Chapitre 24
«Je ne serai jamais heureux.»
Point de vue de Justin.
- C'est quoi ce bordel ? lâchai-je.
Je me précipitai auprès de ma mère qui semblait être tétanisée. Je ne comprenais rien à ce qui était en train de se passer sous mes yeux. Pourquoi Thomas se faisait-il embarquer ? Où était Jazmyn ? Je n'avais aucune idée de comment gérer la situation.
Je n'eus pas le temps de demander quoi que ce soit aux flics, ils étaient partis en un claquement de doigt en emportant avec eux le copain de ma mère.
- Maman ! Qu'est-ce qu'il s'est passé ?
Elle était en pleurs. Je détestais la voir ainsi. Cela me rappelait de très mauvais souvenirs, des souvenirs dont j'aimerais me débarrasser pour de bon.
- Ils ont dit que Thomas était accusé de viol et ils l'ont arrêté.
- De viol sur qui ? fis-je choqué.
- Je ne sais pas Justin, je n'ai pas compris. Je suis aussi perdue que toi.
Je la pris dans mes bras et elle pleura encore un peu plus. Putain de merde. Que devais-je faire ? J'étais paniqué. Je n'arrivais pas à croire qu'un autre problème nous était encore tombé sur la tête. Ça ne finirait donc jamais. Je vis du coin de l'œil Abigail s'approcher de nous. Je posai alors mes yeux sur elle. Elle affichait un air désolé. Après avoir passé une si bonne soirée, je n'aurais jamais cru qu'elle terminerait de cette manière.
- Où est Jazmyn ? demandai-je à ma mère en me détachant d'elle.
- Dans sa chambre, elle dort.
- OK. On va aller au commissariat pour avoir plus d'informations. Tu peux rentrer chez toi si tu veux, m'adressai-je maintenant à Waller.
- Non, je veux venir avec vous. Je ne peux pas vous laisser comme ça.
Je souris intérieurement. C'était exactement ce que j'avais espéré qu'elle dise. J'avais besoin de sa présence dans un moment pareil parce qu'elle était la seule qui pourrait me canaliser.
- OK, on y va alors, dis-je.
Ma mère partit enfiler rapidement des chaussures tandis qu'Abigail et moi regagnâmes la voiture. Je soufflai et tapai le dos de ma tête contre le dossier du siège.
- Ma vie est un cauchemar sans fin, lâchai-je.
- Ça va aller, me dit Abigail.
- Non, pas cette fois-ci.
- Tu n'en sais rien Justin. Ils se sont peut-être trompés, Thomas a peut-être été accusé à tort, on n'a pas d'informations.
Je ne dis rien. Je ne croyais pas une seule seconde en mon étoile et au fait que l'arrestation de Thomas était en réalité une erreur. Ce pauvre mec tout là-haut ne voulait pas me foutre la paix et j'étais certain que ce n'était que le début des problèmes. Alors quoi ? Que comptait-il faire ? Me faire payer toutes les fois où j'avais traité une fille comme de la merde ? Ce qu'il nous arrivait à ma famille et moi était injuste. Pourquoi le ciel s'acharnait-il autant sur moi ?
Ma mère refit surface et prit place sur le siège passager étant donné qu'Abigail s'était mise à l'arrière du véhicule. Je démarrai et pris la direction du commissariat le plus proche. Le trajet se fit dans le silence le plus complet. Nous devions tous être en train de nous poser un tas de questions.
Je me garai le plus près possible du bâtiment puis nous sortîmes sans perdre de temps de la voiture. D'un pas précipité, je franchis les portes, montai les escaliers et m'avançai jusqu'à l'accueil suivi de ma mère et Abigail. Une dame nous demanda de patienter sur les chaises et nous nous exécutâmes à contre cœur. Je tapais frénétiquement du pied contre le sol carrelé. Je voulais être fixé tout de suite.
