Peur, pour @Fuyez_y_a_une_folle2
Est-ce que j'aurais pu changer la donne ? Est-ce que j'aurais pu l'aider ? La soulager ? La retenir ?
Je me souviens de ce terrible moment. Quand elle... quand elle avait décidé de faire cesser sa souffrance.
Cette phrase, qu'elle m'avait dite... La pensait-elle vraiment ? Était-ce ma faute ? Même en partie ma faute ?
Je fermai les yeux, tentant de contenir mes larmes. Elle m'avait planté comme ça, plein de doutes, de peurs, de regrets. Maintenant, je sais que je vivrais à jamais avec ce sentiment de me dire que si elle n'était plus là, c'était peut être ma faute.
Rien de mieux pour un garçon tel que moi, que de détruire sa petite amie.
« Il aurait suffi que tu te lèves pour me prendre la main... ». Elle avait sans doute raison. J'avais eu trop peur, je n'avais pas osé réagir, et...
Je m'appelle Jules. Je suis en seconde, et j'étais, en secret, le petit ami de la plus merveilleuse fille du monde, Anna.
Il y avait un problème, dans notre relation. Je ne voulais pas qu'on le sache. Pourquoi ? Parce qu'Anna était la cible d'harcèlement. Et que le harceleur était mon frère, Victor. Et j'avais peur de Victor. Je savais qu'à la maison, quand il n'y avait pas nos parents, il n'hésitait pas à me faire mal. Vraiment mal. Alors être le petit ami de sa cible ? J'aurais signé mon arrêt de mort.
Mais j'aimais Anna, de tout mon cœur, et je tenais à sortir avec elle. Alors, on a fait ça en secret. Au début, ça allait. Quand on se voyait, on sentait le goût de l'interdit, c'était grisant. On riait du danger qu'on nous voit ensemble.
Mais mon frère a continué à la harcelé. Beaucoup. Et moi, de loin, je le regardai faire. Je croisais le regard douloureux d'Anna, mais je n'osais rien faire.
Anna a commencé à aller mal. Elle me suppliait, quand on se voyait, de faire quelque chose, la prochaine fois.
Elle ne se rendait pas compte, je crois, à quel point j'avais les points liés.
Ma famille, c'était l'enfer. Ma mère avait divorcé avec mon père quand j'avais neuf ans, et nous avait laissé, Victor et moi, sur le dos de Papa. Celui-ci nous considérait comme des fardeaux, dont un homme ne devrait pas à avoir à s'occuper tout seul, et qui plus est le souvenir d'une femme qui avait osé le quitter. En plus, un jour, il avait trouvé une nouvelle femme, mais celle-ci l'avait quitté quand elle avait appris qu'il avait des enfants.
Du coup, il s'était mis à nous détester encore plus. Il nous frappait, il nous battait, Victor et moi. Rapidement, Victor, plus vieux que moi, s'était endurci et avait appris à se défendre. Il contrait les coups de Papa, et il a gagné son respect. Du coup, Papa s'est remis à le considérer comme son fils, et à l'aimer, plus ou moins. Moi, c'était pire, à présent. La force de la colère de Papa n'était plus partagée avec Victor. Elle s'abattait complètement sur moi. Une fois, Papa m'avait volontairement cassé le bras. Après ça, Victor a commencé à me défendre. Mais c'était lui qui se permettait de me frapper, alors.
Pour moi, mieux valait Victor, qui me laissait tranquille si je n'avais rien fait.
Mais si je me mettais Victor à dos, j'allais être frapper à la fois par mon père et par lui.
Je n'avais pas parlé de tout ça à Anna, évidemment. Je ne voulais pas de sa pitié, ni de son aide.
Alors j'ai continué à laisser Victor lui faire du mal, en la voyant chaque jour craquer un peu plus.
Jusqu'au jour où s'est allé trop loin. Victor avait frappé Anna, parce qu'il la trouvait trop petite, trop moche, trop intelligente... Qu'en sais-je ? Je ne m'en mêlais pas.
Un pluie d'insulte s'était abattue sur elle, et moi, con que j'étais, je les avais regardé faire.
À la sortie du lycée, elle était partie en trombe. Je l'avais poursuivie jusqu'à un pont...
Elle était appuyée sur la rambarde, elle pleurait, elle semblait si mal...
J'étais arrivé, j'avais tenté de la réconforter, mais elle ne me répondait pas. Au bout d'un moment, elle se redressait s'est assise sur la barrière, les jambes dans le vide, et elle m'a regardé, de ses yeux pleins de larmes.
Moi, j'avais peur. J'avais peur de Victor, peur de me peur, peur de ce que ça pouvait causer chez Anna. Peur de ce qu'elle pourrait faire.
Elle m'a regardé dans les yeux, a esquissé un sourire amer, et m'a dit d'une voix emplie de toute la rancœur et toute la tristesse du monde : « Il aurait suffi que tu te lèves pour me prendre la main ; alors seulement j'aurais pu y arriver ». Ce fut sa dernière phrase. Elle se laissa tomber dans le vide.
Sans doute a-t-elle raison. Tout est de ma faute, elle est morte à cause de moi.
Et maintenant, j'hésite... Me pardonnera-t-elle si je la rejoins ?
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