Chapitre 10

  «Je t'en voudrais toute ma vie pour ce que tu as fait.»  

Point de vue de Justin.

J'étais qu'un pauvre con. J'aurais dû faire ce calcul dès que j'avais eu des doutes sur le fait que Julian n'était pas son frère. Mais tellement buté à l'idée que je ne pouvais être père maintenant, je n'avais pas réfléchi un seul instant. Un simple putain de calcul aurait mis un terme à toute cette mascarade depuis longtemps. 

J'étais en colère, contre Abigail et moi-même. Parce que je n'arrivais pas à croire qu'elle ait pu me cacher une chose pareille et parce que j'avais été trop naïf de penser que je ne pouvais pas faire partie de ce merdier. 

Zéro. Il fallait maintenant repartir de zéro.

Je quittai le café sans hésiter un seul moment. Il était hors de question que je reste une seconde de plus en compagnie de cette fille qui avait osé me mentir droit dans les yeux plus d'une fois. Julian était mon fils putain ! Comment avait-elle pu me cacher ça ? Il fallait que je parte sinon j'allais tout retourner. Je devais m'isoler pour éviter de faire quelque chose que je regretterais. Comme avoir fait un enfant à Abigail Waller. 

J'étais tellement fou de rage que j'étais au bord des larmes. Je ne savais pas ce qui me mettait le plus en colère : le fait d'apprendre que j'étais père ou le fait que l'on me l'avait caché. Je n'arrivais pas à croire que ma vie était désormais chamboulée et que j'allais devoir faire avec. Pas d'échappatoire possible. Pas cette fois. Tu es papa Justin !  Bordel  ! A quel moment avais-je merdé ? 

- Justin ! S'il-te-plaît ! Attends ! 

Je me retournai. C'était Abigail qui avait couru pour me retenir. Je secouai la tête. Elle me dégoûtait. Quand je pensais que nous pouvions être amis et bien nous entendre, j'avais complètement eu tort. Je ne pouvais pas être ami avec une fille qui me cachait l'existence de mon fils. Pourquoi ? Pourquoi avait-elle décidé de ne rien me dire ? Pourquoi s'était-elle rapprochée de moi sans aucun scrupule alors qu'elle portait ce lourd secret ? Pourquoi m'avait-elle fait croire que tout allait bien ? Pourquoi était-elle si égoïste ? Pourquoi merde ? Je ne comprenais pas. 

- Laisse-moi tranquille, lui ordonnai-je.
- Laisse-moi t'expliquer. 
- Juste fous-moi la paix ! T'es qu'une pauvre conne. Je ne veux pas t'écouter. 

Je la haïssais plus que tout et je lui ferais payer tôt ou tard ce qu'elle m'avait fait. 

- Justin, insista-t-elle en attrapant mon bras. 

Je retirai sa main brusquement sans faire attention à ne pas lui faire de mal et continuai ma route. Je marchais pour me retrouver le plus loin possible de tout ça. Je voulais juste être seul, qu'on me laisse tranquille. J'avais l'impression que le monde s'était abattu sur moi, que je payais toute sa misère, la famine, la guerre, et bien plus. C'était injuste. Pourquoi moi ? 

A travers ma vue troublée par les larmes, j'aperçus un bar. Je décidai de m'y arrêter. Je m'assis au comptoir. 

- Tout ce que vous avez de fort, commandai-je sans attendre. 
- Un bon remontant pour le jeune-homme.

Je me tins la tête entre mes mains. Je ne me sentais pas bien. Ce n'était qu'une seule nouvelle mais c'était trop à encaisser d'un coup. Ce n'était pas comme ça que j'avais imaginé mon avenir. J'avais prévu tellement de choses, mis en place tellement de projets et tout s'était effondré. Comment allais-je faire maintenant ? Ce n'est pas possible.

Mon premier verre arriva et je le bus d'une traite. On m'en servit un autre et il se vida comme le premier. J'étais en train de retomber dans mes travers, à cause d'elle, à cause d'Abigail Waller. C'était entièrement de sa faute et elle avait voulu tout ça. 

- Bordel... murmurai-je.

