Chapitre 2

«Elle a foutu sa vie en l'air.» 

Point de vue de Justin. 

Ses yeux bleus me fixaient intensément. Elle me regardait comme si elle ne s'attendait pas à ce que je dise cela. Puis sa bouche s'entrouvrit, ses sourcils se froncèrent et elle finit par me contourner pour quitter la pièce. 

- Tu devrais partir, Zac va bientôt arriver, me dit-elle en s'éloignant.

Je ris nerveusement et me retournai pour la suivre. 

- En réalité, tu espérais ne jamais me revoir.

Nous étions de retour dans le salon. J'étais certain que j'avais beaucoup plus laissé ma trace dans cette pièce que ce que Zac était actuellement en train d'essayer de faire. J'espérais le croiser un jour pour mettre enfin un visage sur ce putain de mec. Abigail se tourna vers moi et je m'approchai pour être à un mètre d'elle. Son visage n'avait pas changé d'un poil. Ses yeux bleus étaient toujours autant perçants. En la regardant, je savais exactement pourquoi elle avait été pour moi un jour la plus belle fille de cette Terre. 

Cependant, elle avait des cheveux nettement plus longs et, étant plus fort que moi, j'avais remarqué que ses seins avaient bien grossi. Pourtant, elle ne semblait pas avoir pris de poids, juste des seins. En effet, sa poitrine était nettement plus grosse qu'avant. Je me reconcentrai sur ses yeux et elle était toujours en train de me fixer.

- Tu as dit à Valentin que si tu quittais Boston, c'était pour toujours. Tu peux comprendre que je ne m'attendais pas à ce que tu reviennes.
- OK, bien. Si tu préfères qu'on s'évite jusqu'à mon départ, j'accepte. De toute façon tu ne me dois rien. Tu fais ce que tu veux. 

Elle me lança un sourire grimaçant. Je n'aurais pas dû croire qu'on pourrait être amis. Je devais accepter le fait qu'elle avait tourné la page. Et puis, c'était tout à fait compréhensible. Je m'apprêtai à partir quand des pleurs se firent entendre. Abigail s'empressa d'aller calmer Julian et j'eus une envie de la suivre. Je voulais voir comment elle s'y prenait. Ainsi, je la rejoignis et je la retrouvai avec son petit frère dans les bras. Une sensation bizarre frappa ma poitrine en les voyant. Elle paraissait encore plus belle avec un enfant dans les bras. 

Elle était en train de lui tapoter le dos. Je m'appuyai contre la chambranle de la porte et mis mes mains dans les poches. Je l'observais avec attention.

- Il pleure souvent ? demandai-je.
- Oui, pas mal de fois.
- Tu n'en as pas marre parfois ?
- Non, c'est mon... C'est mon frère. Et je sais que ce n'est pas pour me faire chier, dit-elle en souriant.
- Je peux le porter ?

Elle me regarda longuement avant de finalement accepter. Je m'avançai donc et elle me tendit le bébé. Un frisson immense me parcourut. Une vague de chaleur envahit ma poitrine. Cela faisait longtemps que je n'avais pas tenu un nouveau né dans mes bras. Julian avait cessé de pleurer mais il faisait encore la grimace. Il restait tout de même très mignon. Il avait déjà des cheveux, châtains lisses, et des yeux marron, comme les miens. Il était joufflu ce qui le rendait encore plus adorable.

Il me faisait penser à quelqu'un mais je ne savais qui. 

- La mère est où ?
- Oh... Euh... Elle est hôtesse de l'air. Elle est souvent absente, répondit-elle.
- Elle s'appelle comment ?
- Rachel. 

Waller semblait troublée en me voyant porter Julian. Elle me fixait d'une manière très étrange comme si cela la perturbait. Je pouvais carrément deviner que son cœur battait la chamade à l'intérieur de sa poitrine. Porter un bébé me rendait-il irrésistible ?

- Euh, se racla-t-elle la gorge, je peux le reprendre ?
- Oui, oui, répondis-je et elle le reprit. 

Julian s'était rendormi dans mes bras alors elle le reposa dans son berceau. Nous quittâmes discrètement la chambre et fûmes de retour une nouvelle fois dans le salon. Je passai une main dans mes cheveux. Je croyais bien qu'il était temps que je la laisse tranquille.

