Chapitre Onze {2}
Nous marchons quelques heures puis nous arrêtons pour manger. Le soleil qui s'élève dans le ciel me réchauffe. Un peu de bleu et quelques rayons de lumière me mettent de bonne humeur. J'avale en vitesse un repas sec agrémenté d'un peu d'eau. Je ne parle pas et notre groupe n'y fait pas attention, ils rigolent ensemble. Je ne me sens pas exclue. Après les événements, j'ai besoin de calme. J'ai besoin de me retrouver. La brise chatouille mon visage et soulève mes cheveux que j'ai détaché.
Tout se passe trop vite et nous avons encore moins de temps. Une infiltration ne me semble pas adaptée par les temps qui courent. Les attaques se multiplient et tout ce qu'on trouve à faire c'est espionner nos ennemis pour attendre qu'ils fassent une erreur et les prendre par derrière. C'est une tactique réfléchie et intelligente. Le mieux c'est de connaître l'adversaire puis l'attaquer sur ses points faibles... Mais j'ai pensé, non je n'ai pas pensé. Je veux foncer dans le tas sans me retourner et punir tout le monde alors qu'il doivent obéir à celui qui détruit tout, le Dirigeant. Heureusement que Marc n'a pas choisi mon plan. Maintenant que j'y repense, il n'était pas organisé, ça n'a aucun sens de tuer tout le monde. Il n'y avait que de la rage, de la rancune et de la colère dans mes projets. Rien d'autre, ce que je voulais c'était une vengeance. Je la veux toujours.
De plus, les soldats de la Garde sont pour la plupart, comme me l'a expliqué Tom, des hommes qui n'ont pas de situation et qui ont été repêché par le Dirigeant. Ils n'ont pas choisi leur vie, les actes qu'on leur impose ne sont pas les leur. On peut à moitié les pardonner et de l'autre les comprendre. Le Dirigeant les contrôle et le monde avec.
Je remercie Marc intérieurement de m'avoir ouvert les yeux. J'ai des œillères de chaque côté, elles me bloquent la vue et je suis la seule à me les avoir imposée. Je ne connais rien à la vie. J'ai vécu recluse de tous. Je dois comprendre, apprendre et découvrir ce nouvel univers où j'ai mis les pieds. Au moment où ce sera fait, je pourrais décider des meilleurs choses à faire. Mais actuellement ce pouvoir est détenu par ceux qui m'envoie accomplir cette mission.
Je souhaite tout apprendre et je suis trop impatiente... Ce qui m'a déjà coûté ma famille et mes amis...
Je ne veux plus faire d'erreurs mais c'est impossible. Je m'en rends bien compte. Je suis obligée d'en passer par là pour apprendre. Et je le comprends mais au moment où je ne ferai pas le bon choix, serais-je en état pour l'accepter ?
Morgan me scrute toujours mais je ne vais pas lui faire le plaisir de lui parler. J'ai compris qu'il ne me faisait seulement cours que pour observer mes progrès, ça à l'air tout à fait normal mais il ne me considère pas comme un être vivant mais plutôt comme un objet qui évoluerait après plusieurs modifications. Je suis un être humain, en fin pas totalement mais en tout cas je sais que je ne suis à la disposition de personne. Je fais mes propres choix et celui d'ignorer Morgan me paraît tout à fait compréhensible.
La nuit va tomber dans une demi-heure et nous sommes aux abord du palais de la Paix.
Des coups de feu retentissent dans le crépuscule. Je prends peur mais me met sur mes gardes, prête à me défendre. Des ombres courent dans tous les sens, les coups de feu reprennent leur funeste musique. Nous sommes devant le portail, grand ouvert, il a été forcé. On voit une des portes avec l'empreinte de ce que aurait pu être un bélier.
Des cris m'assaillent de toutes parts. Des gardes se défendent devant des hommes et des femmes qui les attaquent.
Diane interpelle une petite femme qui doit être une réceptionniste puisqu'elle sort de la loge qui est à l'entrée du palais :
- Que ce passe-t-il !?!
- C'est une nouvelle attaque de renégats. Venez vous mettre à l'abri !
Nous la suivons mais la nuit est arrivé et nous la perdons dans l'obsucrité du jardin. Des gardes nous prennent en chasse, Juliette et moi :
- Laissez nous ! Nous arrivons pour travaillez ici ! leur crie ma compagne.
- Non ! Vous mentez vous êtes là pour tuer le Dirigeant ! Vous êtes de la vermine. Longue vie au Dirigeant !
Le garde qui prononce ces paroles y croit vraiment. Cette soirée, je crois que je vais m'en souvenir comme preuve que tout le monde n'est pas de notre côté, ce serait trop facile sinon... Tout se passe beaucoup trop vite.