L'endroit était surpeuplé. Il y avait peut-être presque une vingtaine de personnes qui attendaient comme nous leur tour rendant mon impatience plus grande. J'étais en train de fixer le sol quand je sentis une main se poser sur ma cuisse droite. Je tournai la tête et je vis Abigail me lancer un doux regard de compassion. Je pris alors sa main et la serra. Merci Waller d'être là.
- Je serai toujours là pour toi, me murmura-t-elle comme si elle avait lu dans mes pensées.
Et à cet instant précis, j'avais juste envie de la prendre dans mes bras et de l'embrasser. Sur la bouche, comme un couple, même si nous nous étions dits qu'il valait mieux pour l'instant que nous restions amis. Car en plus de me soutenir, elle était irrésistible dans sa robe rouge et ses talons. J'étais tellement fier qu'elle soit la mère de mon enfant.
Un homme se posta devant nous et me sortit de mes pensées. Il portait un smoking de couleur noir et une mallette à sa main gauche. Il était brun et devait faire la quarantaine facilement.
- Bonsoir, je suis l'avocat de Monsieur Hoffman, se présenta-t-il. Maître Robbins.
Je lâchai alors la main d'Abigail et me leva pour serrer la sienne. Ma mère et Waller m'imitèrent.
- Vous êtes sa conjointe, c'est ça ? s'adressa-t-il à ma mère.
- Oui c'est bien moi.
- Enchanté.
- De même.
- J'ai été prévenu de l'arrestation de votre conjoint et je suis venu dès que possible. On m'a informé qu'il est en plein interrogatoire en ce moment même et qu'il attend ma venue pour répondre aux questions. Je vais donc le rejoindre et je reviendrai vers vous pour vous communiquer les détails, lui expliqua-t-il.
Elle acquiesça et Maître Robbins s'en alla. Nous reprîmes place sur nos chaises.
- Bon, déjà, il a son propre avocat, c'est déjà ça, fit Abigail. Il doit bien le connaître et saura très bien le défendre.
- Mais si Thomas a vraiment violé quelqu'un, je ne veux pas qu'il soit défendu, lui dis-je.
- Tu vas me dire que je n'en sais rien et que je le connais à peine mais je suis sûre qu'il n'a pas pu faire une chose pareille.
- Moi aussi je suis persuadé qu'il n'est pas capable de faire ça pourtant c'est bien lui qui est en train d'être interrogé Abigail.
Elle baissa les yeux et je me tournai alors vers ma mère qui ne disait pas un mot. Je me demandais ce qu'elle pouvait se dire. Je me demandais aussi si elle croyait son copain capable de violer quelqu'un. Evidemment que non Justin.
Le temps paraissait durer une éternité depuis que l'avocat de Thomas était parti le rejoindre. Je vis Abigail à côté de moi qui tremblait. Elle avait la chair de poule. Je décidai alors de retirer ma veste et de la lui passer. Elle me regarda quelque peu surprise et ne refusa pas mon aide. Puis elle me remercia et je lui souris.
...
Cela devait faire au moins quarante minutes que nous étions là assis à attendre le retour de Maître Robbins. Mes paupières avaient commencé à devenir lourde et je sentais que je pouvais m'endormir à tout moment. Ma mère n'avait toujours pas décroché un mot depuis la dernière fois. C'était la première fois que je la voyais aussi silencieuse. D'habitude, elle trouvait toujours quelque chose à dire. Abigail s'était elle endormie sur mon épaule depuis cinq minutes m'ayant obligé à arrêter mes gestes nerveux.
Quand je n'y croyais plus, j'aperçus la silhouette au loin de l'avocat de Thomas. Je me levai par réflexe et par conséquent sortis Abigail de son sommeil. Il se dirigea directement vers nous. Son visage ne laissait rien paraître. Ainsi, je ne pouvais deviner si l'interrogatoire s'était bien passé ou non.
Il nous invita à nous isoler en dehors de l'accueil qui était encore rempli de monde et nous emmena dans un couloir.