- Je vais y aller, annonçai-je.

Elle acquiesça.

- Alors j'imagine que c'est la dernière fois qu'on se voit, ajoutai-je.
- Peut-être qu'on se recroisera. 

Je contractai ma mâchoire.

- OK. Sache juste que Jazmyn aurait adoré te revoir, dis-je en me dirigeant vers la sortie. Bonne continuation Waller.
- Bonne continuation à toi aussi Justin. 

Je lui lançai un dernier regard mais elle restait de marbre. Je préférai donc ne pas tarder et partir. Je n'aurais peut-être pas dû lui rendre visite. J'aurais dû comprendre que passer du temps avec moi était la dernière chose qu'elle voulait après ce qu'il s'était passé l'année dernière. J'avais cru bien faire en voulant m'assurer que la hache de guerre était toujours enterrée mais j'aurais dû rester à ma place. Après tout, j'avais merdé et elle avait le droit de m'en vouloir encore aujourd'hui même si elle prétextait le contraire. 

Néanmoins, j'avais quand même l'impression d'avoir enlevé le dernier poids sur mes épaules. 

Je retournai dans l'appartement que nous avions loué le temps que l'affaire avec Jazmyn soit enfin terminée. Je retrouvai ma mère, ma sœur et Thomas tous les trois en train de regarder la télé sur le canapé du grand salon. 

- Ah Justin, ça va ? s'empressa de me demander ma mère.
- Ouais ouais, répondis-je en me dirigeant vers la cuisine ouverte.
- Tu es parti voir Abigail ? continua-t-elle en se levant.
- Ouais. Elle préfère qu'on ne se voie plus, dis-je en me servant dans le frigo.
- Pourquoi ?
- Parce qu'elle veut passer à autre chose, n'hésitai-je pas à dire tout haut en présence de Jazmyn.
- Elle n'est pas gentille, intervint cette dernière.
- Jazmyn, ne dis pas ça, lui dit Thomas. Elle a ses raisons.
- Mais ce n'est pas grave, ce n'était pas comme si je voulais qu'on soit les meilleurs amis du monde. Je voulais juste savoir comment elle allait, ajoutai-je.

C'était vrai, j'avais juste voulu avoir de ses nouvelles. Je les avais eues, tout était réglé.

- Tu n'es pas déçu ?
- Non, bien sûr que non, affichai-je un sourire. Elle va bien, tant mieux pour elle.
- Moi je suis déçue, je voulais la voir, continua Jazmyn.
- Je vous avoue que je le suis un peu aussi, nous dit ma mère. Je pensais qu'elle aurait aimé nous revoir.
- Peut-être qu'elle en a envie mais qu'elle ne préfère pas, la défendit Thomas.

Je replaçai la bouteille de jus d'orange dans le frigo et m'en allai dans la chambre que j'occupais. Pour moi, il n'y avait plus à débattre là-dessus. Nous étions en vacances et je voulais en profiter pleinement.

...

Il était presque dix-neuf heures. Ma mère toqua à ma porte et je lui dis d'entrer. Elle referma derrière elle et vint s'asseoir sur mon lit à côté de moi. Je savais très bien qu'elle allait me parler d'Abigail. J'avais l'impression qu'on était retourné à l'année dernière. 

- Tu fais quoi ? me demanda-t-elle.
- Rien, je joue sur mon téléphone.
- Je voudrais te parler un peu.
- D'Abigail ? devinai-je.
- Je veux juste avoir de ses nouvelles, à propos de son père tu sais et Harvard... Tu ne nous as rien dit.

Je grattai mon front et me redressai pour être un peu plus à l'aise pour discuter. Je verrouillai mon cellulaire et le posai à côté de moi. 

- Beaucoup de choses ont changé, elle a un petit frère maintenant.
- Ah oui ? fit-elle choquée.
- Julian. Il a un peu plus de quatre mois. Son père a réussi à se trouver quelqu'un, Rachel une hôtesse de l'air.
- Ah d'accord. C'est une bonne nouvelle ça.
- Ouais mais elle n'a pas réussi son année à Harvard à cause de ça. Je lui ai donné ma place et elle a préféré la gâcher.
- Il faut faire des concessions dans la vie Justin...
- Mais pas ça, pas Harvard. Elle n'a pas arrêté de m'en parler pendant un an pour finir par la négliger. J'ai l'impression qu'elle s'est foutue de ma gueule, expliquai-je. Son père et sa copine peuvent très bien s'occuper tous seuls de leur fils.
- Je comprends, c'est un peu bizarre tout ça.

