Chapitre 6

  «Elle n'est pas comme les autres et c'est ça qui m'a fait tomber amoureux d'elle.» 

Point de vue de Justin. 

Je frappai trois coups fermes contre la porte puis passai une main dans mes cheveux en attendant impatiemment que l'on m'ouvre. J'entendis des pas se rapprocher, la poignée être saisie et enfin, la porte s'ouvrit. Elle laissa apparaître Abigail, très surprise de me voir ici un samedi matin. Elle portait un mini short de sport et un débardeur - par dessus un soutien-gorge - ce qui me faisait penser qu'elle devait sortir de la douche. 

- Justin ? fronça-t-elle les sourcils.
- Ton père est là ? 

Un bruit de chaise se fit entendre derrière elle. Elle n'était pas toute seule.

- Il arrive dans quelques minutes. Il est parti faire quelques courses. Pourquoi ? 
- J'aimerais lui parler.
- Lui parler ? fit-elle encore plus confuse.

Soudain, une tête apparut derrière elle. Un mec brun aux yeux bleus était venu se présenter aux côtés de la belle fille. Je devais admettre qu'il avait bonne allure. Il faisait bien plus vieux que moi et plus mature bien que j'en avais pris de la maturité en une année. Il n'avait pas l'air enchanté de me voir. Je compris immédiatement qu'il s'agissait de ce Zac. J'avais enfin l'occasion de le rencontrer. Après un an. Il était l'un des rares qui avaient réussi à me rendre jaloux. La discussion serait cette fois-ci inévitable. 

Abigail se retourna quelques secondes vers son copain avant de reposer ses yeux sur les miens. Elle semblait très mal à l'aise tout d'un coup. Je ris intérieurement. J'avais oublié à quel point c'était amusant de voir Waller gênée. 

- Euh... se racla-t-elle la gorge. Je te présente Zachary mon petit-ami et Zac je te présente Justin... Mon... Enfin voilà, tu le connais. 

Mon ? Qu'avait-elle voulu dire ? Ex petit-ami ? 

- Salut, dis-je avec un geste nonchalant de la main.

Je ne dirais pas que j'étais enchanté de le rencontrer car ce n'était pas vrai. Je n'allais pas faire l'hypocrite.

- Salut, fit-il du même ton.
- Alors ? me reconcentrai-je sur ce que j'étais venu faire.
- Qu'est-ce que tu veux lui dire ?
- Je veux prendre de ses nouvelles. 

Elle semblait ne pas comprendre où je voulais en venir comme si ce n'était pas possible que je vienne parler à son père pour prendre de ses nouvelles. Il était vrai que je l'avais envoyé à l'hôpital - il ne fallait pas l'oublier - mais c'était justement une des raisons pourquoi je devais prendre de ses nouvelles. Mais j'étais surtout là parce que la façon dont elle avait fuit la dernière fois m'avait laissé perplexe et ainsi j'étais certain que son père apporterait des réponses aux questions que je me posais. 

- Prendre de ses nouvelles ? répéta son copain.

J'élevai un sourcil tout en gardant mon regard sur Abigail. De quoi se mêlait-il ? Elle vit mon début d'agacement et posa une main son torse pour lui faire comprendre qu'il n'avait pas à intervenir.

- Je pense qu'il vaut mieux que tu repasses plus tard, me dit-elle.
- Quand ?
- Je t'enverrai un message.
- Pourquoi tu veux prendre de ses nouvelles ? reprit ce Zac.
- Zac, s'il-te-plaît.
- C'est quoi le problème ? demandai-je en me tournant vers lui.
- Ce n'est pas toi qui l'as envoyé à l'hôpital ?
- Si.
- Et tu veux prendre de ses nouvelles ? 

Je souris narquoisement. N'était-il quand même pas en train d'essayer de me faire face ?

- C'est grâce à moi si ta copine est encore en vie aujourd'hui alors si tu essayes de me faire passer pour le méchant, c'est raté, lui dis-je droit dans les yeux.

Je me tournai vers Abigail qui ne savait plus où se mettre. 

- J'attends ton message, lui dis-je.

Je leur tournai le dos et partis sans plus tarder. Quel coincé ce mec ! Obligé de rester coller au cul de sa petite-amie pour s'assurer qu'elle ne ferait rien derrière son dos. Je voulais bien comprendre qu'il avait peur que quelqu'un comme moi lui vole sa copine mais il s'agissait du père, il pouvait lâcher l'affaire. 

