12. I'm a sorry sucker and this happens all the time

TYLER

Les jambes croisées, je souris en regardant le défilé auquel j'ai été conviée avec Allison et Juan aujourd'hui. Assise au premier rang, je leur désigne de temps en temps les tenues qui attirent mon regard, montrant d'un geste les mannequins qui défilent pour Balmain Menswear Spring-Summer 2019 sur un immense yacht, autour duquel sont installés les invités, dans le port de Los Angeles. L'aspect industriel de l'endroit contraste à merveille avec les pièces colorées aux tissus fluides que nous présente le designer, et je ne peux qu'admirer son travail. Cependant, un élément m'empêche de profiter pleinement du show : Karl, assis à quelques rangées de moi, et que j'ai surpris plusieurs fois à me fixer. En fait, je suis même certaine qu'il n'a fait que ça du défilé.

Je lui lance à nouveau un regard, et quand je rencontre encore une fois le sien, accompagné d'un sourire en coin à tomber, détourne vite celui-ci, remettant mes cheveux en place d'un geste gêné. Je ne sais pas comment me comporter avec lui, après tout il a disparu hier sans un mot, sans retour, et maintenant le voilà ici, à me lancer des sourires équivoques.

Le défilé se termine et l'after commence. Les invités s'engouffrent sur le ponton pour rejoindre le yacht, à bord duquel se déroule la soirée. Sans attendre, je cherche Karl du regard. Mais il n'est nulle part, et je commence déjà à me demander s'il n'est pas reparti directement après défilé.

Me retournant pour partir vers le buffet, le seul ami sur lequel on puisse réellement compter dans ce genre de situation, je manque de me heurter à la personne juste derrière moi, qui rit en voyant la tête consternée que je fais face à son torse musclé. Un rire et un torse que je reconnaîtrais dans n'importe quelle circonstance.

- Tu m'as fait peur, idiot !

- Désolé, j'allais te prévenir mais tu t'es retournée trop vite... Tu vas bien ?

Je lève les yeux vers lui et détaille son visage. Il a l'air fatigué, mais un sourire radieux étire ses lèvres. J'ai envie de fondre en larme.

Sans le prévenir, je ma rapproche et le passe mes bras autour de son torse. Je serre le dos de son t-shirt entre mes poings, me blottissant contre son torse. Il semble un peu surpris par ma réaction, mais ses bras finissent par m'entourer et il me serre à son tour contre lui.

- Je suis désolé, j'étais-

- On s'en fiche, t'es là maintenant.

Sa main vient caresser mes cheveux et je pousse un soupir de soulagement, avant de relever la tête vers lui et de poser mes mains sur ses joues. Ouvrant la bouche, je m'apprête à dire quelque chose, mais suis interrompue par un flash. Retenant un juron, je me tourne vers le photographe et lui souris, lâchant Karl au passage.

Un frisson me parcoure quand je sens sa main sur ma taille. Se penchant vers moi, il approche ses lèvres de mon oreille.

- Retrouve-moi dans dix minutes près de la salle de contrôle, il y a une pièce où on pourra parler, murmure-t-il, avant de lui aussi sourire pour la photo et quitter l'endroit.

Faisant mine de rien, je repars vers le buffet, auquel je trouve Juan et Allison en grande discussion.

- Tu veux une coupe ? Me demande Juan, en me désignant le champagne au frais.

Je secoue la tête, avant de saisir une part de brownie et de l'enfourner dans ma bouche.

- J'évite de boire, la dernière fois ça ne s'est pas très bien passé...

- Oh mais t'inquiète pas, je serai toujours prêt à venir te chercher au commissariat du coin !

Sur ces mots, il passe son bras autour de mon épaule et m'attire à lui, avec un rire. Allison me lance un regard bizarre, elle semble un peu déphasé... Est-ce que ça la dérange, que je sois aussi proche de son copain ? Ne voulant pas la m'être mal à l'aise, je repousse gentiment le brun, avant de me prendre une deuxième part de gâteau.