Je soupirai. 

- Tu n'as pas de souci à te faire, elle est intelligente, elle sait ce qu'elle fait. C'était sûrement une décision réfléchie. 
- De toute façon tant pis pour elle, ce n'est plus mon problème.
- Justin... souffla-t-elle.

Elle me fixait comme si elle voulait me poser une question mais qu'elle n'osait pas. 

- Quoi ? lâchai-je.
- Est-ce que ça t'a fait quelque chose de la revoir ? 

Je contractai ma mâchoire. Peut-être. Oui. Cela m'avait fait sentir bizarre. Tellement bizarre que mon cœur s'en était retourné. Pas dans le sens qui voulait dire que je ressentais toujours quelque chose pour elle car ce n'était pas le cas mais la dernière fois que je l'avais vue, j'étais encore amoureux d'elle ainsi la revoir et constater que mes sentiments n'étaient plus les mêmes, c'était étrange pour moi. 

- Non. Rien de spécial, répondis-je en préférant garder tout ça pour moi.

Mon portable se mit soudainement à sonner. Je le pris. C'était Kiara. 

- C'est Kiara ? me demanda ma mère confirmation.

J'acquiesçai.

- D'accord, je te laisse.

Elle me souffla un baiser puis s'en alla. Seul dans la pièce, je décrochai.

- Allô bébé ? entendis-je sa douce voix à travers le téléphone.
- Oui c'est moi.
- Comment tu vas ?
- Bien et toi ? répondis-je.
- Tu me manques mon amour.
- Tu me manques aussi.
- Comment va Jazmyn ?
- Elle va bien comme tout le monde.
- Tant mieux.

Je me rallongeai sur mon lit et agrippai d'une main la partie supérieure de mes cheveux.

- Comment c'est la France ? lui demandai-je en retour. 
- C'est cool, les mecs là-bas sont mignons, dit-elle en riant pour me taquiner.
- Ce n'est pas grave, je ne suis pas jaloux, souris-je.
- Peut-être que t'as trouvé mieux à Boston.
- Elles sont toutes fades, ça ne risque pas.
- J'ai demandé à mes parents s'il était possible de vous rejoindre si la procédure avec Jazmyn prenait plus de temps que prévu et ils ont accepté.
- Tu pourras enfin découvrir la ville dans laquelle j'ai grandi.
- Oui, je suis hyper excitée mais pour l'instant je suis en France et loin de toi, l'entendis-je faire la moue.
- Profite de tes vacances bébé, la France c'est cool.
- Oui t'as raison. Bon je dois te laisser, on va partir visiter le Louvre. Je t'appellerai en rentrant, je t'aime.
- Je t'aime aussi.

Elle raccrocha. Je posai mon téléphone sur la table de chevet. Kiara était ma petite-amie depuis un bon bout de temps maintenant, depuis presque six mois précisément. Je l'avais rencontrée dans une soirée au mois de Novembre, par hasard. Nous avions appris à nous connaître pendant un bon mois avant que je ne décide à passer à l'étape supérieure. 

Elle avait vingt et un an, elle était juste un peu plus âgé que moi mais c'était ce qui était bien avec elle. Elle vivait toujours chez ses parents cependant elle avait le permis et elle étudiait dans une grande école de commerce. J'avais envie de la rejoindre, je n'avais plus ma place ici à Boston. J'avais hâte qu'on en finisse avec la justice par rapport à Jazmyn et qu'on se barre des Etats-Unis. J'avais l'impression que ce pays n'était pas fait pour nous.

... 

J'étais sorti dans un bar pour me changer les idées. J'avais encore le décalage horaire qui jouait avec mon humeur mais je voulais surtout retrouver ma copine. Il faisait nuit mais très bon puisque nous étions en été. J'étais sur le point de regagner ma voiture quand je remarquai au loin une silhouette qui m'était familière. Je ralentis mes pas et me déplaçai afin d'avoir un meilleur angle. Je reconnus tout de suite Waller. Elle n'était pas seule. Il y avait un mec avec lui et elle tenait un landau. Je compris donc qu'il s'agissait de ce fameux Zachary.

