6・Essoufflement Moral

Pendant qu'un grand nombre de personnes aux alentours s'affolait après avoir entendu l'explosion et vu les vitres voler en éclats, comme une pluie scintillante, Connor et moi étions allongés sur le ventre, sur des tuiles qui auraient bien besoin d'un rafraîchissement, son apparence noircie colorait nos mains qui s'y appuyait.

Je me mis à sourire toute seule comme une idiote en me rendant compte qu'à ce moment précis, on ressemblait fortement à Ladybug et chat noir.

Surtout que Connor était blond, et moi j'avais les cheveux noirs, bon, Ladybug n'avait pas de mèches de couleur blanches sur le dessous et n'était pas non plus asiatique.

J'étais une version plus...sombrement stylée.

Des fois je ne me comprenais pas moi-même, j'étais du genre à penser à beaucoup de choses en même temps et me laissait peu de répit, mais je trouvais le moyen d'être détendue actuellement, l'habitude sûrement.

Soudain, je me relevai en vitesse et courut de l'autre côté du toit, à l'arrière du bâtiment, et me rendis compte qu'il y avait une porte arrière de la pharmacie à présent grande ouverte.

Malheureusement, la nuit tombait déjà, et je ne savais pas depuis combien de temps ils étaient sortis, ni s'ils avaient intelligemment sauvé Zach, afin qu'il leur donne une description plus précise de ce qu'il avait vu.
Avec un peu de chance, ils comprendront qu'ils s'en prennent au serpent et à sa clique et ne viendront pas chercher les embrouilles, surtout si c'est pour une voiture qu'on a rendue, ainsi que les potes de Zach, qui sont d'ailleurs bien vivants.

Comment tu veux passer des marchés avec des gens pas dignes de parole. Bienvenue dans ce monde.

Zach, je peux te jurer que si tu es encore en vie tu n'en as plus pour longtemps mon vieux.

Même si je savais bien qu'il y avait une chance sur deux qu'il ne respecte pas sa promesse.

– Connor ! m'écriai-je parmi les sirènes des voitures de polices et des ambulances qui approchaient, regarde s'il y a encore les mecs dans la BM !

Je le vis qui fixa la voiture d'un regard analytique, avant de me montrer son pouce en l'air. Je lui répondis en lui faisant signe qu'on s'en allait.

Nous nous mirent à sauter de toits en toits, nous éloignant de cette rafale de bruits qui traduisait la panique qu'avait produit la grenade.

Eh bien, qu'est-ce que ce serait avec la plus puissante grenade de Jake ?

Bien que les rues étaient quasiment désertes, il fallait prendre garde à ne pas être aperçus par les personnes curieuses qui ouvraient leurs fenêtres pour savoir d'où tout ce raffut provenait.

Oh, on se croirait à la place du Chat Potté.

Rhéa imbécile ce n'est pas le moment.

On accélérait l'allure, et le vent me giflait le visage, Connor sur les talons, une échelle à grimper par ici, un saut de trois mètres par-là, un toit plat suivi d'un toit monopente.

Parmi nos essoufflements, je l'entendais soudain glisser, et me retourna presque immédiatement, il se retrouva accroché par la force d'une seule main à la dernière tuile, la peur glissant dans ses pupilles. Je me baissai rapidement mais sûrement, et attrapa sa main afin de le tirer sur le toit de toutes mes forces, tant bien que mal.

Nous nous assîmes sur la partie la plus haute de la toiture sans mot, et prîmes notre souffle en regardant aux alentours si nous avions été aperçus ou suivis. Il n'y avait qu'un papi qui promenait son bichon maltais tout en douceur, et avait le regard rivé sur celui-ci.

Seigneur.

??? : Oui ?

Sa voix qui résonnait dans ma tête sans crier gare me soutira un haut le cœur. Pourquoi diable était-je dotée d'une telle capacité ? Et pourquoi avec une seule personne en particulier ? C'était tout bonnement insensé et inhumain. Mais lui avait l'air d'un gamin heureux qui jouait avec son nouveau jouet dernier cri.

Je ne voulais pas paraître paniquée alors que lui avait l'air indifférent.

Oh tiens, l'imbécile d'homme, maintenant que t'es là explique moi ce que tu entendais par "failles de mon esprit".

Son rire s'éleva dans ma tête, et qui malheureusement, était loin d'être désagréable.

??? : Je pense que la méditation te ferait un grand bien, si tu as autant l'esprit embrouillé par pleins de sujets à la fois, ça te crée des failles.

De la méditation ?

??? : Tu vois, le genre de truc qui permet d'éloigner des pensées meurtrières par exemple.

Ahah, t'en fais toi, de la méditation ?

??? : Il faut croire que moi j'arrive à gérer comme un roi naturellement.

Et quel est ton secret, roi ?

??? : Je suis simplement toujours détendu. Je ne sais pas si c'est une bonne chose dans certaines situations, mais je suis un roi qui gère. Le roi du stoïcisme quand je m'y mets.

– Cheffe... Rhéa ? Eh.

Connor me tira de ma transe pensive en m'ébouriffant les cheveux, un gamin qui se le permettait, on aura tout vu. Il me fixait sérieusement de ses sourcils froncés, ayant presque l'air qu'il allait me remonter les bretelles.

Mais c'était loin d'être son genre.

– Tu sais que... Enfin... Hum, se racla-t-il la gorge, maladroit et non habitué à parler sérieusement, je sais que t'es la cheffe et qu'enfin, c'est normal que tu doives penser à beaucoup de choses mais euh, tu sais tout Phoenix sont tes piliers.

Je détournai le regard, attirée par le coucher de soleil qui se tenait en face de nous. Je mesurai sérieusement sa phrase et débuta un labyrinthe de réflexions silencieuses.

