Chapitre 5

Sa voix me paraissait lointaine, alors que je sentais mon état empirer. Je savais qu'il était près de moi, alors que sa main paraissait glacée dans la mienne.

C'était comme se brûler, mais totalement.

Je ne savais pas où nous étions, mais où que je sois de toute façon, ma douleur s'amplifiait. C'était insoutenable. J'avais conscience que mes cris ne devaient pas aider, mais je ne pouvais pas les retenir. J'avais toujours la sensation que si je cherchais à les refouler, la douleur s'amplifierait et le peu de contrôle qu'il me restait m'échapperait.

Depuis combien de temps étais-je dans cet état ?

Je n'en avais aucune idée. J'avais perdu la notion du temps, dès le moment où j'avais fui la moitié de moi-même, celui qui m'était destiné. Rien que cette pensée me fit mal à la poitrine, ajoutant un poids à mon corps, à mon âme qui réclamait sa présence, alors que je souffrais le martyre sans comprendre pourquoi.

Je frissonnais de la tête aux pieds, mon corps était secoué de tremblements, de spasmes incontrôlables, alors que tout ce que je voulais, c'était me retrouver dans un bain d'eau glacée pour atténuer tout ce que je subissais.

J'avais chaud et froid à la fois.

Comme si j'étais malade. Mais je savais que ce n'était pas possible. Les Anciens avaient posé un sort sur ma petite personne afin que je ne tombe pas malade dès ma naissance. Autant éviter que je ne meure dès les premières secondes de ma vie.

Ça aurait été une catastrophe pour eux.

Un élancement me parcourut la main gauche et je serrai les dents, alors que j'enfonçai ma tête dans l'oreiller pour étouffer mon cri qui voulait absolument sortir. C'était comme si ma main se faisait arracher. Comme si quelque chose à l'intérieur de moi me rongeait pour en sortir. Ma peau sembla se déchirer alors que j'entendais un craquement qui ressembla fortement aux os de ma main qui venaient de se briser.

Alors que je haletais pour reprendre mon souffle, me sentant moins brisée, le feu toutefois présent dans chaque parcelle de mon corps, je relevai la tête, les cheveux me collant au visage et de ma vision floue, j'aperçus une silhouette près de moi. Je devinais qu'il s'agissait de Tren dont j'avais lâché la main au moment où je m'étais recroquevillée sur moi-même sous le supplice que je subissais.

- Merde alors !

Ma vision s'adapta peu à peu, alors que les battements de mon coeur résonnaient dans mon crâne et j'aperçus Tren se tenir la tête comme s'il n'en croyait pas ses yeux. Ses cheveux blonds étaient dans tous les sens et il ne portait plus ses vêtements de gardien, mais un simple pull avec un jean.

- Fais chier, fais chier, fais chier... Non, pourquoi... Non...

Je fermai les yeux un instants, alors que mon corps chauffait de toute part.

- Tren, soufflai-je.

- C'est pas possible... Non, c'est trop tôt !

Il continuait à marmonner dans sa barbe et j'ouvris les yeux pour le voir faire les cent pas devant moi, comme s'il paniquait. Je ne l'avais jamais vu dans cet état. Ça devait être vraiment terrible pour qu'il réagisse de cette façon. Je pliai mes doigts et je grinçai des dents en sentant ma main gauche faire des siennes. Je tournai la tête pour regarder ce qu'il m'arrivait et je me figeai, avant de sentir la peur et la panique monter en moi.

Je n'avais plus de main.

Non. Au lieu de ça, j'avais... j'avais une patte. Des poils de couleurs brunes et des griffes avaient pris place. Ma respiration s'accéléra alors que mon coeur s'emballait plus qu'il ne l'était déjà et je sentis des mains se poser sur mes épaules.

- Du calme, Flo. Ça va aller !

Ma voix se coinça dans ma gorge, alors que je tentais de bouger ma main, mais au lieu de ça, mes griffes arrachèrent les draps qui se trouvaient sous ma patte.

- Tu te transformes, Flo'. Il faut que tu te calmes, sinon, ça ne fera qu'empirer !

Transformer ? Ce n'était pas possible ! Les transformations devaient se faire en présence d'un Alpha, sous peine d'y passer si la douleur devenait insoutenable. Je comprenais mieux pourquoi il était dans cet état, maintenant.

Nous étions en fuite.

On fuyait mon âme soeur.

Un Alpha.

Ce dont j'avais besoin en ce moment même.

- Tren !