On aurait dit un couple de jeunes fiancés. Ils se tenaient par la main et sortaient d'un restaurant. Cette vue ne me dérangeait pas plus que ça. Ce qui m'intriguait c'était plutôt le fait qu'ils soient sortis avec Julian. Pourquoi ne l'avaient-ils pas laissé chez Abigail avec ses parents ou au moins avec son père ? Plus simplement : pourquoi Abigail emmenait-elle son petit frère au restaurant alors qu'elle pouvait passer un moment seule avec son copain ? 

Peut-être que son père était absent mais je trouvais ça bizarre de vouloir concevoir un enfant et de laisser sa fille s'en occuper la plupart du temps. Peu importe, j'ignorai cela et rentrai dans la voiture que j'avais louée pour pouvoir me déplacer dans Boston. Mon ancien moi, celui de l'année dernière, aurait sûrement foncé sur eux pour les provoquer et foutre la merde mais j'avais changé et mettre la pagaye partout où je passais n'était plus mon passe-temps favori. 

Mon portable sonna au fond de ma poche. Je le pris et souris en voyant le nom de Valentin s'afficher. Je m'empressai de décrocher.

- Hey mec ! lançai-je.
- Bieber ! Comment tu vas ?
- Bien et toi ? 
- Bien, bien ! Alors c'est bon ? Tu t'es remis du décalage horaire ? 

Valentin et moi étions restés en contact depuis mon départ en Australie.  Nous nous envoyions des messages le plus souvent possible et nous nous appelions au moins une fois par semaine. J'avais envie de le revoir et de faire à nouveau les quatre cents coups avec lui mais il avait déménagé à Chicago alors il fallait attendre encore longtemps avant que le duo soit de retour. 

- Ouais, tranquille.
- Tu fais quoi là ?
- Je reviens d'un bar.
- Tu t'es saoulé ?
- Non mec, pourquoi je le ferais ? ris-je.
- Parce que t'as revu ton ex.
- Gros je m'en fous. D'ailleurs je viens de la croiser avec son mec et son petit frère. On aurait dit une famille.
- C'est peut-être leur enfant, plaisanta-t-il.
- Ça expliquerait beaucoup de choses.

Je pris soudainement conscience que c'était peut-être réellement la vraie raison de ce retournement de situation. Peut-être que c'était ça qu'elle me cachait derrière son année à Harvard ratée.

- Attends, il l'a mise en cloque ? demandai-je plus sérieusement.
- Je ne sais pas mec, ce n'est pas moi qui suis à Boston pour constater ça.
- Putain ça craint si c'est le cas !  Elle a foutu sa vie en l'air !
- T'as qu'à lui demander.
- Non je n'ai pas envie. Et puis, c'est son problème.
- Ouais c'est son problème.

Ça serait complètement fou si Waller était mère à dix-neuf ans. Mère, putain ! A son âge ! Quel bordel ! 

- Et au fait, t'as dit à Kiara ou pas que t'avais revu Abigail ?
- Non, elle péterait un plomb et ce n'est pas comme si c'était important.
- T'étais amoureux de cette fille quand même.
- Ouais mais je ne le suis plus alors on s'en fout.
- Si tu le dis.
- Et toi avec Zara ? lui demandai-je.
- Ça roule. Le couple parfait.

Je ris. Il en faisait toujours des caisses.

- Tu l'aimes ?
- Tranquille. Je ne veux pas être pris pour un con une seconde fois.
- T'es une tapette Val.
- Ta gueule. Moi au moins je ne dis pas "je t'aime" au bout d'un mois.
- Ferme-la. 

Il rit.

- Bon je vais te laisser mec. On se rappelle plus tard.
- OK, pas de problème.

Je raccrochai. Quel con ce Valentin, toujours en train de critiquer mon couple. Je démarrai la voiture, attachai ma ceinture et m'en allai pour rentrer chez moi. La discussion de tout à l'heure trottait dans ma tête. Je ne pouvais pas imaginer Abigail maman, pas maintenant et honnêtement pas avec ce mec Zac. Je ne disais pas qu'elle méritait mieux mais ça serait précipiter les choses et ne pas réfléchir.

Je voulais connaître la vérité.

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