Qu'allait-il arriver à mon couple avec Kiara ? Je refusais de la laisser seule en Australie et de l'abandonner sous prétexte que j'avais un enfant avec une autre fille. Mais elle ? Que voudrait-elle quand elle aurait appris la nouvelle ? Serait-elle capable de me quitter ou accepterait-elle la situation ? Je ne pouvais pas la perdre. J'avais enfin trouvé une relation, stable en plus de cela, je ne voulais pas que ça se termine. Merci Waller, tu as tout gâché.

Un bébé merde. Je commençais à peine à être responsable et voilà que j'avais déjà un autre petit être sous ma responsabilité. Cela semblait irréel pour moi. Je n'avais que dix-neuf ans, je n'avais pas été préparé. Comment m'en sortirais-je ? J'espérais qu'Abigail était en train d'en prendre plein la tête et qu'elle était aussi mal que moi. Elle ne méritait que ça pour ce qu'elle avait fait. 

...

Je rentrai chez moi vers vingt-heures, quand le bar ne voulut plus de moi. J'étais tellement soul que je pouvais m'écrouler à tout moment. Je tenais à peine debout. Je toquai faiblement à la porte, assez pour que les personnes à l'intérieur puissent entendre. Ce fut ma mère qui m'ouvrit. 

- Justin ! souffla-t-elle de soulagement. Je t'ai appelé une centaine de fois !
- Maman, ce n'est pas le moment, grognai-je.

J'entrai en titubant. Elle me soutint par le bras ayant peur que je tombe.

- Tu es soûl !
- Ah le voilà ! débarqua Thomas.
- Il est parti se soûler, lui dit ma mère furieuse.
- Laisse-le, c'est normal. Il a besoin d'encaisser la nouvelle.
- J'ai eu peur qu'il fasse une connerie.
- Mais ça va, je suis là ! On peut me laisser tranquille maintenant ? 
- Je sais que tu es bouleversé par la nouvelle Justin mais ce n'est pas une raison pour t'en prendre à nous.
- Je ne m'en prends pas à vous putain ! m'énervai-je. Je veux juste qu'on me laisse tranquille ! 

Je me dégageai de son étreinte et partis me réfugier dans ma chambre. 

- Putain ! criai-je.

Je voulais tout faire péter. Il était impossible pour moi de me calmer et le taux d'alcoolémie dans mon sang n'arrangeait rien. 

- Il faut que je me calme, me murmurai-je. 

La seule façon pour moi de reprendre mes esprits était d'appeler Kiara. Elle était la seule personne ici qui pourrait me canaliser. Mais comment lui expliquer la situation ? Comment lui dire que j'étais papa d'un garçon qui n'était pas le sien ? Je n'avais aucune idée de comment elle prendrait la nouvelle. Pas une seule seconde nous avions imaginé que cela pourrait nous arriver. 

Avec une grande appréhension, je sortis mon téléphone et l'appelai. J'espérais qu'elle réponde vu l'heure qu'il était. Mon cœur battait frénétiquement et je n'avais aucune idée de si c'était l'alcool ou la nervosité qui rendait les battements si rapides. J'avais peur qu'elle me quitte, qu'elle refuse de supporter cette situation. Je ne pourrais pas affronter tout ça sans son soutien.

- Oui, mon amour ? décrocha-t-elle directement.
- Je te dérange ?
- Non, je suis dans ma chambre d'hôtel.
- OK... Alors je n'aurais jamais pensé devoir faire ça un jour et j'aurais aimé ne pas à avoir te le dire par téléphone mais...

Je soupirai. Je priais pour qu'elle prenne bien les choses. 

- Tu me fais peur Justin.
- Je suis papa, révélai-je dans un élan de courage.

Elle ne dit rien. Je m'effondrai sur mon lit et portai mon regard vers le plafond. 

- Kiara ?
- Tu as dit quoi ?
- Je suis papa... J'ai un fils... Et Abigail est la mère...

Elle ne dit rien une nouvelle fois. Je compris alors qu'elle ne prenait pas du tout bien la chose. Putain. 

- J'ai besoin de ton soutien Kiara. J'ai besoin que tu sois là pour moi et que tu m'accompagnes dans cette nouvelle page de ma vie.
- Je... Je ne comprends pas... 
- Julian est en fait son fils et c'est aussi le mien. Je viens de l'apprendre. Je suis autant sous le choc que toi.
- Oh mon dieu... l'entendis-je murmurer.
- Je sais... C'est difficile à croire. 