- Eh bah, il leur est arrivé quoi à tes résolutions de perte de poids ? me demande alors Allison, qui picore une amande ou deux par-ci par-là, mais rien d'autres.

- Allison, ta gueule, elle mange enfin, ne vas pas la faire retomber dans tes conneries, grogne alors Juan, protecteur.

Je leur souris et secoue la tête, montrant que ce n'est rien de grave.

- Un certain Karlito m'a fait le plus beau speech du monde et depuis j'ai tout simplement envie de croquer la vie à pleines dents ! Littéralement parlant ! Eh puis je vais le retrouver, à côté de la salle de contrôle... Je vais lui dire ce que je ressens pour lui, alors il me faut du courage.

- C'est-à-dire, « ce que tu ressens pour lui » ? demande Juan avec circonspection.

- Que je l'aime, que j'ai pas l'intention d'arrêter de l'aimer et qu'il va falloir qu'on fasse avec !

Poussant une exclamation de satisfaction, il lève la main pour que je tape dedans, ce que je fais sans tarder, avant de tirer la langue à Allison.

- Tu me dois quelque chose, maintenant !

- Vous avez pariez sur ma relation... ?

- Ouais, Allison pensait que tu finirais par coucher avec Henrik, mais moi j'avais foi en toi, pas comme certaines...

Vexée, Allison hausse les épaules.

- J'ai juste dit ça comme ça. Je vous laisse, 'faut que je trouve où sont les toilettes...

Et sur ces mots, elle disparaît, me laissant aux côtés d'un Juan perplexe de son comportement.

KARL

Dix minutes plus tard

- Putain, mais sors tout de suite !

- Non ! Si tu la quittes pas, je lui dirai que c'est toi qui m'a embrassée, que t'en as rien à foutre d'elle, que tu la tromperais avec la première venue !

- Mais t'es complètement tarée c'est pas possible ! Tu crois vraiment qu'elle va croire ça ?

- Pourquoi pas ?

- Allison, j'en ai rien à foutre de toi, même si je n'étais pas avec Tyler, ça reviendrait au même, quand est-ce que tu vas le comprendre ?!

- Tu dis ça mais-

- Mais rien du tout ! D'ailleurs je vais lui dire tout de suite la vérité, tu ne me laisses plus le choix, là !

Je tente de la contourner, mais elle se met en travers de mon chemin, agrippant mon t-shirt de ses mains minuscules. Comment ai-je fait pour me retrouver dans cette situation... ? Et comment a-t-elle su que j'étais ici, d'ailleurs ?

Malgré tous mes efforts pour la dégager sans violence, elle continue à me bloquer le chemin.

- Lâche-moi !

Mon sang bat de plus en plus fort dans mes veines, je vois rouge. J'ai juste envie de lui foutre une baffe pour la calmer, mais je me contrôle tant bien que mal. Jusqu'au moment où elle plaque ses lèvres sur les miennes dans un dernier geste désespéré. Dégoûté, je la repousse violemment, à tel point qu'elle tombe au sol, avant de m'essuyer les lèvres. Le cri de douleur qu'elle vient de pousser en atterrissant par terre résonne dans ma tête, et je me sens immédiatement mal de l'avoir poussée ainsi. Voulant m'excuser, je me penche vers elle pour lui tendre la main, mais le bruit d'un poing qui tape contre la porte nous surprend.

- Karl ?

C'est la voix de Tyler. Parfait, il suffit que je lui dise, que je lui avoue tout. Tant pis pour Allison, elle ne mérite pas l'indulgence que j'ai à son égard.

Mais la petite brune me devance. Sans que je n'ai le temps de réagir, elle se relève et s'élance vers la porte. Avant de l'ouvrir, elle se retourne et m'offre un petit sourire, avant de violemment arracher les boutons de sa chemise et d'ébouriffer ses cheveux.

