Chapitre 1
«Tu es mon premier amour.»
Un an plus tard...
Point de vue d'Abigail.
Je me promenais dans le jardin public de Boston. Il faisait bon. C'était bientôt l'été, on entendait le chant des oiseaux et le rire des enfants. C'était une ambiance agréable et je profitais pleinement de cet instant. Avec tout ce qu'il s'était passé en un an, je n'avais pas eu un moment à moi alors cela tenait presque du miracle que je puisse avoir une heure de libre enfin. Je marchais et poussais Julian dans son landau. Il dormait paisiblement sous son petit drap blanc. Je souris légèrement en posant mes yeux sur lui. Il était si mignon quand il ne pleurait pas et qu'il ne me dérangeait pas. Mais je l'aimais malgré tout, il était mon fils, même s'il n'avait pas été dans mes plans, même s'il n'avait été pas voulu et même si à cause de lui j'avais dû renoncer à mon rêve une seconde fois.
Heureusement pour lui et moi, j'avais été assez mâture pour ne pas l'avoir renié et aujourd'hui, je ne regrettais pas cette décision. Il était certain que je traversais plus de bas que de hauts depuis sa naissance et surtout depuis que j'avais appris que j'étais enceinte mais il faisait quand même mon bonheur et je savais que ça irait mieux avec le temps.
Je pouvais compter sur l'aide de mon père, de Briana et de Zac donc je n'étais pas seule et je ne pouvais pas me plaindre. Ça aurait pu être pire, mon père aurait pu me foutre dehors, mon copain aurait pu me quitter et ma meilleure amie aurait pu me tourner le dos mais ça n'avait pas été le cas.
Je continuais de me balader suivant le chemin tracé. Je rencontrais d'autres mamans qui me souriaient comme pour partager leur galère avec moi, des couples qui me dévisageaient sûrement parce qu'ils devaient juger que j'étais trop jeune pour avoir un enfant et des personnes âgées qui m'envoyaient leur pitié ou leurs félicitations. Je n'y prêtais pas attention. Ma vie avait changé depuis l'arrivée de Julian et ceci faisait partie de mon quotidien depuis quelques mois maintenant. J'avais alors pris l'habitude de rencontrer ce genre de personnes.
Les yeux de Julian s'ouvrirent doucement. Il était en train de se réveiller. Je me penchai vers lui et tentai de le bercer pour qu'il ne se mette pas à pleurer. Je ne voulais pas me donner en spectacle ici et de plus je ne savais pas encore parfaitement le gérer.
- Non, non, chut... S'il-te-plaît Julian... murmurai-je.
J'arrêtai la poussette sentant qu'il était bien parti pour pleurer. Je voulus le prendre dans mes bras quand je sentis une présence derrière moi.
- Waller ?
Mon cœur manqua un battement, le temps se figea et glaça mon corps avec. Un millier de choses me passa par la tête. Waller. C'était lui. Il n'y avait que lui pour m'appeler encore comme ça. Tous les souvenirs revinrent en une fraction seconde. Tous ces souvenirs que je m'étais efforcée de garder loin de moi pour ne pas souffrir. Pourquoi était-il de retour ? Pourquoi maintenant que j'allais beaucoup mieux ? Je n'osais pas me retourner. J'avais peur de croiser son regard et, en plus d'avoir ravivé des souvenirs, qu'il ravive des sentiments en moi que j'avais enfouis.
- Abigail ? fit-il une nouvelle fois.
Je tournai les talons lentement tout en retenant mon souffle. Ma bouche s'entrouvrit en le découvrant pour la première fois en un an. Mes yeux parcoururent de bas en haut sa silhouette. Il avait agréablement changé malheureusement. Son teint était plus foncé - il avait donc bronzé - ses cheveux avaient poussé et il soignait mieux sa coiffure même si elle restait quelque peu négligée, sa barbe était semi-apparente et foncée, les traits de son visage étaient plus affirmés et il avait pris de la carrure. Il avait encore plus d'encre sur sa peau et il avait définitivement laissé tomber les jeans trop grands ce qui lui allait mieux.
Mon cœur palpitait. J'étais totalement paniquée. Je n'avais aucune idée de ce que je devais dire ou faire. De plus, Julian était avec moi et je ne voulais pas que Justin me pose des questions sur lui. J'avais réussi à ne rien dire pendant des mois, je voulais garder le secret le plus longtemps possible.
