Chapitre 4 - Rêve olympique et première médaille d'or (Léon)
— « Allons enfants de la patrie, le jour de gloire est arrivé... Marchand, Marchand, qu'un sang impur, abreuve nos sillons... »
La Marseillaise résonne dans l'Arena, entonnée par les quinze mille spectateurs réunis. Les télévisions du monde entier sont braquées sur moi, je ne réalise pas encore ce que cela signifie. Quand ma main a touché le mur d'arrivée dans le bassin, que le son a vibré contre mon oreille, que mon coach est venu me frapper le dos et me serrer dans ses bras, que mes parents et mon frère m'ont à moitié assommé dans leur étreinte, en répétant combien ils étaient fiers de moi, je ressentais tellement d'émotions, tellement de plaisir mêlé, que je ne savais plus où j'étais.
Sans doute dans un autre monde, un autre univers.
Je touche mon rêve du doigt, ce pour quoi j'ai travaillé ces dernières années.
Ce n'est que le début, rien n'est fini, j'ai d'autres courses à mener, mais celle-ci à un goût particulier. Gagner une compétition est une chose incroyable. Gagner une médaille d'or, ici, à Paris, dans mon pays, a une saveur extraordinaire.
Je porte ma main autour de mon cou et me saisit de la médaille d'or que l'on m'a remis, la première d'une série que j'espère longue.
— Félicitations, M. Marchand !
— LÉOOOOOOOOOOOOOOOOON ! scande la foule.
— You were amazing ! me félicite mon entraîneur.
— Léon ! Léon ! hurle mon petit frère, ma tête en carton toujours dans ses mains.
— M. Marchand, nous accorderiez-vous une interview ?
Je lance un regard du côté de Bob qui opine et quitte le podium, sous les acclamations du public, pour rejoindre les deux journalistes. Ils opèrent tous les deux pour France Télévision et veulent savoir comment je me sens. Durant quelques minutes, je tente de répondre du mieux possible, pesant mes mots, car je sais combien le moindre faux pas peut ruiner une carrière, avant même qu'elle ne commence. Heureusement, ils n'ont que des compliments à la bouche. Je finis par les remercier et m'éloigne, j'ai envie de prendre une douche – oui, je sors de l'eau, je sais, mais j'ai besoin de faire redescendre la pression - et d'aller manger quelque chose. Je rejoins la call room sous une dernière ovation, ma médaille d'or toujours pendue autour du cou. Elle pèse lourd, mais je ne l'enlèverai pour rien au monde.
En entrant dans la zone d'attente, je croise mon regard dans un miroir et vois la fierté inscrite sur mon visage. Je lève ma médaille et l'embrasse, l'or brille et se reflète dans mes iris. Je me précipite sous la douche, toujours sans ôter cette médaille et profite de l'eau chaude sur mon corps nu durant de longues minutes. La course ne cesse de repasser en boucle dans mon esprit, j'ai du mal à faire redescendre l'adrénaline tant je me sens galvanisé.
Une chose est sure : je ne vais pas parvenir à trouver le sommeil.
Quand je sors de la douche, une serviette m'attend sur un banc, ainsi que des vêtements propres. D'abord étonné, je décide de ne pas me poser de question et m'enroule dedans. Elle est douce et chaude, je la noue autour de ma taille. Mes cheveux dégoulinent sur mon visage, répandant des gouttelettes sur le sol. Je retire ma serviette pour m'habiller, quand soudain...
— PARDON !
La fille aux yeux océans est devant moi.
Figée.
Son visage se colore de rouge, parant ses iris Atlantique d'une douce lueur orangée, alors qu'elle plonge tête la première, le nez vers ses baskets, et que je me détourne, lui offrant une vue plongeante sur mon postérieur.
Et merde !
Je rattrape rapidement la serviette alors qu'elle s'enfuit en courant.
Quel idiot ! Quel idiot !
Il est évident que des bénévoles sont présents ici, et qu'ils peuvent nous tomber dessus n'importe quand. En général, cela ne me gêne pas, je vois couramment d'autres sportifs à moitié à poils dans les vestiaires. On s'habitue à la nudité après les entraînements, ce n'est qu'une simple formalité. On est tous venu au monde en tenu d'Adam, il n'y a pas de quoi en faire tout un plat. Le problème, là, c'est que ce n'est pas juste une bénévole parmi tant d'autres.
C'est celle qui m'a offert à boire. La jolie fille aux yeux bleus qui semble avoir à peu près le même âge que moi et qui vient de s'enfuir parce que...
Parce que quoi ?
Décidant d'en avoir le cœur net, j'enfile rapidement les vêtements préparés sur le banc et la suis. Lorsque j'émerge de la call room, je tombe sur le staff en plein préparatif de la collation servie après la compétition. Au loin, Bob me fait signe, des journalistes m'appellent, d'autres sportifs aussi, mais je n'ai d'yeux que pour l'environnement qui m'entoure, cherchant et recherchant Miss-Océan.
Je manque de bousculer plusieurs personnes en me pressant au milieu des uns et des autres. Je réponds par des sourires polis à quelques sollicitations, esquive mon père qui se précipite pour un nouveau câlin de fierté, et arrive près du buffet. Je la recherche encore, sans la trouver nulle part, et finis par pousser un soupir de dépit avant de me reporter sur la nourriture.
— Je vous sers quelque chose ?
Mon regard rencontre celui d'une jeune femme à la peau noire et aux cheveux crépus. Son prénom « Olivia » est épinglé sur son t-shirt estampillé des anneaux olympiques et du bonnet phrygien, mascotte des JO 2024.
— Un perrier, s'il vous plaît.
J'aime les bulles, et comme il est exclu que je prenne du champagne – l'alcool est à éviter durant les compétitions -, j'en consomme de façon abusive. Olivia me tend mon verre et je la remercie d'un mouvement de tête, puis me saisit d'un petit four et d'une madeleine. Bob ne va pas aimer que je mélange le sucré et le salé, mais qu'importe ! Ce n'est qu'un petit encas. En me penchant pour reprendre un autre met, j'ai soudain une idée de génie :
— Dites, vous n'avez pas vu une fille avec une queue de cheval ? Et le même t-shirt que vous ?
Olivia fronce les sourcils, puis jette un œil dans la pièce.
— Il y en a beaucoup ici, avec des queues de cheval et un t-shirt de bénévole.
— Elle avait des yeux bleus, comme l'océan.
Je suis un cliché ambulant.
Un sourire s'inscrit sur le visage d'Olivia.
— Vous voulez parler d'Apolline ?
Apolline. J'aime bien ce prénom.
— Je ne sais pas. Est-ce qu'elle distribuait de l'eau avant la compétition ?
Olivia hoche la tête.
Alors, c'est elle.
— Vous savez où elle est ?
— Elle vient juste de partir, elle devait accompagner son père sur une autre compétition.
Flûte.
— Elle sera sûrement là demain.
Ah.
— Vous voulez que je lui demande quelque chose ?
— Non, ça ira. Remerciez là juste pour... eh bien... l'eau.
Et excusez-moi de m'être retrouvé à moitié nu (enfin, en entier) devant elle.
— Bonne soirée.
Je me détourne du buffet. De toute façon, mon frère m'appelle. Je dois encore répondre aux questions des journalistes et ensuite rentrer au village olympique pour me reposer. Il sera toujours temps de m'excuser plus tard, et de retrouver Apolline-Océan.
Pour l'heure, je dois penser à mes prochains objectifs.
Le 200m papillon et 200m nage, dans quelques jours.
Je compte bien toutes les remporter.
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