Chapitre 74
PDV Jade
" Je t'avais dit de revenir en forme " Aliya remarque alors que je la suis dans le couloir, sortant tout juste de la chambre d'un patient.
" Je le suis " je répond un peu confuse.
Elle arque un sourcil avec un sourire amusé.
" Tes yeux et ton cou ne me disent pas la même chose " elle rit puis reprend sa marche.
Mes yeux sont légèrement gonflés dû à mes larmes cette nuit et mon manque de sommeil. En effet, après ces... Pensées, je n'ai pas réussi à m'endormir.
Alors que je regarde Aliya avancer en riant, je m'arrête et porte ma main à mon cou. Mes yeux s'écarquillent quand en touchant ma peau douloureuse je me souviens des suçons que Sam a fiérement laissé cette nuit.
Je lâche un juron et me rend immédiatement aux toilettes, là où je détache mes cheveux et les arrange de façon à ce qu'elles cachent les marques violâtres sur ma peau.
Je retrouve ensuite Aliya qui a toujours ce sourire amusé sur ses lèvres, qui d'ailleurs s'aggrandit quand elle remarque mon essai de cacher quelque chose qu'elle a déjà vu.
" Ce n'est pas ce que tu crois " je murmure rapidement en prenant quelques dossiers dans mes mains.
" Tu es mariée Jade, c'est normal " elle rit, me caresse doucement le bras avant de me prévenir dans quelle chambre elle sera.
C'est comme si tous les jours j'oubliai que je suis mariée, et tout les jours quelqu'un me le rappelle.
Comment puis-je oublier quelque chose comme ça ?
Mon regard se pose comme par réflexe sur ma main, cherchant mon alliance. Cependant, celle-ci n'est plus autour de mon doigt.
Bien sûr, je l'avais jeté à la figure de Sam la dernière fois. Le jour où je l'avais giflé. Le jour où il avait eu l'audace de venir à la fac et m'humilier - peut-être sans le savoir - devant mes 'amis '.
Je fronce les sourcils au souvenir. Pourquoi avait-il fait ça déjà ?
Il y a encore beaucoup de choses que je dois découvrir visiblement.
Et je ne sais pas si j'ai hâte ou non pour ça.
" Je peux comprendre que tu es fatiguée, mais essayes d'être plus active ma belle " Aliya remarque quand je la rejoins dans la chambre d'un patient auquel elle administre un produit.
" Je m'excuse, j'ai un peu la tête en l'air " je soupire en la regardant faire, mon regard fixé sur la seringue.
" J'ai remarqué ça " elle me sourit avant de reprendre son travail.
Je sais qu'elle pense sûrement qu'il s'est passé des choses cette nuit, mais ce n'est pas le cas. Ces pensées que j'ai eu, cette réalisation plutôt, qui m'a empêchée de dormir, m'empêche maintenant de me concentrer.
Je ne fais que de penser à ça. A ces filles...
Si seulement je pouvais faire quelque chose pour eux, les aider, ou seulement les soutenir.
Je lâche un soupir assez bruyant à l'idée que je ne pourrai peut-être rien faire. Je suis seulement une jeune femme de vingt ans, que pourrai-je faire ? Qui me prendrait au sérieux ?
" Comment tu as connu ton mari ? " je demande soudainement à Aliya, qui, surprise ou plutôt confuse par ma question, relève la tête en fronçant les sourcils.
" Quand il est venu demander ma main à mon père " elle répond sans me questionner. Nous quittons cette chambre aussi quand le patient s'assoupit, et nous reprenons notre marche dans le couloir.
" Tu ne le connaissais pas avant ? " j'arque un sourcil.
Elle secoue la tête de droite à gauche. " Apparemment il m'avait vu avec sa cousine le jour de son retour de France. Je ne sais si c'est le coup de foudre, mais quelques jours plus tard, après s'être informé, il est venu demander ma main. Mon père a dit oui, puis tout s'est passé assez rapidement. Dans les mois qui ont suivis, on s'est mariés et j'ai du le suivre ici, en France. "
" Mais, tu ne t'es pas opposée ? "
" Pourquoi je l'aurai fait ? " elle hausse les épaules.
Sa réponse me surprend, mais je continue mon questionnement. " Tu ne le connaissais pas et il ne t'a pas demandé ton avis. Tu aurais pu t'opposer, non ? "
" Eh bien, je ne voyais de problème... " elle soupire avec à nouveau un haussement d'épaule. " Il était sérieux et il disait m'aimer, qu'est-ce que je pouvais demander d'autre ? "
' C'est tout ? ' j'ai envie de lui demander mais je me tais.
" Tu t'es senti obligée d'accepter ? " je demande, un peu hésitante.
