Chapitre 4 - Le Labyrinthe
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Mon regard se perd alors sur ce gigantesque mur qui nous coupe... de quoi, en fait ? Voilà ce que je voulais demander en premier, avant de me ressaisir. Si mon but est de survivre, alors je dois d'abord savoir à qui j'ai à faire.
Même si je connais déjà la réponse, cela permettra de débuter sur de bonnes bases. Commençons par le plus simple, les présentations :
— Comment t'appelles-tu ?
Simple, efficace.
Il a un visage à la fois doux et sévère. Mais tout dans son attitude me donne envie de lui faire confiance. Je représentais une menace pour eux, à mon arrivée, alors il a décidé de m'enfermer – ce que je trouve légitime. En cela, pour l'instant, il me semble être un bon meneur.
Aussi, j'apprécie sincèrement qu'il a su se fier à Gally. En cela, il accepte de me faire confiance. Je lui en suis sincèrement reconnaissante.
— Je m'appelle Alby, répond-t-il en tournant sa tête vers moi. J'ai été le premier à arriver ici. C'est aussi pour ça qu'on me considère comme le chef.
Son regard se perd à son tour quelques instants dans le lointain. Il doit se rappeler des moments difficiles, je m'en suis rendue compte à l'amertume que j'ai ressentis dans le ton de sa voix. Un nom me vient : Georges. Cependant, je ne crois pas que ce soit le bon moment pour en parler.
Aussitôt, je renchéris :
— D'accord. Enchantée, Alby. Moi c'est Sophia. Qu'est-ce que c'est que ...
— Quoi ? me coupe-t-il, interloqué. Tu te souviens déjà de ton prénom ?
Je le fixe alors quelques secondes, pensant avoir fait une bêtise. Visiblement il sait quelque chose que je ne sais pas encore. Il voit que je suis perdue alors, il prends un ton plus conciliant. Il semble si étonné, qu'il aurait pu avoir la même réaction si je lui avais appris que j'étais sa sœur.
— Ne t'inquiète pas. En fait, chaque nouvelle personne qui arrive ici, comme toi aujourd'hui, souffre d'amnésie. Au bout d'un jour après l'arrivée, ou beaucoup plus en fonction de l'individu, la personne finit par se souvenir de son prénom. Mais c'est tout. Depuis quand t'en souviens-tu ?
— Depuis que j'ai ouvert les yeux... si ça peut te rassurer, je ne me souviens de rien d'autre. J'ai une vague réminiscence de mon physique, mais je ne sais rien de mon âge, de mes loisirs ou encore de ma famille.
Alby ne sait pas quoi répondre sur le moment et semble plongé dans une longue réflexion.
— Au moins, ajoute-t-il, ton comportement de tout à l'heure en dit long sur ton caractère : tu n'as pas peur de te défendre et choisit la fuite comme première solution face à l'inconnu.
— Je n'avais pas vu ça comme ça, admet-je.
Un court silence s'installe entre nous deux. Malgré moi, une certaine complicité est née. J'en ai presque oublié la raison principale de ma présence ici, sur cette tour à l'allure primitive. Je repense à Gally. Je ne pouvais m'empêcher de m'en vouloir, de lui avoir porté ce coups. Il a l'air d'avoir suffisamment morflé ici.
— Tiens, à ce propos, reprends-je, je voulais m'excuser d'avoir agi comme une sauvage. Vous n'avez pas l'air méchant, j'ai juste eu peur et je ne comprenais pas où je me trouvais... Le blond, là, Gally, il doit m'en vouloir de lui avoir mis tous ces coups.
— Peut-être bien. Tu n'as pas choisi le moins rancunier... mais rassure-toi. Il a vécu comme toi, comme nous tous ici, le flou que provoque une arrivée. Il comprendra.
Je ressens un véritable soulagement à la fin de ces mots. Je pense qu'il est temps d'entrer dans le vif du sujet.
— Mais, quoi qu'il en soit, quel est cet endroit ?
Je demande ceci, une nouvelle fois, en espérant bien avoir une réponse. Je ne m'attends pas à ce qu'elle soit des plus détaillées. Je veux juste... qu'on me dise quelque chose. N'importe quoi, au sujet de cet endroit. Au sujet de ce "Labyrinthe".
