Chapitre huit

J'ai réussi à tenir. C'est seulement un jour, mais ça a été épouvantable entre mon père et moi. J'avais cette impression qu'il était encore prêt à me bondir dessus au moindre faux pas que je ferais. En raccourci, j'ai vraiment passé un week-end de merde. Je ne me suis pas du tout reposé et je reviens avec des blessures. Que dire de plus...

Je suis dans mon appartement, à Paris, tranquillement allongé dans mon clip clap. Je regarde le plafond et je ne sais pas quoi faire. J'ai envoyé deux messages à Jawad en début de soirée pour savoir quand il rentrait, mais il ne m'a toujours pas répondu. Faut dire, que depuis je côtoie Arthur, il s'éloigne de moi et je n'aime pas ça. Je ne comprends même pas sa réaction, sachant qu'Arthur est hétéro'.

Je pousse un autre soupire, qui rejoint la petite dizaine en moins d'une minute. Je me sens vide, et c'est pire que lorsque que je suis triste, car quand je suis vide, je ne ressens et ne suis plus rien. En fait, sans Jawad, je ne suis pas grand chose. C'est sûrement bête, mais il me manque. Ma sonnerie de téléphone me coupe dans mes pensées. Je tends mon bras vers l'appareil et décroche sans prendre la peine de regarder de qui il s'agit.

"Allo ?"

"Kian ?"

"Arthur ?"

Je l'entends glousser à l'autre bout de l'appareil et je ne peux m'en empêcher tant la situation est ridicule.

"Comment ça va ?" me demande-t-il joyeusement, un peu trop d'ailleurs.

"Ça va," je mens "et toi ?"

"Nikel, je m'éclate comme un fou !"

"Euh, t'es sûr que ça va Arthur ? Tu téléphonais pour quoi ?"

"J'ai jamais été aussi bien, ne t'en fais pas. Je ne sais pas, je voulais te voir, mais bon je t'entends, c'est déjà ça." pouffe-t-il.

"Ok." je rigole, amusé du fait qu'il est un peu abusé sur la consommation d'alcool. "Tu es où là ?"

"Enfaite, je suis dans ta rue, je crois. Je me suis dis ; tiens ça fait longtemps que j'ai pas vu Kian, une petite visite serait de bon augure."

Et c'est à mon tour de pouffer car ce qu'il vient de dire n'a aucun sens.

Pendant qu'il continue de me raconter  des âneries sans queue ni tête et qui me font toutes plus rire les unes que les autres, j'enfile un léger sweat et des chaussures puis descends de mon appartement.

Et, effectivement, lorsque je me retrouve dans la rue, j'aperçois un grand brun qui passe d'un pied à l'autre, ce qui me fait sourire. Il a beau être grand et imposant, on dirait un petit enfant. Je m'approche doucement vers lui, son dos me faisant face et pose mes mains sur ses yeux pour m'amuser un peu. Arthur se retourne aussitôt, une secousse ayant parcouru son corps robuste, et me sourit.

- Tu m'as fais peur, déclare-t-il, en rangeant son téléphone dans sa poche.

- Oups, pas fait exprès. dis-je avec un sourire qui prouve bien le contraire.

Il secoue la tête, avec un sourire, puis se met à marcher alors je me positionne à côté de lui et fais de même.

- Dis-moi, tu n'aurais pas un peu trop bu ? je questionne, d'un ton léger.

- Non, enfin un peu, mais pas trop quand même. répond t-il, un peu confus.

- Je vois, je rigole.

- Merci d'être venu, c'est sympas. confie-t-il, en prenant un air plus sérieux.

- C'est pas comme si un abruti qui a la gueule de bois m'attendait en bas de chez moi, je me moque.

- Eh ! s'exclame-t-il, en me donnant un coup de coude. T'es pas sympas en fait ! sourit-il.

- Je n'ai jamais prétendu l'être.

- Pas de phrase philosophique pour ce soir, merci.

- T'es pas possible, je soupire, en fourrant mes mains dans mes poches de sweat.