Je retournai dans la voiture quelque peu énervé. Je soufflai et pris quelques secondes pour me calmer. Il ne fallait pas que je retombe dans mes travers où je partais au quart de tour pour un rien. J'eus à peine le temps de mettre la clé dans le contact quand je vis Abigail sortir de son immeuble presque en courant. Elle se mit à chercher quelque chose du regard et je devinai que c'était moi qu'elle cherchait. Je sortis alors de la voiture pour qu'elle puisse m'apercevoir étant donné que je ne possédais pas la même bagnole que l'année dernière. 

- Waller, l'appelai-je. Qu'est-ce que tu fous ?
- Ah tu es là toi ! 

Elle s'avança vers moi l'air déterminé. J'espérais qu'elle n'était pas descendue pour me prendre la tête. 

- Je suis là, affirmai-je.
- Tu étais sérieux tout à l'heure ?
- Oui ? fus-je intrigué de sa question.

Elle fronça les sourcils tout en intensifiant son regard sur le mien.

- Mais qu'est-ce qu'il y a d'étrange dans le fait de vouloir prendre des nouvelles de ton père ? Tu sais qu'on a beaucoup parlé après son réveil et que je lui ai demandé de prendre soin de toi. Ce n'est pas parce que je suis parti que j'ai oublié qu'il y a un an de cela, ton père te maltraitait. 

Elle ne sut plus quoi dire sûrement choquée de voir que je me souciais encore beaucoup d'elle.

- Je ne pensais pas que ça te préoccupait encore Justin. 

J'ébauchai un sourire.

- Bon alors, tu es convaincue ? 
- Je lui dirai, ne t'inquiète pas, sourit-elle en retour.
- Merci.
- Merci à toi, me dit-elle en affichant un sourire sincère. 

Nous nous fixâmes pendant quelques longues secondes. Le temps semblait s'être arrêté pour je ne savais quelle raison. Ses yeux bleus captivaient toute mon attention. C'était comme si je ne pouvais décoller mon regard du sien. Je ne savais pas ce qui était en train de se passer. Puis, dans un coup de vent, elle s'en alla me laissant seul, béat. 

... 

Il était déjà le soir. J'étais allongé sur mon lit en attendant qu'Abigail m'envoie un message. Notre échange de regards me restait en tête. Ses yeux m'avaient clairement troublé. J'avais eu l'impression de les redécouvrir. C'était peut-être parce que, pour la première fois, j'avais senti que son "merci" était sincère, de ses iris à son sourire. La sonnerie de mon téléphone me coupa dans mes pensées. C'était elle.

«Mon père nous invite au restaurant ce soir pour avoir une bonne discussion. Il est ravi de savoir que tu veuilles prendre de ses nouvelles.»

«Nous ?» 

«Toi et moi.» 

«Et ton mec ? Il ne va pas encore s'énerver ? » 

«Il est OK avec ça. Et puis, nous ne serons pas seuls.» 

«Et la copine de ton père ? Et Julian ? Ils ne viennent pas avec nous ? » 

«Elle est encore en voyage mais Julian sera aussi avec nous.» 

Encore ? N'avait-elle jamais de jours de repos ? C'était vraiment suspect.

«D'accord. Je vais demander la permission à ma copine.» 

«Tu demandes la permission maintenant ? Bieber n'est donc plus le mâle dominant ? » 

Je souris. Elle se souvenait de toutes les fois où je lui avais rendu la vie dure en allant à des soirées débordant de filles sans lui demander son avis alors qu'il se passait clairement quelque chose entre nous. En y repensant, je n'aurais jamais dû faire ça. Elle avait été vraiment patiente avec moi.

«C'est fini. Je me suis rangé du côté des good boys.» 

«Je suis fière de toi.» 

«Te moques pas de moi Waller.» 

«Je ne me moque pas. J'ai attendu longtemps le jour où Justin Bieber me dirait qu'il n'est plus un fuckboy.» 

«Et bien tu n'as plus besoin d'attendre.» 

«Bon, vas demander la permission avant qu'elle ne te dise qu'il fait déjà trop nuit pour sortir.» 