- Qu'est-ce que tu fous ?!

Mais il est trop tard : elle ouvre la porte, semblant en pleurs, et tombe directement sur la blonde qui était sur le point d'entrer. Celle-ci s'arrête brusquement, écarquillant les yeux en voyant l'état déplorable de sa soi-disant « amie ». Je m'apprête à lui expliquer, mais évidemment, Allison me devance à nouveau.

- Tyler ? Oh mon dieu, je suis tellement désolée, j'ai jamais voulu...

Elle pose deux mains sur sa bouche et fond en larmes. Elle aurait sans doute eu une meilleure carrière en tant qu'actrice qu'en tant que mannequin...

Tyler met quelques secondes à réaliser ce que tout ça veut dire. Puis, relevant lentement les yeux sur moi, elle fronce les sourcils, l'air profondément désorientée.

- Est-ce que... Est-ce que tu as... ?

Comment peut-elle ne serait-ce que poser la question ? Le fait qu'elle ne voit pas directement qu'il s'agit d'un mensonge me blesse comme mille aiguilles enfoncées dans mon cœur, et je serre les dents, croisant les bras et la fixant d'un air dur. Je dois lui lancer le regard le plus froid dont je suis capable, aux vues de la façon dont se décompose son visage.

- A quoi ça servirait que je me défende, si de toute façon tu m'en crois capable ?

- Karl, je-

- Qu'est-ce que c'est que ce bordel ?!

Juan arrive et dégage sans violence Tyler de son chemin, avant de prendre Allison dans ses bras.

- Qu'est-ce que tu lui as fait, connard ? Ça te suffisait pas de faire souffrir Ty', fallait aussi que tu t'attaques à elle ?! Je te jure que cette fois je vais te tuer, espèce de-

Il va pour me foncer dessus, mais Allison le retient contre elle, sanglotant contre son haut. Cette fois, je me défends, incapable de me laisser insulter de la sorte. J'ai l'impression que ma tête va exploser, que je vais vomir... Mon cœur bat à cent battements à la seconde, et je me sens sombrer dans une nouvelle crise de panique.

- Mais vous voyez pas que c'est un jeu pour elle ?! Cette gamine se fout de votre gueule, je ne lui ai rien fait, elle est juste folle à lier !

- Oh bien sûr, parce qu'entre elle et toi, c'est elle qui a le plus souvent menti, n'est-ce pas ?

- Oui, justement !

- Tu me dégoûtes... Je vois même pas pourquoi je prendrais le temps de te frapper, t'es juste pathétique... Pas étonnant que tu te sois si bien entendu avec une femme comme Olivia. T'aurais peut-être du rester avec elle, vous faisiez la paire !

Rajoutez quelques centaines d'aiguilles de plus et le compte est bon... Je n'ai même pas la force de répliquer, trop blessé.

- Allez, viens Tyler, on va raccompagner Allison chez elle...

Il part avec la brune sur le bras, considérant que Tyler va prendre sa suite. Son regard passe du couple à moi, et je ne l'ai jamais vu sembler aussi déchirée par un choix. Mais qu'est-ce que j'en ai à foutre ? Qu'elle me choisisse ou non, le résultat est le même : elle ne m'a pas cru sur parole. Elle ne me croit jamais...

- Tyler !

Juan l'appelle à nouveau, et la blonde sort de son immobilité, faisant un pas dans sa direction. Elle me lance un dernier regard. Un regard qui, je le devine, veut dire « désolée ». Et elle disparaît.

TYLER

Juan et Allison descendent du bateau, et je les suis, complètement perdue. Quelque chose ne va pas. A première vue, ce qui c'est passé dans cette pièce semble évident. Mais Karl ne ferait jamais ça. C'est le type le plus respectueux que je connaisse, jamais il n'agresserait une femme de la sorte...

- Tu viens ?