- Justin, réussis-je à dire.
- Comment tu vas ?
- Bien, je vais bien, répondis-je, et toi ?
- Je vais bien aussi.
Je sentais le malaise qui émanait de nous. Peut-être que j'étais plus gênée que lui mais c'était certain qu'il l'était aussi. Ses yeux me scannèrent avant de dériver derrière moi c'est-à-dire sur le landau où Julian pleurait encore. Merde. Comment allais-je me sortir de cette situation ?
- Tu fais du baby-sitting ? me demanda-t-il en fronçant les sourcils.
- Oh... Euh... me grattai-je la tête. Non, c'est... C'est mon petit frère... mentis-je.
- Ton petit frère ? répéta-t-il surpris.
- Oui, mon père s'est trouvé une fiancée et ils ont eu un enfant ensemble.
J'avais l'impression que mon cœur allait sortir de ma poitrine. C'était horrible de devoir mentir sur ça. Parce que Julian était son fils et il fallait qu'il le sache un jour ou l'autre. Mais pour l'instant, je n'étais pas prête à lui révéler une chose pareille. Je ne m'attendais même pas à le voir ici.
- Il s'appelle Julian et il a un peu plus de quatre mois, ajoutai-je.
Je le sortis de son landau et le pris dans mes bras pour le bercer et ainsi arrêter ses pleurs. Justin me fixait confus. Il ne semblait pas m'avoir cru. Il fallait donc que j'argumente pour qu'il ne se doute pas de la vérité.
- La fiancée de mon père est super cool, je suis très contente de la venue de Julian. Ça s'est fait rapidement je sais mais ils sont très amoureux et moi je suis heureuse avec cette nouvelle famille, dis-je en faussant un sourire.
- Je suis content pour toi.
Julian se calmait peu à peu contre mon épaule ce qui faisait redescendre la pression en moi.
- Et toi ? Comment ça se fait que tu sois ici ? Ça ne s'est pas bien passé en Australie ? lui demandai-je.
- Si. On doit justement voir la juge pour qu'elle nous accorde définitivement la garde de Jazmyn. On est juste là le temps des vacances.
J'acquiesçai. Il n'était donc pas revenu ici pour un second nouveau départ mais seulement pour aller dans la continuité du premier.
- On pourrait faire un truc un de ses quatre pour parler plus longuement ? proposa-t-il.
- Oh... Euh...
Je passai une main dans les cheveux châtains de Julian tout en réfléchissant. Je n'étais pas certaine que ce soit une bonne idée. Je ne savais pas si je voulais prendre de ses nouvelles et l'entendre me dire tout ce qu'il avait fait de super pendant que j'avais dû m'occuper de notre enfant.
- Je suis très occupée en ce moment mais dès que je serai libre, il n'y a pas de problème, déclarai-je.
- Ce soir ? Viens dîner chez moi, tu retrouveras ma mère, Thomas et Jazmyn.
- Justin, je...
- Tu peux venir avec ton père et sa fiancée, il n'y a pas de problème, insista-t-il. Et Julian aussi bien sûr.
Il me suppliait presque du regard. Pourquoi me faisait-il ça ? Pourquoi cela ne lui venait-il pas à l'esprit que je n'avais peut-être pas envie de passer du temps avec lui et que j'aurais préféré qu'il reste loin de ma vie une bonne fois pour toute ? Toute ma haine pour lui était quelque temps revenue quand j'avais appris que j'attendais Julian et que j'avais donc dû dire adieu à mes longues années d'étude alors non ça ne m'enchantait pas vraiment de le voir ici.
- Je ne pense pas que Zac va accepter, je suis désolée.
- Zac ? fronça-t-il les sourcils. Celui d'Harvard ? Tu es avec lui ?
- Oui.
Il fit - certainement de manière impromptue - un pas en arrière comme si cette nouvelle lui choquait. Je savais ce qu'il devait penser. J'avais été amoureuse de lui quand j'avais fréquenté Zac et si j'étais en couple avec ce dernier aujourd'hui c'était que je n'avais pas été sincère avec lui auparavant. Mais c'était faux, j'avais aimé Justin plus que tout à cette époque et Zac n'avait clairement pas fait le poids mais lui était resté et aujourd'hui c'était lui que j'aimais.