Je ris et verrouillai mon téléphone. J'étais content de voir qu'elle ne se gênait plus pour me taquiner comme avant. C'était beaucoup mieux que des moments de silence. Nous étions sur la bonne voie pour devenir de bons amis. Je sortis de ma chambre et allai trouver ma mère pour lui annoncer la nouvelle. 

- Je vais dîner au restaurant avec Abigail et son père ce soir, lui dis-je avec un sourire amusé sur mes lèvres.

Ses yeux s'agrandirent par le choc de cette annonce. Mon sourire s'allongea.

- Qu'est-ce que tu as fait encore ? 
- Rien. J'ai juste voulu prendre des nouvelles de son père. 
- Est-ce que sa copine sera là ?
- Non. Abigail m'a dit qu'elle est encore en voyage. 

Elle me lança un regard dubitatif. Je partageais son sentiment. 

- Tu vas mettre au courant Kiara ?
- Oui. Je ne veux pas qu'elle pense encore une fois que je lui cache des choses. 
- C'est très bien Justin. Tu me diras comment s'est passé le dîner. Ce serait bien que tu essayes de leur soutirer des informations. Tu sais, comme tu le fais si bien, en les mettant dans une impasse. 

J'acquiesçai et retournai dans ma chambre. Je m'assis au bord du lit et composai le numéro de ma copine. J'avouais être un peu nerveux. Je ne voulais pas me disputer avec elle et surtout pour quelque chose de futile comme ça. Kiara me laissait beaucoup de liberté mais s'il s'agissait d'Abigail, cela pouvait être différent. Les bips s'enclenchèrent. Mon pied gauche tambourinait la moquette de la pièce. Elle n'avait pas encore décroché que je voulais déjà raccrocher. Mon ancien moi n'aurait même pas songé à envoyer un message. 

- Allô bébé ? 
- Ça va ? 
- Tu me manques mais je vais bien et toi ? 
- Tu me manques aussi Kiara. Tout se passe bien en France ?
- Oui mais je veux juste te rejoindre et retrouver ta famille.
- Bientôt.
- J'espère.
- Il faut que je te dise quelque chose. Je vais manger avec Abigail et son père ce soir. Il ne faut pas que tu t'inquiètes. C'est seulement pour être sûr de la santé de son père. Tu sais, je t'en ai parlé.
- Bébé... souffla-t-elle.
- Je sais que ce n'est pas facile pour toi. Je ne te demande pas de fermer les yeux là-dessus mais juste de me faire confiance et tu verras que j'ai toujours été droit envers toi.
- Tu sais Justin que je ne t'interdirai jamais quoi que ce soit mais tu m'as dit la dernière fois que c'était ta mère et ta sœur qui continuaient de la voir alors que toi aussi.
- C'était son père que j'étais venu voir. C'est lui qui a décidé qu'on dîne ensemble ce soir.
- Bébé, ne rejette pas la faute sur les autres à chaque fois. Dis-moi juste que tu es resté en bons termes avec elle et je l'accepterai. 

Elle marqua une pause.

- Je l'accepterai parce que si c'est comme ça que tu es heureux, je ne t'en empêcherai pas. 

Mon cœur se gonfla. J'avais tellement de chance de l'avoir. Elle était si patiente et indulgente avec moi. Parfois je me disais que je ne la méritais pas. 

- Kiara... J'essaye de rester en bons termes avec elle, c'est vrai, avouai-je.
- C'est tout ce que je voulais entendre. Je veux juste que tu sois totalement honnête avec moi.
- Mais ça restera de l'amitié.
- Je sais mon amour. Je te crois quand tu me dis que tu as tourné la page. Je te fais confiance. Ne me déçois pas.
- Je ne te décevrai pas. Merci d'être la petite-amie parfaite. Je t'aime.
- Je t'aime aussi. 

Je raccrochai et soufflai de soulagement. Je n'aurais pas dû douter autant de son indulgence. Elle essayait toujours d'être de mon côté. Fixé, j'envoyai alors un message à Abigail.

«C'est bon, j'ai eu la permission de ma copine. Dans quel genre de restaurant on va ?»

 «Elle est cool ta copine ! Je l'aime bien ! Je crois que c'est un resto chic mais ne viens pas sur ton 31 non plus.» 

