutenir son regard, évaluer sa réaction. La mine dépitée et triste qui transforma son visage était un indicateur irréfutable.

"Comment ça se passe, avec elle ?
- Joker. Je n'ai vraiment pas envie d'en parler."

L'air grave qu'il prenait faisait comprendre à Flora que ce mariage ne l'enchentait toujours pas et que les choses qu'il écrivait sur les lettres étaient encore actuelles. Elle replia ses genoux contre sa poitrine et posa la tête dessus, ne lâchant pas le revenant des yeux.

Elle ne voulait pas louper une miette de Mattheo. Elle se nourrissait de lui comme un condamné à mort de son dernier repas.

"Et Poudlard ? J'ai entendu dire que tu y enseignais.
- C'est vrai, sourit Mattheo, depuis un an. C'est grâce à Neville. Il m'a proposé le poste de professeur contre les défenses du mal.
- C'est drôle. Toi qui détestais Poudlard.
- Justement, c'est une nouvelle école. On l'a rebâtit de nos mains, on en a fait quelque chose de nouveau. Je m'y plais, ça me fait du bien. Je suis loin de la maison, loin de..."

Il soupira en détournant le regard.

"Mon patronus a changé, d'ailleurs."

Le professeur s'était entraîné nuit et jour pour être excellent et donner à ses élèves de vrais outils. En se noyant sous le travail, il avait éteint une partie de son esprit, celle qui lui hurlait à quel point il haïssait sa vie et que son avenir lui donnait envie de mourir.

"C'est un phénix !
- Magnifique, sourit tendrement Flora, tu renaîs de tes cendres.
- J'en sais rien, souffla Mattheo. Et toi ? Il n'a pas changé ?
- La dernière fois que je l'ai utilisé, c'est... c'est quand ta mère nous avait attrapé."

Ce souvenir la fit frissonner d'horreur. Le regard de Mattheo s'assombrit. Il en cauchemardait encore, entendait toujours les hurlements de Flora, se sentant impuissant et inutile.

"C'était Salem.
- Comment il va ?
- Il est mort, Mattheo. Les bombardements ont détruit le dortoir, je n'ai jamais retrouvé sa trace.
- Il s'est peut-être enfuit, espéra le garçon.
- Soyons réalistes. Comment ?"

La part sombre de Flora demeurait. La vie l'avait changée et cette obscurité faisait à présent partie d'elle.

Elle avait apprit à la dompter avec beaucoup d'efforts et de volonté. À présent, elle savait que cette noirceur faisait partie d'elle, elle faisait d'elle Flora Scamander. Elle ne prenait plus toute la place, ne la rendait plus malade à vomir jusqu'à fermer les yeux et espérer ne plus les ouvrir.
Elle était là, à sa place, tout autant que sa part de lumière.

"Le plus dur en étant professeur, c'est de se dire qu'on ne peut plus sécher les cours."

La jeune femme explosa de rire et le cœur de Mattheo se rechauffa d'un sentiment agréable.

"Ça faisait longtemps, murmura t-il.
- De quoi ?
- Que je n'avais pas entendu un rire sincère de ta part."

Flora lui sourit. Il disait vrai. Ces derniers mois, elle riait à nouveau.

"Et toi ? Que fais-tu de ta vie ?
- Je travaille avec George à la boutique de farces et attrapes."

Un immense sourire étira les lèvres du jeune homme.

"Tu aurais pu devenir Auror. Je pensais vraiment que tu suivrais cette voie.
- Non merci, grimaça Flora, la chasse aux Mangemorts ne m'intéresse plus. Je pense que j'ai assez donné de ma personne en ce sens."

Vrai. Il hocha la tête, sa main caressant l'herbe épaisse et moelleuse du jardin.

Quelques oiseaux chantaient dans les branchages au dessus de leurs têtes. Quelques fourmis traçaient leur chemin à la fil indienne dans la terre.

"Et du coup, Azkaban, c'est pour quand ? Le taquina Flora, les yeux plissés de malice.
- Ha-ha, répondit cyniquement Mattheo. Je parie que tu as entendu la nouvelle, comme tout le monde.
- Oui, je sais. Heureusement.
- Je ne sais pas si je mérite vraiment ma liberté, surtout au prix où elle me coûte. J'ai... tué.
- Il n'y a pas de mal sans bien, répondit Flora. Tu as survécu avec les moyens que tu avais. Les autres peuvent bien dire ce qu'ils veulent, ils auraient fait la même chose que toi pour s'en sortir vivants. Tous les côtés ont leurs motivations, qu'on les comprennent ou pas."

Mattheo la regardait aussi, en catimini. Le soleil reflétait dans ses cheveux d'or. Elle était toujours aussi belle, plus adulte, plus mâture, mais toujours Flora. Ses longs cheveux, ce sourire éclatant, ce teint de pêche. Certains choses ne changeaient pas. Une forme de constance se maintenait malgré le chaos.