- OK... Bon, une prochaine fois peut-être. Demande-lui quand même, on ne sait jamais. J'ai toujours le même numéro.
J'hochai la tête et il me fit un signe de la main avant de partir. Je fermai les yeux et soufflai de soulagement car tout ne s'était finalement pas si mal passé. Il n'avait pas l'air de savoir pour Julian et nous avions réussi à passer outre notre gêne et nos histoires du passé. Je reposai Julian dans le landau et décidai de rentrer chez moi.
Même avec l'arrivée du bébé, nous n'avions pas pu déménager mon père et moi car ce n'était clairement pas dans notre budget. Nous étions donc à l'étroit dans l'appartement mais il fallait faire avec.
De retour, je couchai Julian dans son lit puis partis me rafraîchir dans la cuisine. J'étais encore sonnée. Je n'arrivais pas à croire que Justin était de retour. Toute ma haine commençait à refaire surface. Tout ce qu'il avait fait de travers, toutes les fois où il ne m'avait pas respectée mais surtout tous les mots qu'il m'avait dits avant et après cette fois qui avait mis notre fils en route. «On a déjà fait pire.» «Tu me fais confiance ? » «Je suis dépisté.» «Je n'éjaculerai pas en toi.» «Tu prends la pilule du lendemain et ça ira.»
Pourquoi l'avais-je écouté et fait confiance ce jour là ? Pourquoi n'avais-je pas choisi la raison pour une fois ? Un simple non aurait empêché tout ce qu'il m'arrivait aujourd'hui mais c'était trop tard et je ne pouvais pas faire marche arrière. De toute façon, je n'avais jamais pu le faire. J'avais fait un déni de grossesse ce qui ne m'avait pas permis d'avoir eu le choix d'avorter ou non. Il avait été déjà trop tard quand j'avais appris que j'étais enceinte. Le fœtus dans mon ventre était déjà là depuis presque cinq mois. Mais au final, je ne pensais pas que j'aurais été capable de lui ôter la vie. Ce n'était pas dans mes principes.
Mon père arriva une demi-heure plus tard. Il remarqua directement que quelque chose n'allait pas.
- Qu'est-ce qu'il y a ? me demanda-t-il. Il y a un problème avec Julian ?
Je secouai la tête négativement puis me levai du canapé.
- J'ai croisé Justin tout à l'heure, lui annonçai-je.
Il entrouvrit sa bouche sans laisser échapper un son. Son cerveau semblait s'être subitement déconnecté. Il avait eu en quelque sorte la même réaction que moi. Il posa son sac à ses pieds comme si cela l'aiderait à se rendre compte de la situation puis se rapprocha de moi.
- Il est de retour ?
- Seulement pour les vacances.
- Et ? demanda-t-il en devinant que ce n'était pas tout.
- J'étais avec Julian.
- Tu as lui dit la vérité ?
- Non, je lui ai fait croire que Julian est mon petit frère.
Mon père avait respecté mon choix de ne vouloir rien dire à Justin mais je doutais qu'il veuille bien que je mente et que je le mette surtout dans mes problèmes en faisant croire que Julian était son fils.
- Abigail, je comprends que c'...
- Je sais, je n'aurais pas dû dire ça, le coupai-je. Mais il m'a prise au dépourvu. Je te promets que je lui dirai bientôt la vérité.
- Je veux bien... Je veux bien jouer le jeu le temps que tu sois prête à lui dire ce qu'il doit savoir mais je ne pourrais pas le jouer éternellement.
- Tu ferais ça pour moi ? lui demandai-je surprise.
- Abigail, je sais que c'est difficile pour toi. Je veux bien te rendre service mais il faudra que tu lui dises un jour.
Je lui sautai dans les bras et le remerciai. J'avais encore une fois besoin de son soutien et il répondait toujours présent.
- Il nous a invité à dîner ce soir, je ne sais pas si c'est une bonne idée, ajoutai-je.
- Un dîner où et avec qui ?
- Chez lui avec sa famille.
- Ne compte pas sur moi, je veux bien jouer le jeu avec lui mais pas avec sa famille.
- Oui... Je sais... De toute façon je ne voulais pas y aller.
- Tu l'as dit à Zac ?