- Ça va aller, Flo'. Je vais trouver une solution ! Il faut juste qu'on se dépêche d'aller à la base et ils sauront quoi faire.

Je secouai la tête faiblement.

- Je tiendrai pas... Tren... Ça fait tellement... mal !

- Je peux peut-être utiliser un sort de guérison pour atténuer la douleur...

Il s'était agenouillé à ma hauteur, passant sa main sur mon front pour écarter des mèches de cheveux qui étaient tombées devant mes yeux.

- T'as déjà... essayé...

Le moment de répit qui m'était accordé était un cadeau. Si j'avais tant souffert pour que seule ma main ne se transforme, j'avais une promesse de souffrance pour le reste de mon corps.

- Tu sais que rien ne peut... soulager une transformation...

- À part un Alpha, me coupa-t-il. Je sais. Je connais mes cours comme tu connais les tiens. Mais il doit forcément exister un autre moyen de t'aider !

Je savais qu'il avait tort et lui aussi. Dans les cours que j'avais eus, il était dit que toute transformation se faisait accompagner d'un Alpha, afin qu'il puisse soulager la douleur du nouveau venu. Sans lui, il était condamné à mort, tué par la douleur des évolutions de son corps. C'était dans l'instinct d'un nouveau loup que d'écouter son Alpha. C'est pour cela qu'il fallait sa présence. Le leader était le seul à pouvoir le contrôler dans cet état de délire.

- Je vais trouver. Essaye de te reposer un peu. Ça fait près de 12 heures que tu es dans cet état.

Comment voulait-il que je me repose ? Tout était tellement insoutenable que je n'avais qu'une envie, c'était hurler comme si un mort se trouvait devant moi, jusqu'à m'en arracher les cordes vocales.

Mais il me fallait un peu de retenu tout de même.

Je fermai les yeux, en tentant au maximum de ne pas penser au visage de cet homme qui venait me hanter. Je ne l'avais vu que quelques instants, mais c'était comme si mon cerveau avait imprimé son image.

Si seulement tous mes cours avaient été retenus de la même façon.

Ce n'était pas le moment de penser à ce genre de chose, alors que j'étais sûrement proche de la mort.

Je somnolais légèrement, complètement immobile à cause de tout ce que je ressentais bouillonner dans mon corps. C'était comme être assommée par des tas de briques, et que celles-ci vous recouvrait tellement, qu'il vous était inutile de vous débattre pour vous y dégager.

- Tiens bon, Flolène.

Ma patte gauche était lourde et mon corps avait hâte que cette transformation se termine. Mais sans un Alpha, elle allait se dérouler lentement, pour faire durer la souffrance.

Bon Dieu, quelle souffrance d'être un loup garou.

Surtout une hybride.

Le processus était censé être plus douloureux pour nous. Vu que nous n'étions que la moitié d'un loup garou

Comme s'il s'agissait d'une punition.

Mais j'avais déjà cette malédiction qui pesait sur moi et pourtant, ça ne semblait pas assez.

- Je vais nous faire sortir de la ville. Tu devrais te sentir mieux de te rapprocher d'une forêt.

Par je ne sais quelle manière, il finit par me déposer sur la banquette arrière d'une voiture, cachant ma patte par une couverture et je l'entendis fermer la portière avant d'aller s'installer à la place du chauffeur.

Il avait raison. Plus il roulait et plus mon corps semblait se détendre, alors que j'osais enfin ouvrir un oeil, sortant de ma léthargie pour jeter un coup d'oeil par la fenêtre.

La forêt.

Les battements de mon coeur ralentirent, alors que je sentais une envie profonde d'être entourée de verdure, de sentir l'air pur.

De gambader.

Cette idée me surprit, alors que je me redressais un peu, sentant les brûlures dans mon corps diminuer. Ma patte gauche commençait à s'agiter, comme excitée à l'idée de pouvoir bouger.

- Tren...

- Flo ?! T'es réveillée ? Tu te sens comment ?

Il n'avait pas quitté la route du regard, pour éviter tout accident du même genre que la dernière fois.

- Mieux.

- C'est peut-être mauvais signe, marmonna-t-il.

Je regardai par le fenêtre, en retenant autant que possible mon envie d'ouvrir la portière pour aller directement dans la forêt. Je savais que les loups avaient des instincts primitifs à assouvir, mais je n'aurais jamais crû qu'il était si difficile de se contrôler.

De contrôler sa partie animale.

Tren s'arrêta sur un sentier de terre, incantant quelque chose, alors que mes pieds tapaient frénétiquement sur le plancher de la voiture, pressés de pouvoir fouler ses terres.