La voix de Juan me sort de ma réflexion. Je suis restée plantée sur le ponton, incapable de quitter ainsi la soirée. Je sais qu'il va se sentir trahi, si je pars, mais...

- Je suis désolée, Juan. Ramène-la à la maison, moi, je ne peux pas partir comme ça.

- Tyler, il a essayé de la...

Le mot qu'il cherche ne parvient pas à franchir ses lèvres : « violer ». Et pour cause : Karl en serait incapable, surtout en de pareilles circonstances.

- Je sais que tu vas me détester pour ça, mais... Je n'y crois pas.

Et sans lui laisser le temps de répondre, sans le regarder plus longtemps, parce que je sais que cette trahison le blessera plus que tout, je me retourne et repars vers la fête, priant pour que Karl n'en soit pas déjà parti par l'une des autres sorties.

KARL

Le bruit de mes pas sur le ponton de bois résonne, j'ai l'impression que chaque pas me vrille la tête, sur fond de musique lancinante. Qui a décidé de mettre un truc comme Groupie Love de Lana Del Rey à une soirée pareille ? Et pourquoi je connais le titre de cette connerie ? Ah, oui. Tyler l'écoute constamment. Décidément, où que j'aille, elle me suit.

- Karl ! Attends-moi.

Apparemment, elle me suit métaphoriquement et littéralement. Je ne prends pas la peine de me retourner, partant vers le port les mains dans les poches de mon costume. Ses pas résonnent derrière moi, et je sais qu'elle va finir par me rattraper.

Elle me dépasse et passe devant moi pour me bloquer. Elle aussi, je vais devoir la pousser ?

Ses yeux s'écarquillent. Je me demande ce qui la fait réagir comme ça : mes yeux rouges d'avoir trop pleuré, ou les larmes qui strient encore mes joues détrempées.

- Quoi ?

- J'aurais pas du partir, je suis désolée.

- C'est trop tard. Ça sert à quoi d'être ensemble si tu ne peux pas me faire confiance ? J'ai accepté que tu doutes de moi quant à tellement de choses... Mais ça ? Tu crois vraiment que j'aurais pu faire du mal à cette pauvre fille ?

- Non ! Je ne l'ai jamais cru, sinon je ne serais pas là ! Mais Juan m'appelait, tu ne m'as rien dit, je ne savais pas quoi faire, je ne pouvais pas l'abandonner, il a fait tellement pour moi...

- Et moi ? Tu sais ce que j'ai fait pour toi ?! Ce que j'ai abandonné, ce que j'ai supporté ? Oui, tu le sais, parce que t'as fait exactement la même chose pour moi, du moins au début. Qu'est-ce qui a changé ? Maintenant j'ai juste l'impression que tout le monde passe avant moi...

Sa bouche reste entrouverte, mais elle ne répond pas. Et pour cause : qu'est-ce qu'elle pourrait bien répliquer ? Tout ce que j'ai dit est vrai : elle me considère comme acquis, et c'est sans doute ce qui fait le plus mal : je le lui étais. Mais aujourd'hui je ne peux plus. Je ne peux plus supporter ces disputes constantes, son manque de confiance en moi, toutes les emmerdes que ça nous apporte...

- Allez, laisse-moi passer, ce sera plus simple.

Mais elle reste plantée là. Et je vois des larmes perler au coin de ses yeux. Oh non, elle ne va pas s'y mettre aussi ? Mais malheureusement si, elle commence à pleurer.

- Je suis tellement désolée !

- Tyler, on s'en fout, c'est trop tard, maintenant...

- Non ! Je ne m'étais pas rendue compte de tout ça, je suis désolée, vraiment. T'as toujours l'air si fort, j'ai pas-

- Mais c'est trop facile, ça ! Si on doit être ensemble, 'faut que tu réalises que je suis juste un putain d'humain, comme tous tes amis à qui tu portes tant d'attention.

- Je te promets que ça ne se reproduira plus jamais.