Le soldat nous rattrape et Juliette se retourne pour lui redire le but de notre présence mais l'homme n'est pas de cet avis et dès qu'elle s'est retournée, le couteau placé au bout du fusil du soldat transperce mon amie. La lame retirée, elle s'effondre, je la retiens puis la pose sur l'herbe et plante un crochet du droit dans la mâchoire du garde avec une force que je ne m'étais soupçonnée. Il tombe à terre.
Je reviens vers Juliette étendue sur la pelouse. Elle ne bouge pas. Je m'agenouille à hauteur de son visage et lui prends les épaules pour qu'elle me regarde dans les yeux quand je lui dis :
- Tiens bon, je vais te soigner, n'ai pas peur, ça ne fait pas mal.
Je suis sur le point de puiser dans mes dernières forces pour refermer sa blessure mais elle lève sa main et me coupe dans mon élan :
- Arrête. Je n'en vaut pas la peine. Garde tes forces pour te sauver et réussir la mission.
- Ne dis pas de bêtises.
Je pleurs.
La voix de Juliette se fait moins audible :
- Fais ça pour moi, pour toi. Je serai un poids mort si tu me soignes.
- Non, guérie, tu iras beaucoup mieux, voyons c'est logique !
Je crie intérieurement de rage et de peur de me retrouver sans elle. C'est ma seule amie.
- Si tu ne me laisses pas tu n'aimeras pas ma réaction.
Je n'en ai rien à faire de ce qu'elle me dit, je commence à rassembler mon énergie et le cercle de bois s'anime. À ce moment là je ne mesurais pas la conséquence de mon geste. Elle avait déjà pris sa décision et ne changerait pas d'avis.
- Katelynn, ne le fais pas, tu vas le regretter. Tiens prend ça.
Elle me tend le bouton que je lui ai donné ce matin.
- Garde le, ce sera un souvenir. Et rappelle toi que tu es forte et que tu vas réussir.
Sur ces paroles, elle matérialise de l'eau, grâce à ses capacités d'Élémentaire. Juliette fait éclater la bulle de liquide, qui bouche bientôt ses orifices respiratoires.
Elle se noie volontairement.
Je reste pétrifiée devant cette scène. Je rêve ? Oui, serait la réponse que je préférerai. Mais les hoquets secs et rapides de Juliette me font me rendre compte que je suis impuissante. Après plus de trente secondes sous l'eau, elle part, trop loin de moi dans un monde inconnu où je ne peux pas la suivre.
Elle rend son dernier souffle.
Je tremble et ne peux plus bouger. Je n'arrive qu'à serrer fort le bouton beige dans ma main.
Juliette s'est tuée ! Pourquoi ?! Je hurle, le soldat essaye de se relever mais je le fais avant lui et lui donne un monumental coup de pied dans les côtes. Je hurle de rage une seconde fois.
Juliette, mon amie, m'a abandonnée ! Elle s'est suicidée alors que je pouvais la sauver ! Je continue à hurler dans la nuit. Je m'en fiche si on m'emmène ou que l'on me tue en me croyant partisane de ces "renégats".
Je crie toujours quand j'essaye, dans un dernier moment d'espoir, de prendre le poul de Juliette une suprême fois mais cet ultime geste ne fait qu'avérer le fait qu'elle soit morte. Morte. Je répète ce mot dans ma tête et reprend mes hurlement dans l'obsucrité. Des larmes brouillent ma vue.
Des bras bloquent les miens dans mon dos. Je me débats et une voix masculine me chuchote doucement à l'oreille :
- Chut... Calmez-vous...
- Non !
Il me retourne et je voie le visage de Morgan qui se découpe dans la nuit. Ses yeux verts luisent dans le noir.
- Venez, il faut rentrer.
- Je ne peux pas la laisser là, je montre le corps de mon amie.
- Que s'est-il passé ?
- Elle s'est tuée.
Il me regarde avec une lueur de compassion qui disparaît vite :
- Non, il faut la laisser là.
Je réussis à me libérer de son emprise et me révolte :
- Vous ne comprenez pas ! Cette fille là-bas était mon amie! Elle s'est donné la mort alors que je pouvais la sauver ! C'est sa faute à lui !
Je me jette sur le soldat à terre et le roue de coups.
- Arrêtez!
Les bras de Morgan me soulèvent et il me cale sur son épaule comme un sac à patate, la tête en bas sur son dos et les pieds sur sa poitrine, il me tient les jambes. J'essaye de le faire lâcher prise mais je m'épuise et abandonne rapidement. Je suis éreintée et incapable de faire autre chose que dormir.
Morgan se met en marche, les petites secousses me bercent et je sombre dans le sommeil.
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