- Tren, gémis-je. J'peux plus tenir... Je dois sortir !

Il m'ouvrit la portière et mon corps se mouva de lui-même, posant mes pieds à terre, alors que je sentais mon coeur prendre de la vitesse. À peine quelques pas plus tard, je sentis mon corps se tendre, alors qu'un éclair de douleur venait traverser ma jambe droite, me faisant trébucher, lâchant un cri malencontreusement.

Cri qui fit écho dans les environs.

- Flo' !!

Tren se mit à ma hauteur, alors que j'étais à quatre pattes sur le sol, en gémissant, alors que ma jambe m'élançait.

- Flo' ! On va rentrer ! Ce sera mieux que de rester ici !

Il n'eut pas le temps de faire quoi que ce soit, qu'un hurlement retentit dans la forêt, me faisant frissonner et m'empêchant de bouger. Mon corps refusait de faire le moindre mouvement, face à cet appel.

Du soulagement, de la peur, de la fureur.

- Pxtain ! Je croyais les avoir semés ! Saloperie !

Les mains de Tren se posèrent sur mon corps et il tenta de me soulever, mais mon enveloppe charnelle refusait de répondre à mes mouvements et ne voulait pas se laisser faire par Tren qui voulait seulement qu'on s'en aille.

- Flo' ! Qu'est-ce que tu fous ?!

- C'est pas moi !... C'est mon corps... Il veut pas bouger !

Des hurlements différents se firent entendre, alors que mon corps voulait leur répondre, avec cette envie urgente de hurler à mon tour, mais je gardai ma bouche fermée, grinçant des dents, et sentant la douleur dans ma gorge, tellement mon instinct souhaitait faire signe à ces loups.

- C'était une mauvaise idée, marmonna Tren en cherchant comment nous sortir de là.

N'en pouvant plus, un long gémissement m'échappa, alors que je sentais ma jambe droite brûler. J'avais la même sensation que celle que j'avais ressentie lorsque ma main était devenue une patte. C'était désagréable, mais libérateur.

Alors quand j'entendis un bruit de déchirement, accompagné de craquement, je compris que ma jambe venait de se changer en patte de loup.

Comme précédemment, le soulagement vint vite après la transformation de ce membre, et je me laissai tomber par terre, en soufflant, mon corps tremblant encore sous tout ce qu'il venait de se passer.

Tren profita de ce moment de relâchement pour me soulever dans ses bras, mais il était trop tard, les bruits de pattes et les grognements incessants se faisaient déjà entendre, et lorsque je sentis le sablier dans ma main encore humaine, je compris pourquoi mon corps ne voulait pas s'enfuir.

Il était là.

Et aussi beau qu'il l'était la première fois que je l'avais vu, ce loup me fixait, tout en montrant les crocs à Tren. A côté de lui, se trouvait un loup légèrement plus petit. Et sur le dos de ce dernier, était assis un être humain.

Humain que j'avais aussitôt reconnu.

- Traître, siffla Tren en l'apercevant.

- Tren !! Flolène !! Vous étiez là ! Vous allez bien ?!

Il était descendu du dos du loup qui l'avait transporté et il avait fait un pas vers nous, mais Tren avait reculé, faisant grogner l'Alpha qui se tenait toujours sur ses gardes.

- Qu'est-ce que tu fous avec eux ?! cracha mon gardien en me serrant contre lui.

- Je vous cherchais ! Et je suis tombé sur eux. Ils m'ont demandé de les aider à retrouver quelqu'un alors j'en ai profité pour fouiller les environs tout en les aidant ! Mais... je pensais pas que c'était vous qu'ils recherchaient...

Si Tren avait pu, j'aurais juré qu'il se serait frappé le front avec sa main.

Mais pour l'heure, tout ce que je voulais, c'était aller me blottir contre ce loup imposant qui ne m'avait pas quitté du regard. Et puis sans prévenir, d'autres loups apparurent, alors que le plus imposant faisait craquer ses os.

Pour le laisser apparaitre nu devant moi.

Encore une fois.

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Hey !!!

Merci pour tous vos votes et commentaires concernant cette histoire ! Ca me fait super plaisir ! Et du coup, j'ai fais aussi vite que j'ai pu pour vous écrire ce chapitre ! :)

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Le 14 novembre 2016

°revu le 3.06.2017°
© Cette histoire m'appartient. Pour tout plagiat, merci de me prévenir. ©

Edit le 30.09.2019 à 12:43

Lil