- Tu as quoi à la pommette droite ?

Je me raidis immédiatement. C'est vrai que c'est un peu enflé. En même tant, ce n'était qu'hier.

- C'est rien, je me suis pris une porte.

- Une porte ? s'exclaffe-t-il. Dis-moi un mur tant que t'y es ! Tu crois vraiment que je vais croire à ça ?

- Je sais pas, peut-être. penché-je la tête sur le côté.

- Tu sais si tu as des problèmes, tu peux m'en parler. déclare-t-il gentiment.

- Merci, mais tout va bien.

- Il me semble t'avoir déjà dis que tu étais un très mauvais menteur.

Il me lance un coup de coude que je lui rends puis je soupire avant de parler.

- Ne te méprends pas, mais ce ne sont pas tes affaires. Je pense que tu as assez avec tes problèmes. Et puis qu'est-ce ça peut te faire au fond ? On se connaît que depuis quelques semaines et par une mauvaise manière.

J'accélère ma cadence mais m'arrête lorsque je remarque qu'Arthur ne me suit plus et s'est arrêté.

- C'est vraiment ce que tu penses ? demande-t-il, d'un air peiné.

- Écoute Arthur, tu as vu d'où je viens, tu aurais mieux fait de me laisser là où j'étais sans m'aider.

- Alors ça, non ! fronce-t-il les sourcils, en s'avançant vers moi.

Il me saisit par le poignet et nous engouffre dans une petite rue qui finit en cul de sac. Je me retrouve contre un mur tandis qu'Arthur est en face de moi, à moins d'un mètre. Il est si près de moi que je peux sentir son parfum sucré et fruité.

- Ne pense jamais ça.

- De tout façon on pourra jamais être ami ni même des connaissances.

- Pourquoi tu dis ça ? Je ne vois pas où est le problème.

- Ton monde, mon monde, Étienne, ça ne fonctionne pas, tu vois bien.

- Je ne vois pas pourquoi tu fais compliquer. Je t'aime bien alors je reste avec toi. C'est simple, non ?

Et son regard me trouble et me transperce à la fois. C'est comme une décharge. En général, personne ne veut rester avec moi. Ses paroles me font toutes drôles. Je préfère alors me méfier.

- Ne dis pas quelque chose que tu ne feras pas.

- Quoi ? Rester avec toi ?

Je hoche la tête et il enchaîne alors :

- Je ne vois pas pourquoi je ne pourrais pas le faire. Ne te complique pas la vie, Kian. Accepte que les autres puissent venir vers toi et fais leur confiance.

- C'est plus simple à dire qu'à faire. Comment je pourrais savoir si je peux te faire confiance ?

- Moi, je te fais confiance.

Et ça me l'a fait boucler tout comme ce qu'il me dit ensuite :

- Je te fais confiance alors je vais te dire un truc, chuchote-t-il en se rapprochant de moi, je suis gay.

J'écarquille les yeux, ne dis rien pendant un instant puis explose de rire, ne sachant pas comment réagir. Il se met alors à rire et il repart de la ruelle. Je le seconde, en tentant d'oublier ce qu'il vient de me dire, et on continue notre ballade nocturne, sous la lumière des lampadaires et de certaines vitrines.

- C'est beau Paris quand même.

- Je suis tout à fait d'accord avec toi, je réponds.

- Tu veux pas qu'on se trouve un banc ?

- Si tu veux, je hausse les épaules.

Nous nous asseyons sur un banc dans un des parcs de la ville, malgré le fait qu'il fasse plus sombre ici.

- Tu n'aurais pas pu trouvé plus effrayant, je commente ironiquement.

- Ce n'est pas de ma faute si tu es une tapette. explosé-t-il de rire, comme si c'était la meilleure blague du monde.

- T'es sérieux ?

Je le regarde et il tourne son visage vers moi, avec un sourire enfantin sur le visage. Il a une mine qui me fait fondre alors je me détends.

