Chapitre 1 - Je serai duc
La violence. La peur. Le sang. Voilà tout ce qui avait constitué sa vie jusqu'à présent. Ali venait de fêter son seizième anniversaire. Il avait grandi éloigné de tout, dans un gigantesque château au fin fond du royaume de Lunaris. Sa mère, il ne l'avait pas connue, elle était morte en lui donnant naissance. Son père avait fini par noyer son chagrin dans l'alcool. Ali avait vécu à ses côtés et avait subi son agressivité pendant seize ans.
Ali tourna la tête et se regarda dans l'immense glace qui ornait sa chambre. Qu'allaient faire les gens lorsqu'ils allaient découvrir qu'il n'était pas celui qu'ils croyaient ? Un imposteur, c'est tout ce qu'il était. Il allait hériter un jour ou l'autre du titre de duc de son père, il aurait les pleins pouvoirs sur le duché de Ruthswald alors qu'il ne méritait rien de tout cela.
Depuis seize ans, il attendait avec impatience le moment où son père mourrait, mais il craignait aussi ce jour car il lui incomberait alors un lourd fardeau. Et ce jour était peut-être arrivé.
Il se tourna vers la fenêtre et regarda à l'extérieur. Sa chambre avait une vue impressionnante sur toute la vallée qui environnait le château. En général, le spectacle qui s'offrait à Ali était époustouflant. Les prairies verdoyantes s'étendaient à perte de vue et il pouvait distinguer au loin les paysans faisant paître leurs vaches ou travaillant dans les champs. Mais aujourd'hui, le rouge du sang et du feu avait remplacé les couleurs vives de la nature. Les paysans avaient fui et avaient cédé leur place à de nombreux soldats et cavaliers qui assiégeaient le château. Le petit village qui se trouvait en face du château, normalement si paisible, était habité par la peur et la mort. Parmi les soldats, Ali distinguait des chevaliers à l'allure fière, l'épée sortie, prête à trancher tout ce qui se trouvait sur leur chemin.
Aujourd'hui, son père allait mourir, Ali en était persuadé. Et lui allait survivre. Angus, duc de Ruthswald, avait pris le parti du roi Aurèle au moment où une rébellion commença à se monter contre lui. Angus envoya des troupes pour combattre les révolutionnaires, mais elles furent décimées. Et maintenant, il n'y avait plus assez de monde pour défendre le château. Les soldats restants mouraient tous les uns après les autres.
Ali se lécha nerveusement la lèvre inférieure. Le pari qu'il s'apprêtait à faire était risqué, mais c'était soit ça, soit la mort. Dans une heure tout au plus, le duché de Ruthswald allait tomber aux mains des révolutionnaires. Aurèle était déjà mort, cela ne servait donc à rien de résister.
Quelqu'un toqua à la porte de la chambre, faisant sursauter Ali. Un serviteur se glissa à l'intérieur. Il s'inclina respectueusement devant le jeune homme avant de prendre la parole.
— Monsieur, les chevaliers sont rentrés dans le château. Le nouveau roi est dans la salle de cérémonie.
Ali leva les yeux vers le serviteur, intrigué.
— Le nouveau roi ? Et qu'en est-il de mon père ?
— Il est dans la salle de cérémonie avec le roi.
Ali remercia le serviteur et sortit de sa chambre. Il se dirigea vers la salle de cérémonie. Sa longue épée battait contre sa cuisse. Son cerveau fourmillait de dizaines de questions. Que faisait le roi ici ? Et comment se faisait-il que son père ne soit pas encore mort ?
Tous les regards se tournèrent vers Ali lorsqu'il entra dans la salle de cérémonie. Les chevaliers sortirent leur épée, prêts à en découdre. Il les toisa du regard et une moue de dédain se dessina sur ses lèvres. Il vit le roi assis au fond de la salle, dans le trône dans lequel s'installait normalement son père. Angus était à genoux devant lui, les mains attachées dans le dos. Il n'en menait pas large. Ali inspira longuement, appréciant le sentiment de pouvoir qu'il avait à voir son père hors d'état de nuire.
— Tu n'as pas l'air particulièrement troublé de voir ton père dans cette situation, ni de voir autant de chevaliers étrangers chez toi, remarqua le roi, rompant le silence lourd qui régnait dans la salle.