«D'accord Waller. Envoie-moi l'adresse et je vous rejoindrai directement là-bas.» 

«Tout de suite. Je te donnerai l'heure du rendez-vous.» 

Cette histoire enfin réglée, je rangeai mon portable dans ma poche et retrouvai ma sœur dans sa chambre. Elle était en train de jouer avec sa tablette numérique. Elle ne décolla pas ses yeux de l'écran bien qu'elle m'ait entendu entrer. Je me plaçai sur son lit à côté d'elle. Elle était assise en tailleur et très concentrée sur ce qu'elle faisait.

- Jazmyn, tu n'es toujours pas allée voir tes anciennes amies ? lui demandai-je.
- Non.
- Tu n'en as pas envie ? 

Elle ne répondit pas. 

- Jazmyn ? Tu peux arrêter de jouer et m'écouter ? 

Elle appuya sur pause et posa la tablette sur ses genoux. Son regard croisa enfin le mien.

- Elles ne se souviennent plus de moi, répondit-elle.
- Pourquoi tu dis ça ?
- Parce que c'est vrai.
- Mais non Jazmyn, il faut que tu ailles leur parler.
- Je ne veux pas. 

Son anniversaire était bientôt et je voulais lui organiser une grande fête. Cependant, si elle refusait de revoir ses amies, cela ne pourrait pas se faire. Je ne comprenais pas son attitude. Elle avait été pourtant très triste de les quitter l'année dernière.

- Jazmyn, ne sois pas capricieuse, insistai-je.
- Je ne suis pas capricieuse.
- Si. Je suis sûr que ça va te faire du bien de les revoir.
- Non. Elles vont m'ignorer.
- Tu t'es disputée avec elles  ?
- Non. Elles ne m'aiment juste plus. 

Je soufflai, quelque peu agacé. Que lui fallait-elle pour qu'elle accepte ? Je reçus un message d'Abigail. Elle me dit qu'ils seraient au restaurant à vingt-deux heures. Il me restait donc une heure pour me préparer. Je laissai ma discussion avec Jazmyn en suspend et partis me doucher. Je ne comptais pas me prendre la tête sur le choix de la tenue. J'optai pour un t-shirt blanc et un jean, cela ferait largement l'affaire. 

Je comptais sur ce soir pour trouver des réponses à mes questions et surtout à cette fameuse question : Julian était-il le fils d'Abigail ? Même si je m'étais dit que cela ne me regardait pas, je voulais savoir. C'était plus fort que moi. 

J'arrivai devant le restaurant indiqué à l'heure prévue. Il y avait beaucoup de monde. Ça sentait vraiment l'été. Les allées bondées de monde, le bruit des couverts, la musique en fond, l'odeur de la cigarette, c'était vraiment une bonne ambiance. Je m'arrangeai un peu devant la vitre teintée de ma voiture puis pénétrai dans l'infrastructure. Je cherchai du regard la table où était la famille. Je la trouvai au fond de la grande pièce. Abigail remarqua immédiatement ma présence et me sourit. Je lui rendis son sourire avant de me présenter à leur table. 

- Bonsoir, commençai-je.
- Oh Justin ! fit le père amicalement. 

Il se leva et me prit dans ses bras. Je fus d'abord étonné de son geste avant d'accepter son étreinte. Je n'aurais jamais cru que j'échangerais un câlin avec lui un jour. 

- Installe-toi, m'invita-t-il.

Je pris place sur la seule chaise vide qui restait. Je remarquai la présence d'une poussette à droite de Waller. Une petite tête y dépassait. Julian dormait paisiblement. Je ne pourrais pas lui faire un coucou maintenant. Mes yeux s'attardèrent donc sur sa sœur. Elle portait une robe rouge qui mettait en valeur son teint un tantinet bronzé. Elle avait laissé ses cheveux détachés, avec une raie au milieu. Elle ne portait pas de maquillage superflu ni ses lunettes. Elle était très belle ainsi. 

- Comment tu vas Justin ? me demanda le père. 
- Je vais très bien merci. Et vous ? 
- Ça va aussi. Un peu de fatigue. 
- A cause du bébé ? demandai-je. 
- Oui, entre autre.
- La mère ne vous aide pas trop il paraît.