J'ai juste envie de partir vers ma voiture et de rentrer. Et j'ai juste envie de la prendre dans mes bras et de ne plus la laisser partir. Et j'ai juste envie de lui balancer ses quatre vérités pour voir si elle souffre autant que moi. Je me sens comme engourdi, paralysé par les différentes options qui s'offrent à moi et le tourbillon de pensées et de sentiments qui m'envahit, comme à chaque fois que les choses tournent mal entre nous.

- Eh puis pourquoi tu pleures, d'abord, je t'ai rien fait... finis-je par soupirer, cette question me semblant plus simple à poser que tout le reste.

- Parce que j'avais jamais réalisé que je pouvais te faire autant de mal avec mes décisions. Et que maintenant que je m'en rends compte, je me mets à ta place, et...

- Oh, par pitié, tais-toi.

Saisissant son visage entre mes mains, je l'attire à moi et l'embrasse. Enfin. Enfin elle se tait, enfin je peux sentir ses lèvres contre les miennes. Je suis incapable de définir quelles larmes je goûte en ce baiser, les siennes, les miennes... Mais je m'en fous. Ses mains remontent jusqu'à mes cheveux, et je pousse un soupir en les y sentant, tandis que les miennes viennent saisir le creux de ses reins, plaquant son bassin contre le mien. Elle gémit en sentant mes mains descendre sur ses fesses, et recule un peu le visage, pour rompre le baiser.

- Où-

Je lui vole un baiser.

- Est garée-

Un autre baiser.

- Ta voiture ?

- 'Pas le temps d'aller jusque là-bas, je réponds dans un grognement.

Je la soulève et, avec un petit cri de surprise, elle serre ses bras autour de mon cou. Elle est toujours aussi légère...

TYLER

La veste de Karl sur le bitume pour nous servir de matelas, un espace entre deux conteneurs pour nous servir de cachette. Et ses mains sous ma robe, ses caresses, ses baisers, tout ce que je n'avais plus ressenti depuis si longtemps. Assise sur ses cuisses, j'embrasse son cou, y laissant ma marque, puis lui retire son t-shirt, obligeant ses mains à délaisser mon corps pour quelques secondes.

Torse nu sous moi, il pose ses deux paumes au sol, passant quelques secondes à me regarder sans un mot, sans un geste. Je sens mes joues rosir, mais ne peux m'empêcher de faire de même... Ce n'est pas son torse musclé qui attire mon attention, ni les deux os qui ressortent au niveau de mon bassin. Non, c'est la façon dont son regard posé sur moi luit à la lumière des étoiles. C'est les traces encore rouges de griffures au dos de ses épaules, que j'ai déjà aperçues plusieurs fois, qu'il se fait de lui-même quand il est stressé. C'est la seule et unique cicatrice sur son avant-bras, presque effacée, témoin de ses années adolescentes. C'est tous ces signes qui m'ont toujours montré sa vulnérabilité, mais que je n'ai jamais daigné prendre le temps de comprendre. Et je ne peux même pas m'en vouloir assez pour ça : pour ce que je lui ai fait. Ce ne sera jamais assez.

Mais ses mains reviennent sur mon corps, et me font rapidement revenir à l'instant présent. Je l'embrasse encore. Le goût et la texture de ses lèvres, de sa langue, la sensation de son incisive trop aiguisée mordant ma lèvres inférieure... C'est comme ça que tout avait commencé. Par un baiser. 

.  .  .  .  .

Bon bon... J'ai prévu de créer un club du nom de "Allison cte tepu", vous vous inscrirez?

Oui, Karl est un homme, et oui, Karl pleure! Est-ce que vous êtes d'accord avec ce qu'il reproche à Tyler, ou alors pensez-vous que ce soit exagéré?

Préparez-vous, le prochain chapitre sera plus léger, lemon et détente en vue les amies!

De l'amour et des bisous, as always

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