- C'est simplement pour rire. J'ai compris après l'avoir dit que ça n'était pas vraiment approprié.

- Ouais, je boude pour de faux, en m'écartant de lui et en croisant les bras comme un gosse.

- Oh, allez, Kian. C'était juste une blague.

Il me tire par le bras et je tombe alors contre lui. Je suis d'abord gêné, mais voyant que lui non, je pose ma tête sur son épaule, mes bras toujours croisés sur mon torse.

- Pardonné.

- Merci, rit-il puis moi aussi tant nous sommes ridicules parfois. Tu as fait quoi ce week-end ?

- Je suis rentré chez mes parents. je réponds, avec une certaine peine dans la voix liée aux événements qui s'y sont déroulés.

- Ils habitent où ?

- Caen.

- Alors, comme ça tu es un Caencannais.

J'explose de rire aussitôt qu'il me sort cette bêtise.

- Tu as décidément trop bu, je suis Caennais et pas je sais pas quoi. je pouffe, ainsi que lui aussi. Et toi, tu viens d'où ?

- Pur Parisien.

- C'est pour ça que tu es chiant.

Et pour la, je ne sais pas combien de fois depuis ce soir, il me donne un coup de coude.

- T'aimes vraiment bien me taper, je me plains.

- Ouais, je suis un sadomaso'.

- Oh, non, Arthur.

Je cache ma tête contre son épaule tandis qu'il rit.

- T'es gêné ?

- Un peu, je réponds, toujours caché.

- Pour une fois que c'est toi.

- Comment ça ? je demande, en sortant de ma "cachette".

- Habituellement, c'est toi qui me gêne, lâche-t-il d'un air sérieux et réfléchi.

- Ah bon, pourquoi ? je m'intéresse.

Il tourne son visage vers moi et sa tête me surplombe. Je me sens alors tout petit et encore plus gêné.

- Je crois que c'est parce que tu me fais ressortir des choses que j'avais tenté de cacher. Et ça fait mal.

- Je suis désolé, je m'excuse, confus mais aussi peiné de lui faire du mal d'une quelconque manière. Je ne voulais pas, vraiment.

- Je t'ai déjà dit d'arrêter de t'excuser. Tu n'y peux rien si tu attrayant.

Et pour la seconde fois, ses mots me provoquent une décharge dans tout le corps. C'est étrange ce qui se passe. J'ai l'impression d'avoir à faire à un tout autre Arthur.

- Qu'est ce que tu veux dire par là ?

- Que je t'aime bien et un peu trop que je ne le devrais.

Et je ne sais pas s'il est sincère ou si l'alcool parle pour lui, ce qui est fortement probable.

- Et comment je pourrais te croire ?

- Tu n'as vraiment pas confiance facilement, toi. pousse-t-il un petit rire, en passant une main pour remettre ses cheveux en place.

Il se saisit alors d'un élastique qu'il avait autour de son poignet et se les accroche en un chignon. Puis, il pousse un soupire et se retourne à nouveau vers moi, son regard ancré dans le mien d'une manière qui m'intimide.

- Je suis méfiant, c'est tout.

- Tu ne devrais pas l'être autant, secoue-t-il la tête.

- J'ai mes raisons. Et puis qui me dis que tu ne dis pas ça parce

Il me coupe, en posant ses lèvres sur les miennes. J'écarquille les yeux, clairement surpris, puis je me laisse aller. C'est juste une pression, mais c'est tellement doux, et timide aussi. Je me redresse alors tranquillement pour être à la même hauteur que lui, mais il se recule. Il a les joues toutes rouges et fuit mon regard. Il pose ensuite sa tête dans ses mains, comme désemparé et lâche dans le vent :

- Mais qu'est-ce que tu me fais faire ?

Et je ne comprends pas vraiment ce qu'il veut dire alors je me lève et le préviens :

- Je ferais mieux de rentrer.

Il enlève sa tête de ses mains et se place devant moi, tandis que je fourre mes mains gelées dans mes poches de sweat.

