Chapitre 22 : It's time


Je crois que le temps ne m'a jamais paru aussi long que durant cette garde.

Les interventions se sont pourtant enchaînées, me tenant occupé physiquement, mais mon esprit n'avait pas quitté les vestiaires et la sensation si douce de ses lèvres et de ce baiser presque trop furtif.

Je n'avais, bien entendu, pas pu échapper aux trop nombreuses questions de cet idiot de Trevor, voulant tout savoir, et dans les moindre détail, de ce qu'il s'était passé avec la jolie brune.

Je ne lui avais évidemment rien raconté, ne voulant pas avoir à subir ses conseils, ni ses reproches de ne pas avoir saisi l'occasion de conclure cette entrevue par une étreinte torride dans les douches de la caserne.

J'en étais toujours là de mes pensées en poussant la porte de mon appartement.

Incapable de tenir en place, je parcourais d'un pas rapide, la faible surface de l'unique pièce constituant mon foyer, croisant les bras, les décroisant, passant une main nerveuse dans mes mèches décoiffées, soupirant lourdement.

Que suis-je censé faire maintenant ?

Noyé sous le flot incessant de questions qui s'immiscent dans mon cerveau, je ne suis plus vraiment maître de mon corps et me rend compte que plus je cherche de réponse, moins j'en trouve dans la tempête qui tourbillonne dans mon crâne.

Prenant une nouvelle inspiration rapide, l'évidence me frappe enfin et je lève les yeux au ciel face à ma propre stupidité.

Il n'y a qu'un moyen efficace pour éclaircir cet entrelac d'interrogations et calmer mon âme tourmentée.

La méditation.

J'attrape l'un des carnets de Louis, pour me servir d'ancrage physique et, n'ayant pas de coussin de sol, je m'installe en tailleur à même le parquet en prenant une lente et longue première inspiration.

Je me récite, en silence, les mantras, appris il y a plus de dix ans, et retrouve progressivement ma sérénité au fil de ma respiration apaisée.

Je retrace calmement le fil des derniers événements et tente de déterminer ce que sera ma prochaine action.

Alexa n'était plus là quand je suis revenu d'intervention, je n'ai donc aucune idée de la façon dont elle a ressentis les choses et je pense que c'est ce qui me perturbe le plus.

J'aurais aimé avoir plus de temps, pouvoir profiter un peu plus longtemps de ce moment suspendu, ne pas devoir la laisser en plan, une fois encore.

Les mains soudainement crispées sur le petit carnet pour ne pas perdre le fil, je suis perturbé de sentir mon cœur adopter un rythme irrégulier et rapide à cette pensée.

J'ai envie de passer du temps avec elle.

J'ai envie de la laisser entrer dans mon espace.

Et même si cette dernière affirmation — parce que c'en est une — me terrifie, je dois me rendre à l'évidence. C'est ce que je veux.

Je sors brusquement de mon état méditatif et cligne plusieurs fois des yeux, quelque peu ébloui par l'afflux de lumière. J'ouvre le carnet en ma possession et tourne les pages, précautionneusement, pour retrouver une phrase lue récemment.


Écoute ton cœur

Il saura te guider

Dans les nuits sombres de la peur

Il est le seul à qui tu peux te fier


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Je m'ébroue vigoureusement en pénétrant dans le hall de son immeuble et peste contre le temps maussade en pressant le bouton d'appel de l'ascenseur.

J'entre dans la cabine et le temps de l'ascension, je me répète comme un mantra ma décision prise au moment de quitter mon appartement.

Décision qui explique ma présence, à cet instant précis, sur le pas de sa porte, ruisselant de pluie, parce qu'impatient de la retrouver, j'ai préféré marcher vite plutôt que de m'efforcer d'attirer l'attention d'un taxi.

Vivre aujourd'hui pour ne rien regretter demain.

Agir plutôt que réfléchir.

J'ai cherché, alors que l'averse me faisait presser le pas, ce que je lui dirai.