Alby s'appuie contre la barrière sécurisée – qui ne l'a pas l'air tant que ça – tout en regardant vers le lointain, c'est-à-dire le mur.
— C'est notre chez-nous, ici. On l'a surnommé le Bloc. Pour faire simple, c'est une large zone herbue, qu'on a aménagée à notre manière, en fonction de ce qui s'y trouvait déjà. Là, c'est le potager où travaillent les sarcleurs, me montre-t-il d'un signe de tête. C'est notre principale ressource en nourriture, avec nos enclos et étables pour les animaux, lieu de travail des trancheurs.
Je suis du regard toutes les zones qu'il me désigne. Plus tôt, j'ai déjà aperçu le potager, qui me paraît plus grand d'ici. Ce dernier semble bien organisé. Un peu plus loin, situé contre un des murs du Bloc, se trouve une grande bâtisse, faite de bois elle aussi. C'est la fameuse étable. A l'extérieur, les enclos renfermant des bêtes qui, paisiblement, broutent les rares touffes d'herbes qui ont résisté à leur piétinement.
— Par-là bas, continue le Chef, ce sont nos dortoirs et notre lieu de rassemblement, pour les fêtes, les discours, les "anniversaires", ce genre de choses quoi.
Alby se retourne et se dirige à l'autre extrémité de la tour.
— Et là, me dit-il en pointant du doigt une sorte de petite cabane, c'est l'atelier des bâtisseurs. Comme son nom l'indique, cette division s'occupe de l'élaboration des plans et réfléchit aux matériaux les plus adaptés à utiliser pour nos constructions. C'est au rôle de Gally, celui que tu as enfermé dans la fosse, de gérer ce petit monde-là. Newt, celui que tu as assommé, est mon second. Voilà, je pense que je t'ai dit l'essentiel. Pour le reste, tu finiras bien par le découvrir, au fur et à mesure des jours que tu passeras avec nous.
Je grimace de honte, en pensant à la réaction exagérée que j'ai eu à mon arrivée. Je vais devoir leur présenter mes excuses, et, pour une raison que j'ignore, il semble que je déteste avoir tort.
— Et donc... ça fait combien de temps que vous êtes ici ? Et laisse-moi deviner, vous ne savez pas qui nous envoie et ce qu'il y a derrière ce mur ? supposé-je tout en portant de nouveau mon regard sur le barrage qui m'intrigue énormément.
Il soupire longuement.
— Cela fait un peu plus de trois ans. Et tu as raison sur un point. Nous ne savons pas qui nous envoie. Par contre, parmi nous, nous avons des individus que nous appelons des Coureurs. Tous les matins, ils se rendent au-delà de ce mur, explique-t-il lentement.
Trois ans ? Une étrange sensation de vertige s'empare de moi. J'ai tellement de mal à imaginer ce que trois ans peuvent signifier, enfermé entre quatre murs.
— Et il y a quoi derrière ? je demande, faisant preuve d'impatience.
— Un Labyrinthe, déclare-t-il sombrement, tout en relevant le menton.
Je prends le temps de réfléchir à l'ensemble des choses qu'il vient de me dire. Surtout, ça me frustre... car il ne semble pas vouloir entrer dans le sujet Labyrinthe pour l'instant.
— Quand arrivera la prochaine personne ?
— La boîte, comme on l'appelle, remonte une fois par mois, nous amenant un nouvel individu ainsi que du ravitaillement. Jusqu'à aujourd'hui, ce n'était que des garçons. Je ne sais pas pourquoi ça a changé aujourd'hui, termine-t-il en soupirant longuement.
Alby allait descendre quand je l'interpelle.
— Merci Alby. Merci de me faire confiance. Mais... au sujet du Labyrinthe ? Gally m'a dit que... qu'un des vôtres y était allé et avait trouvé la mort.
— Vient, je vais t'expliquer sur le chemin, me dit-il en me faisant signe de le suivre.