Un silence s'installa pour la troisième fois. Était-elle en train de songer à me quitter ? Le monde entier allait-il s'abattre sur moi pour de bon ? 

- Dis-moi quelque chose bébé.
- Je ne sais pas quoi te dire Justin. Qu'est-ce que tu comptes faire ?
- Comment ça ?
- Est-ce que tu vas l'assumer ? Est-ce...
- Bien sûr, la coupai-je. C'est mon fils. Je vais l'élever et être présent pour lui.
- Où ? A Boston ? Et qu'est-ce qu'il en advient de nous ?
- Kiara, s'il-te-plaît, calme-toi. Je ne sais pas encore comment je vais gérer tout ça mais Julian est mon fils et je veux être là pour lui. Même si avoir un bébé était la dernière chose que je voulais aujourd'hui.
- Je ne veux pas que ça brise notre couple Justin.
- Ça ne le brisera pas si on arrive à faire la part des choses. 

J'entendais dans sa voix qu'elle n'était pas rassurée. Moi non plus à vrai dire. J'avais un enfant avec mon ex petite-amie et nous étions tous les deux en couple de notre côté. Nous avions à peine dix-neufs ans et nous habitions dans deux continents différents. Comment cela pourrait-il fonctionner correctement ? Ça me paraissait impossible. Il allait falloir que nous fassions tous les deux des concessions et je n'étais pas certain pour le moment de vouloir en faire. 

- Mais comment ça a pu arriver ? 
- Je ne sais pas. Je...

Je me relevai subitement en me rappelant de ce qu'il s'était passé l'année dernière. La piscine... Et la cabine... C'était sûrement là que tout avait basculé. Pauvre con. C'était de ma faute, entièrement de ma faute. Putain. Pourquoi n'avais-je pas pu me retenir ? Je n'avais pas du tout réfléchi et j'avais laissé mon envie me dépasser. Quel con sérieux. Pourquoi avais-je fait autrefois du sexe une priorité ? Tous les souvenirs de cette journée refaisaient surface. Si j'avais su que nous avions mis un enfant en route ce jour-là... Bordel.

Et pourquoi ne m'avait-elle pas repoussé ? Pourquoi m'avait-elle laissé entrer en elle sans préservatif ? Elle aurait dû m'en empêcher. Elle qui était si raisonnable. Elle était aussi fautive. Nous l'étions tous les deux.

- Justin ? me sortit Kiara de mes pensées.
- On l'a fait sans se protéger. Une fois. Et malheureusement c'était la fois de trop.
- Pourquoi vous...

Elle souffla.

- De toute façon, le mal est fait. Ça ne sert à rien que j'essaie de comprendre le pourquoi du comment, dit-elle finalement. Mais je te soutiens Justin. Je ne te laisserai pas tomber. 

Je soufflai de soulagement. C'était tout ce que j'avais voulu entendre, dès le début. 

- Merci. J'avais peur que tu me dises que tu préfères en rester là. 
- Quoi ? fit-elle offensée. Tu pensais que je pouvais être capable de te quitter pour ça ? 
- Il s'agit d'un bébé Kiara. Ce n'est pas rien. Ce n'est pas quelque chose dont je peux m'en débarrasser.
- Je sais mais je t'aime Justin et tu le sais. Tu devrais savoir que ce n'est pas un bébé qui va m'éloigner de toi.
- Je ne sais plus rien Kiara. Je suis complètement perdu. Tu peux comprendre que je doute de tout maintenant.
- Mais pas de moi. Ne doute pas de moi.
- D'accord, excuse-moi.
- Tu as l'air épuisé.
- J'ai un peu bu, avouai-je.
- Non, tu es soul, ça s'entend. Tu ne devrais pas te mettre dans cet état pour ça Justin.
- S'il-te-plaît Kiara, ce n'est pas le moment pour qu'on me fasse la morale.
- J'essaye de t'aider !
- Contente-toi de me dire que ça va aller.
- Je vais te laisser décuver. On s'appelle demain.