- Non mais je vais le faire.
- Il va t'aider à l'annoncer.
- Non, ris-je nerveusement, pas lui.
Zac haïssait Justin sans même l'avoir déjà rencontré. Il le haïssait parce qu'il m'avait mise enceinte puis qu'il s'était cassé, il le haïssait parce qu'il avait brisé mon rêve mais surtout parce qu'il avait été le premier et qu'il estimait qu'il ne l'avait pas mérité. Ce n'était certainement pas lui qui m'aiderait à dire la vérité à celui qui était le père du bébé qu'il m'avait aidé à élever et qu'il considérait comme son fils.
...
Il était vingt heures et la porte s'ouvrit laissant apparaître Zac. Il sourit directement en me voyant et s'approcha de moi pour déposer un baiser sur mes lèvres.
- Ça va ?
J'acquiesçai.
- Julian dort ?
- Oui. Il a déjà mangé.
Il prit place à table à côté de moi. Mon père était dans sa chambre et ainsi nous pouvions être tranquilles que tous les deux. Je n'avais toujours pas changé d'humeur depuis tout à l'heure, j'avais Justin en tête et tout ce qui se tramait autour de ce personnage. J'avais l'impression que la spirale infernale était de retour et j'avais peur de ne pas pouvoir m'en défaire une seconde fois.
- Tu es sûre que ça va ? remarqua-t-il mon égarement.
- Oui... Oui...
- Bébé, dis-moi.
Je mordillais nerveusement ma lèvre inférieure. Je savais que je devais lui raconter ce qu'il s'était passé mais je ne voyais pas comment. C'était délicat. Cela touchait un point sensible. J'avais été amoureuse de Justin et j'imaginais bien qu'après ce que je lui dirais, il pourrait avoir peur que mes sentiments pour lui reviennent.
- J'ai croisé Justin cet après-midi, annonçai-je avant de me pincer les lèvres.
Ses sourcils se froncèrent et sa mâchoire se contracta. La couleur bleue de ses yeux s'assombrit et son visage se ferma. Je pouvais imaginer que les battements de son cœur avaient doublé et que le sang bouillonnait désormais en lui. Je déglutis. C'était définitivement le retour des problèmes.
- Qu'est-ce qu'il fout ici à Boston ?
- Il est ici pour sa sœur, il ne restera pas longtemps.
- Qu'est-ce que vous vous êtes dits ?
- On a discuté rapidement, répondis-je. On ne s'est rien dit de spécial.
- Tu étais avec Julian ?
- Oui et... Je n'ai pas eu d'autre choix que de lui dire que Julian était mon frère. J'ai paniqué et c'est la seule chose que j'ai pu trouver, expliquai-je.
- Tu as bien fait.
- Tu trouves ?
Il se leva et partit dans la cuisine sans répondre à ma question. Je fronçai les sourcils, je trouvais que quelque chose clochait dans sa façon de réagir à cette nouvelle.
- Est-ce qu'il compte te revoir ? me demanda-t-il en refaisant son apparition.
- Je sais que t'es contre ça.
- Tu n'as pas répondu à ma question, dit-il en reprenant sa place à côté de moi.
- Peu importe Zac.
- Tu vas lui dire pour Julian ?
- Mon père va m'y obliger et puis, je dois le faire.
- Mais tu m'as dit qu'il ne restera pas longtemps ici, il n'a pas besoin de le savoir.
- Zac... Si ça ne tenait qu'à moi, je ne lui dirai rien. S'il n'était pas revenu, je n'aurais pas remis ma décision en question mais il est de nouveau là et même si ce n'est pas pour longtemps, je ne pourrais pas faire semblant longtemps devant lui.
- Alors évite-le jusqu'à son départ comme ça tu ne te sentiras pas obligée de lui dire quoi que ce soit.
Je soupirai. Il ne comprenait pas. Ce n'était pas si simple que ça. Il n'était pas dans ma situation, ni dans ma peau, il ne pouvait pas comprendre.
- Je sais Zac que tu ne veux pas qu'il te le prenne mais il est son père biologique et...
- C'est injuste, me coupa-t-il avec un ton dégoutté.
- De toute façon, je suis certaine qu'il ne l'assumera pas.
