20. In the end, as we fade into the night Who will tell the story of your life?

TYLER

La nouvelle est arrivée il y a trois jours, pendant notre fête à Paris. Karl était dehors avec Nora et Viktor, j'étais à l'intérieur. Mais on a tous les deux eu l'information. Après avoir pris le premier vol pour l'Italie, nous voilà en Toscane. Pour un enterrement.

Assise sur le lit, les genoux remontés jusqu'à ma poitrine et les bras autour de ceux-ci, je ne peux que regarder Karl, impuissante. La clope à la main, il regarde par la fenêtre. Il ne porte rien d'autre que son jogging gris, et je commence vraiment à m'inquiéter pour lui. Non, en fait, je m'inquiète pour lui depuis la seconde où Henrik nous a annoncé la nouvelle. Aucune explosion, aucune réaction. Bien que je pense évidemment que ce soit sa façon de gérer le deuil, une infime partie de moi ne peux s'empêcher de se demander s'il ne serait pas en réalité vraiment indifférent à ce qui est arrivé à Sergio. Après tout, même s'il ne m'en a jamais vraiment parlé, il faudrait être la pire des connes pour ne pas comprendre qu'il ne lui porte aucune affection. Enfin, portait.

- Je ne vais pas y aller.

Je fronce les sourcils, sans le quitter des yeux, attendant qu'il se tourne vers moi pour répondre. Mais il n'en fait rien, le regard toujours porté sur un point imaginaire à travers la fenêtre de notre chambre d'hôtel italienne. Finalement, je me décide à parler, puisqu'il ne se décide pas à me regarder.

- C'est ton père, Karl...

- Je sais, oui. Mais je n'irai pas à ses funérailles.

- Tu vas le regretter, ensuite.

- T'en sais rien. Je sais que tu m'aimes, que tu me connais, Ty', mais crois-moi, quand il s'agit de cet homme, mon seul regret est de l'avoir gardé dans ma vie aussi longtemps.

J'avale difficilement ma salive, la gorge serrée par l'émotion. Je ne sais pas quoi dire. Je ne veux pas le brusquer, mais j'ai peur. Peur que tout ça finisse par lui retomber dessus bien plus violemment que s'il avait accepté la chose dès son commencement. Qu'est-ce que je dois faire ? Le faire sortir de son mutisme ? Le laisser tranquille ?

Eh puis... Je dois être à ces funérailles. Ce n'est pas comme si j'éprouvais une grande tendresse pour le défunt, mais quelqu'un là-bas a besoin de moi. Il sera seul. Le connaissant, il portera toute la cérémonie sur son dos. Je ne suis même pas certaine qu'il ait envie d'y assister. Mais c'est ce que les gens attendent de lui, alors il le fera...

Serrant les poings, je m'approche de lui, décidée. Je comprends qu'il ne veuille pas y aller. Mais je ne peux pas me le permettre.

- Je vais y aller, Karl. C'est l'homme qui t'a élevé, mine de rien, et si tu refuses vraiment de la faire, alors laisse-moi m'en charger pour toi.

Je m'attends à ce qu'il proteste, qu'il réplique je devrais plutôt rester avec lui, ou Dieu sait quoi d'autre. Mais son regard se pose enfin sur moi et, après quelques secondes à m'observer, il hoche finalement la tête.

- D'accord, vas-y. Au moins quelqu'un m'y représentera.

KARL

- Elle n'y va pas pour me représenter, ou parce que c'est important pour elle. Elle y va pour Henrik.

Croquant dans une part de la pizza qu'on a commandé dans la chambre d'hôtel pour le déjeuner, Nora penche un peu la tête. Je lui suis vraiment reconnaissant d'être venue ici avec nous. Et d'être restée avec moi.

- Ça ne t'agace pas, de penser qu'elle va réconforter ton frère plutôt que toi.... ?

Souriant un peu, je hausse un sourcil et lui jette un regard interrogateur. Il semblerait qu'elle ait laissé son tact au placard, aujourd'hui.

- Tu sais quoi ? Je lui fais confiance... J'ai pas le choix, de toute façon. Eh puis...