Puis je clignai des yeux, comme pour conclure mon cheminement. Un tic, j'imagine.

Je me demandais pourquoi il me disait ça d'un coup, peut-être était-ce dû au fait que j'étais sans arrêt perdue dans mes pensées.

Et je parle à la fois de l'inconnu et de mes réflexions.

Je n'avais quasiment aucun temps de pause, soit je réfléchissais aux affaires de Phoenix, à quoi faire, comment ; soit c'était cette télépathie qui me trifouillait l'esprit. Mais bon, j'étais assez habituée.

– T'es gentil Connor, dis-je simplement.

Je savais bien que ma réponse n'était pas suffisante, d'ailleurs, je crus l'entendre soupirer légèrement.

Cela avait plus l'air d'un soupir d'impuissance que d'exaspération. J'espérais juste qu'il n'allait pas parler de ses craintes à Ivy, c'était la première à vous mettre le grappin dessus pour soulager le moindre de vos problèmes.

Dit comme ça, on aurait vraiment dit que ce n'était pas des piliers, mais des poids, pourtant ce n'est pas le cas, et je refuse de leur en mettre un des miens sur le dos. Je dois bien avouer qu'ils m'ont souvent fait le reproche de garder les choses pour moi.

Je comprenais le fait que ce soit frustrant comparé à eux qui se confiaient à moi. Mais j'étais sûre et certaine que j'allais pouvoir gérer, même sans la méditation, j'avais réussi à survivre jusqu'ici, après tout. Oui, je connaissais le stoïcisme, mais seulement à l'extérieur.

– Ivy à raison, demain après les cours on viendra te chercher en moto pour aller à la plage.

J'esquissais un sourire.

Parfois, je me sentais coupable du fait d'entraîner Connor dans ces affaires de gang.

C'est vrai quoi, c'est comme si j'avais accéléré le processus de maturité d'un coup.

Il était le plus innocent d'entre nous, et au début, je me souviens que cela a été très difficile pour lui, plus que quiconque, il faut dire que le début de nos activités était seulement d'ordre meurtrier.

On nous engageait comme mercenaires, mon surnom de serpent trouvait d'ailleurs ses origines ici, dans notre période de tueurs à gages.

C'était une triste période pour Connor, qui en a vomi des semaines et des semaines, mais a refusé de nous quitter, et j'en suis bien heureuse aujourd'hui.

Il a surmonté sa peur de la mort, du sang et de la torture en blaguant sur ces sujets, petit à petit et à son rythme.

En tout cas, je l'admets. J'étais bien entourée. Et j'étais fière de l'admettre.

Je pense pouvoir dire sans difficulté que cette bande de crétins représentait ma vie entière, mon réconfort, mes craintes, mes joies et ma famille. Même en sachant, évidemment, que je n'avais besoin de personne.

Mais bon, je pouvais bien leur faire un peu de place dans mon cœur.

Mon portable vibra dans mon soutif, vive les jupes sans poches.

– Oui ?

– C'est Jake. Ivy vous a envoyé une tonne de messages, raconte, m'intima-t-il.

Pendant que je lui faisais le débrief, le soleil disparaissait peu à peu derrière les bâtiments, tandis que le vieil homme promenait toujours son chien, un sourire aux lèvres. Qu'est-ce qu'il pouvait avancer lentement, lui, il serait déjà mort en combat singulier.

– Je vais te laisser je dois aller voir Cassandra....Dit, Jaky. Il faudra qu'on parle.

– Ok, Liam a fait une tartiflette comme tu les aimes, dit-il non sans transparaître une pointe de surprise.

– Je passerai, répondis-je avant de raccrocher.

Vivement que je goûte à cette tartiflette qui me permettra de m'apaiser comme jamais.

– Bon, j'y vais, fais attention à toi concon, lançai-je, anxieuse à l'idée de parler sérieusement avec Cassy, mais je m'y attendais.

Elle n'avait jamais été du genre à laisser passer des choses qui ne lui plaisaient pas, et était aussi têtue que moi quand elle s'y mettait.

C'est ainsi que je laissais Connor derrière moi et repris ma course maîtrisée sur les toits du quartier désert, en étant totalement en confiance. Flash McQueen c'était moi à cet instant précis.

Oui, moi aussi je me demande comment je peux avoir le temps de regarder ce genre de choses. Mais Phoenix prend très à cœur le fait de garder du temps pour soi et de se retrouver, la dernière fois on s'était retrouvés devant un marathon Disney.

Cette ville ou j'habitais, je la connaissais par cœur.
C'était une ville avec en son centre un bon nombre de buildings plus hauts les uns que les autres. Même si maintenant je me tenais à l'écart.

Mon premier but, en fuyant ma famille, enfin ma "famille", avait été de survivre, j'ai donc voulu infiltrer un building, pour trouver du travail.

L'infiltration était une chose que j'avais toujours pratiquée, c'était ma carte maîtresse, celle en qui j'avais placé ma survie.

Puis je me suis faite connaître par les encageurs de mercenaires comme cela, j'étais passée dans un journal pas très connu, mais cela a suffi pour me permettre d'associer à la fois ma capacité d'infiltration, et celle que j'allais débloquer : la vitesse, l'endurance, la force, l'aïkido, le maniement des armes.

Merci à toi, sale famille de merde, de m'avoir forgée.

Pendant que mon passé refaisait surface, une chose m'arrêtait brusquement dans mon élan solitaire.

La nuit était dominante, et la lune me permettait tout juste de distinguer une forme humaine en contrebas, qui s'avançait doucement, un pied après l'autre, venant d'en face, et armé d'un fusil.

Dans ce calme à la fois apaisant et terrifiant, je me senti pétrifiée.

Il me regardait.

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