Chapitre 21 : What the hell
Plus de deux semaines sans la moindre nouvelle.
Au début, j'ai pensé que c'était la faute de nos emplois du temps incompatible. Moi, souvent sur les tournages en fin de journée et lui avec ses horaires de gardes alternées. Et puis j'ai fini par comprendre.
Il ne répond à aucun de mes messages, ne va plus à la salle de sport ou s'arrange en tout cas pour ne pas y aller en même temps que moi.
Je pense que je n'ai jamais fait autant d'activités physiques en quinze jours, motivée dès que j'avais un moment de libre, espérant le croiser et pouvoir enfin discuter avec lui.
Rongeant l'ongle de mon pouce glissé entre mes dents, je me retourne le cerveau dans tous les sens pour comprendre la situation. Je vais devoir changer de doigt bientôt au risque d'en attaquer la chair.
Je ne cesse de me repasser en boucle cette dernière soirée en sa compagnie. J'ai pourtant l'impression que tout se déroulait bien, il commençait à s'ouvrir enfin et j'ai adoré qu'il me parle de son voyage en Inde.
Et puis ce baiser, pour le moins inattendu, mais tellement agréable, bien plus que sa réaction et le brusque changement d'atmosphère quand il a pris la fuite comme s'il avait oublié quelque chose sur le feu.
Et depuis, c'est le silence...
Peut-être que c'est de ma faute ? Peut-être que c'est moi ?
Ce baiser était sans doute tellement nul qu'il a préféré partir plutôt que de me dire qu'il avait fait une erreur monumentale en m'embrassant.
C'est vrai que je manque sûrement de pratique. Les prétendants ne se sont pas vraiment bousculés au portillon depuis Lloyd, enfin, je devrais plutôt dire que je n'ai pas vraiment laissé la chance à qui que ce soit de m'approcher ces dix dernières années.
Je balance sur le sol, le script que j'ai dans les mains, de toute façon, je ne parviens pas à me concentrer en ce moment.
Mon esprit est complètement obnubilé par Tyler et son comportement étrange, me valant quelques remontrances quant à la qualité de mon travail.
Siobhan m'a même plus d'une fois rappelé à l'ordre, me conseillant de dormir plus, de manger plus sainement pour être plus concentrée sur le plateau et ne pas perdre les précieux contrats qui pourraient me passer sous le nez si les rumeurs de mon manque de professionnalisme arrivaient jusqu'aux oreilles des scénaristes en recherche de talent.
Me levant prestement de mon sofa, j'attrape ma veste à la va-vite, l'enfilant maladroitement alors que je dévale les escaliers, manquant à plusieurs reprises de louper une marche par mon inattention.
Si j'ai bien compris le roulement de ses gardes à la caserne, il devrait être en service aujourd'hui et ne pourra donc pas fuir. J'ai besoin de savoir.
Je méritais mieux que de me faire ghoster comme ça, je vais me pointer sur son lieu de travail et exiger une explication. J'aurais préféré en discuter calmement autour d'un bon repas, mais il ne me laisse pas vraiment le choix en ignorant mes messages et je suis arrivé au bout de ma patience.
J'appuie nerveusement sur la pédale d'accélérateur faisant ronfler le moteur bruyamment. Il ne manquerait plus que je me fasse arrêter et embarquer au poste pour excès de vitesse. Ça rendrait bien sur mon CV.
Mais je suis trop en colère et déçu pour réfléchir clairement et enfonce un peu plus mon pied droit contre le plancher.
Me garant de travers sur le trottoir face à la caserne, je prends une longue inspiration avant de descendre de mon véhicule et de me diriger d'un pas décidé vers le bâtiment.
J'aperçois alors une jeune femme en tenu décontractée, non loin des portes entrouvertes, donnant sur le garage où sont stationnés les fameux camions rouge prêt pour un départ en intervention. Je choisis de m'adresser à elle plutôt qu'à l'accueil ne voulant pas non plus passer pour une folle furieuse.
— Euh, excusez-moi, je...