"Je ne peux pas m'empêcher de culpabiliser, avoua le garçon la voix tremblante. J'ai tué mon meilleur ami, ma mère, Dumbledore, je...
- Non, le coupa Flora, tu n'as pas tué Theodore.
- Si, rectifia t-il, il a fait ce qu'il a fait parce qu'il avait peur de nous.
- Et Bellatrix méritait bien pire comme fin. Je t'ai trouvé tendre.
- Wow, siffla Mattheo, tu es sûre que tu n'es pas devenue Serpentard ?
- Comme je te l'ai dis, tout le monde peu faire le mal. Moi y comprit, je ne suis pas une sainte. Nos motivations sont différentes. Je pourrais tuer pour ceux que j'aime. Je l'ai fais pour Fred."

Flora reprit une inspiration, ravalant sa salive, le regard lointain.

"Je ne pourrai jamais le faire dans mon propre intérêt. Voilà ce qui fait de moi une poufsouffle plutôt qu'une serpentard, conclu t-elle.
- Que tu es devenue sage, sourit Mattheo.
- Tout n'est pas linéaire, l''être humain est complexe, Mattheo. Les méchants n'existent pas plus que les gentils. Ce sont simplement deux forces opposées qui se nourrissent l'une et l'autre.
- J'aime bien quand tu dis mon prénom.
- Je suis sérieuse !
- Pardon.
- Un Serpentard peut avoir bon cœur, tu en es la preuve. Theodore aussi.
- Les Poufsouffle ont été irréprochables, remarqua Mattheo, aucun de vous n'a rejoint les rangs de Tom et aucun de vous n'a sombré dans la magie noire."

Flora se redressa, adossée contre l'épais tronc d'arbre, fière. Un petit silence s'installa, confortable et délicieux. Ils regardaient l'immense jardin vivre, tous les deux perdus dans leurs pensées.

Ces retrouvailles étaient sereines et dechirantes à la fois. Plus mâtures, aussi. Un peu à leur image. Les épreuves de vie, leurs traumatismes, les avaient changés pour le meilleur comme pour le pire.

"Quel est le prix de ta liberté ?"

Elle le regardait à nouveau, soucieuse.

"... Mattheo."

La ponctuation finale de cette question le fit sourire. Elle essayait de rendre les choses moins durs.
Il tenta de balayer la question d'un geste de la main mais Flora le regardait toujours avec insistance, curieuse. Les lèvres du garçon s'agitèrent sans qu'aucune phrase cohérente n'en sorte.

"C'est long et compliqué, bafouilla t-il.
- J'ai tout mon temps.
- Flora...
- Mattheo."

Il lui lança un regard faussement exaspéré. Peut-être qu'en parler lui ferait du bien, après tout.

"Lucius m'a clairement vendu aux Greengrass, synthétisa Mattheo, surtout pour que je ne pourrisse pas à Azkaban. Ça risquait de salir sa réputation puisqu'il a été proclamé innocent."

Le regard de Flora se durçit, ses muscles se raidirent.

"Mais il ne savait pas quoi foutre d'un sale gosse comme moi. Alors il a décidé d'unir sa fortune, la mienne et celle des Greengrass.
- Et du coup, d'épouser Daphnée ?
- C'est ça.
- Et elle ? Elle le vit comment ?
- Bien. Trop bien, d'ailleurs. Elle m'aime."

Le cœur de la jeune fille se serra si fort que cela en devenait douloureux. La jalousie. Quel ignoble sentiment déstabilisant.

"Et toi ? Murmura t-elle.
- Je ne peux plus vivre dans le faux, souffla Mattheo, je n'y arrive plus. Je n'en peux plus. Azkaban ou un mariage arrangé, c'est la même merde. J'ai dû négocier avec son père pour venir ici. Je dois être rentré demain à quinze heures. Je sais qu'il m'attendra de pied ferme et que si je ne suis pas là à quine heures une, sa milice viendra me choper par la peau du cul."

Il pressa ses mains calleuse sur son visage, désespéré.

"Elle a pété un câble en apprenant que je serai présent au mariage. Je n'ai pu venir qu'à la soiée. Elle était trop inquiète que je sorte sans elle. Elle sait que... je ne l'aime pas comme elle m'aime. Ils ont peur de moi. Que je me taille, que je fasse un truc dingue, je sais pas.
- Putain, souffla Flora sincèrement dégoûtée, c'est ignoble.
- Bienvenue dans ma vie.
- C-comment tu fais, avec elle ? Je veux dire, tu es obligé de jouer le faux mari ?
- Oui.
- Tout ce qui va avec ?
- Oui.
- Tout ? Genre... tout ?"

D'un geste nerveux, Mattheo arrachait les brins d'herbes pour les jeter un peu plus loin.

"On couche ensemble, oui, si c'est ça que tu veux savoir. Enfin, c'est plutôt elle qui couche avec moi."