- Monsieur Hoffman restera en garde à vue ce soir. Les policiers n'ont pas encore assez de preuves pour l'emprisonner. Comme vous le savez déjà, il est accusé de viol. C'est une de ses anciennes patientes qui a porté plainte. Elle dit que les faits se seraient déroulés il y a deux ans, ici, à Boston. Il lui aurait proposé de l'eau et y aurait mis une drogue qui l'aurait endormie et qui lui aurait permis de profiter d'elle dans son bureau même. Votre conjoint nie les faits et je le crois. Et je vous dis avec toute sincérité que vous devez le croire aussi.
Je passai une main derrière le dos de ma mère pour lui apporter du réconfort.
- Je vais étudier le dossier de cette patiente et voir si je peux trouver des éléments qui expliqueraient sa fausse déposition.
- Comme par exemple ? demandai-je.
- Le besoin d'argent. Dès que j'ai du nouveau, je vous appelle. Je vous laisse ma carte pour que vous puissiez me faire part de votre numéro. Les policiers garderont sûrement Monsieur Hoffman vingt-quatre heures comme la loi l'autorise. Si les vingt-quatre heures sont passées, ils devront le libérer sauf s'ils obtiennent une autorisation de leur supérieur pour le garder plus longtemps. Je doute fortement qu'ils arrivent à trouver des éléments qui l'accableraient. Je vous conseille de rentrer chez vous et d'attendre mon appel. C'est tout ce que vous avez à faire. Monsieur Hoffman est entre de très bonnes mains, ne vous inquiétez pas. Nous allons le sortir d'ici. Je vous souhaite à tous un bon repos et normalement, nous nous contacterons demain.
- Merci beaucoup Maître, à demain, le remercia ma mère.
Et il s'en alla. Je me tournai vers ma mère qui semblait être sonnée de toutes ces informations qui venaient d'être déballées.
- On a plus qu'à attendre et espérer qu'il est innocent, me dit-elle.
Je secouai la tête et sortit du couloir pour rejoindre le hall d'entrée du commissariat. J'étais dégoûté. Je ne croyais pas une seule seconde à la libération de Thomas et je doutais de son innocence. Un viol ? Il y a deux ans ? C'était tout à fait possible. C'était carrément plausible qu'il eut été une différente personne il y a deux ans de cela ou même qu'il avait simplement dérapé.
J'appuyai mes avant-bras contre la rambarde des escaliers et pris ma tête entre mes mains. J'étais désorienté, désespéré, écœuré de tout ça. Je voulais juste tout foutre en l'air - du moins tout ce qui n'avait pas déjà été foutu en l'air. J'entendis la porte s'ouvrir puis des pas s'approcher de moi. Une main se posa sur mon épaule alors je relevai la tête et croisai le regard de Waller.
- Il faut que tu fasses confiance à Monsieur Robbins, me dit-elle.
J'hochai la tête négativement et me détachai d'elle. Je fis trois pas en arrière jusqu'à presque toucher le mur derrière moi.
- C'est fini Abigail, tout est fichu, on a tout perdu. Ils vont nous reprendre Jazmyn, Thomas sera condamné et on aura fait tout ça pour rien !
- Ne sois pas pessimiste comme ça Justin...
- Comment ne puis-je pas l'être ? Dis-moi Abigail ! élevai-je la voix. Comment ? Ma vie entière est un putain de merdier ! Le bonheur ça n'existe pas ! Je n'aurais jamais dû y croire !
Elle me regardait sans savoir quoi dire. Je savais qu'elle avait de la peine pour moi et qu'elle ferait tout en son pouvoir pour me remonter le moral mais tout ça ne servait à rien.
- Je ne serai jamais heureux Waller. Jamais. Il y a quelqu'un quelque part sur Terre qui ne me laissera pas l'être.
Je sentais les larmes border mes yeux malgré moi. Je ne savais même pas si c'était des larmes de tristesse, de colère, de rage ou de tout ça à la fois. Abigail le remarqua immédiatement et s'avança vers moi. Elle me tendit ses bras et m'enlaça. Je ne refusai pas son étreinte et la serra fort contre moi. Son odeur envahissa mes narines. Je fermai les yeux et profitai de cet échange. Une vague d'amour s'empara de moi.