Quand elle se retourne, je suis subjugué par sa beauté, ses traits sont fins et il se dégage une douceur agréable de son visage solaire.
— Je peux vous aider ?
Elle fronce les sourcils se demandant sûrement ce qu'une civile fait dans l'enceinte de la caserne.
— Je...
Je me racle la gorge quelque peu mal à l'aise. Et puis je me rends compte que ma démarche est stupide, il n'a sûrement aucune envie de me voir et moi je me pointe comme ça, lui imposant ma présence — et sur son lieu de travail qui plus est — il y a vraiment un truc qui ne tourne pas rond chez moi.
Alors que je baisse la tête et fais un pas en arrière m'apprêtant à me retourner pour m'enfuir lâchement, une voix que j'ai déjà entendu, avec son air lourd de sous-entendu, s'élève derrière la jeune femme.
— Oh, une princesse égarée, j'arrive juste à temps !
Pourquoi a-t-il fallu que ce soit lui ? Alors qu'un rire grave sort de sa bouche, je maudis la terre entière d'avoir mis, une fois encore, cet apollon de pacotille en travers de mon chemin.
— Je... je vais y aller, par...
— Mais non, n'est pas peur petite chose. Je suppose que...
Il se tourne rapidement, s'assurant que personne ne se trouve derrière lui et continue d'un ton plus bas en se rapprochant subtilement de moi.
— Tu es venu voir le grizzli ?
Sa phrase a tout l'air d'une affirmation. Comme si ma présence ici ne pouvait être que pour les beaux yeux du grand brun, ce qui est vrai, mais...
Sans me laisser le temps de réagir, et de lui répondre, Trevor passe un bras autour de mes épaules et m'entraîne vers on ne sait où, me baragouinant des propos sans le moindre sens sur le fait que son sixième sens ne l'avais pas trompé et qu'il savait bien qu'il se passait un truc entre nous, même si Tyler n'en disait rien. Son comportement parlait de lui-même apparemment.
Je ne l'écoute pas vraiment, trop focaliser sur l'endroit où il me guide d'un pas assuré et sur le fait que je vais le revoir, mon cœur tambourinant comme un forcené dans ma poitrine, voulant s'arracher de mon corps et s'en aller très loin de ce lieu et de cette prochaine confrontation avec celui qui hante littéralement mes pensées depuis son retour dans ma vie.
J'ai à peine le temps de lire l'inscription sur la porte que le pompier aux cheveux d'or me fait entrer dans les vestiaires, me poussant devant lui une main posée entre mes omoplates.
— Hook, il y a quelqu'un pour toi.
Le susnommée arrive du fond de la pièce, entouré d'une légère brume, rendant le moment presque onirique. Un pantalon fluide retenue difficilement par ses hanches, un torse nu encore luisant de la douche qu'il vient sans doute de prendre, quelques gouttes d'eau glissant encore sur cette peau, semblant si douce que je me mords discrètement l'intérieur de la joue pour me détourner de l'envie de tendre le bras pour vérifier mon impression.
Une serviette sur la tête, se séchant vigoureusement les cheveux, il ne peut me voir et répond à son collègue d'une voix lasse.
— Si c'est Becka, dis-lui que j'ai suivi ses conseils et qu'elle peut arrêter de me harceler.
Aïe, mon petit cœur saigne de ce prénom glissant sur ses lèvres. Cette Becka serait-elle la raison de son silence. Aurait-il finalement rencontré quelqu'un qui soit suffisamment digne d'intérêt au point de me rayer de sa vie.
Je vais pour esquisser un pas en arrière et fuir avant qu'il ne me voie et que je ne me noie dans ma honte. Je ne représentais vraiment rien pour lui, une personne parmi tant d'autres...
Comment ai-je pu être aussi stupide et me laisser bercer par mes douces illusions en pensant que notre histoire progressait.
La pression se raffermit sur mon dos et alors que je jette un regard paniqué vers un Trevor, apparemment fier de ce qu'il est en train de faire, il me fait un clin d'œil et de son index posé sur ses lèvres il m'ordonne silencieusement de ne rien dire.
