8 - Popularité contre Survie

Durant les derniers jours de ce mois, mes points ont atteint un total de 1 250 000. Une somme respectable, grâce à un cadeau inattendu de 50 000 points et tous les deux jours 200 000 points, sur les classes C et D des deuxième er troisième année, obtenus par mon habile opération visant à piéger les piégeurs. Ce n’est pas parfait, mais c’est suffisant pour garantir ma tranquillité. Du moins, pour l’instant. Du moins, je ne compte pas arrêter sur ce point. Les premiers jours jusqu'au 15 j'ai été un peu trop gentil.

La classe, elle, commence à ressembler à une classe normale, où règne une ambiance plus encourageante. Pourtant, certains élèves continuent de traîner, incapables de se comporter correctement. Cela ne me concerne pas. Je ne suis pas là pour jouer les moralisateurs ni pour redresser des individus qui ne savent même pas tenir une discussion sérieuse. Mon problème principal, c’est Kushida.

Ces derniers jours, elle me suit presque partout, comme une ombre. Aujourd’hui encore, alors que je marchais tranquillement dans le couloir, profitant d’un rare moment de calme, elle est apparue de nulle part.

— Oh ! Tu es là, s’exclame-t-elle, arborant son habituel sourire éclatant, celui qui semble greffé sur son visage.

Je hoche la tête sans un mot, préférant garder mes distances. Mais elle s’accroche, ajustant son pas au mien, me forçant à ralentir.

Son regard me scrute, perçant presque ma carapace. Derrière cette façade chaleureuse et bienveillante, je vois clair dans son jeu. Elle cherche à se rapprocher, à gagner ma confiance, mais je sais qu’elle est bien plus dangereuse qu’elle ne le laisse paraître.

— Tu sais, commence-t-elle, c’est impressionnant ce que tu fais. Avec tout ce que tu as accompli, tu pourrais être beaucoup plus populaire dans la classe si tu faisais un peu plus attention aux autres.

Je reste silencieux, pesant mes mots. Elle veut que je m’ouvre, que je me trahisse.

— La popularité ne m’intéresse pas, dis-je enfin, mon ton aussi neutre que possible.

Son sourire vacille l’espace d’un instant, mais elle se reprend rapidement.

— C’est dommage, répond-elle, feignant une pointe de tristesse. La popularité peut être un outil puissant. Avec les bonnes relations, tu pourrais obtenir bien plus que ce que tu as maintenant.

Je m’arrête et me tourne vers elle. Mon regard froid se plante dans le sien.

— La survie est plus importante que la popularité.

Elle arque un sourcil, intriguée.

— Oh ? Et pourquoi ça ?

Je soupire légèrement, réfléchissant à la meilleure manière de lui répondre sans lui donner d’armes contre moi.

— La popularité est éphémère, dis-je finalement. Aujourd’hui, tu es adulée. Mais il suffit d’une rumeur ou d’un faux pas pour que tout s’effondre. Ceux qui t’idolâtraient te tourneront le dos. La popularité ne te protège pas ; elle te rend vulnérable.

Son sourire disparaît presque, remplacé par une expression indéchiffrable.

— Et la survie, alors ? Tu crois vraiment que ça suffit ? demande-t-elle, un éclat de défi dans le regard.

— La survie, c’est tout, rétorqué-je calmement. Tant que je tiens debout, je peux m’adapter, avancer. Je n’ai pas besoin de l’approbation des autres pour exister. Toi, en revanche…

Je laisse ma phrase en suspens, la fixant avec une intensité calculée.

— Moi ? demande-t-elle, feignant l’innocence.

— Toi, tu dépends des autres. Ton besoin constant d’attention, d’être au centre de tout… C’est ta faiblesse. Le jour où tu ne l’auras plus, tu t’effondreras.

Elle recule légèrement, mais son sourire réapparaît, teinté d’un défi froid.

— Fascinant, murmure-t-elle. Mais tu te trompes sur moi. Ce n’est pas une faiblesse. C’est ma force. La popularité, c’est du pouvoir. Avec elle, je peux manipuler les situations, obtenir ce que je veux.

Je secoue la tête, un sourire glacial aux lèvres.

— Peut-être. Mais chaque stratégie a ses limites. Tu es tellement obnubilée par ton besoin d’être au sommet que tu ne vois pas les dangers qui t’entourent.

Elle me fixe, ses yeux brillants de détermination.

— On verra bien, répond-elle doucement, presque en chuchotant. Mais ici, l’isolement, c’est la mort.

Elle s’éloigne enfin, me laissant seul dans le couloir.

De retour au dortoir, je retrouve Igor et Yinghua discutant près de l’entrée.

— Kushida est venue te parler ? demande Igor d’un ton direct.

— Oui. Elle veut que je joue le jeu de la popularité, dis-je simplement.

— Classique, réplique Yinghua en souriant. Elle cherche probablement à te recruter pour ses propres intérêts.

— Elle n’a aucune chance, rétorqué-je.

— Fais attention, quand même, intervient Igor. Kushida est dangereuse. Elle pourrait te nuire si elle te voit comme une menace.

J’acquiesce. La prudence est une règle de survie ici.

En entrant dans ma chambre, je remarque une enveloppe glissée sous mon bureau. Intrigué, je l’ouvre. À l’intérieur, une note manuscrite :

"Survie ou popularité ? Les deux ont un prix. Assure-toi de choisir le bon."

