8. I am not the one to sit around and be played
TYLER
Ma bouteille de thé aux fruits rouges à la main, j'en prends une gorgée.
- Qu'est-ce que t'as, à boire ce truc tout le temps ?
Je relève les yeux vers celui qui vient de m'interpeller. Ma main dans la sienne, je hausse les épaules, avant de lui tendre la bouteille de l'autre main.
- C'est du thé, tu veux goûter ? Une fille qui bossait avec moi sur un shooting m'a dit que c'était bon pour perdre du poids, alors j'en ai commandé.
- Tu pense vraiment que t'as besoin de perdre du poids ? T'es déjà tellement fine que je sais pas comment tu fais pour pas t'envoler.
- C'est bien pour ça que t'es là pour me tenir la main ! Dis-je, en désignant d'un regard nos mains.
Henrik lève les yeux au ciel, et je ne peux pas m'empêcher de l'observer. Son visage me fait penser à celui de Karl, sous certains aspects. Le nez, la mâchoire... Mais ce qui est le plus étonnant, c'est la sensation de tenir sa main. Ils ont les mêmes, tous les deux. Et je dois avouer que c'est presque réconfortant de pouvoir trouver ça chez lui. Maintenant que je ne peux plus le trouver chez Karl...
Ce n'est pas très moral, mais ça m'aide.
On arrive finalement devant le café où j'ai rendez-vous avec Juan et Allison. Me tournant face au brun, je me mets sur la pointe des pieds et embrasse sa joue.
- Merci d'être venu me chercher au boulot.
- Je passais par là, de toute façon, répond-il avec un sourire.
- Je vais faire comme si je te croyais !
Riant un peu, je lâche sa main et lui fais un signe, avant de le laisser pour entrer dans le restaurant. Les deux amoureux sont déjà assis à une table, ou plutôt Juan est assis sur la banquette, Allison sur ses genoux. Qui l'aurait cru ? Mais étant donné le regard que me lance l'espagnol, je dois déjà m'attendre à passer un mauvais quart d'heure.
- C'était quoi, ça ? Me demande-t-il quand j'arrive à leur niveau.
- Ça ?
- Toi, en train de tenir la main du frère de ton ex en pleine rue, et de l'embrasser.
- C'était sur la joue, n'en fais pas un drame, je soupire tout en m'installant.
- Si tu fais ça pour rendre jaloux Karl après la photo de lui et l'autre pétasse, c'est purement ridicule.
Je baisse le regard sur le menu qu'on vient de m'apporter. Tout plutôt qu'affronter ses yeux pleins de jugement. Il n'a pas tort. Après la crise du commissariat, quand j'ai repris mes esprits, je me suis sentie humiliée, surtout en voyant les avis et commentaires des gens. D'un côté, j'espérais qu'il ressente la même chose... C'est gamin. De l'autre, Henrik me rappelle réellement Karl, et il est toujours gentil avec moi, compréhensif. Ça me fait du bien, de le voir. Mais si il n'y avait que ça...
- Et si j'avais des sentiments pour lui ?
Juan me fixe juste avec un air désabusé, alors que Allison écarquille les yeux.
- Dis pas de conneries. Tu l'utilises pour remplacer Karl, mais même si j'ai pas beaucoup d'affection pour lui, 'faudrait que je sois con pour approuver ça.
- Juan, arrête, t'es pas sympa là ! s'exclame Allison, en lui donnant une tape sur l'épaule. Tu vas finir par gâcher l'ambiance, et ma surprise !
- Ta surprise ?
Elle semble elle aussi agacée, et pousse un petit cri de rage, qui ressemble plus à celui d'un chat qu'au rugissement d'un lion. Prenant son portable, elle pousse un soupir et appelle quelqu'un.
- Oui, tu peux venir. Je viens de dire qu'il y avait une surprise, j'ai merdé. M'insulte pas !
Sans trop comprendre de qui il peut s'agir, et en espérant de tout mon cœur que ce n'est pas Karl à l'autre bout du fil, car je ne supporterais pas ce genre de traquenard, je me tourne vers la porte d'entrée, pour voir si quelqu'un arrive. Mais la sensation de deux mains qui se posent sur mes épaules et l'entente d'un « BOUH » tonitruant me font sursauter, et je me retourne en précipitation.
Tout d'abord, je ne la reconnais pas. Elle a désormais de longs cheveux bruns qui la font ressembler à une poupée et encore son visage moins émacié que quand elle travaillait avec moi. Mais quelques secondes me suffisent à comprendre qu'il s'agit de Annie derrière cette masse de cheveux foncés. Me levant d'un coup et provoquant un bruit de chaise qui attire l'attention de quelques personnes dans le restaurant, je lui saute au cou, avec un rire.