— Ce n'est pas Becka.
Un lourd silence s'installe alors que Tyler retire prestement la serviette de son crâne et que son regard croise le mien.
Je sens à peine la main quitter mon dos et entends vaguement la porte se refermer dans un bref courant d'air, trop bouleversé par les prunelles bleu-vert qui me scrute de façon si intense.
— Alexa ?!
Mon prénom entre ses lèvres est si doux qu'un frisson parcourt mon corps, me donnant l'impression de presque flotter dans l'air, suivi d'un atterrissage brutale quand il poursuit face à mon mutisme.
— Qu'est-ce que tu fais là ?
Son ton est presque froid, ou surpris, je ne sais pas trop.
— Je...
Je me racle la gorge, clairement mal à l'aise face à son visage neutre. Pas le moindre sourire ni la moindre étincelle dans son regard.
Je baisse la tête refusant d'affronter l'ancien Tyler. Je pensais vraiment l'avoir aidé à retrouver un peu de sa joie de vivre, mais il semblerait que je me sois planté en beauté, encore une fois.
— Je... je suis désolé de débarquer ici, comme ça, mais... tu ne réponds plus à mes messages et j'ai la désagréable impression que tu m'évites alors je voudrais savoir pourquoi. Est-ce que c'est à cause du...
— Je peux pas...
Je relève brusquement le visage vers lui et le retrouve les yeux baissés sur ses doigts triturant sa serviette, dansant d'un pied sur l'autre comme un gosse.
— Tu peux pas quoi ?
— Ça. Toi et moi. Je... je peux pas...
Je m'approche lentement de lui, complètement perdue par ses propos incompréhensibles.
Je pose une main que je veux rassurante sur son avant-bras pensant l'aider par ce geste à m'en dire plus. Mais quelle n'est pas ma surprise quand il se rebiffe à la dernière minute, retirant vivement son bras avant que mes doigts puissent le frôler, et se recule avec empressement pour s'adosser au mur comme si mon simple contact lui était tout bonnement insupportable.
— Je peux pas... Je ne veux pas me lier à quelqu'un. Je refuse de souffrir de nouveau, je... Je ne le supporterais pas...
— Je comprends que la mort de Louis t'ait...
Il relève ses prunelles profondément tristes et éteintes vers moi, me laissant sous le choc de toutes les émotions que je peux y lire, avant même qu'il n'ouvre la bouche, je comprends mon erreur. Louis est un sujet presque tabou pour lui, un sanctuaire que je viens de profaner, mais au fond de moi, je sais qu'il doit avancer et ce n'est pas en faisant comme si son frère n'avait jamais existé en n'en parlant jamais qu'il arrivera à s'en remettre !
— Ne parle pas de lui ! Ne parle pas de lui comme si tu avais la moindre idée de ce que je peux ressentir ! Tu le connaissais à peine et moi... Moi, c'était mon frère et... Il n'est plus là ! A cause de moi !
L'émotion éteint sa voix sur la fin de sa phrase et je vois une larme traîtresse lui échapper juste avant qu'il ne la chasse impatiemment et me tourne le dos. Sa respiration profonde et lente me fait comprendre qu'il reprend le contrôle de ses émotions, et je lui en laisse le temps. Pourtant, une fois fait, il ne se retourne pas vers moi à nouveau, comme s'il avait honte de s'être laissé ainsi aller devant moi, au lieu de ça, je le vois s'appuyer contre le mur, bras tendus.
Je pourrais partir, lui laisser l'intimité que son corps, dans son langage informel, semble me réclamer, mais je refuse de le laisser ainsi avec sa souffrance... pour combien de temps encore ? Les années n'ont pas atténuées son chagrin, il semble encore porter tout le poids de sa perte sur ses épaules !
