36 - Clyde
« There are things that we can have, but can't keep. »
- « One more light » de Linkin Park.
Comment dire Adieu ?
Je ne parle pas d'un « à bientôt », d'un « salut » ou même d'un « au revoir » ; je parle de l'adieu, le vrai, le concret, le définitif.
Comment tourner la page, passer à autre chose et juste prétendre que tout va bien quand tout va mal ?
Je vais vous répondre. Ce n'est pas possible. On ne peut pas juste faire une croix sur quelqu'un qu'on a tant aimé. C'est ainsi, une part de cette personne est gravée en nous pour toujours, une part de mon coeur lui appartiendra à tout jamais. Car même si elle a fait des erreurs, elle a aussi beaucoup fait pour moi, tellement. Sans elle, je ne serais pas devenu l'homme que je suis aujourd'hui.
Même la mort n'arrêtera pas mon amour.
C'est impossible.
Certains amours n'ont pas de limites.
J'enfilais ma veste de costume noire face au miroir reflétant l'image d'un homme que j'avais du mal à reconnaître : pâle, fatigué, démunis. Aujourd'hui ne serait pas un jour facile.
On frappa doucement à la porte avant qu'elle ne s'ouvre, laissant entrevoir Ed accompagné de Mercy.
– Tu es prêt, Coal ? demanda-t-il, son regard brillant de compassion.
Je fermais les yeux une seconde en soupirant avant de me retourner pour brandir ma cravate.
– Je ne sais pas faire le noeud, avouai-je alors que Mercy s'avançait vers moi.
– Je m'en occupe, déclara-t-elle en la nouant autour de mon cou pour l'attacher avant d'épousseter, d'un geste machinal, les épaules de ma veste immaculée, C'est bon.
– Où est Jared ? demandai-je à Ed.
– Il y est déjà. Il discutait avec le prêtre quand je l'ai eu au téléphone. Tu es sûr que tu veux y aller ? s'inquiéta-t-il en me fixant.
– Ai-je vraiment le choix ?
– Si c'est trop difficile pour toi, les gens comprendront. Personne ne t'en voudra, Coal. Il ne te suffit que d'un mot, un seul et on part où tu veux, tout de suite. Dis-moi où tu souhaites aller, au bord de la mer ou en Norvège, et on aura qu'à partir ; lever le pied. Tu as le droit de prendre le temps d'aller mieux.
Sa proposition était si tentante. Ça aurait été si facile de dire oui : «oui j'en ai envie, oui je veux partir». Mais ce serait fuir, fuir sans dire au revoir, sans affronter mes combats, et ça, je ne pourrais m'y résoudre. C'est une dernière bataille que je dois mener.
– Non, je dois le faire.
Ed hocha la tête, compréhensif.
– Je conduis, conclu-t-il, Descends quand t'es prêt, mon vieux.
Lui et Mercy quittèrent la pièce. Je regardai autour de moi, jetant un dernier regard sur mon costume impeccable, sur cet homme qui ne me correspondait pas, puis me dirigeai vers mon lit pour m'emparer de mon manteau et de mes partitions.
En sortant dans le couloir, mes yeux se posèrent quelques secondes sur la porte de la chambre d'Eleanor, je détournais la tête et descendais les escaliers pour rejoindre la voiture où Ed, Mercy et Steven m'attendaient.
Le trajet jusqu'à l'église se passa dans un silence pesant, personne n'osait parler, ils ne savaient trop quoi dire. Il y a certaines situations où les bons mots n'existent pas.
Arrivé, je regardais l'église quelques instants, hésitant à rentrer. Le ciel était d'un bleu éclatant aujourd'hui ; un temps radieux pour un enterrement.
– On y va ? demanda Ed en posant sa main sur mon épaule alors que je hochais la tête et pénétrais dans les lieux.
– Bonjour Monsieur Coal, m'adressa le prêtre en venant vers moi pour me serrer la main, Toutes mes condoléances.
– Merci, mon père, lui répondis-je en m'avançant dans l'église, mes yeux se décollant difficilement du cercueil placé en son centre.
Quelques personnes étaient déjà arrivées, je m'avançais vers les petits attroupements présents que je connaissais pour les saluer. Je fus surpris de voir Richard Wilkins, au fond de l'église, accompagné de sa femme et de quelques Red Storms.
– Bonjour, Richard.