- Oh mon dieu, j'y crois pas ! Qu'est-ce que tu fais à New York ?!
Me serrant dans ses bras, elle rit à son tour, et recule la tête pour me regarder.
- T'es encore plus jolie, toi ! J'ai vu les news sur toi et Karl dans la presse, alors je suis venue et j'ai demandé à Alli' de nous organiser quelque chose !
- Oh, c'est adorable... Qu'est-ce qui est arrivé à tes cheveux ?
- C'est ma copine qui aimait ça... Enfin, mon ex-copine.
- Pardon ? T'as rompu avec... Elle s'appelait comment, déjà ?
- Jenna. Et oui, on a rompu, c'est tout récent. Toi et moi, on est deux célibataires dans New York !
Elle s'assoit avec nous, et appelle rapidement le serveur pour que l'on puisse commander.
- Une salade, s'il vous plaît, avec des blancs de poulets.
Juan hausse un sourcil, et je me tourne vers lui.
- Quoi ?
- T'avais dit que t'arrêtais le régime, après la Fashion Week.
- Ouais, mais ça sert à quoi que je reprenne le poids que je vais devoir perdre à la prochaine saison ?
Il ne dit rien, mais semble contrarié. Décidément, il a décidé d'être charmant, aujourd'hui. Lui qui d'habitude est toujours adorable...
Nos plats arrivent, et le serveur pose un croque-monsieur accompagné de frites devant l'hispanique et sa copine, qui apparemment partagent leur plat.
- Comment tu fais pour manger des trucs pareils et garder une ligne impeccable ? Je demande alors à Allison, pointant son assiette.
- C'est pas compliqué, je prends des médicaments pour aider !
Cette fois, Juan grimace et serre les poings, levant les yeux au ciel.
- Tu veux dire des laxatifs ? Soupire-t-il.
- Si tu préfères ! Mais ça marche vachement bien !
Elle se penche vers moi, sur un air de confidence.
- J'ai essayé de me faire vomir, mais j'ai pas le reflex de déglutition...
- On l'aura remarqué, ajoute Juan, avec un semblant de sourire ; je préfère ça.
- J'ai une boite, dans mon sac, tu veux que je te les passe ?
- Oh, non ! Je préfère éviter...
- C'est comme tu veux ! Sinon, si tu veux quelque chose de plus naturel, j'ai des bonbons suppresseurs de faim ! C'est super bon et souvent, ça me remplace mon repas du soir !
J'hésite un peu, mais finit par hocher la tête. Après tout, il y a une différence entre bousiller ses intestins et éviter de manger : ça, je le fais déjà. J'aurais simplement moins faim qu'avant. Allison me tend un paquet de bonbons, ainsi qu'une plaquette de gellules.
- Je t'ai dit que ça, j'en voulais pas !
- Je sais, mais on sait jamais, si tu as besoin d'essayer un jour !
- Mouais...
A ses côtés, Juan nous lance un regard inquiet. Je sais qu'il n'aime pas ce genre de chose... Mais c'est le prix à payer pour faire ce métier. On ne pourrait pas rentrer dans les vêtements, si l'on n'était pas parfaitement sculpté.
KARL
Les portes de l'ascenseur s'ouvrent sur l'étage de mon bureau. J'ai l'impression que ces derniers jours, tout ce que je fais se rapporte au travail. Mais d'une certaine façon, ce n'est pas plus mal : mon travail a un rapport avec Tyler. Je n'ai pas l'intention de laisser tomber. Elle veut de l'espace, très bien. Mais je sais qu'elle m'aime encore, et que la seule chose qui l'empêche vraiment d'être avec moi, c'est toute cette presse qui nous entoure. Alors je vais laisser les choses retomber, et quand elle sera prête, je serai là. C'est bien pour ça que je suis toujours à New York malgré le fait que je sois initialement basé à Londres.
Je m'approche du bureau de Nora, dont la porte est inhabituellement close. Mais au moment où je m'apprête à taper, son assistant débarque, et m'interrompt, l'air embarrassé.
- Je suis désolée, mais Mademoiselle Wilson m'a demandé de ne laisser entrer personne dans son bureau ce matin...
- Ah... Elle est avec quelqu'un ?
Il secoue vivement la tête, en signe de négation, mais le manque de naturel qu'il prête à ce geste est tout sauf convainquant.
- Qui ?
- Mais je vous dis qu'elle n'est avec personne... S'il vous plaît, Monsieur, je-
Mais un gémissement se fait entendre de l'autre côté de la porte. Je reste stoïque : ce n'est pas la première fois que je surprends Nora en pleine action. Même si en général, elle évite de ramener ses conquêtes au boulot... En face de moi, son assistant prend une intéressant teinte pivoine, qui monte jusqu'à ses oreilles, m'arrachant un sourire. Le pauvre, il ne doit pas bosser pour elle depuis bien longtemps...