— Tu as raison... Je ne sais pas ce que ça fait, je n'ai pas vécu ce que tu as vécu, mais je peux comprendre ce que tu ressens. Je sais que ce n'est absolument pas comparable, loin de là même... mais même si je n'en donne pas l'air, moi aussi la vie m'a claquée la porte au nez... Il y avait ce garçon ! Il était mon grand amour... Le premier. Je pensais qu'on passerait toute notre vie ensemble et qu'on serait heureux.
Je ris nerveusement en me passant une main dans les cheveux, me sentant ridicule de lui exposer mon cœur brisé alors que lui c'est son âme qui est en morceau...
— Je me doute que je ne suis pas la seule personne au monde à avoir vécu une rupture, mais cette rupture m'a brisée... Il n'y a eu personne d'autre depuis lui, et personne avant lui ! Moi aussi, j'ai peur de m'attacher à nouveau et prendre le risque de souffrir encore car je sais au fond de moi que si ça devait se reproduire, je ne me relèverai peut-être pas cette fois... Et puis, tu as à nouveau fait irruption dans ma vie et... j'ai pris conscience que...
Je m'avance vers lui et pose une main hésitante sur son épaule. Le fait qu'il ne la rejette pas m'encourage à poursuivre et je m'approche encore un peu de lui.
Ses deux bras tendus contre le mur, la tête baissée vers le sol et les yeux fermés, je le contourne doucement et laisse ma main courir le long de son bras alors que je me faufile dans le mince espace entre son corps et le mur, ses mains reposant de chaque côté de mon visage.
Mon cœur est au bord de l'explosion quand j'ose poser une main tremblante sous son menton pour croiser ses pupilles brillantes de ses larmes silencieuses.
— On ne peut pas vivre sans rien ressentir. La vie a tellement à offrir... Tu mérites vraiment d'être aimé et d'être heureux... et... peut-être... Peut-être qu'on pourrait avoir peur... ensemble ?
Son regard dérive brièvement sur ma bouche avant de revenir se plonger dans l'océan de mes yeux. Son souffle percute mes lèvres quand il se rapproche de moi posant presque son front contre le mien. Ses paupières se ferment et il se mordille nerveusement la lèvre inférieur murmurant si proche de moi.
— J'en ai envie, j'en ai vraiment envie, si tu savais comme je...
— Alors lâche prise. Arrête de réfléchir.
Il s'approche encore, nos bouches se frôlant presque, sa main se décolle du mur pour venir se glisser délicatement sur ma joue caressant de son pouce ma peau brûlante.
Je le sens prendre une longue et lente inspiration comme s'il s'apprêtait à plonger en apnée, son torse nu se soulevant devant mes yeux entrouverts.
Il effleure enfin mes lèvres dans un contact si subtil que je pourrais presque penser l'avoir rêvé.
Son touché est si délicat, presque aérien. Mon cœur explose de ce trop peu et mon corps se tend de façon presque imperceptible vers lui, réclamant plus, bien plus que ce petit effleurement.
Son corps s'échappe, alors que ma main reste levée dans le vide qui me fait face et je prends alors conscience de la sirène tonitruante qui retentit dans tout le bâtiment.
Je me laisse glisser au sol quand la porte se referme bruyamment et pose deux doigts sur mes lèvres closent.
........
Les choses évoluent entre eux ... enfin je crois !!
Bon comme je le craignais, je vais être contrainte de faire un break en ce qui concerne cette histoire.
Je n'ai toujours pas avancé et mon cerveau n'a pas l'air décidé.
Il me reste donc deux chapitres à vous poster.
Par chance, le chapitre 23 pourrait presque passé pour une fin.
La fin d'un premier cycle, disons. D'une première partie.
Je pense donc que c'est le bon moment pour moi de la mettre en stand by
La grande question que je me pose maintenant, et que je vous pose aussi c'est :
Est-ce que je continue à poster chaque vendredi ou je vous confie les deux derniers chapitres tout de suite ??
Je vais poster un sondage sur mon compte insta
Pour ceux qui ne me suivent pas encore , le lien est dans ma bio et pour les autres, libre à vous de me répondre via commentaires ou message privé.
Love U
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