– Bonjour Coal. Je te présente toutes nos condoléances. On est venu pour te soutenir dans ces moments difficiles. Ces derniers temps, les Red Storms et les Sinners se sont beaucoup rapprochés, sache que j'apprécie sincèrement cette collaboration. Tu es un type bien, Coal. Je suis désolé pour tout.
– Merci, votre présence me touche et je ne vous remercierai jamais assez pour l'aide que vous nous avez apporté, ces derniers temps. Par contre, pour moi, c'est fini. Je ne serais plus là. Je vais quitter les Sinners. Je suis resté en ville que pour l'enterrement, mais je m'en irai juste après. Il n'y a plus rien qui me retient ici. Je laisse les rennes à Jared et Ed, ils sauront gérer les affaires bien mieux que moi.
– Je suis désolé de l'apprendre, déclara Richard en acquiesçant face à mes explications, Mais je pense que c'est une bonne chose pour toi. Tu n'as jamais eu l'air vraiment heureux dans cette vie. J'espère que tu trouveras ce que tu cherches. Tu es encore jeune, le monde est à toi.
Je hochai la tête, peu convaincu, et les saluait pour me diriger vers Jared qui se tenait près de l'autel avec Maria, sa mère. Il se tourna vers moi à mon arrivée et me fit une accolade.
– Je suis là, mon frère, me glissa-t-il à l'oreille.
– Merci, Jared. Merci pour tout.
– Pas de ça entre nous, Coal, souligna Jared, Ne me remercie jamais d'être là pour toi. C'est normal. Tu es ma famille.
Ces mots me touchèrent plus que ce qu'il ne pouvait l'imaginer. Il avait raison, Jared était ma famille, il en avait toujours été ainsi.
– Non, vraiment, contrai-je, Je sais que je ne te le dis pas souvent, mais je t'en serais toujours reconnaissant. Je ne sais pas ce que je serais devenu sans toi. Je t'aime mon frère.
– Mon petit Clyde, s'exclama Maria en venant vers moi, les larmes aux yeux, et en ouvrant ses bras pour m'enlacer, Je suis tellement désolée. Comment tu te sens, mon ange ?
– Ça va. Ce n'est pas facile mais ça va. Merci d'être là.
– C'est normal, mon coeur. Tu l'as vue ?
Je jetai un coup d'oeil vers le cercueil ouvert et hochai négativement la tête.
– Non, pas encore. Je vais y aller, indiquai-je en lâchant sa main pour me diriger vers le centre.
Mes pas étaient lents, infiniment lourds. Chaque mètres qui se réduisaient me rapprochaient de la réalité, de celle que j'avais perdue. J'arrivai finalement devant le cercueil et posai mon regard sur ses cheveux parfaitement coiffés, ramenés sur sa poitrine. Elle avait l'air si paisible, pour la première fois depuis des années, je reconnaissais la femme que j'avais connue.
– Bonjour maman, soufflai-je face à son corps inerte.
Des images de mon enfances me frappèrent. Tout mes souvenirs, le pire comme le meilleur, m'assaillirent violemment : une glace qu'on partageait au bord de la mer, des heures à apprendre les bases du piano avec cette patience qui n'appartenait qu'à elle, la berceuse qu'elle jouait avant de m'endormir, mais les larmes aussi, la peine, toutes ces fois où j'ai vu mon père lui infliger des coups alors qu'elle restait muette. Il y a eu du bon, il y a eu du moins bon. Je lui en ai beaucoup voulu de ne pas s'être battue, d'avoir été si aveuglée par l'amour, au point de ne plus pouvoir distinguer le bien du mal. Mais malgré tout, c'était ma mère et je l'aimais de toute mon âme, de tout mon coeur.
La perte d'un parent, bien que dans l'orde des choses , demeurent infiniment difficile. C'est accepter d'enterrer une partie de son passé. Quand on est enfant - avant de rencontrer des amitiés et des histoires d'amour, de construire sa vie - il y a toute une période où nos parents représentent toutes notre vie, c'est notre monde tout entier. Dire au revoir, c'est voir ce monde exploser.
– Nous allons commencer, m'indiqua doucement le prêtre en posant sa main sur mon bras, C'est bon pour vous ?
J'acquiesçai et me dirigeai vers le premier rang pour m'asseoir aux cotés de Jared et Maria, ainsi que d'un oncle que je n'avais que brièvement connu.