Ses yeux dérivèrent sur sa fille qui racla sa gorge. Il se tramait un lourd secret autour de la présumé mère de Julian et même le père était dans le coup. Combien de temps cela allait-il durer ? Une serveuse vint à nous et leur sauva la mise. Elle nous servit un apéritif et le menu.

- Comment s'est passée ton année en Australie ? 
- Très bien. L'intégration a été facile. 
- Il s'est même trouvé une copine, ajouta Abigail.
- Oh... Tu as remplacé ma fille, dit-il sur le ton de l'amusement. 

Abigail et moi échangeâmes un regard gêné. 

- Elle m'a aussi remplacé, dis-je.
- C'est vrai. C'est dommage, vous aviez l'air tous les deux faits l'un pour l'autre du peu que j'ai vu et de ce que j'ai entendu.

Il me regardait avec insistance comme s'il savait quelque chose sur les sentiments que j'avais autrefois éprouvés pour sa fille. 

- On peut changer de sujet ? Ça devient trop gênant, fit remarquer Abigail.
- Pardon, je pensais que vous n'aviez pas de problème à parler de ça puisque vous avez l'air proches malgré tout.
- On essaye de faire la part des choses, dis-je.
- C'est bien. C'est mature de votre part.
- Tu sais, il a beaucoup mûri en un an, lui dit Abigail.

Je lui souris. C'était sympa de sa part de me faire des compliments devant son père même si cela ne servait à rien puisque je n'étais pas son petit-ami et qu'elle n'avait pas besoin de me "vendre" auprès de lui.

- Il paraît, fis-je modestement.
- Tu es beaucoup moins sanguin ? 
- Oui, c'est ça. D'ailleurs, je voulais encore m'excuser pour, vous savez, vous avoir envoyé à l'hôpital.
- Ce n'est pas grave. Je sais que tu as fait ça pour une bonne raison, je ne peux pas t'en vouloir. Tu as voulu protéger ma fille.
- Au moins, vous savez ce qu'il ne faudra pas reproduire avec Julian.
- Oui, c'est certain, approuva-t-il.
- Qu'est-ce qui vous a donné envie de refaire un enfant ? Je veux dire, Abigail a déjà dix-neuf ans et...
- Il n'était pas voulu, me répondit-il en me coupant la parole.
- Ah bon ? lâchai-je surpris.
- Oui.
- C'est pour ça que sa mère n'est pas souvent présente ?
- Entre autre oui, répondit Abigail.
- Mais elle ne pouvait pas prendre un congé de maternité ?
- Non... Euh... Justement parce qu'il n'était pas voulu, elle n'en a pas pris. 

Je fronçai les sourcils. Je n'étais pas sûr d'avoir bien compris où elle voulait en venir. Le père ne disait rien, comme s'il ne voulait pas rentrer dans la discussion. C'était vraiment étrange. Je me demandais s'il était capable de couvrir le fait que sa fille avait un fils. Et si oui, pourquoi ? Je devais m'égarer, un père ne pouvait pas faire ça. Ce n'était pas éthique.

Nous terminâmes l'apéritif et commandâmes la suite. Julian dormait toujours sagement dans sa poussette. Ce petit était vraiment adorable. Ce n'était pas un perturbateur. 

- Qu'est-ce que vous avez pensé du fait qu'Abigail sacrifie son année à Harvard pour s'occuper de votre fils ? 
- Est-ce qu'on pourrait parler d'autre chose ? me demanda Abigail.
- Qu'est-ce qu'il y a ? fis-je confus.
- Ce serait plus sympa qu'on parle d'autre chose que de Julian.
- Bon... D'accord.

Je n'aurais sûrement pas plus d'informations pour ce soir. Peut-être que c'était un signe qui voulait dire que je devrais laisser tomber ou qu'il faudrait plutôt que j'en parle directement et franchement à Abigail. Ainsi, je le ferais. Et ce soir, il fallait que je passe du bon temps au lieu de jouer les détectives. 

- J'ai une question à vous poser, déclara le père. Étiez-vous en couple ou bien ? Je ne suis pas sûr d'avoir compris qu'elle était votre relation.
- Non, répondîmes Abigail et moi en même temps.
- Enfin, pas officiellement, expliquai-je. Mais c'était comme si. En tout cas pour moi, avec du recul, je sais qu'au fond je m'étais considéré en couple avec elle.