Ali lui sourit froidement. Il s'inclina légèrement avant de s'adresser directement au roi.
— Peu de choses m'intimident, votre Altesse.
Le roi lui lança un sourire amusé. Ce gamin avait de l'audace et ne semblait pas avoir peur. Il avait toutes les qualités d'un bon chevalier.
— Quel âge as-tu, petit ? lui demanda le roi.
Ali fronça les sourcils. Il avait toujours fait plus jeune que son âge, mais la dénomination de « petit » lui déplaisait au plus haut point.
— J'ai seize ans. Et vous, comment vous appelez-vous ? répondit-il avec insolence.
— Je suis Adams, ravi de faire ta connaissance. Dis-moi, partages-tu les opinions de ton père ?
Ali retint un sourire. Il s'attendait à cette question.
— Je ne les partage pas. D'ailleurs, je n'ai jamais rien partagé avec lui. Il n'est rien de plus qu'un ivrogne violent. Je le déteste.
— Parfait. Cela ne te dérangera donc pas si on l'exécute devant toi ?
— Non. Qu'attendez-vous pour le faire ?
— Un de mes chevaliers comptait se charger de son cas personnellement, mais il n'est pas encore arrivé.
Ali hocha la tête. C'était peut-être pour lui le moment de lui délivrer le discours qu'il avait préparé. Mais il se demandait s'il allait en avoir besoin. Aucune des personnes présentes n'avaient l'air d'en avoir après lui.
— Pourquoi ne me tuez-vous pas ? demanda Ali.
Le roi se mit à rire doucement.
— Je ne touche pas aux enfants, encore moins à ceux qui semblent avoir un potentiel tel que le tien.
— A quoi voyez-vous que j'ai du potentiel ?
Le roi ouvrit la bouche pour répondre lorsque la porte de la salle de cérémonie claqua violemment. Il lança un sourire carnassier au chevalier qui venait de rentrer.
— Flavio, enfin te voilà ! lança-t-il, l'air satisfait. Nous n'attendions plus que toi pour s'amuser un peu.
Le dénommé Flavio était impressionnant. Tout en lui respirait la force, la puissance et le courage. Il portait une lourde armure noire couverte de sang. Une longue cape couvrait ses épaules et descendait jusqu'au sol. Il tenait son casque à la main ce qui donna à Ali l'occasion d'observer son visage. Il avait les traits fins, la peau très blanche, et les yeux noirs et profonds comme un puits. Ses cheveux noirs et un peu longs tombaient en mèches désordonnées sur son front. Ali se sentit minuscule lorsque le fameux Flavio passa près de lui. Il sortit son épée et en admira le tranchant. Elle brillait tellement qu'il devait pouvoir se mirer dedans. Sans dire un mot, il tendit son épée et la plaça sur la gorge d'Angus. Le père d'Ali sursauta et leva un regard larmoyant vers Flavio.
— Pitié... balbutia-t-il.
Flavio ricana légèrement et baissa son épée. Il s'approcha vers Angus et s'accroupit près de lui.
— As-tu eu pitié de mon père lorsqu'il t'a demandé d'épargner sa vie ? lui susurra-t-il à l'oreille.
— Je... Je ne sais pas de quoi vous parlez... Pitié...
— Cela n'a pas d'importance, mais laisse-moi te rafraîchir la mémoire. Mon père travaillait dans une des fermes du village. Tu considérais qu'il ne produisait pas assez de blé, alors que l'année avait été dure, des inondations avaient détruit nos plantations, nous n'avions même plus de quoi nous nourrir. Alors tu as pris ma mère. Tu l'as violée sous mes yeux. Puis tu as tué mon père de sang-froid. As-tu violé tant de femmes dans ta vie que tu ne te rappelles même plus de celle dont je parle ?
Angus secoua la tête. Il savait qu'il était une cause perdue.
— Figure-toi qu'elle s'est suicidée une semaine plus tard.
Sur ces mots, Flavio se releva et fit un geste ample du bras. Et la tête d'Angus roula au sol.
***
Et voilà le premier chapitre de ma toute nouvelle histoire !!
Qu'en pensez-vous ?
Hésitez pas à me donner votre avis, cela me motive beaucoup hihihi !
Je vous fais de gros bisous !
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