Chapitre 32
«Sa main droite a bougé.»
Point de vue de Justin.
J'étais dans la chambre d'hôpital depuis cinq heures maintenant. Le temps paraissait tellement long mais je ne regrettais pas ma décision si c'était pour qu'Abigail puisse se reposer. Même si je l'avais surprise avec Zac en train de se prendre dans les bras, plus tôt ce matin. Je m'étais retenu de lui en parler parce qu'encore une fois, ce n'était pas le moment, mais je ne comprenais pas pourquoi elle l'avait mis au courant ni pourquoi elle l'avait fait venir ici. Cela m'énervait et j'étais jaloux, c'était indéniable.
J'étais en train de discuter par messages avec Valentin quand j'entendis du bruit. Je relevai mes yeux mais je ne vis rien de suspect ni personne entrer. Je replongeai alors mon regard sur mon téléphone quand ce même bruit discret mais audible se fit entendre une seconde fois. Je rangeai alors mon cellulaire et me levai. Je portai mon attention sur le corps du père d'Abigail et le scannai de haut en bas. Son corps semblait toujours inerte jusqu'à ce que je remarquai que sa main droite bougeait fébrilement. Elle se frottait contre le drap et était à l'origine du bruit que j'entendais. Oh putain !
La panique s'empara de moi. Je ne savais pas ce que j'étais censé faire. Je voyais sa main bouger de plus en plus et d'autres membres de son corps comme ses lèvres et ses paupières commencer à faire de même. Je courus alors hors de la chambre pour trouver un médecin.
- Il s'est réveillé ! Monsieur Waller s'est réveillé !
Trois infirmiers répondirent à mon appel et me suivirent dans la chambre presque en courant.
- Sa main droite a bougé, déclarai-je. Ses paupières et sa bouche aussi.
Je restai sur le côté pendant qu'ils surveillèrent ce qu'il se passait.
- Monsieur Waller, vous m'entendez ? fit l'une d'entre eux.
Même si je ne devais pas m'emballer, j'étais tellement content de savoir qu'Abigail pourrait parler à son père avant qu'il ne parte rejoindre sa mère. Cela aurait été encore plus cruel qu'il meurt sans qu'elle puisse lui dire adieu.
Après dix minutes, il n'était toujours pas complètement conscient. Le stress s'était emparé de moi. Il fallait qu'il se réveille ! Les infirmiers continuaient de le stimuler pour qu'il revienne parmi nous et je croisais les doigts pour qu'ils y parviennent. Finalement, après dix minutes supplémentaires, il fut complètement conscient. Ils quittèrent la chambre une fois sûrs de son état et je me retrouvai alors seul avec lui.
- Justin ? fit-il confus d'une voix fébrile.
- Oui c'est moi.
Je m'approchai timidement de lui. Il avait un air si fatigué. Je n'osais même pas le toucher de peur de le briser. J'avais l'impression que nous étions revenus un an en arrière, pourtant, tout avait changé depuis.
- Qu'est-ce qu'il m'est arrivé ?
- Je ne sais pas si c'est à moi de vous le dire...
Peut-être qu'Abigail voulait le lui annoncer. Je n'avais pas le droit de lui enlever cela.
- S'il-te-plaît Justin.
Putain, qu'est-ce que je suis censé faire ? Il valait mieux que j'appelle Abigail immédiatement et qu'il attende son arrivée. Mais il ne semblait pas être d'accord avec ça.
- Si c'est quelque chose de grave, je préfère que ce soit toi qui me le dise, continua-t-il de sa faible voix. Je ne veux pas qu'Abigail me voie pleurer.
Je baissai les yeux. Il avait raison. Si Abigail voyait son père triste et surtout en train de pleurer, elle serait encore plus brisée et ce n'était pas ce que je voulais. Je soupirai. Comment devions-nous annoncer à quelqu'un qu'il allait bientôt mourir ? J'admirais les médecins et les policiers qui s'occupaient de cette cruelle tâche. Il était clair que si ce n'était pas pour Waller, je n'en aurais pas été capable.
- Vous avez un cancer des poumons, réussis-je à dire. En phase terminale.
Son visage se décomposa et des larmes coulèrent sur ses joues en un rien de temps. Je déglutis. Je ne l'avais jamais vu dans un état pareil. Je ressentais énormément de peine pour lui désormais. Je fis un pas en arrière, mal à l'aise, puis décidai finalement qu'il valait mieux que je le laisse seul quelques instants.
- Je vais appeler...
- Non, me coupa-t-il, ne l'appelle pas. Pas tout de suite. Je n'ai pas envie qu'elle me voie dans cet état là.
- D'accord, acquiesçai-je.
- Tu sais combien de jours il me reste ?
- Peu mais on n'a pas le nombre précis.
Il essaya d'essuyer ses larmes. Je pris peur pendant quelques instants m'imaginant obligé de le faire à sa place. Mais il y parvint, après une longue minute.