Je reste un instant à fixer ces mots. Menace ou simple avertissement ? Peu importe. Dans cette école, baisser sa garde n’est pas une option. Le mois n’est pas encore terminé, et ce n’est que le début.

La note entre mes doigts, je prends un moment pour observer les détails. Le papier est simple, une feuille blanche ordinaire, mais l'écriture est soignée, presque trop parfaite, comme si elle avait été faite pour ne pas laisser de trace. Pas de parfum, pas de pli distinctif, rien qui puisse me donner un indice évident. Pourtant, une chose est sûre : celui ou celle qui l’a laissée voulait que je la trouve ici, dans ma chambre.

Je plie la note et la glisse dans ma poche. Trouver l’auteur ne sera pas facile, mais ce genre de défi ne me décourage pas. Je commence par passer en revue les événements récents. Kushida, bien sûr, est la première à venir en tête. Elle a toujours cette façon d’essayer de manipuler les gens tout en restant dans l’ombre. Peut-être veut-elle tester mes limites ? Mais cette approche ne ressemble pas à son style direct. Elle préfère parler en face, toujours avec ce sourire charmeur.

Ensuite, il y a Igor et Yinghua. Je ne veux pas croire qu’ils soient impliqués, mais il serait naïf de les écarter totalement. Igor est loyal, mais il est aussi pragmatique. Et Yinghua... elle joue souvent sur plusieurs tableaux à la fois. Leur conversation devant le dortoir n’était peut-être pas aussi anodine qu’elle en avait l’air.

Je quitte ma chambre, décidé à creuser la question. Le dortoir est calme, la plupart des élèves sont probablement encore dehors ou déjà couchés. Je descends les escaliers et me dirige vers le bureau de surveillance. Les caméras peuvent avoir capturé quelque chose, et avec un peu de chance, j’aurai accès aux enregistrements.

En arrivant, je trouve le surveillant, un homme d’âge moyen au regard désintéressé, tapotant sur son clavier. Il relève à peine les yeux lorsque j’approche.

- Besoin de quelque chose ? demande-t-il d’un ton neutre.

Je m’appuie contre le comptoir, prenant un air détendu.

- Rien de sérieux, juste une curiosité. Quelqu’un a laissé un mot dans ma chambre, et je me demandais si vous aviez remarqué quelque chose d’inhabituel ces dernières heures.

Il arque un sourcil, sceptique.

- Un mot ? Quel genre de mot ?

- Rien de menaçant, juste... étrange. Vous savez, dans une école comme celle-ci, il vaut mieux être prudent.

Il soupire et se tourne vers son écran.

- Les caméras sont là pour la sécurité, pas pour surveiller les petits jeux entre élèves. Mais si c’est important, je peux jeter un œil.

Je le remercie avec un sourire poli et le regarde parcourir les enregistrements. Après quelques minutes, il secoue la tête.

- Rien d’anormal devant ta porte, dit-il en haussant les épaules. Si quelqu’un a laissé ce mot, il a été assez malin pour éviter les angles morts des caméras.

Un bon point pour l’auteur de la note. Celui ou celle qui l’a laissée sait ce qu’il fait.

En retournant dans ma chambre, je commence à envisager une autre approche. Si je ne peux pas utiliser les caméras, je dois pousser les gens à se dévoiler eux-mêmes. Mais pour ça, je dois d’abord identifier mes suspects principaux et tester leurs réactions.

Je décide de commencer avec Kushida. Elle est la plus évidente, et même si elle n’est pas derrière cette note, sa réaction pourra m’en dire long. Je l’aperçois le lendemain matin, assise à une table de la cafétéria, entourée de son petit cercle habituel. Je m’approche, mon plateau en main, et m’installe à une table voisine.

- Oh, bonjour ! lance-t-elle avec son sourire habituel, comme si elle m’attendait.

- Bonjour, dis-je calmement, sans chercher à prolonger la conversation.

Elle semble hésiter un instant, puis se lève pour venir s’asseoir à ma table. Son regard est aussi curieux que calculateur.

- Alors, comment vas-tu ?  demande-t-elle, d’un ton innocent.

Je lui lance un regard neutre.

- Bien. Mais je suppose que tu le savais déjà.

Elle rit doucement, feignant l’amusement.

- Toujours aussi direct. Alors, quoi de neuf ?

Je décide de la tester.

- Rien d’inhabituel. Enfin, à part une note étrange que j’ai trouvée hier soir.

Son sourire vacille à peine, mais ses yeux montrent une lueur d’intérêt.

- Une note ? Quel genre de note ?

- Juste une phrase énigmatique. Rien de très clair. Mais c’était... intrigant.

Elle penche la tête, jouant la curieuse.

- Tu crois que ça vient de qui ?

- Aucune idée, dis-je en haussant les épaules. Mais j’imagine que la personne a voulu attirer mon attention.

Elle sourit à nouveau, cette fois avec une touche de malice.

- Peut-être que quelqu’un essaie de te défier. Ou alors, de t’aider.

- Peut-être, dis-je, mesurant ses mots autant que son expression.

Kushida reste un moment silencieuse, comme si elle réfléchissait à ce qu’elle allait dire ensuite. Finalement, elle se lève et retourne à sa table, laissant derrière elle une impression de mystère.

Elle n’a rien confirmé, mais sa curiosité était trop forte pour être naturelle. Que ce soit elle ou non, elle sait probablement plus qu’elle ne le laisse entendre.

Le jeu ne fait que commencer.

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