Elle raccrocha. Je jetai furieusement mon téléphone à l'autre bout de la pièce. Merde !  Pourquoi avait-il fallu que je gâche cet appel ? Il ne fallait pas que je commence à mal agir avec elle. Elle n'y était pour rien dans cette histoire, elle n'avait pas à supporter mes excès de colère. 

Je sortis enfin de ma chambre vers vingt-trois heures mourant de faim même si la faim était le cadet de mes soucis désormais. Je tombai sur ma mère et Thomas dans le salon qui semblaient discuter sérieusement. Ils arrêtèrent leur conversation quand ils m'entendirent arriver et se tournèrent vers moi. 

- Tu ne dors pas ? me demanda ma mère. 
- Comment je suis censé pouvoir dormir alors que je viens d'apprendre que j'ai un fils ? répondis-je presque sèchement. 

Elle ne dit rien. 

- On va trouver une solution, me dit Thomas.
- Quelle solution ? Je sais déjà ce qu'il va se passer. On va rester ici, Abigail et moi aurons la garde partagée de Julian, je vais devoir avoir une relation à distance avec Kiara, Jaz...
- Arrête Justin, me coupa ma mère. Arrête de dire des choses pareilles. Tu ne sais pas ce que l'avenir te réserve.
- Pour l'instant, l'avenir m'a réservé une vie avec un bébé que je n'ai pas voulu et un lien éternel avec mon ex petite-amie mythomane. Alors sérieusement, laisse-moi me lamenter.
- Tu n'as pas envie d'élever Julian ? Et bien tu sais que tu peux ne pas l'assumer mais...
- Stop maman, la coupai-je. J'étais peut-être un sombre connard avant mais je vais l'assumer ce gosse. Je ne veux pas être un salaud comme l'a été celui dont je porte les gènes.
- Ce qu'elle veut dire c'est que Zac est là et...
- Non, interrompis-je Thomas. Je ne laisserai pas ce mec élever mon fils. C'est moi son père, pas lui. 

Je n'arrivais pas à croire que ma mère et Thomas puissent envisager que je laisse Abigail seule avec Julian. Eux qui estimaient la famille comme la chose la plus importante sur Terre. J'avais l'impression d'être en train de délirer.

- Je rêve ou vous préféreriez que je ne l'assume pas ? 
- Justin, dit ma mère en s'approchant de moi. Julian est mon petit-fils. Comment tu peux penser que je veuille le renier ? 
- Je ne sais pas, vous faîtes tous les deux comme s'il y avait une autre possibilité.
- On se demande juste comment on va faire pour réorganiser notre deuxième nouveau départ. Thomas va devoir fermer son cabinet en Australie, on va devoir déménager, vendre la maison et en acheter une ici, Jazmyn va encore devoir changer d'école, et tu sais, un tas d'autres choses.
- Et le procès n'est pas terminé alors il faut qu'on s'y prenne à l'avance pour montrer qu'on est une famille organisée et responsable, ajouta Thomas. 

Je me figeai à l'entente de leurs paroles réalisant tous les changements que nous allions encore devoir subir. Pourquoi ? Pourquoi nous ?  Ne pouvait-on pas nous laisser tranquille ? Je haïssais Abigail encore plus désormais et pire, je haïssais le mec tout là-haut pour me l'avoir retiré de ma vie en pensant que c'était pour le meilleur avant de la faire débarquer à nouveau avec une bombe entre ses mains. 

 - J'espère que vous ne comptez plus être amis avec cette... Pauvre fille, dis-je après avoir cherché mes mots. 
- Justin... Tu n'es pas obligé d'être vulgaire quand tu parles d'elle.
- Elle m'a caché que j'avais un fils. Elle m'a laissé reconstruire ma vie de mon côté sachant que je n'étais pas là où je devais être.
- Peu importe Justin, il va falloir qu'on reste en bons termes avec elle si on veut pouvoir faire grandir Julian dans une famille seine.
- Une famille seine ? répétai-je amusé. Il va avoir quatre parents, dont deux biologiques qui sont ex, Zac et moi qui ne pouvons pas nous saquer, et Kiara qui détestera sûrement Abigail. Je ne vois pas comment ça pourrait être sein.
- Ça va l'être parce que vous y mettrez tous du vôtre. Abigail a eu des problèmes dans sa famille, toi aussi alors je pense bien que vous voulez tous les deux que Julian n'en ait pas.