Je fais donc ce qu'on me dit, nous descendons les escaliers tout en faisant attention de ne pas chuter de cette hauteur. Une fois les pieds sur la terre ferme, il siffle et j'aperçois Gally sortir sa tête d'une des fenêtres du bâtiment des bâtisseurs :
— Viens, Gally. Et emmène Chuck, s'il te plaît.
Puis, il s'adresse à moi et nous continuons notre chemin vers le mur.
— Pour sortir d'ici, il n'y a qu'un seul moyen. Parcourir le Labyrinthe, c'est donc le rôle des Coureurs, le cartographier, l'étudier et enfin trouver sa sortie. Mais ce n'est pas si simple, car tous les soirs les murs changent de place et...
Il se tait tout en se retournant vers le Bloc. Il ferme les yeux, en soupirant.
— Georges a été un des premiers coureurs. Il a aussi été un des premiers à périr. Il n'est pas mort dans le Labyrinthe... il en est revenu mais il n'était plus lui-même. Il était devenu fou. Je me rappelle qu'il avait, sur sa peau, une piqûre enflammée et profonde. Autour, sa peau s'était noircie... il pourrissait...
Un énième frisson me parcourt la peau. Ce qu'il me raconte me fait froid dans le dos.
— La chose qui lui a fait ça, murmure-t-il tout en se retournant vers moi, il y en a des dizaines qui rôdent dans le Labyrinthe. On les appelle les « Griffeurs ». Leurs piqûres provoquent des douleurs et des nécroses, l'infection qui s'en suit se propage dans tout le corps. Nous n'avons aucuns traitements et la personne devient si dangereuse que nous devons faire quelque chose pour protéger le reste du groupe. C'est ce que j'ai fait. J'ai protégé le reste du groupe.
— Alors... c'est toi, qui l'a tué ? je déclare avec effroi.
— Oui, répond Alby alors que nous nous arrêtons face à une ouverture menant à l'intérieur du Labyrinthe. Mais il était déjà condamné. Je n'ai fait qu'abréger ses souffrances.
Face à nous, s'étend un long couloir de béton, suivis de plusieurs embranchements, menant je ne sais où. L'intérieur est sombre, bien qu'on y voie clair grâce à la lumière du jour. Je frissonne car le mur est encore plus impressionnant de près. Je suis mal à l'aise d'être ici et j'aurais beaucoup trop peur pour m'aventurer là-dedans.
Des lierres parcourent les parois, de haut en bas... mais aucune présence d'un quelconque griffeur. Bien qu'à aucun moment, je n'ai envie d'en croiser un, vu ce qu'ils ont fait à Georges.
— Alby !
Nous nous retournons, quand nous apercevons Gally ainsi qu'un jeune garçon un peu grassouillet. Il a des bonnes joues et je me prends immédiatement d'affection pour lui.
— Avant que je ne te laisse avec Chuck, Sophia.
Les deux autres ont l'air surpris. C'est si surprenant, que je me souvienne déjà de mon prénom ? Enfin.. c'est presque comme si je ne l'avais jamais oublié.
— Il y trois règles à suivre, ici au bloc. Chacun doit accomplir sa tâche, car il n'y a pas de place pour les fainéants. Ne jamais blesser un autre Blocard. Il faut que tu puisses faire confiance à tout le monde. Enfin, la plus importante... ne jamais franchir les murs du Bloc. Tu n'as pas le droit d'aller dans le Labyrinthe.
— Cela me semble simple, dis-je calmement.
Enfin, j'allais demander à Alby ce que nous attendons quand un souffle sortit tout droit du Labyrinthe nous parvient. Il est tellement fort que je suis obligée de me protéger les yeux de la poussière. Au même moment, un gros bruit de monolithe que l'on traîne se fait entendre. Un bruit de roche que l'on pousse, le grincement de la pierre contre la pierre, me donne mal aux oreilles. Je lève les yeux. Les portes du Labyrinthe sont en train de se fermer.
L'une vers l'autre, les deux pans de béton – bien que je ne comprenne pas comment ces deux blocs peuvent bouger – se rejoignent. C'est très lent, très long et le grincement continu en est insupportable, surtout à cette distance.
Je recule instinctivement. Je sens le sol trembler sous mes pieds. C'est horrible. Tout mon corps vibre et s'en est insupportable.
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