Prenant une gorgée de vin toscan, j'inspire longuement, cherchant les mots exact. Bien sûr, j'ai envie de me persuader qu'elle ne ressent rien de plus que de l'amitié pour Henrik. Mais...

- Si elle fait une connerie, je préfère le savoir et agir en conséquence, plutôt que de vivre en prévenant toujours la possibilité qu'elle m'abandonne.

Les larmes perlent au coin de mes yeux, mais je les essuie rapidement. Je ne suis même pas triste, du moins je ne me sens pas triste, mais c'est comme si les pleurs s'étaient déclenchés automatiquement à la prononciation de ces mots.

Mais elle m'aime, je sais qu'elle m'aime. Si ce n'était pas le cas, ça ferait longtemps qu'elle aurait fuit, avec toutes les occasions qu'elle a eu... Non ?

TYLER

Le cercueil est ouvert devant nous. Au premier rang, la compagne du moment de Sergio, Olivia, son fils aîné et moi. Au deuxième, des actionnaires, des collègues, bref, principalement des gens avec qui il a pu faire affaire dans sa vie... C'est horrible.

Henrik ne dit rien à mes côtés. Ses yeux sont rivés sur le prêtre qui délivre son discours, censé honorer le défunts. Ses yeux sont secs. J'ai du mal à respirer, c'est à peine si je peux imaginer ce qui se passe à l'instant dans sa tête. Il n'en laisse rien paraître, mais il ne faut pas être un génie pour comprendre que ce qu'il y a derrière son masque impassible est beaucoup moins calme... Et si ça l'est tout autant, alors la situation est encore plus terrible que je ne l'aurais imaginé.

Il a remarqué que je le fixais. Je le sais, j'ai vu ses yeux dévier un instant sur sa droite, si court soit-il. Mais il refuse d'en faire de même, son regard restant obstinément posé sur le cercueil.

N'y tenant plus, j'approche doucement ma main de la sienne et l'y glisse, liant ses doigts aux miens. Plusieurs secondes passent, sans que ses doigts ou ses yeux, derrières ses lunettes noires, ne bougent. Mais finalement, je le sens rendre mon étreinte. Me déplaçant discrètement, je m'appuie un peu sur son bras. Pas un mot n'est échangé, mais ce n'est pas nécessaire. Il sait que je suis là pour lui, et pour personne d'autre. Comme il a pu être là pour moi.

Plusieurs heures plus tard

Comment les gens peuvent-ils participer à ce genre de fêtes après un événement pareil ? Je n'ai qu'une envie : rentrer chez moi, me cacher sous une couette et pleurer toutes les larmes de mon corps. Et je ne connaissais même pas le défunt.

Les photographes sont là, comme toujours, mais se tiennent à distance, tentant d'être aussi discrets que leur profession le permet. De mon côté, je tente de rester debout, droite aux côtés de Henrik, qui se voit forcé de faire la conversation à tous les invités qui viennent lui présenter leurs condoléances. Il est évident qu'il voudrait être partout sauf ici, surtout quand un associé de son père vient, peu subtilement, lui parler de la succession de celui-ci à la tête de son groupe. Rapaces.

« Henrik, mon pauvre chéri, tu dois être bouleversé ! »

Et voilà la tornade rousse qui fait son entrée, on aura tout vu aujourd'hui.

« Tyler, tu es superbe, comme toujours, tu portes incroyablement bien le CHANEL.

- ... Merci, Olivia. »

Malgré le fait que nous soyons censées être en bons termes, j'ai toujours une violente envie de m'éloigner d'elle quand je suis en sa présence, ce qui n'est d'ailleurs pas forcément pratique pendant nos réunions autour de notre collaboration.

Le brun à mes côtés doit le sentir car sa main vient trouver mon épaule, qu'il caresse un peu, comme pour me calmer. Je pousse un soupir et sourit à la rousse, sans un mot de plus. Elle comprend visiblement que sa présence n'est pas requise puisqu'elle semble prête à s'éloigner, quand son regard se fige soudain sur quelque chose derrière moi. Ou plutôt quelqu'un.