Sur le point de le laisser tranquille, je remarque une veste, sur le fauteuil siégeant devant la porte. Une veste en cuir, que j'ai déjà vue il y a quelques jours : Viktor.
- Luis, dîtes-moi immédiatement qui se trouve dans ce bureau si vous voulez avoir une chance d'évoluer dans cette entreprise.
- Monsieur...
- Ne m'obligez pas à répéter.
Il semble pris dans un dilemme cornélien mais, finalement, pousse un soupir résigné.
- Viktor Jakande.
- Évidemment. Merci, Luis.
Une petite heure plus tard
Trois petits coups résonnent dans mon bureau. Je ne réponds pas mais entends tout de même la porte s'ouvrir. Des bruits de pas s'approche de moi, et enfin, la tête de Nora entre dans mon champs de vision.
- Tu t'es vraiment caché sous ton bureau ?
Je hausse les épaules, et tourne la tête de l'autre côté, la laissant reposer contre le bois. Je fais ça depuis que je suis gamin : étonnamment, le bureau de mon père était le seul endroit où ni celui-ci ni mon larbin de frère ne venait me chercher. J'attendais toujours que ma mère m'y trouve, quand elle était là, les choses étaient plus simples. Enfin, elle l'était pour moi.
Mais maintenant, je n'ai plus de mère pour venir me prendre dans ses bras et me dire que tout ira bien.
- Karl, je suis désolée de ne pas t'en avoir parlé plus tôt...
- Ça fait combien de temps, que vous sortez ensemble ?
Elle s'assoit par terre, à mes côtés.
- On se voit depuis quelques semaines...
- C'est pour ça, que tu ne m'accompagnais plus ?
Pas de réponse.
- Il est revenu à cause de toi, pas vrai ?
- Quoi ?
- Il est revenu me voir pour toi ?
- Oh... Eh bien je lui ai dit qu'avant qu'on officialise, je voulais que vous vous réconciliez, alors...
Donc elle sort avec mon ancien meilleur ami depuis des semaines sans me le dire, me laisse tomber pour lui en prétextant que son chien déteste prendre l'avion, et lui revient vers moi uniquement pour pouvoir se la taper ouvertement...
Je me sens tellement seul. Nora était la seule qui me restait. Et j'apprends qu'elle m'a menti sur une aussi longue durée. Quant à Viktor, j'avoue que je m'étais pris à penser qu'on pourrait redevenir ami, après tout, puisqu'il avait fait l'effort de revenir vers moi.
Mais non, personne ne fait d'effort pour moi. Ils le font tous par intérêt. Personne ne fait attention à moi pour ce que je suis : ni mon père, ni mon frère, ni Viktor, ni même Nora.
- Sors, s'il te plaît.
- D'accord... Je serai dans mon bureau, si jamais tu veux venir en parler, ou si tu as besoin de moi.
Elle tente de me sourire, mais je n'y prête pas attention. Alors elle se lève, et repart, fermant la porte derrière elle.
A peine a-t-elle quitté la pièce que les larmes coulent. Ma respiration s'accélère, comme si je ne trouvait plus d'air à respirer, et je me sens nauséeux.
Je passe mes deux mains tremblantes sur mon visage, plaquant mes cheveux en arrière au passage. Hésitant, je saisis mon portable. J'ai besoin d'elle.
Plusieurs sonneries se font entendre, plus longues à venir les unes que les autres. Et finalement, la messagerie. Sa voix joyeuse et légère retentit, me disant de laisser un message. Mais qu'est-ce que je pourrais bien lui dire ?
Je raccroche. Oui, personne ne fait attention à moi pour ce que je suis : ni mon père, ni mon frère, ni Viktor, ni même Nora. Ni Tyler.
TYLER
L'ascenseur est sur le point de se refermer, mais je cours et bloque les portes d'une main. Celles-ci s'ouvrent à nouveau, et j'entre avec soulagement. Jusqu'à ce que je réalisé : l'homme qui était déjà dans l'ascenseur n'est autre que Karl. J'étais tellement pressée de le prendre que je n'ai rien remarqué...
- Oh... Salut, je lui dis, un peu gênée.
- Salut.
Des cernes foncées lui creusent le visage, et ses cheveux sont en bataille, ce qui est particulièrement inhabituel. Un instant, la culpabilité m'envahit : je n'ai pas répondu à son dernier appel, j'étais avec Annie... Est-ce qu'il était mal ? Est-ce que j'aurais du être là pour lui ?
- Karl-
- Ca te va bien, les cheveux blonds, m'interrompt-il. T'avais cette couleur, quand on s'est rencontré.
- Ah... Merci.
