Chapitre 9 - Camping elfique

La nuit est entièrement tombée quand nous entamons la traversée du lac Scintillant. Les flots paisibles reflètent la lumière de la Lune, loin sous nos pieds. Est-ce la Lune d'ailleurs ? Je lève la tête vers le satellite naturel qui éclaire habituellement notre sommeil pour apercevoir deux cercles illuminés se distinguant de milliers d'étoiles.

Hum... ce n'est pas la Lune du coup. Je demanderais bien à Thalion, mais plus tard, parce que là, tout de suite, je n'en ai pas la force.

Je me laisse envelopper par le silence de la nuit, enfin calmée après avoir craqué comme ce matin et pleurer silencieusement toutes les larmes de mon corps. Ce matin... Il me semble que nous nous sommes faits attaqués par les Alphyns la semaine dernière... tant de choses se sont passées depuis ; l'attaque, la rencontre de Thalion, les Griffons, le Dragon, l'arrivée au château, la reine, la lettre, la décision, le mort, la fuite...

Pour ne pas perdre le contrôle à nouveau, je décide de ne plus y penser et me replonge dans ma contemplation.

Un ciel sans nuages se fond dans un paysage plongé dans l'obscurité et seules les étoiles permettent encore de délimiter l'horizon. Les deux Lunes nous procurent un peu d'éclairage, dispersant une douce lueur sur la nature endormie. L'une d'elles est d'un blanc laiteux et l'autre d'un orangé éclatant contrastant avec le noir de la voûte céleste.

Nous perdons de l'altitude et je remarque que nous ne survolons plus le lac, mais une masse dense et sombre, sûrement une forêt endormie.

Nous nous posons dans un espace dégagé, mais l'obscurité ne me permet pas de distinguer plus nettement cet environnement. Après nous avoir assuré qu'il ne pleuvrait pas, Thalion sort trois couchages des sacs en toile transportés par les Griffons et les déplie avant de nous en tendre un chacun.

― Ce sont des peaux de Catoblépas. Elles sont très épaisses ce qui est vraiment pratique contre le froid et la dureté du sol.

Il recommence à fouiller la sacoche avant d'en sortir un pot en argile gravé de motifs étranges et peint en rouge recouvert d'un couvercle étanche.

― C'est une spécialité Faune, un feu éternel qui repousse les bêtes sauvages et le froid. Le seul inconvénient, c'est qu'il est visible de très loin, par des amis dans le besoin comme par d'éventuels ennemis.

Je hoche la tête gravement et demande :

― Les Faunes ?

― Ou les Satyres. C'est pareil, répond Romain.

― Comment tu sais ?

― Je l'ai vu en latin.

Je me souviens alors que mon ami est inscrit à cette option depuis la sixième et qu'il est passionné de créatures mythologiques et d'étymologie. Nous nous étions rencontrés là-bas, mais j'avais arrêté dès la cinquième. Je ne voyais pas l'intêret de savoir parler une langue morte, surtout s'il fallait apprendre toutes les terminaisons et déclinaisons qui vont avec.

― Tu en fais toujours ? je m'étonne.

― Bien sûr, dit-il comme une évidence.

― Eh ben dis donc.

Nous déplions les peaux de Carlopéplas – ou quelque chose comme ça – et les disposons en cercle sur l'herbe sèche avant de placer le pot en argile au centre. Les deux Griffons s'allongent à nos côtés. Thalion ouvre le bocal pour libérer de grandes flammes bleutées qui s'élancent vers les Cieux.

― Tu connais les Carpolépas, du coup ? Je questionne Romain.

― Catoblépas, corrige-t-il.

― Pardon Môssieur, j'ironise. Et alors, c'est quoi ?

― C'est une vache avec une tête de cochon.

J'explose de rire en tentant de me l'imaginer, ce qui attire l'attention de Thalion, un peu plus loin. Il délaisse Tango pour s'approcher de nous.

― Que se passe-t-il ? Demande l'Elfe en souriant.

― Il me décrit les caboplébas, j'explique en riant.

― Catoblépas ! répète Romain.

Thalion sourit et mon ami reprend ses explications.

― C'est Pline l'Ancien qui l'a décrit en premier, et il...

― Mais comme tu sais ça ?

― Je te l'ai déjà dit ; on l'a vu en latin.

― Oui, mais de là à l'avoir retenu...