Il secoua la tête. Il était complètement renfermé et en désaccord avec moi. Comment allais-je gérer tout ça ? Ça ne commençait déjà pas très bien pour ne pas dire mal.
- J'ai le droit de donner mon avis. Je l'élève avec toi, je le considère comme mon fils, je...
- Je sais tout ça, le coupai-je. Je sais à quel point il compte pour toi. Il ne te l'enlèvera pas. Il n'en a pas le droit.
Je pris sa main et entrelaçai nos doigts. Je voulais le rassurer. Il n'avait pas à avoir peur. Même si Justin était le vrai père de Julian, il n'était pas qualifié pour prendre des décisions à son propos. Je me levai et me posai sur ses cuisses. Je lui lançai un sourire avant de l'embrasser tendrement. Je fermai les yeux. C'était agréable. La chaleur de nos deux corps se répandit rapidement dans toute la pièce. Le baiser tendre se transforma en un baiser sensuel. J'étais bien avec Zac et je ne voulais pas que ça change.
...
C'était le deuxième jour depuis le retour de Justin et j'étais déjà au bord de la crise de nerfs. Zac m'avait de nouveau pris la tête par rapport à Julian, mon père me lançait des regards du genre le temps est compté, mon fils était tombé malade et Briana était injoignable. J'avais l'impression que le monde était contre moi.
J'aurais dû partir au travail aujourd'hui mais comme Julian n'allait pas bien, mon patron m'avait accordé deux journées de congé. J'étais donc seule dans l'appartement avec lui. J'avais réussi à l'endormir mais je savais que le calme serait de courte durée.
J'étais en train de lire les cours de première année de Zac quand j'entendis quelqu'un toquer à la porte. Je posai les feuilles sur la table et me levai pour voir qui c'était. Mon cœur manqua subitement un battement quand le visage de Justin apparut juste là, devant moi.
- Justin... lâchai-je.
- Hey...
Je pinçai mes lèvres, il était terriblement sexy et sans le vouloir en plus. Des mèches tombaient sur son front, il portait un t-shirt qui moulait ses pectoraux et ses gros bras parfaitement musclés, il sentait bon et cette barbe... Merde... Cette barbe était ma nouvelle faiblesse. Elle lui allait si bien.
- Est-ce que tu as besoin de quelque chose ? demandai-je en reprenant mes esprits.
- Est-ce que tu as quelques minutes à m'accorder ?
- Euh...
Je lançai un regard derrière moi avant de le reposer sur lui.
- Je garde Julian, il est en train de dormir. Il ne faut pas qu'il se réveille.
- Je serai discret.
- Bon... D'accord.
Je me plaçai sur le côté et le laissai entrer. Je fermai la porte derrière lui puis l'invitai à s'asseoir à table. Je lui proposai poliment à boire mais il déclina.
- Alors ? Dis-moi.
J'attrapai mon gilet et l'enfilai étant donné que j'étais encore en pyjama et que je n'étais pas à l'aise ainsi avec lui. J'avais clairement perdu toute l'assurance que j'avais eu l'habitude d'avoir avec lui.
- Tu ne m'as pas donné de nouvelles hier et comme je n'ai plus ton numéro, j'ai préféré me déplacer.
- Désolée, j'avais complètement la tête ailleurs.
- Ce n'est pas grave, sourit-il, ce n'était pas un dîner officiel.
- Tant mieux alors.
Je ne savais plus comment lui parler, comment agir. Comment devons-nous être face à la personne qui nous a brisé le cœur mais à qui nous avons tout pardonné ? Outre le fait qu'il ne savait pas que le bébé qui dormait dans la pièce d'à côté était son fils, c'était notre histoire d'amour ratée qui me rendait extrêmement gênée en sa présence.
- Est-ce que tu as réussi ta première année à Harvard ?
- Oh... Euh... me raclai-je la gorge.
Je n'avais pas oublié que c'était Justin qui m'avait donné sa place après la remise des diplômes bien que le donneur avait voulu être anonyme. Mais que devais-je lui répondre ? Je savais qu'il serait déçu d'apprendre que je n'avais seulement pas loupé mon année mais que je ne l'avais carrément pas terminée.
- Non, dis-je avant de me mordre la lèvre inférieure.
- Comment ça se fait ? fronça-t-il les sourcils.
- J'ai peut-être trop sous-estimé le niveau.