" Non, j'aurai pu refuser. Mais comme je te l'ai dit, du moment qu'il m'aime, c'est tous ce qui compte pour moi. Et je n'ai pas fait le mauvais choix. " elle me fait un petit sourire, mais son expression devient sérieuse et inquiète en me regardant. " Pourquoi toutes ces questions ? A quoi tu penses ? "
" Je... Je pensais juste à ces filles qui... Qui sont, tu vois, forcées au mariage... " je marmonne en jouant avec les manches de ma chemise. Je ne veux pas qu'elle sache que j'ai eu un mariage comme ça. J'ai l'impression que ça changera sa vision sur moi, qu'elle me regardera différemment.
" Ça doit être tellement dure pour eux " Aliya soupire avec une moue triste.
" J'imagine bien... " je soupire à mon tour, manquant d'air une fois encore à la pensée. " J'aimerai bien faire quelque chose pour ces filles "
" Comme quoi ? " elle demande alors qu'on arrive à son bureau où je dépose tous les dossiers que j'avais entre les mains.
" Je ne sais pas " je hausse les épaules. " Peut-être empêcher à ce qu'elles ont à endurer quelque chose comme ça, ou leur montrer un peu de soutiens... "
Elle semble réfléchir un instant alors qu'elle range les dossiers. Puis elle se retourne vers moi avec son fameux sourire que j'ai maintenant l'habitude de voir tous les jours. " Je connais quelqu'un qui pourrait peut-être d'aider "
* * *
Samuel rentre plus tard que moi donc, de retour à la maison, je me met immédiatement au travail pour préparer le dîner.
J'ai l'impression que c'est la première fois qu'on va dîner ensemble, comme un couple. Le dîner d'hier soir était commandé et avec mon attitude on a pas pu en profiter pleinement. Cette fois je veux quelque chose de spécial.
Un moment j'hésite à mettre des bougies mais je décide du contraire et dresse la table d'une façon simple. Après tout, ce qui compte c'est qu'on passe du bon temps.
Au moment où j'entend la sonnerie retentir, mon portable se met également à sonner ; tout en le décrochant, je vais ouvrir la porte.
J'écoute Annie parler alors que Samuel entre et je ferme la porte derrière lui. Il m'embrasse rapidement sur les lèvres et me prévient qu'il va monter se changer, me laissant figée sur place avec le téléphone collé à mon oreille.
" Tu m'écoutes Jade ? " Annie demande, agacée, et je cligne des yeux pour revenir sur Terre.
Je ne peux empêcher le sourire idiot qui s'étend sur mes lèvres en repensant à ce qu'il vient de faire.
Il m'a seulement embrassé, ce n'est pas la première fois. Mais c'est la façon dont il l'a fait... C'est comme la fois où il m'avait embrassé la joue, c'était différent, mais je ne pouvais pas expliquer mes émotions. C'est le même cas à cet instant.
" Tu disais ? " je reprend la conversation et écoute Annie lâcher un grognement plaintif.
" Je te parlais de mon rendez-vous ! C'est demain après-midi "
" Ah... Ton rendez-vous... Oui bien sûr... "
" Tu l'avais oublié, n'est-ce pas ? " je l'imagine déjà rouler des yeux mais je la comprend.
" Je pense à beaucoup de choses en ce moment, c'est pour ça " je m'explique en passant une main dans mes cheveux. " C'est à quelle heure ? "
" Quinze heures " elle marmonne.
Je soupire. Je serai à l'hôpital à quinze heures...
Alors que je réfléchis à une façon d'arranger ça, mes yeux se posent sur Samuel qui entre dans la cuisine, effectivement changé en de vêtements plus confortables, et qui me sourit.
" Attends je vais demander à Samuel " j'éloigne le téléphone de mon oreille alors que le concerné me regarde confus. " Le rendez-vous de psy d'Annie est demain, tu pourrais l'emm - "
" Oh que non ! " il secoue immédiatement la tête, ne me laissant même pas finir ma phrase.
Je roule les yeux et reporte le téléphone à mon oreille.
" Je vais essayer d'arranger ça et je t'envoie un message, d'accord ? "
" Bah si tu ne peux pas, on y va pas et c'est tout " elle propose.
" Non Annie, on va y aller, prépares toi pour ça. "
Elle marmonne un simple ' bonne soirée ' avant de raccrocher. Je lance un regard à Samuel qui ne fait qu'hausser les épaules et s'installe à table.
Je me retiens pour ne pas faire une remarque et compose plutôt le numéro d'Aliya, à qui j'explique la situation. Elle est assez gentille pour me donner mon après-midi, à condition de le rattraper un soir, et j'accepte, sachant que je n'ai pas vraiment le choix.
Je passe outre le refus de Sam d'accompagner ma soeur et m'installe à table dans l'optique de passer une bonne soirée.