Puis l'office commença, une suite de paroles que j'avais du mal à suivre, mon regard trop figé sur le visage de ma mère. Plusieurs personnes parlèrent, quelques discours furent prononcés, des souvenirs évoqués, des chansons que ma mère adorait résonnèrent; et pendant tout ce temps, je n'arrivais pas à prendre conscience de la situation. Ça faisait des années que je me préparais à ce jour, sachant qu'il pouvait survenir d'un instant à l'autre. Après tout, ça faisait beaucoup trop longtemps que la vie de ma mère ne tenait plus qu'à un fil. Mais j'avais beau savoir que ça devait arriver, la douleur n'en fut pas moins forte le moment venu.
– Coal, c'est à toi, m'intima doucement Jared en me donnant un léger coup de coude alors que je relevais la tête pour croiser le regard du prêtre qui m'interpellait.
Je me levai, la partition en main, et m'avançai vers le piano, situé à droite de l'autel. En prenant place sur le tabouret, je tremblai, perturbé fac aux yeux de la foule qui me fixaient.
– C'est ma mère qui m'a fait découvrir le piano, commençai-je en déglutissant, Elle ne savait pas alors qu'elle venait de me faire rencontrer ce qui deviendrait ma plus grande passion. On a toujours partagé cet amour du piano, de la musique. Les mélodies nous sauvaient quand les mots ne suffisaient pas à exprimer ce qu'on ressentait. Maman, aujourd'hui, j'aimerai partager ça avec toi, pour la dernière fois.
Posant mes doigts sur le clavier, je savourais le contact familier de l'ivoire contre ma peau avant de commencer à jouer. Je plaquais les accords comme si c'était la dernière fois que j'en avais l'occasion, le dernier moment pour dire à ma mère à quel point je l'aimais. La mélodie de la chanson One more light de Linkin Park résonna dans l'église, explosant dans ce silence religieux. Puis je commençais à chanter, moi qui ne chantais pourtant jamais, je débitais les paroles, les laissant s'échapper sans pouvoir les retenir, les voyant s'écraser sur les gens qui me fixaient, les yeux embués de larmes. Ces mots et cette mélodie exprimaient à la perfection tout ce que je ressentais, la difficulté de l'avoir perdue, le deuil, les doutes, l'espoir, toutes ces questions qui faisaient encore des loopings dans ma tête, l'injustice de notre monde. Cette chanson n'avait pas le pouvoir de la ramener, j'en avais parfaitement conscience, mais dans un sens elle me soulageait, elle résumait avec justesse l'amour que je lui portais. Quand la dernière note s'acheva, je rejoignis ma place en évitant le regard des gens et retournais m'asseoir pendant la fin de la cérémonie. C'est seulement là, alors que Jared me prenait la main, la serrant fortement, que je constatais que pleurais, des larmes traitresses sillonnant silencieusement mon visage.
A la fin de l'office, les gens défilèrent pour me présenter leurs condoléances ; je ne réussi à percevoir rien d'autre qu'un mer de visages à qui je faisais des polis signes de tête en retour. Quand la plupart des personnes furent passées, je sortis à l'arrière et inspirai une grande bouffée d'air pour vaincre cette désagréable sensation d'étouffer.
– Salut, souffla une voix dans mon dos, m'interrompant dans ma contemplation du cimetière.
Je me retournai pour croiser le regard d'Eleanor. La voir me fit l'équivalent de se prendre une claque en plein figure. Je réalisai soudain à quel point elle me manquait.
– Je suis désolée pour ta mère, Clyde, continua-t-elle.
Ses mots qui m'avaient pourtant été adressé tellement de fois aujourd'hui ; dans sa bouche, il semblait sincère, juste. Elle avait le ton de quelqu'un qui sait exactement ce que c'est que d'enterrer sa mère.
– Merci, acquiesai-je difficilement.
– Comment tu te sens ?
– Ça va, la rassurai-je.
J'avais répété ce mensonge si souvent au cours de la journée qu'il sonnait presque vrai dans ma bouche. Pas tout à fait, à l'évidence, car Eleanor fronça les sourcils.
– Non, ça va pas, en déduit-elle en me fixant.
– Non, ça va pas du tout, confirmai-je.
Puis j'explosai en sanglot, les larmes devenant trop difficile à retenir. Je m'effondrai dans ses bras alors qu'elle me serrait contre elle en silence. Notre étreinte dura longtemps, une petite éternité, jusqu'à ce que je m'écarte. Les larmes avaient fini par se tarir.
– Qu'est-ce que tu fais là ? finis-je par demander.