- Toi ? Sous-estimer Harvard ? rit-il confus. Ce n'est pas possible.
- Et peut-être que j'ai préféré faire passer Julian avant.
- Ton copain ne t'a pas aidé ?
- Zac ? Tu sais, il est débordé lui aussi.
- OK... Je vois... Et donc qu'est-ce que tu as prévu de faire à la rentrée ?
- Je travaille au café pour l'instant et ça me va. Et comme ça je peux aider mon père pour les frais de Julian.
Il me fixait et semblait perdu. Mes paroles semblaient l'avoir perturbé.
- Je ne te reconnais plus. Tu avais l'habitude d'avoir beaucoup d'ambition et finir dans un café ne faisait pas partie de tes buts.
- Les gens changent Justin.
- Je ne pensais pas que tu ferais partie de ces gens.
- Pourquoi ça te dérange ? Parce que c'est toi qui me l'as donné cette place ? T'aurais aimé que ça ne serve pas à rien ?
- J'aurais aimé que tu n'aies pas de regrets plus tard.
- Qui te dit que j'en aurais ?
- Je te connais Abigail, je...
- Arrête Justin, le coupai-je. Tu crois me connaître mais tu ne sais rien. Tu es parti il y a un an, tu...
Je soupirai. Ses paroles m'énervaient. J'avais l'impression qu'il me faisait la leçon et il n'avait aucun droit de me la faire. Pas à moi, celle qu'il avait laissé tomber.
- Alors on en est encore là ? demanda-t-il.
- Pourquoi ? demandai-je en retour. Pourquoi tu fais comme si rien ne s'était passé ?
- Non, je ne...
- Si, élevai-je la voix de manière impromptue. Si Justin. Tu...
Je soupirai une nouvelle fois. Je n'arrivais pas à supporter cette situation. Je décidai de partir me réfugier dans ma chambre. Je l'entendais me suivre. Je fermai la porte derrière moi avant qu'il ne puisse me rejoindre. Je tombai sur mon lit complètement désespérée. Je me tins le visage entre mes mains. Comment allais-je faire ?
- Est-ce que tu veux qu'on reparle de ce qu'il s'est passé ? proposa-t-il derrière la porte.
Je relevai la tête et portai mon regard vers sa voix. Un millier de choses me passait par la tête. C'était dur pour moi de comprendre ce qu'il se passait mais il y avait une chose dont j'étais certaine, c'était que cela avait été une erreur de croire que notre histoire était définitivement terminée. Je me levai et me dirigeai vers la porte. Je l'ouvris et tombai nez à nez avec Justin. Je retins ma respiration quelques secondes. Ses yeux me transperçaient. Il était beaucoup trop près de moi. Il attendait ma réponse.
- Est-ce que ça changerait quelque chose qu'on en parle ?
- Je ne crois pas.
- J'ai besoin de savoir si tu m'en veux toujours.
Ma réponse était certainement oui mais je l'avais pardonné il y avait un de cela maintenant. Il ne comprendrait pas si je lui disais que ça me faisait encore du mal de le voir. Ses sourcils se froncèrent à mon silence. Il fit un pas en arrière.
- Pourquoi tu me détestes encore ?
- Justin, laisse tomber...
Je voulus le contourner mais il attrapa mon bras.
- Abigail, je ne veux pas que tu me détestes pour une connerie que j'ai faite il y a...
- Justin, ça n'a rien à voir avec ça.
Je voulus partir une nouvelle fois mais toujours aussi insistant, il fit un pas vers moi pour me barrer la route. Son visage était soudainement si près du mien. Son souffle brûlait mon visage, il me déstabilisait. Comme la première fois, comme quand je croyais qu'il n'y avait rien.
- Je t'en supplie Waller... Arrête de me haïr.
- Je ne te hais pas, murmurai-je presque.
Je tremblais presque. J'avais l'impression de revivre les mêmes émotions que lorsqu'on s'était découvert. C'était perturbant parce que je savais maintenant qui il était, je savais ce que j'avais aimé de lui et ce que j'avais détesté ainsi pourquoi mon corps agissait-il comme si c'était la toute première fois ?
- Si, tu me hais, je le vois dans tes yeux.
- Pourquoi ça t'atteint ?
- Parce que tu es mon premier amour Abigail.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top