Et je peux dire que c'est l'une des soirée les plus calmes et sereines que j'ai passé. C'était juste nous, aucune question, aucune remarque désagréable, aucun secret. Juste nous.
Le soir je suis obligée de repousser Sam plusieurs fois pour l'empêcher de me faire d'autres suçons.
J'ai cru comprendre qu'il adore faire ça et regarder son ' chef-d'oeuvre '.
Il peut être un vrai gamin parfois. Mais je l'aime comme ça.
* * *
" Je te jure si elle ne me prend pas dans la minute qui suit je m'en vais " grommelle Annie en croisant ses bras sur sa poitrine.
" Tu ne vas nulle part " je répète pour la énième fois, même si moi aussi je commence à être agacé d'attendre, d'autant plus qu'on est arrivé une demie-heure à l'avance et qu'on attend depuis une heure notre tour.
Je suis soulagée quand la porte s'ouvre et je vois enfin le patient sortir du bureau, suivit de la psychologue qui s'approche de la salle d'attente pour appeler Annie.
" Tu veux que je vienne avec toi ? " je demande alors qu'elle devient toute pâle et visiblement nerveuse.
" Non, ça va " elle murmure, tenant à me faire croire qu'elle n'est pas nerveuse du tout, puis elle suit la psychologue dans son bureau.
Je mord ma lèvre un instant en la voyant comme ça, puis m'adosse contre mon siège pour attendre sa sortie.
Je commence à m'ennuyer en attendant, si bien que je feuillette plusieurs magasines sur la table posé au centre de la salle mais cela n'est pas assez pour combler mon ennuie.
Je prend ensuite mon portable et décide d'envoyer un message à Samuel, qui, avant de partir ce matin, m'avait proposé de nous accompagner malgré tout. Mais seulement si je venais aussi.
* J'aurai du accepter que tu viennes en fin de compte * je lui envoie et regarde l'écran de mon portable dans l'attente d'une réponse qui ne tarde pas à venir.
* Vous n'êtes pas sortis encore ? Quelque chose va mal ? *
Je l'imagine déjà en train de paniquer et même si je ne devrai pas sourire je ne peux m'en empêcher.
* Non, tout va bien, il y a eu un retardement c'est tout. Je m'ennuie à attendre, tu fais quoi ? *
* Je suis en réunion *
* Oh désolée, je vais te laisser alors *
Je soupire avec une moue triste. J'aurai espéré qu'il puisse me tenir compagnie au moins par message.
* Non ça va, je n'écoutai pas de toute façon ;) *
Je souris encore une fois à la vue de son message et m'empresse de lui répondre.
* Est-ce qu'il y a un instant où tu peux être sérieux et arrêter d'en faire qu'à ta tête ? *
* Je peux être très sérieux quand je le veux... Tu veux un exemple ? ;) *
Pourquoi j'ai l'impression qu'il va faire une remarque sexuelle encore une fois ?
* Non, ça va aller. Annie vient de sortir, je dois y aller *
J'envoie rapidement le message et me lève à la vue d'Annie. Ça ne fait même pas une demie-heure, qu'est-ce qu'elle aurai pu dire en si peu de temps ?
" Je peux vous parler un instant ? " la psychologue demande quand je m'approche d'eux.
Je hoche la tête, un peu confuse, et la suit à l'intérieur du bureau alors qu'Annie retourne dans la salle d'attente.
" C'est sa première séance, elle n'a quasiment pas parlé mais c'est compréhensible " elle explique. Je ne fais qu'acquieçer et elle continue. " Je ne veux pas dire grand chose pour l'instant, je vous demande seulement de continuer à prendre des rendez-vous régulièrement. On va attendre qu'elle s'habitue et qu'elle se sente à l'aise pour pouvoir me parler de ses problèmes "
" Oui, bien sûr. Y-a-t-il quelque chose qu'on pourrait faire en dehors de ça ? "
" Essayez d'être à l'écoute, c'est le plus important " elle m'offre un sourire compatissant et je la remercie. Peu après, je quitte son bureau et retrouve Annie à sa place.
Je n'oublie pas de fixer les prochains rendez-vous avec la secrétaire avant de quitter les lieux.
" T'as vu, ce n'était pas si mal que ça " je remarque alors qu'on se dirige vers l'arrêt de bus.
" Ouais... Remercies ton mari, sans lui je ne serais même pas venus "
" Quel est le rapport avec Samuel ? " je demande en fronçant les sourcils.
" On a fait un compromis ; si je venais à ce rendez-vous, il m'a promis qu'on allait adopter le chat que j'avais retrouvé "
" Oh..." je souffle.
Pourtant, il m'avait dit que c'était moi qui avait réussi à convaincre Annie. En fait, il voulait seulement que je pense comme ça, ne prenant même pas le mérite lui-même. Que je pense que j'étais une bonne soeur.
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