– Où est-ce que je pourrais bien être d'autre ? Clyde, oui tu m'as menti et j'ai été énervée. Je suis partie car c'était ce qu'il fallait faire. Je devais prendre de la distance, pas juste avec toi, avec tout le reste. Mais ça ne veut pas dire que je ne t'aime plus. On s'est promis d'être toujours là l'un pour l'autre dans les moments difficiles. Je suis là, Clyde.
Je voulais la remercier mais les mots n'étaient pas suffisant, alors je me penchai et m'emparai de ces lèvres. Ce fut bref, presque un frôlement, un merci chaste et silencieux.
– Tu veux marcher un peu ? proposai-je, Je ne supporte plus ce cimetière.
Elle acquiesça et je fis un signe de tête à Jared qui discutait avec Ed pour lui indiquer que je partais.
Nous marchâmes un long moment, sans réelle destination. Je lui posais des questions sur ces deux derniers mois, des choses anodines, je lui racontais les dernières nouvelles de la maison, les récentes mésaventures de Jared avec les filles. Elle éclata de rire quand je lui exposai la fois où une blonde, complètement cinglée, était venue jouer la sérénade sous sa fenêtre, réveillant toute la maison. Je lui parlais aussi de ma mère, de la femme qu'elle avait été, je n'évoquais que les bons souvenirs. Ça faisait un bien fou de discuter normalement après cette journée éprouvante, pouvoir juste parler de tout et de rien était une libération. Je me sentais, pour la première fois depuis l'annonce sa mort, un peu moins triste.
– Ça me fait plaisir de te voir, glissai-je alors qu'on flanait le long du fleuve, bien trop habillés comparé aux autres passants.
– Moi aussi, Clyde, vraiment, approuva-t-elle en faisant une pause avant d'ajouter, Jared m'a dit que tu allais quitter la ville.
– Oui, je suis rentré en contact avec mon oncle. Ils se sont disputés, il y a des années, avec ma mère à cause de mon père. C'est un homme bien. Je vais aller passer quelques temps chez lui, il a un ranch dans la Sierra sur la côte Ouest. Ensuite, je verrais ce que je ferais. Je veux plus de cette vie de gang et de trafique. Ce n'est clairement pas fait pour moi, ça ne l'a jamais été. Je suis à bout, exposai-je en me demandant ce qu'elle pensait de mon départ, Et toi Eleanor, que comptes-tu faire maintenant ?
– Ça dépendra.
– De quoi ?
– De toi.
Je fronçais les sourcils ; même si elle était présente aujourd'hui pour me soutenir, j'avais considéré qu'elle ne pourrait jamais vraiment me pardonner. Dans mon esprit, notre histoire s'était arrêtée définitivement à l'instant où j'avais décidé de lui mentir. Certaine erreur ne sont pas pardonnables.
– J'ai beaucoup réfléchi. Clyde, tu n'aurais pas dû prendre une décision qui n'appartenait qu'à moi. Mais je ne t'en veux plus, la situation était tellement, tellement compliquée. Qui sait ce que j'aurais fait à ta place. Je t'aime, Clyde, voilà ce que je retiens. Ma vie va être courte et c'est ça le combat que j'ai choisi mener. C'est toi, ça a toujours été toi.
Je lui pris la main en silence et contemplai l'eau paisible de l'East river.
– Il y a autre chose, ajouta-t-elle calmement.
Son air soudainement sérieux me surpris.
– Que ce passe-t-il ? m'inquiétais-je.
N'avions-nous pas eu notre lot de révélations ces dernier temps ?
– Je suis enceinte.
Je lâchai sa main en étouffant une exclamation de surprise et reculai.
– Je suis le père ?
– Non, c'est Jared, ironisa-t-elle en soupirant, Clyde ! Bien-sûr que tu es le père.
– Bordel, C'est une sacrée nouvelle, m'exclamai-je sans vraiment réaliser, Non vraiment, Bordel! Tu es sûre ? Tu le sais depuis quand ? Tout va bien ? Qu'est ce qu'on va faire ? ça fait deux mois, non ? Tu penses que... débitai-je, lui assénant mes questions d'une voix paniquée alors qu'elle posait ses deux mains sur mes épaules pour me calmer.
– Respire, Clyde, m'ordonna-t-elle. Oui, je suis sûre, j'ai fais une prise de sang. Je le sais depuis hier. Le bébé va bien, pour l'instant. Je ne sais pas ce qu'on va faire et oui, ça fait deux mois. Ecoute, je suis désolée de t'annoncer cette nouvelle comme ça, je ne voulais par le faire aujourd'hui, pas le jour de l'enterrement de ta mère. Mais j'ai eu la confirmation et je ne pouvais pas te cacher ça.
