Chapitre 19 : Nouvelle vie

Dayana prit de grandes respirations, ravalant le flot de larmes qui montait dans sa gorge.

Sois courageuse, sois courageuse, sois courageuse... se répéta-t-elle.

Mena s'approcha doucement d'elle.

-Allez viens, encouragea-t-elle en tendant la patte. Je vais te montrer où tu vas habiter.

La petite fille joignit sa main. Elle comprenait à présent pourquoi on disait que les chats avaient des pattes de velours. C'est si doux, pensa-t-elle, réprimant une envie de caresser la patte.

Elle déambula dans le village, en essayant de retenir le chemin que Mena et Sinari empruntaient. Il n'y a avait pas de rue à proprement dite, ni de réel organisation. Les maisons en bois avaient été construites là où bon leur semblait. Une dizaine de minutes plus tard, ils arrivèrent à destination. Ayant toujours vécu dans un château, Dayana n'arrivait pas à déterminer si l'habitacle pouvait être considéré comme grand ou non. Elle décida d'attendre d'être à l'intérieur pour juger. Le couple ouvrit la porte et la laissa entrer la première.

Dayana fut surprise. Elle ne pensait pas qu'il y aurait autant d'espace. Mais il faut dire aussi que les pièces étaient épurés au maximum. En tout et pour tout, dans la pièce de vie, il y avait une grande table entourée de quatre chaises et deux fauteuils posés devant la cheminée. Les deux chambres contenaient respectivement un lit, une petite table de chevet et une armoire pour ranger les vêtements. Cela la changeait du luxe du château, mais ce n'était pas non plus inconfortable.

Le couple de félins observait ses réactions au fur et à mesure qu'elle découvrait son nouveau chez elle. Ils espéraient que ça lui plairait, ils voulaient si bien faire pour leur protégée.

- Ta chambre sera celle de gauche, elle te plait ?

- Oui, le lit a l'air très confortable. En quoi sont faites les couvertures ? c'est très moelleux et doux !

- C'est de la laine de moutons, nous en faisons l'élevage, ainsi que celui de vaches, c'est avec leur peau qu'on obtient du cuir, répondit Sinari.

- Oh, je vois.

Elle voulut s'asseoir sur l'épais edredon mais se ravisa en prenant conscience de l'état de sa robe. Sa course dans la forêt et le voyage en bateau l'avait laissée boueuse et humide.

Mena devina ses pensées et se tourna vers son compagnon :

- Va chercher des habits secs dans notre armoire s'il-te-plait.

Il s'exécuta aussitôt et la chaline ajouta avec douceur :

- Ce sera un peu grand, mais c'est provisoire. Je te confectionnerai quelques tenues de rechange que tu pourras mettre dans l'armoire.

Sinari revint et lui tendit les vêtements propres.

Dayana examina leurs habits. Ils étaient vêtus d'un pantalon en toile, beige pour la femme et noir pour son compagnon, ainsi que d'une simple chemise couleur crème pour tous les deux. Cependant, Mena avait une large ceinture qui ceignait sa taille, mettant en valeur son allure féline.

La fillette trouvait que leurs vêtements avaient l'air beaucoup plus pratiques que sa robe.

- Merci, je pourrai choisir la couleur ? finit-elle par dire.

- Bien sûr laquelle veux-tu ? Je peux faire une couleur différente pour le haut et le bas.

- J'aimerai du noir, pour les deux.

Elle souhaitait s'habiller dans la couleur du deuil. Elle voulait que ses vêtements soient le reflet de ses ténèbres intérieures.

- Très bien. Je pense que tu es fatiguée par ce long voyage et il est tard. Il est temps d'aller dormir. Nous ferons plus ample connaissance demain, cela te convient-il ?

- Oui, merci. Merci pour tout, dit-elle, reconnaissante.

Sinari et sa compagne la gratifièrent d'un sourire chaleureux.

- Dors bien Dayana.

- Bonne nuit, salua-t-elle.

Elle referma derrière elle la porte de sa chambre.

Elle se changea et s'allongea dans son lit moelleux et chaud.

Seule, elle repassa dans sa tête les dernières heures de sa vie. Elle pleura toutes les larmes de son corps avant de s'endormir, épuisée.

La petite fille se réveilla tard dans la matinée. Elle avait dormi d'une traite, sans rêve. Elle mit un peu de temps à émerger de sa torpeur et à comprendre où elle se trouvait. Les évènements de la veille lui revinrent à l'esprit. Le chagrin la submergea soudainement. Elle se leva, affamée. Son dernier repas remontait à quelques heures avant la tragédie. Une odeur de pain chaud fit gargouiller son ventre. Elle sortit de sa chambre et aperçut Mena s'affairer à la cuisine.

- Bonjour, salua Dayana timidement.

- Bonjour ! répondit la chaline, enjouée. J'espère que tu as bien dormi. Je t'ai fait des petits pains chauds et je t'ai préparé un jus de pomme.

- Merci beaucoup, j'admets avoir faim.

Un grondement affirma ses dires.

- J'entends ça ! Viens donc t'asseoir, lui enjoignit la chaline en riant.

Dayana prit place devant l'assiette où s'amoncellaient les miches dorées et encore fumantes. La fillette en prit une et mordit dedans avec avidité. C'était délicieux. Elle observa un instant Mena qui nettoyait un grand récipient.

- Où est votre compagnon ?

Elle se tourna vers la fillette.

- Tout le monde se tutoie ici. Nous sommes tous égaux sur cette île, il n'y a pas vraiment de hiérarchie.

- Oh, d'accord. Je vais essayer de m'y habituer. Exceptés mes parents et les domestiques, j'ai toujours vouvoyé. Où est ton compagnon ? reprit-elle.

- Sinari est parti me chercher du tissu noir au marché, d'ici demain tu auras des vêtements à ta taille.

- Ce n'est pas si pressé ... affirma-t-elle en finissant son pain.

En réalité, la perspective d'obtenir des habits neufs rapidement la soulageait. Habituée aux toilettes faites sur mesure, elle n'était pas très à l'aise dans ces habits trop amples. Mena retourna le récipient pour le laisser sécher et s'essuya les mains sur son tablier.

- Ne t'inquiètes pas ça me fait plaisir. D'ordinaire je m'occupe des moutons et du potager, et Sinari des vaches. ça me change du quotidien et Sinari pourra prendre soin des moutons pour une fois.

- Oh il ne fallait pas modifier votre organisation pour moi ! s'exclama-t-elle, un peu honteuse.

- C'est juste une journée, ne culpabilise pas. Ça nous arrive de modifier notre programme à cause d'imprévus, la rassura Mena.

- Oui mais...

- Il n'y a pas de "mais", dit fermement la chaline. Nous sommes heureux de pouvoir t'aider.

Elle s'assit en face de Dayana et lui prit la main.

- Ecoute, je ne sais pas quelles épreuves tu as traversées, peut-être qu'un jour tu te sentiras prête à nous en parler. Sache que je suis désolée de ce qui t'es arrivée, peu importe ce que c'est. Tu es ici car tu es importante, Freya t'a conduite jusqu'à nous pour te protéger et prendre soin de toi, et c'est ce que nous ferons.

Touchée par ses propos, la fillette mit son autre main sur son cœur et hocha la tête en guise de remerciements.

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