- Ça fait combien de temps que je suis ici ?
- Deux jours.
- Où est-ce qu'elle est ?
- Je l'ai obligée à rentrer pour se reposer.
- Merci de t'occuper toujours aussi bien d'elle.
Il voulut se redresser mais se sentit trop faible pour le faire. Je lui proposai alors de remonter le haut de son lit et il accepta.
- Comment elle va ?
- Je ne vais pas vous le cacher, très mal, répondis-je.
- Elle va surmonter cette épreuve et je sais que tu l'aideras comme il faut pour ça.
- J'ai peur de ne pas être à la hauteur Monsieur Waller, avouai-je.
- Tu le seras. Je te fais confiance.
Je ne comprenais pas pourquoi il avait une confiance aveugle en moi. Je n'étais pas une personne parfaite. J'avais un tas de défauts. Et puis, j'avais déjà brisé le cœur de sa fille, je l'avais même déjà laissé tomber. Pourquoi était-il certain que je ne recommencerais pas ?
- Comment pouvez-vous en être sûr ?
- Parce que tu as appris de tes erreurs. Et surtout, tu l'aimes.
Il avait sûrement raison. Mais ses mots me mettaient encore plus la pression.
- Merci en tout cas de me donner votre confiance.
- Je sais que tu prendras soin d'elle.
Même si ce n'était pas du tout encore le moment, peut-être que je devrais en profiter pour prendre de l'avance et surtout faire les choses dans les règles. De toute façon, c'était maintenant ou jamais.
- Et du coup, est-ce que ça veut dire que... Que vous m'accordez sa main ? demandai-je timidement.
Il me regarda surpris mais agréablement. Je sais, je suis moi-même surpris de ce que je suis en train de faire.
- Oui, tu peux marier ma fille. Et je suis ravi de voir que tu as pris la peine de me demander sa main malgré les circonstances.
- Merci.
Il sourit. J'étais content de pouvoir lui apporter un peu de joie. C'était dommage que nous avions commencé d'un si mauvais pied. Nous aurions pu très bien nous entendre, encore plus que jusqu'à maintenant.
- Je devrais chercher Abigail maintenant ?
- Oui, c'est vrai.
- A tout à l'heure.
Ainsi, je quittai l'hôpital pour retrouver Waller. J'avais hâte de lui annoncer la nouvelle. Je lui envoyai un message pour lui demander où elle était et elle me répondit qu'elle était chez elle. Je pris alors la direction de son appartement. Je devinais qu'elle était en train de faire les cartons. Ça devait être encore plus dur pour elle de quitter les lieux.
- Tu rentres te reposer ? me demanda-t-elle après m'avoir ouvert la porte.
- Non. Ton père s'est réveillé, je t'emmène le voir.
Sa bouche s'ouvrit de choc.
- T'es sérieux ?
- Oui. Viens, dépêche-toi.
Elle rassembla ses affaires, récupéra Julian et en un clin d'œil, nous étions dans la voiture.
- Comment il va ? Tu lui as parlé ?
- Il m'a demandé de lui dire ce qu'il avait. J'ai préféré que ce soit toi qui le mette au courant mais il n'a pas voulu.
- Comment il a réagi ? me demanda-t-elle inquiète.
- Il a gardé un visage ferme, mentis-je. Il est très courageux Abigail.
- Je suis sûre qu'il profite de ton absence pour pleurer.
- Arrête de t'imaginer des choses pareilles.
Elle semblait à la fois excitée et nerveuse. Elle se rongeait les ongles et ne parlait plus, perdue dans ses pensées. Une fois de retour à l'hôpital, elle courut presque rejoindre son père et je m'occupai alors de Julian. Je la retrouvai dans ses bras en train de pleurer et je préférai alors les laisser entre eux.
Julian dormait dans mes bras et je le remerciais d'être plutôt calme durant ce moment difficile. Avec tous nos problèmes, je réalisais à peine qu'il grandissait à vive allure. Je ne profitais pas assez de lui et je le regrettais.
Maintenant que le père d'Abigail était réveillé, il fallait que j'écoute les conseils de Valentin et que je fasse quelque chose qui embellirait les derniers jours qu'ils passeront ensemble. Je ne savais pas encore quoi mais je comptais bien trouver.
...
Abigail avait retrouvé un peu le sourire mais je savais qu'elle pensait au moment où elle devrait lui dire adieu. Julian dormait désormais dans les bras de son grand-père et sa mère les mitraillait de photos. Tout semblait aller mieux. Mon portable sonna dans ma poche. C'était ma mère. Je m'isolai pour décrocher.
- Allô Justin ?
- Oui ?
- On a trouvé la maison qu'il nous faut. Je vais t'envoyer des photos.
- Non, refusai-je. On vous fait confiance. Signez les papiers.
- Vous êtes sûrs ?
- Oui. Achetez-la.
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