― Tu me laisses finir oui ou non ? S'énerve Romain.

― Mouais, vas-y.

― D'après Pline l'Ancien...

― Pourquoi « ancien » ? je demande, un peu exprès pour l'embêter.

― Parce qu'il y a aussi Pline le Jeune, m'explique patiemment le latiniste.

― Et alors quoi ? C'est son petit fils ?

― Non. C'est son neveu.

― Oh purée...

Je me frappe le front avec une main.

― Donc, d'après Pline l'Ancien, le regard du Catoblépas tue, un peu comme celui du Basilic.

J'ouvre une bouche ronde comme un « o ».

― Et comment vous faites pour les chasser du coup ? Dis-je en me tournant vers Thalion.

― On ne les chasse pas, on les élève. Et on leur met des verres tintés devant les yeux, comme ça, eux voient où ils vont, mais nous ne voyons pas leurs yeux.

Je pouffe.

― Vous leur mettez des lunettes de Soleil ?

Le prince hausse les épaules, ne sachant sûrement pas ce que c'est.

― De toute façon, leur tête est tellement lourde, qu'ils regardent toujours le sol, ajoute-t-il. Ils sont aussi très lents et paresseux.

― Ah bah ça va alors ! Ça casse pas trois pattes à un canard ! Je m'exclame.

Le prince fronce les sourcils.

― Je ne connais pas cette expression.

Je soupire.

― Normal, ça vient de chez nous.

― Et c'est vieux, ajoute Romain. Personne dit ça de nos jours.

Je lui tire la langue et rabat ma couverture sur ma tête.

― Bonne nuit, rigole Romain.

Je réponds en faisant semblant de bouder et il ne me faut pas longtemps pour m'endormir comme une souche.

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La lumière perce au travers de mes paupières clauses. Peut-être qu'il fait jour... ou peut-être que je rêve encore... Je préférerais la deuxième solution.

De toute façon, je ne me lèverais pas avant que mon réveil ne sonne. Je me souviens alors que je commence à neuf heures, exceptionnellement, et pousse un soupir de contentement.

Comme pour contredire mes propos, une ombre se dresse entre les rayons de Soleil qui rentre par la fenêtre et mon corps fatigué. On me secoue doucement par l'épaule et j'ouvre les yeux à contre-cœur.

C'est la tête de Romain qui m'accueille dans cette nouvelle journée et je le dévisage, à moitié endormie. Qu'est-ce qu'il fait dans ma chambre ?

― Allez Laurie, une longue route nous attend ! S'exclame-t-il avec enthousiasme.

Je me frotte les yeux et regarde autour de moi. Un paysage de garrigue s'étend à perte de vue, univers un peu désertique où les plantes ont appris à survivre par leurs propres moyens. Deux bêtes énormes se dressent non loin et un garçon blond aux oreilles pointues s'affaire autour d'un campement improvisé.

Ah ben non, je n'ai pas rêvé, ce monde existe bel et bien et je me prépare à l'explorer un peu plus, en découvrant à chaque instant de nouvelles facettes toutes plus fantastiques les unes que les autres.

Le prince me tend un morceau de viande séchée et une tranche d'une spécialité Elfe qui ressemble à du pain.

― Où va-t-on ? Je demande la bouche pleine, car cette question me turlupine depuis hier soir.

Thalion s'interrompt dans ses préparatifs pour me répondre et mon petit doigt me dit que je vais avoir droit à son exposé du Brevet.

― C'est vrai que je ne t'ai rien expliqué, commence-t-il. Hier soir, je suis allé voir Romain pour savoir si vous aviez pris votre décision, mais tu étais déjà partie.

― Ah mince, dis-je pas le moins du monde embarrassée.

― Je suis donc allé prévenir ma mère pour qu'on décide de la stratégie à adopter quant à votre mission. Et pour envoyer quelqu'un à ta recherche aussi.

― Super option, j'ironise en fixant mon déjeuner.

Romain pouffe, mais Thalion ne réagit pas.

― Sauf que cette personne ne t'a pas trouvé apparemment, et tu es tombée sur notre messager.

Je baisse les yeux à ce souvenir douloureux.

― Comme on ne savait pas si les Ogres allaient vaincre nos défenses, passer le poste sud et atteindre le château, il valait mieux que nous partions tout de suite, en sachant que le temps est compté. Rallier les autres peuples est devenu une priorité.