J'avais envie de trouver les mots parfaits pour ce moment et pourtant, je reste muet sous son regard océan, qui me scrute de façon étrange, quand elle ouvre la porte.

Je sens mon cœur s'affoler dans ma poitrine alors que les dernières gouttes de pluie encore présentes sur ma veste en cuir s'échouent dans un bruit mat sur le sol du palier.

Incapable de rassembler mes pensées, mon esprit complètement hypnotisé par sa présence, je décide d'agir plutôt que de tenter un discours sans le moindre sens.

J'avance d'un pas, glisse mes mains le long de son cou jusqu'à ce que mes phalanges se perdent dans sa chevelure et fait ce que je rêve de faire depuis que la sirène hurlante nous a interrompu dans les vestiaires.

Je l'embrasse.

Nos bouches se rencontrent enfin et je ne peux retenir un soupir de satisfaction face à la sensation grisante que cela déclenche en moi, comme une explosion, un feu d'artifice.

Je peux presque la sentir frissonner sous mes paumes tandis que nos lèvres s'apprivoisent lentement.

Sans précipitation, sans heurt, sans désir de contrôle sur l'autre, juste de la découverte et une infinie tendresse.

Ses mains s'arriment à mes poignets quand je penche légèrement la tête pour approfondir ce moment, entrouvrant doucement la bouche.

Je m'attends presque à ce qu'elle me repousse, mais elle n'en fait rien et se contente de suivre la danse instiller par nos lèvres.

Un rire léger et cristallin fait éclater la bulle dans laquelle nous nous étions enfermé et je m'éloigne à regret, la main d'Alexa toujours accrochée à mon poignet, sûrement par crainte que je ne m'enfuis encore.

— Ça c'est un baiser ! Tyler, je suppose ?!

À l'entente de mon prénom, je me détourne du visage rosie face à moi et croise les prunelles vertes d'une petite brune, qui s'avance vers nous, un immense sourire placarder sur le visage.

Elle tend une paume amicale dans ma direction et tandis que je lève le bras pour la saluer, Alexa semble prendre conscience qu'elle ne m'a pas lâché et s'empresse de me libérer de son étreinte.

— Siobhan, agent, amie et botteuse de fesses occasionnelle de la jolie brune que tu viens d'embrasser. Je suis enchantée de pouvoir enfin mettre un visage sur un prénom que je n'ai cessé d'entendre dernièrement.

J'esquisse un fin sourire, étrangement curieux de savoir ce qui a bien pu être raconté à mon sujet, et me contente d'un signe de tête ne sachant pas trop quoi lui dire.

Elle ne s'en formalise pas et je me rends compte qu'elle est exactement comme me l'avait décrite Alexa : pétillante, énergique, bavarde et un brin excentrique, mais dans le bon sens du terme.

— Je crois qu'il est temps pour moi d'y aller. Je pense que vous avez beaucoup de choses à vous dire... Ou à vous faire... Enfin bref.

Elle embrasse rapidement la joue d'Alexa et me serre une nouvelle fois la main.

— Je t'envoie le contrat par mail et on s'appelle demain pour le reste.

Elle attrape sa veste sur l'une des patères de l'entrée, ouvre la porte et avant de la refermer passe son visage dans l'entrebâillement, nous regardant à tour de rôle un air taquin sur le visage.

— Soyez sage, mais pas trop. Bonne soirée.

Puis elle disparaît derrière le battant et son rire accompagne quelques instants son départ dans le couloir, jusqu'au bip de l'ascenseur signalant l'ouverture de la cabine à l'étage.

Et maintenant ?

Est-ce que je suis censé dire quelque chose ? Faire quelque chose ?

Je suis complètement déstabilisé par son mutisme soudain.

Elle, qui me disait la dernière fois, ne pas être capable de se taire, s'en sort à merveille ce soir puisqu'elle n'a pas prononcé le moindre mot depuis que j'ai fait irruption dans son appartement.

— Dis quelque chose, s'il te plaît. Je me sens un peu con là !



......................

Le chapitre 23 arrivera en cours de journée demain 

Love U

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