– Tu sais ma mère ne t'en aurait jamais voulu de m'apprendre cette nouvelle aujourd'hui. Au contraire, elle aurait adoré entendre cette annonce. Elle a toujours voulu des petits-enfants.
– Qu'est-ce que ça veut dire ? Que tu veux cet enfant?
– Je ne sais pas. Qu'est-ce que tu en penses ? Si tu souhaites cet enfant, je serais là pour vous. Je l'aimerai comme personne et je m'en occuperai toujours. Mais j'ai bien conscience que tu as tout juste vingt ans et que tu es malade ; je ne peux pas t'y obliger. La décision finale te revient. Tu aimerais garder ce bébé ?
– Je ne sais pas. Est-ce qu'on a vraiment la vie qu'il faut pour avoir un enfant ? Penses-tu vraiment qu'on pourrait être de bons parents ?
– Non, on serait des parents horribles, c'est évident, plaisantai-je.
– Clyde, m'avert-il elle en fronçant les sourcils, excédée.
Je levais les mains en signe de défense.
– Plus sérieusement. Eleanor, je n'ai aucune idée de comment s'occuper d'un bébé, avouai-je, Mais tu sais, je crois que c'est le cas de la plupart des jeunes parents. Le principal c'est d'aimer son enfant. J'ai eu un père monstrueux, qui a commis des actes envers moi dont je n'arrive même pas à parler, je me suis fais la promesse que si j'avais un enfant, j'essayerai d'être le meilleur père pour lui, le meilleur exemple, la meilleure version de moi-même. Je sais qu'il y a du travail, je sais pertinemment que des fois - voir la plupart du temps- on sera dépassés. Mais on peut élever ce bébé ensemble et tout mettre en oeuvre pour qu'il devienne quelqu'un de bien, les personnes qu'on aurait dû être si le monde avait été un peu plus juste. Dans tout les cas, il faut y réfléchir, ce n'est pas une nouvelle qu'on doit prendre à la légère, on doit être sûr de notre choix. Néanmoins, quoi qu'il arrive, quoi que tu décides, je te soutiendrais.
Un sourire s'afficha sur son visage, elle passa ses bras autour de mon torse pour m'enlacer en plongeant ses yeux dans les miens.
– Tu es très convaincant, Coal.
– Tu n'as encore rien vu, ajoutai-je avec un sourire coquin alors qu'elle haussait un sourcil.
Elle laissa échapper un rire avant que son regard ne se fasse à nouveau soucieux.
– Mais si il nous arrivait quelque chose ? On a aucune famille pour s'occuper de cet enfant. Par contre, on a beaucoup d'ennemis.
– Tu oublies Jared, lui rapellais-je.
Nous nous regardâmes l'un l'un l'autre, en fronçant les sourcils, suite à ma dernière phrase.
– C'est la pire idée que tu n'aies jamais eu, m'interrompit-elle en souriant.
– Oui, définitivement, c'est une horrible idée, acquiesai-je en repensant à la vie débridée que vivait mon meilleur ami, Je me demande, d'ailleurs, comment ça se fait que le monde n'ait pas explosé au moment où j'ai évoqué cette idée. On demandera à Ed.
– Bien mieux, approuva-t-elle.
–Alors, qu'est-ce qu'on fait maintenant ?
_ J'ai entendu dire que la Sierra était magnifique à cette période de l'année, souffla-t-elle en se rapprochant avec un regard suggestif.
Je hochai la tête, vaincu.
– Allez, viens-là toi, rigolai-je en l'attirant contre moi pour l'embrasser.
Je n'oubliais pas la journée que je venais de vivre, ni ces derniers temps, et toutes les souffrances que nous avions dû accumulés : la perte d'êtres chers, la peine, l'angoisse. Je n'oubliais rien, n'effaçais rien, tous ces drames occupaient encore une grande part de mon esprit. Je savais pertinemment que seul le temps pourrait combler le vide de l'absence. Je gardais aussi en mémoire le choix que nous avions encore à faire, celui qui bouleverserait notre vie à tout jamais. A cet instant, rien n'était acquis, tout était à faire. Mais pour la première fois depuis une éternité, j'avais l'impression que l'avenir me souriait.
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