Effectivement, je me suis fait décoloré les cheveux, avec Annie : elle voulait retrouver sa couleur originelle, et je me suis dit que ce ne serait pas une mauvaise idée de changer un peu...
- Écoute... commence-t-il.
Mais son portable sonne. Il le prend, et regarde de quelle notification il s'agit. Fronçant les sourcils, il me jette un regard.
- Sérieusement ?
Et rapidement, j'aperçois ce qui se trouve sur son écran. Une photo de moi et Henrik, dans la rue, en train de nous tenir la main.
Je veux dire quelque chose, mais me trouve incapable de lui expliquer. Après tout, qu'est-ce que je lui dois ? La photo de lui avec l'autre connasse était bien plus explicite, non ? Du moins, c'est ce que j'essaie de penser.
L'ascenseur arrive presque à l'étage où je suis sensée descendre, mais Karl appuie sur un bouton, et l'ascension s'arrête. Il peut vraiment faire ça ? Je croyais que ça ne marchait que dans les séries...
Sans attendre, il s'approche de moi. Je recule mais me retrouve vite coincée entre lui et le mur, sur lequel il pose son avant-bras, se penchant vers moi. Son visage est à quelques centimètres du mien, il me lance un sourire faussement amusé.
- Aaah... Tyler, Tyler, Tyler...
- Karl, arrête ça tout de suite.
- Non non, écoute moi, je sais que j'ai pas l'air très sympa comme ça, j'ai pratiquement pas dormi depuis une semaine, j'ai plus ou moins envie d'éventrer chaque personne qui m'adresse la parole et tu vas sans doute pas aimer ce que j'ai à te dire, mais écoute-moi quand même.
Je me tais, et le laisse parler. Après tout, qu'est-ce que je peux faire d'autre ?
- Je t'aime, Tyler.
J'écarquille les yeux, sentant mon cœur battre comme un fou dans ma poitrine. J'ai presque peur qu'il l'entende, tant chaque pulsation me bat les tempes.
- Alors je te laisserai pas partir. Tu te souviens, quand on a commencé à bosser ensemble ? Tu ne m'as pas laissé le choix : tu m'as obligé à être honnête avec moi-même. Tu m'as coincé de la même façon que je le fais maintenant, et tu m'as embrassé, en me disant que tu dictais les règles. Et c'était vrai. A chaque fois qu'on s'est séparé, je t'ai laissé faire, je me suis dit que si tu prenais cette décision, c'est que tu savais quelque chose que moi je ne comprenais pas nous concernant.
Il marque une pause, me laissant suspendue à ses lèvres, à ses mots. Son regard est plongé dans les miens, et je me souviens, comme à chaque fois que je le vois : je me souviens que c'est de ça que je suis tombée amoureuse en premier.
- Mais t'en savais rien. T'as jamais eu d'avance sur moi, t'as juste eu plus de courage quand il s'agissait de t'exprimer. Mais tu revenais toujours. Alors cette fois, laisse-moi m'exprimer aussi, laisse-moi te dire comment les choses vont se passer. Tu vas t'amuser quelques temps avec mon frère, parce qu'apparemment, c'est ce que tu fais quand un type te fait du mal : tu vas en voir un autre. Mais ça changera rien, parce que c'est de moi que tu es amoureuse. Et je ne vais pas disparaître, je ne vais pas t'ignorer pour te faciliter la tâche. Je serai omniprésent, tu ne pourras que penser à moi. Je sais pas combien de temps ça va prendre, mais je sais que je ne vais pas attendre que tu craques : je vais te faire craquer. Et crois-moi, je serai pas le plus frustré des deux.
Il saisit ma mâchoire et m'attire à lui, sans douceur, pour plaquer ses lèvres sur les miennes. Mais il met fin à ce baiser avant même que j'ai le temps de le savourer et recule, appuyant à nouveau sur le bouton. L'ascenseur reprend son ascension.
- Souviens-toi, toi aussi t'avais fini cette scène avec un baiser.
Enfin, on arrive à l'étage désiré et il descend, me faisant un petit signe de main ironique. Je reste dans l'ascenseur, incapable de bouger. Et quand les portes se referment sur moi, je me laisse tomber le long de la paroi, posant une main sur ma bouche alors que mes jambes flanchent sous mon poids.
. . . . .
Vous m'avez tellement manqué!! J'espère que moi aussi (un peu au moins? non?)
Bon, voici le retour des aventures de Tyty et Karlito (on dirait le nom d'un dessin animé pour gosses)
Prêtes pour reprendre?
Je tiens à préciser que je ne partage pas les idées de Tyler quant à son régime alimentaire, au contraire, au cas où certaines d'entre vous penserait le contraire.
Voilà, c'est reparti! J'ai vraiment hâte de recommencer mes publications régulières! Je vous aime 💕💕💕
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