Abigail me regarda surprise. Agréablement surprise. Elle s'empêchait de sourire. Mes lèvres s'étirèrent à cette vue.

- Vraiment ? fit-elle.
- Oui. 
- Je ne pensais pas.
- Qu'est-ce qui t'a plu chez ma fille ? me demanda son père.
- D'abord, ses yeux bleus. Ils sont si... bleus. Je me demande de qui elle les tient.
- Si bleus ? répéta Abigail en riant.
- Oui, tu ne vois pas ce que je veux dire ? ris-je.
- Non, dit-elle en secouant sa tête et en mordant sa lèvre inférieure, amusée.

Mon cœur manqua un battement. Waller, ne fais pas ça. Ne mords pas ta lèvre. 

- Elle les tient de sa mère, répondit son père à mon interrogation.

- Ah oui ? Tu ne me l'as jamais dit.

Elle haussa les épaules. 

- Ensuite ? C'était juste mes yeux bleus ?

Elle avait de nouveau ce regard intense sur moi. Comment faisait-elle ? 

- Ses fossettes, dis-je en me tournant vers son père. C'est une des choses qui la rendent encore plus différente des autres. Mais il y a aussi son intelligence, son humour, son répondant, sa sensibilité, son courage et je pourrais continuer encore pendant longtemps. Elle n'est pas comme les autres et c'est ça qui m'a fait tomber amoureux d'elle.

Julian se mit soudainement à pleurer. Abigail se leva avant de se rasseoir instantanément comme si elle s'était soudainement rappelée que son père était là pour s'en occuper. Ainsi, il le prit dans ses bras et l'emmena en dehors du restaurant pour le calmer. Nous étions donc plus que tous les deux. Après ma déclaration. Comme par hasard.

Waller posa timidement ses yeux sur moi. Elle semblait à la fois contente et gênée. 

- Tu n'étais pas obligé de dire tout ça devant mon père.
- Je le pense vraiment. 

Elle fuit soudainement mon regard. Elle ne savait pas quoi dire. Je savais que c'était quelque chose que j'aurais dû lui dire avant que tout parte en éclat, pas maintenant que nous avions tous les deux refait notre vie.

Son père revint rapidement et nos repas arrivèrent en même temps. Le dîner se déroula super bien. Abigail et moi échangions des regards complices et des rires comme si nous ne nous étions jamais quittés. Et même temps, j'avais l'impression de la redécouvrir et elle était encore mieux que quand je l'avais laissée. 

Nous quittâmes le restaurant vers minuit quand Julian avait repris ses pleurs et qu'il était impossible de le calmer. Son père s'était éclipsé aux toilettes et prise de panique, Abigail avait préféré partir. 

- Je peux le porter ? lui demandai-je.
- Oui, bien sûr. 

Elle le sortit de la poussette et me le tendit. Une vague de chaleur m'envahit. 

- Qu'est-ce qu'il t'arrive mon petit ? dis-je en le prenant dans mes bras. 

Je commençai à le bercer. Sa sœur me regardait avec attention. J'espérais que j'arriverais à le calme pour l'impressionner un peu. 

- Tu n'as plus de raison de pleurer maintenant que tu es dans les bras de Justin Bieber. 

Abigail rit.

- Au contraire Bieber, me taquina-t-elle.
- Ne l'écoute pas, m'adressai-je à Julian.

Je continuais à le bercer, et étonnement, après quelques minutes, il finit par se rendormir. J'affichai un air fier. 

- Je crois que tu peux me le laisser, il préfère être dans mes bras.

- Il a voulu être gentil avec toi.
- Ça fait quand même deux fois Waller.

Elle leva les yeux au ciel et je ris. Son père refit surface ce qui voulait dire qu'il était temps pour nous de nous séparer. Je fis la moue. Je ne voulais pas lâcher Julian. Mine de rien, j'adorais avoir ce petit dans mes bras. Ainsi, je le rendis et remerciai tout le monde pour ce fabuleux dîner avant de regagner ma voiture. J'avais passé une très bonne soirée en leur compagnie. Je n'aurais pas pensé m'entendre aussi bien avec le père. Il était très sympathique en réalité. 

Mais surtout, je n'aurais pas pensé retrouver une complicité avec Abigail aussi rapidement et c'était ce qui me rendait le plus heureux ce soir. Bizarrement.

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