- Désolé d'avoir trop bu.

- Ne t'en fais pas, j'aime assez ce Arthur. je souris.

- Je te raccompagne ?

- Je ne dis pas non.

Nous faisons alors chemin inverse et je commence vraiment à avoir très froid. Nous arrivons en silence devant mon immeuble.

- Ça m'a fait plaisir de te voir en dehors des cours, je lui avoue.

- Oui, moi aussi, beaucoup même.

Nous nous regardons encore à travers le vent de la ville lumière puis il finit par déclarer :

- À demain, alors.

- Oui, à demain. Dors bien.

Et nous ne nous disons rien de plus, ne sachant pas très bien comment se saluer. Je prends alors l'initiative et m'avance vers lui. Je pose mes lèvres contre sa joue qui est chaude et rentre ensuite dans mon immeuble, le cœur battant à pleine puissance.

Je monte mes escaliers en courant et sors mes clés pour ouvrir la porte, mais celle-ci se trouve être déjà ouverte. J'entre et trouve alors mon colocataire, endormi, sur le clip clap, en boxer. Je ne peux m'empêcher d'admirer son corps dont je me lasserais jamais je crois. J'enlève mon sweat et ferme à clé. Jawad bouge alors et je le vois ouvrir difficilement ses yeux à cause de la lumière.

- Il est quel heure ? questionne-t-il d'une petite voix, encore endormi.

Je m'avance alors vers la table du salon et regarde sur mon téléphone.

- Presque minuit, désolé de t'avoir réveillé la belle au bois dormant. je souris.

- T'es bête, sourit-il à son tour, viens.

J'enlève mes vêtements pour me retrouver simplement en caleçon puis me glisse sous la couette. Les bras chauds et protecteurs de Jawad viennent m'entourer et je lis nos doigts ensemble. Je suis heureux de constater qu'il n'a plus l'air de me faire la tête.

- Tu es gelé, fait-il remarquer. Tu étais où ?

- Je me promenais dehors.

Je préfère couper la partie "avec Arthur", ne voulant pas qu'on se prenne la tête inutilement. Il me retourne doucement et caresse ma pommette droite avec tendresse avant de demander :

- Il a recommencé ?

Je me contente de hocher la tête, le cœur serré rien que d'y repenser.

- Je suis tellement désolé, Kian, tout est de ma faute.

Je ré-ouvre les yeux, que j'avais fermés à son toucher, et chuchote contre ses lèvres :

- Rien n'est de ta faute. C'est de la sienne. C'est juste un vieux con.

Le basané sourit, crispé, et se rapproche encore plus de moi, nos corps à moitié dénudés collés. Nos lèvres se frôlent et il les fait se toucher sans pour autant poser les siennes sur les miennes. Puis il les presse ensemble et je me laisse emporter au rythme de ses touchées sur ma pommette abîmée. Il se décroche de moi et colle son front au mien. Mon regard se perd dans ses prunelles caramels que je connais si bien.

- J'aimerais tellement pouvoir faire quelque chose, murmure-t-il près de me lèvres.

- Je sais, je me contente de répondre, en liant ma main avec la sienne de libre.

- Tu aurais dû m'appeler.

- Pour faire quoi ? Ça aurait été pire. L'essentiel, c'est que tu sois là, maintenant.

- Tant que tu voudras de moi, je resterai. promet-il, en déposant une nouvelle fois ses lèvres sur les miennes.

Que répondre à cette magnifique et touchante promesse de cœur ? Je l'embrasse alors avec délicatesse même si je repense au petit baiser de tout à l'heure et que je commence à culpabiliser.

- Merci, Jawad, d'avoir été et d'être là.

Hey tout le monde ! Nouveau chapitre enfin en ligne. Désolée du retard, je ne m'étais pas rendue compte :) 😁 En espérant que ça vous plaise toujours. Je posterai le prochain chapitre plus en avance étant donné le petit retard de celui-ci ;)😉
Gros bisous et bonne journée :)😀

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