Jazmyn surgit de nulle part sûrement réveillée par notre discussion un peu trop forte. Elle avait les yeux à moitié ouverts et tenait son doudou dans une main. 

- Qu'est-ce que vous faîtes ? nous demanda-t-elle.
- Jazmyn, pourquoi tu es debout ? lui demanda notre mère avant de la prendre dans ses bras.
- Vous m'avez réveillée, répondit-elle d'une petite voix.
- Pardon ma chérie, lui dit-elle. On en reparlera plus tard, s'adressa-t-elle à moi puis elle partit recoucher ma sœur.
- Tu devrais aller dormir, me dit Thomas. Le manque de sommeil va te rendre encore plus déboussolé.
- Je sais.
- Nous n'avons pas poursuivi la discussion après que tu sois parti du café. Abigail a fondu en larmes et elle a proposé qu'on reparle de tout ça demain. Est-ce que tu veux bien faire un effort et l'écouter ?

- Je n'ai pas le choix de toute façon, répondis-je. Même si je n'en ai rien à foutre de ses explications, je l'écouterai. 

Il acquiesça. 

- Bon je vais manger et retourner dans ma chambre, lui dis-je.
- Bonne nuit Justin.
- Ça va être dur.

Abigail viendrait donc demain pour s'expliquer. J'espérais pour elle que j'arriverais à me tenir et que ma colère se serait calmée d'ici là - ce qui m'étonnerait. Je ne voyais pas comment elle allait pouvoir se justifier de ce qu'elle avait fait. Elle avait simplement agi égoïstement, il n'y avait pas d'autres explications. 

...

Il était dix heures du matin. Je n'avais pas dormi de la nuit et j'étais toujours aussi furieux. J'avais les nerfs à vifs et je sentais que je pouvais éclater à nouveau à tout moment. Ma mère m'avait demandé de ne pas partir au quart de tour et de rester poli pour mener à bien la discussion que nous allions avoir mais je savais pertinemment que c'était au dessus de mes forces. Je haïssais Abigail et rien ne m'empêcherait de le lui faire savoir.

On sonna à la porte. C'était elle. Elle avait bien eu le courage de venir. Thomas se leva pour aller l'ouvrir. Elle entra la tête légèrement baissée. J'espérais qu'elle avait très honte de ce qu'elle avait fait. Des brefs "bonjour" furent échangés tandis que je restais silencieux, mes yeux rivés sur elle.

- J'aimerais parler avec Justin d'abord, nous dit-elle. Si tu veux bien, s'adressa-t-elle à moi. 

Je ne dis rien et me levai du canapé. Je me dirigeai vers ma chambre et je l'entendis me suivre. Seul avec elle, il était désormais certain que je péterais à nouveau un câble. Nous entrâmes dans la pièce et je me plaçai le plus loin possible d'elle, du côté droit de mon lit tandis qu'elle était restée du côté gauche. Je croisai les bras sous ma poitrine. En la voyant là, j'avais conscience à quel point mon regard avait changé sur elle. Il n'y avait plus que du dégoût et une profonde déception. 

- Je t'écoute. 
- D'abord je veux te dire que je ne m'excuserai pas. J'ai...
- Attends quoi ? la coupai-je instantanément. Comment tu peux oser venir chez moi et dire que tu ne t'excuseras pas pour ce que t'as fait ?
- Pour moi, c'était la meilleure décision à prendre et je ne le regrette pas.
- Tu m'as caché que j'avais un fils Abigail ! élevai-je la voix.
- Parce que tu n'étais pas là ! cria-t-elle en retour. Tu étais parti en Australie refaire ta vie ! Je ne me voyais pas t'annoncer que notre bébé était en route ! Je ne voulais pas que tu laisses tout tomber pour revenir ici ! 

Elle était déjà en train de craquer et avait désormais les larmes aux yeux mais cela ne m'affecterait pas. Je lui en voulais et je comptais m'assurer qu'elle le comprenne.