― Et donc, on va où ?

― Oui, tu ne nous l'a toujours pas dit, enchaîne Romain sur un ton de reproches.

― Nous partons convaincre les autres royaumes de se joindre à nous, explique Thalion comme s'il le répétait pour la troisième fois à des enfants de cinq ans. Le plus sûr est de commencer par le royaume des Nains, il est plus près et nous partons vers l'ouest alors que les Ogres arrivent par l'est.

― Ok...

Je me relève et roule ma couverture puis je la range dans une des sacoches accrochées sur le flanc de Tango.

― Et pourquoi vous vous disputiez ? Je demande, l'air de rien.

L'Elfe fronce les sourcils.

― Nous ne nous sommes pas disputés, nie-t-il.

― Alors pourquoi la reine criait ?

Je lui révèle mes connaissances au fur et à mesure pour voir s'il essaie de m'embobiner parce que je déteste ça. Si c'est « top secret », je préfère autant qu'il me le dise clairement et je n'insisterais pas.

― Ah ça, commence-t-il en cherchant ses mots. Nous n'étions pas d'accord sur la stratégie. Ma mère voulait qu'on parte chez les fées en premier, mais nous avons réussi à la convaincre.

― Pourtant elle semblait parler de quelque chose qui s'était déjà passé, et qui a des conséquences maintenant, j'insiste.

― Tu as dû mal comprendre, conclue Thalion en mettant fin à la conversation.

Je lui lance un regard en biais. Je laisse tomber pour l'instant, mais il cache quelque chose. Grave ou pas, je n'en ai aucune idée.

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Nous volons depuis une éternité et la garrigue s'est peu à peu changée en désert aride. Je transpire malgré les courants d'air chauds qui soulèvent mes cheveux en arrière. Bien que je sache la vie possible dans un tel environnement, j'ai beaucoup de mal à l'imaginer à cause de cette chaleur sèche qui imprègne chaque souffle de vent.

Thalion, Chef Suprême de cette Expédition, décide de faire une halte pour un petit pique-nique, en plein désert.

Heureusement, quelques arbres éparts se dressent vaillamment parmi les dunes et nous procurent un abri contre les torrides rayons de Luxia.

Le prince nous propose de la viande séchée de la viande séchée de Coquecigrue, pour changer de celle de Catoblépas et nous nous installons sous un grand arbre qui ressemble beaucoup à un acacia. Sauf que ses épines mesurent dans les dix centimètres.

― Purée, se plaint Romain, c'est tout sec ce truc !

J'approuve d'un signe de tête énergique. Le Chef Suprême de cette Expédition balaie nos plaintes d'un signe de la main, comme les rois du Moyen Âge.

― Vous allez vous habituer.

― J'y crois pas trop, je marmonne en regardant ma part d'un air blasé. Avec un peu de chance, on mangera chez les Nains ce soir.

― On pourrait peut-être demander à Tango de nous le mâcher, propose Romain.

― Beurk, t'es dégueulasse, je m'exclame en souriant.

Il rit et je lui donne un coup de coude.

― Oh ça vaaaa, proteste-t-il, ils font bien ça avec leurs poussins.

― Sauf qu'on n'est pas leurs poussins... enfin, je crois pas.

Nous rions en nous imaginant à moitié Griffons et encore plus quand Thalion nous dévisage comme si nous étions des pingouins déguisés en marmottes sur le bord d'une autoroute.

Nous finissons tant bien que mal notre sandwich avant de repartir.


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Holà! (oui je change de langue chaque semaine et?!)

Voili voilou! Un chapitre un peu plus long où il se passe pas grand chose (je trouve)

Bon, je me pose encore des questions comme:

est-ce qu'on comprend bien leur objectif?

est-ce que c'est pas ennuyeux?

Est-ce que c'est intéressant les Catoblépas?...

Je réfléchi aussi à changer le titre du livre, mais j'ai pas encore d'idées, ça viendra sûrement quand il sera fini

Si vous pouvez répondre à ces questions pour m'aider, c'est top, et sinon... heu... ben je continuerai de me les poser, hein, à la Laurie!

Le chap 10 est pour mardi prochain comme d'hab!

PS: C'est normal que LibreOffice me dit que mon chapitre fait 1950 mots et que sur wattpad, il en fait 1845 🤨

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