- Je te promets que vous allez vous en sortir, me murmura-t-elle.
Je ne comprenais pas pourquoi elle était aussi sûre de ça. La vie n'avait pas été juste avec elle non plus jusque là. Pourquoi était-elle si optimiste ? Nous entendîmes la porte s'ouvrir une seconde fois et ma mère interrompit notre câlin.
- Il est temps de rentrer à la maison, nous dit-elle.
Ainsi, nous quittâmes le commissariat et retournâmes dans la voiture. Le trajet se fit comme à l'aller dans le silence. Nous étions tous choqués et épuisés à la fois. De retour devant la maison, je me retournai pour faire face à Abigail.
- Merci d'être restée jusqu'au bout, lui dis-je.
- C'est normal Justin. Je vais appeler mon patron et lui demander s'il peut m'accorder un jour de repos demain.
- Tu n'es pas obligée.
- Je t'ai déjà dit que je voulais être là pour toi et ta mère.
Je lui souris timidement. Elle s'approcha de moi et sans que je m'y attende, déposa un baiser sur le coin de mes lèvres. Pourquoi pas sur la bouche Waller ? Elle se détacha de moi avant que je ne pusses faire quoi que ce soit et prit dans ses bras ma mère. Elle nous souhaita une bonne nuit puis s'en alla sans que j'eus le temps de lui proposer de la ramener chez elle.
Nous regagnâmes alors la maison silencieusement. Ma mère partit vérifier si Jazmyn dormait toujours dans sa chambre et c'était le cas. Puis, elle partit se faire un café dans la cuisine.
- Tu ne vas pas aller dormir ? lui demandai-je.
- Non, je n'y arriverai pas Justin.
- Prends des somnifères.
- Je n'ai pas envie de dormir. Et puis on ne sait jamais, l'avocat de Thomas pourrait nous appeler d'une minute à l'autre.
- Il a parlé de demain, pas ce soir. Je préfère que tu ailles dormir maman.
- Ne t'inquiète pas pour moi Justin, vas te coucher.
Je la pris alors dans mes bras et partis dans ma chambre, exténué. Je plongeai dans mon lit puis retirai mes chaussures. Je posai ma tête sur mes bras et fixai le plafond. Un million de choses me passait par la tête. Je ne savais pas si je réussirais à dormir ce soir.
Et si Thomas était coupable, que se passerait-il ensuite ? Ils nous enlèveraient Jazmyn et ma mère et moi nous retrouverions à deux comme si cette année passée n'avait servi strictement à rien. Je refusais que les choses se passent ainsi. Je ne pouvais pas voir ma sœur nous filer entre les doigts une seconde fois. Non, pas cette fois-ci.
...
Allez tous vous faire foutre ! Je tapai dans le mur de rage. Il était impossible pour moi de redescendre. Je me mis à pleurer de haine. Je voulais tout détruire sur mon passage.
- Pourquoi tu ne m'as pas réveillé ? hurlai-je contre ma mère.
- Pour ça Justin, me pointa-t-elle du doigt. Parce que tu aurais réagi comme ça devant eux et ça nous aurait encore plus décrédibilisé.
Je secouai la tête et partis me réfugier dans ma chambre. Je claquai la porte derrière moi aussi fort que les murs et la fenêtre tremblèrent. Je balayai tout ce qu'il y avait sur mon bureau, balançai la chaise par terre, jetai les coussins au sol et tout le contenu de mon dressing. Je ne voyais pas rouge mais noir. C'était comme si une autre âme s'était emparée de mon corps et que je ne contrôlais plus rien. Je tremblais. Mes veines devaient être visible sur chaque parcelle de ma peau. Des injures sortaient toutes les secondes de ma bouche. J'étais complètement fou de rage.
Mais une lueur de lucidité me vint et je décidai d'appeler Abigail. Je pris mon téléphone dans ma poche et composai son numéro. Réponds ou tout ça va mal finir. Elle décrocha heureusement rapidement.
- Allô Abigail, j'ai besoin que tu viennes à la maison tout de suite. Ils ont prit Jazmyn.
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