- Et regarde maintenant, c'est pire. Je suis de retour, un an après avec un enfant de quatre mois à assumer. Obligé de tout recommencer à zéro une nouvelle fois. 
- Je ne pensais pas que tu reviendrais !
- Mais je suis revenu ! Alors pourquoi tu ne me l'as pas dit ?
- Je comptais le faire ! Mais il me fallait du temps, ce n'était pas facile pour moi tu sais ? Et je ne voulais pas te l'annoncer dans une lettre comme toi tu l'as fait pour ton départ ! Je ne voulais pas être lâche comme toi !
- Alors quoi ? C'est une vengeance c'est ça ?
- Ne sois pas stupide.
- Tu as été une pauvre égoïste, c'est tout ! Me priver de mon fils comme ça... dis-je dégoûté, je n'arrive pas à y croire.
- Égoïste ? répéta-t-elle en faisant un pas vers moi. Tu es parti et j'ai eu droit à aucune nouvelle. Aucun appel, même pas un putain de message Justin !

Les larmes se mirent à couler sur ses joues. C'était plaisant de la voir ainsi. Je voulais qu'elle pleure, encore et encore, et qu'elle regrette la décision qu'elle avait prise jusqu'à la fin de sa vie.

- Alors je me suis dit qu'en fait, rien de ce qu'il s'était passé entre nous n'avait compté pour toi. Je me suis dit que tu étais plus heureux là-bas et sans moi. J'ai mis des mois à t'oublier Justin. Et quand j'ai enfin réussi à tourner la page, j'ai appris ma grossesse. Alors qu'est-ce que tu voulais que je fasse ? Que je t'appelle et te dise que moi, la fille dont tu n'en avais plus à rien faire, attendais un enfant de toi ? Il était trop tard mais j'étais prête à l'assumer toute seule et à renoncer à ma vie d'adolescente. Je n'ai pas voulu t'obliger à faire de même. J'ai préféré que tu profites de ta nouvelle vie de famille en Australie. Alors tu peux dire et penser ce que tu veux mais ce choix, je l'ai fait pour nous deux. 

Elle essuya ses joues. Je savais qu'elle détestait pleurer devant moi, être vulnérable comme ça. Mais c'était tout ce que je lui donnerais : des larmes. 

- Tu mens, rétorquai-je. Tu ne voulais juste pas que je sois le père de cet enfant. Et il y avait Zac alors...
- Ça n'a rien à voir avec Zac ! me coupa-t-elle.
- Si ! Tu as laissé ce putain de mec s'occuper de mon enfant ! Je suis même sûr que tu comptais faire croire à Julian que c'était lui son père !

Elle ne dit rien et secoua la tête. 

- Je me demande comment tu as pu te regarder dans une glace pendant ces deux dernières semaines. Me parler comme si de rien n'était, me confier Julian sans jamais me dire que j'étais son père. T'as un sacré culot Waller.
- Je te l'ai déjà dit, je voulais te le dire mais je n'y arrivais pas. 
- Et au lieu de ça tu faisais quoi ? Tu te rapprochais de moi ! Tu voulais être mon ami ! Mon ami putain ! Alors que tu savais que ce n'était pas possible ! 
- Je sais que c'est sur ça que j'ai merdé Justin ! Mais pour le reste, je ne regrette rien !
- Je t'en voudrais toute ma vie pour ce que tu as fait, lui dis-je.
- Tu veux que je te dise que je suis désolée ? Désolée d'avoir pensé à toi et ta famille ? OK. Alors je suis désolée ! Mais ça ne changera rien ! J'ai fait ce que j'avais à faire !

Je serrai les poings. Elle me rendait fou. Je voulais tout détruire autour d'elle. Lui faire ressentir ce que je ressentais à cet instant précis. 

- Tout ce que je veux savoir maintenant que tu sais pour Julian, c'est qu'est-ce que tu comptes faire ?
- L'élever. Je veux être le meilleur père pour lui malgré tout.
- OK. Et bien, on va devoir s'arranger pour la garde partagée. 

Je le regardai longuement. Non. Elle ne s'en tirerait pas comme ça si facilement. 

- Non, refusai-je.
- Quoi ? fronça-t-elle les sourcils. 
- J'en veux la garde exclusive. 

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