Flora pâlit, envahie d'une bouffée de chaleur, les yeux ronds et le visage décomposé. Elle se ressaisit immédiatement, ne voulant pas se mettre au centre de cet échange. Elle ne tenait pas particulièrement à ce qu'il sache que cela lui faisait toujours quelque chose après un an de silence.

Elle cachait très mal sa surprise, son choc et son dégoût. Mattheo détourna une nouvelle fois le regard, honteux.

"C'est du viol, je crois, marmona Mattheo la gorge sèche. Ils sont dingues. Tous.
- Tu dois sortir de là !
- Comment ?
- On simule ta mort, tu...
- On ? Répéta t-il en osant à nouveau affronter son regard humide.
- On est une équipe, non ?"

Les prunelles brune de Mattheo se gorgèrent de larmes qu'il empêchait de couler. Flora se rapprocha de lui, soutenant son regard, l'air forte et indestructible, lui prouvant qu'elle était une épaule solide sur laquelle il pouvait s'appuyer de toutes ses forces.

"Je ne compte pas être de retour à quinze heures une au Manoir, avoua finalement Mattheo.
- Comment ça ?
- Demain, je me casse.
- Où ? S'étrangla Flora.
- N'importe où. J'en sais rien. Je n'ai pas réfléchi à un plan. Je ne peux plus vivre comme ça.
- Et Poudlard ?
- Ne t'en fais pas. L'école perdurera avec ou sans moi. C'est certainement ma première et ma dernière opportunité de m'enfuir."

Le vent se leva soudainement, comme si la nature suivait au mot près leur conversation.

"Tu dois en parler à personne, Flora.
- Évidemment, je le jure, promis t-elle. Tu sais que tu peux compter sur moi."

Il la trouvait hésitante. Elle voulait dire quelque chose mais n'osait pas. Malgré toutes ces années, il la connaissait toujours par cœur.

"Quoi ? Demanda t-il en fronçant les sourcils.
- Et s'il t'attrape pendant ta cavale ? Qu'est-ce qu'il va te faire ?"

Les menaces de Gareth, datant de l'année passée, lui revenait très clairement en mémoire. L'intégrité de Flora était menacée aussi, malgré cette année de silence et d'éloignement forcé, ce même si elle ne partait pas avec lui et n'avait rien avoir là-dedans.

Cette fugue était carrément improvisée, Mattheo s'étant saisit de l'occasion en or pour se libérer de ses chaînes. Il n'avait pas réfléchit aux conséquences, ni au comment.

"Je... je pense qu'il me tuera, bégaya le professeur de défenses contre les forces du mal, mais Flora... j'ai peur qu'il s'en prenne à toi aussi."

Elle bondit sur ses deux jambes cotonneuses, prise de panique. Une fois debout, elle remarqua que sa tête tournait légèrement, des taches noirâtre lui gachaient la vue. La crainte de Mattheo était partagée.

"Gareth Greengrass, s'angoissa Flora, il est venu me trouver !
- Quoi ? S'étouffa Mattheo. Quand ? Pourquoi ?"

À son tour, il se leva, vivement inquiet. Ses actes auraient de terribles conséquences. Voyant que Flora s'agitait nerveusement, à deux doigts de la crise de nerfs, il lui attrapa les poignets, plongeant son regard dans le sien. Il s'efforçait de respirer doucement, d'avoir l'air calme et de maîtriser la situation. Il n'y avait que de cette façon qu'elle pourrait se calmer.

"Il m'a demandé de faire table rase, qu'on entende plus jamais parler de moi et que je ne t'approche plus jamais. Et... et je crois qu'il a utilisé un sort de magie noire, raconta Flora, il a détruit une partie de magasin, m'a envoyé valser contre le mur, j'ai craché mes poumons et du sang. Je-j'ai cru que j'allais mourir."

Suite â cette révélation, Mattheo n'arrivait plus à faire semblant d'être dans le contrôle et la maîtrise. Le visage fermé, les narines dilatées de colère, il se sentait revenir des années en arrière.

"Je dois t'avouer quelque chose. Il a été clair avec moi aussi, Flora... au moindre faux pas, il a dit... quelque chose d'ignoble.
- Dis-le moi, Mattheo. Dis-le moi."

En lui relâchant les poignets, il déglutit, encore horrifié par de telles menaces.

"Qu'au moindre faux pas, il te tuerait et se chargerai de me faire baiser ton cadavre avant de me tuer à mon tour et de faire de mes organes son apéritif.
- Tu ne peux pas partir ! Hurla presque Flora. Pas après la pente que j'ai remonté seule, à bout de bras ! Je ne peux pas revivre ça, Mattheo, je ne peux plus me sentir en danger, ni me défendre, je... c'est trop. Je n'ai plus le courage de me battre, pas après toutes ces épreuves. Je n'ai pas sacrifié ma vie pour mourir sans avoir vécu.
- Pars avec moi."

✧ ೃ༄*ੈ✩

Je remarque qu'à chaque publication, les photos disparaissent !! Vous pouvez me dire s'il y a un média d'affiché ? 😡

Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top