Après m'être retournée, je vois Karl, les mains dans les poches, l'air un peu perdu, qui nous regarde.

« Karl ? »

Avec un sourire, je me défais de l'emprise de son frère et me précipite vers mon copain, posant mes mains sur son torse.

« Tu es venu, finalement...

- Il m'a fallu quelques verres mais ouais, je suis là. Nora attend dans la voiture, elle déteste les fêtes de ce genre.

- Tu veux dire... Enterrements ?

- Ouais, voilà. »

D'une main, je viens caresser sa joue, le fixant. Il est épuisé mais c'est bien qu'il soit là. Il l'aurait regretté, j'en suis certaine.

« Tu viens bourré à un enterrement ? »

Un frisson me parcourt à l'entente du ton glacial qu'adopte Henrik, arrivé à ma droite. Je sens déjà la mâchoire de Karl se crisper sous mes doigts et prie pour que les choses restent calmes.

« T'aurais préféré quoi ? Que je fasse l'impasse, comme tu l'as fait avec Maman ?

- Les garçons, c'est pas le moment pour-

- Contrairement à certains qui ne foutaient rien de leur vie, je bossais, ce jour-là.

- J'étais au collège, connard !

- Et j'étais à Yale !

- Tu ne penses pas qu'ils auraient compris si tu t'étais absenté pour ça ?! »

La situation m'échappe totalement et je ne sais pas quoi faire pour les empêcher d'en venir aux mains, ce qui semble imminent si personne n'agit. Les gens, assez polis pour ne pas venir former un cercle autour des deux frères, mais trop curieux pour ne pas les observer et chuchoter d'une façon qu'ils croient sans doute discrète.

« Tu veux vraiment savoir pourquoi je suis venu ? Parfait ! Parce que, contrairement à toi, j'ai jamais été proche de maman.

- C'était ta mère...

- Oh, il aurait peut-être fallu lui faire passer le mémo alors ! Parce que, de ce dont je me souviens, c'était toujours toi, le fils prodige, selon elle. T'étais son portrait craché, tu faisais tout comme elle, avec elle, elle t'a toujours protégé, et ça me rendait fou ! Parce qu'après sa mort j'ai compris que même notre putain de père ferait plus attention à toi qu'à moi, tout simplement parce que t'étais son reflet !

- Tu te fous de moi ?

- J'ai l'air ? Tu crois qu'il m'aurait laissé passer tout ce que t'as fait pour foutre la réputation de notre famille en l'air ? Je ne serais même pas étonné qu'il ait eu cette attaque à cause d'une énième de tes conneries ! »

Visiblement, je suis la seule à voir le poing arriver, car Henrik n'a pas le temps de l'intercepter et l'encaisse de plein fouet. Un murmure parcoure la foule et je m'interpose avant que le brun ne se redresse pour répliquer.

« Ça suffit ! »

Mes yeux se plantent dans ceux de Karl, encore un peu vitreux mais définitivement assombris par la haine. Maintenant, j'ai encore plus envie de pleurer...

« S'il te plaît... »

Il passe une main sur son visage et secoue la tête. Mais finalement, alors que je pensais qu'il allait faire une scène, il se retourne et commence à partir. Mais, après quelques pas, il me jette un coup d'œil.

« Tu viens ? »

Sans prononcer un mot, je secoue légèrement la tête, les larmes aux yeux. Non, je ne peux pas partir. Pas après ça. Parce que lui, il a Nora dans la voiture. Mais que Henrik n'a personne. Ici ou ailleurs.

Et aujourd'hui, je ne peux pas le permettre.

L'ironie dans le sourire de Karl alors qu'il soupire me serre le cœur.

« Bien sûr. »

Et il disparaît au milieu des invités. 

.  .  .  .  .

... je sais. je sais que ce n'est pas très bon, que c'est court et je sais que ce n'est pas ce que vous attendiez. mais cette histoire traîne ici depuis des mois sans updates.

je need closure. Vous, moi, nous, il faut qu'on finisse cette aventure, ok? le prochaine chapitre sera le dernier.

je vous aime énormément.

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