Chapitre 18 : The Red Fish


Pour la énième fois de la journée, je consulte mon téléphone, espérant y découvrir un nouveau message.

Je soupire lourdement face à l'écran vide de toutes notifications et balance l'appareil presque violemment sur mon lit avant de m'y affaler sur le dos, les bras en croix et de m'énerver contre moi-même.

Pauvre petite Alexa désespérée d'attendre un message du beau Tyler qui n'arrivera jamais. Il faut que je me fasse une raison, il m'a embrassé, s'est rendu compte qu'il faisait une connerie monumentale et comme tous les mecs, il a préféré prendre la fuite plutôt que d'assumer ses actes. Il ne vaut peut-être pas mieux que les autres finalement.

Stupide, stupide, stupide petite Alexa.

Siobhan avait raison, je ne peux pas continuer à me morfondre, il faut que j'agisse et que j'avance, et surtout que j'arrête de me prendre la tête pour un mec.

Je me redresse prestement, peut-être un peu trop, vu le vertige qui débarque dans mon crâne. Il faut dire que je n'ai pas mangé grand chose ces deux derniers jours. Je n'ai fait que penser à Tyler.

Je récupère mon téléphone sur le matelas et fait défiler rapidement les contacts de mon répertoire jusqu'à atteindre celui qui m'intéresse.

Ma jambe droite tressaute nerveusement alors que la tonalité d'attente résonne dans mon oreille.

Décroche s'il te plaît. Répondeur. Génial.

— Sio, il faut que tu m'aides, je vais devenir dingue si je reste enfermée une soirée de plus.

Pestant contre ces maudits gadgets et ces personnes qui ne répondent jamais quand on les appelle, je me dirige d'un pas lourd vers ma salle de bain, décidé à prendre une bonne douche pour retrouver forme humaine.

Alors que j'abandonne mon bas de jogging sur le sol, la sonnerie de l'interphone me tire de mes réflexions et c'est donc en petite culotte, dissimulée sous mon t-shirt Harry Styles que je traverse mon loft pour répondre.

Je n'attends personne donc c'est sûrement ma voisine tête en l'air qui a oublié ses clefs ou un livreur qui s'est trompé de destinataire.

Je suis agréablement surprise de reconnaître la jolie voix chantante de mon Irlandaise préférée. C'est la seule que je connaisse, mais quand même.

— Hey Sio, t'as eu mon message ? T'as fait vite, t'es venue en arc-en-ciel ?

— Non nounouillle, j'étais dans le quartier bien déterminée à venir bouger tes jolies petites fesses. T'as du me sentir arriver.

Je ris de bon cœur en appuyant sur le bouton pour lui donner accès à l'immeuble et déverrouille la porte d'entrée, évitant soigneusement le reflet du miroir sur le mur.

Je vais finir par croire qu'elle possède vraiment les pouvoirs magiques dont elle me rebat les oreilles depuis si longtemps. Elle débarque pile quand j'ai besoin d'elle et arrive à me faire sourire malgré mon esprit morose de ces derniers jours.

J'entrebâille la porte, me cachant derrière le panneau de bois, quand j'entends l'ascenseur se mettre en branle et, quelques minutes plus tard, je laisse mon petit lutin souriant entrer dans mon appartement.

Elle détaille ma tenue d'un œil étrange et reste bloqué un moment, le regard fixé juste au-dessus de mon crâne ou plus précisément sur mes cheveux en bataille.

— Toujours pas de nouvelles !?

Siobhan n'est pas du genre à tourner autour du pot pendant des heures et comme je lui ai parlé de la soirée avec Tyler, elle sait exactement pourquoi je suis dans cet état.

Après une bise rapide, je me contente de remuer lentement la tête de façon négative lui faisant mon visage de petit chiot triste avant de me reprendre et me redresser dignement. Enfin autant que ma tenue légère me le permet.

Je lui fais signe de me suivre et la guide jusqu'à mon dressing.

— C'est pas pour ça que je t'ai appelé. Tyler est un sujet tabou ce soir. J'ai besoin de me changer les idées alors, pendant que je vais prendre une bonne douche, tu me choisis de super fringues et on sort faire la fête. Ok ?

Elle acquiesce, un franc sourire sur les lèvres. Je lui envoi un bisou volant pour la remercier avant de m'enfermer dans la salle de bain.

J'en ressort une vingtaine de minutes plus tard, une serviette enroulée autour de mes cheveux et mon corps emmitouflé dans un peignoir.

— Je te laisse te préparer, je vais aller nous préparer un thé et tu me rejoins pour qu'on discute du programme.

Le look pour lequel elle a opté est assez simple : Jean foncé, top noir moulant et veste en jean blanche pour trancher un peu.

Je sèche rapidement mes cheveux les laissant faire ce qu'ils veulent, une touche légère de maquillage et me voilà enfin prête, et présentable surtout.

Je ramasse en quatrième vitesse les vêtements échoués sur le sol de ma chambre avant de tout balancer dans ma machine à laver et de lancer le programme.

Un thé vert et quelques gâteaux trouvés dans un de mes placards devant nous, j'écoute avec attention la proposition de mon amie.

— Ce soir, il y a un groupe assez sympa qui passe au poisson rouge et ...

Je n'entends pas la fin de sa phrase et me mets à sourire comme une idiote à la mention du nom de la salle. Tyler. Pourquoi, quoi que je fasse, je trouve toujours quelque chose qui me ramène à lui ?

—... On ira aussi creuser des tranchées dans les souterrains du métro pour chercher des pièces d'or.

Je remue poliment la tête de bas en haut, sans la moindre idée de ce qu'elle peut bien être en train de me raconter, trop plonger dans mes souvenirs et j'en reviens toujours à ce baiser. C'était si doux, presque tendre, alors pourquoi a-t-il fallu qu'il gâche tout.

Un projectile non identifié m'arrive en plein visage et me ramène à la réalité, face à une Siobhan morte de rire.

— Excuse-moi, j'ai cru que tu étais en train de faire une attaque, tu étais complètement figée, la bouche légèrement ouverte, il ne manquait plus que le filet de bave. Inutile de te demander à quoi tu pensais, ou plutôt à qui !

Je lui renvoi son paquet de mouchoirs avant de lui faire une grimace digne de l'école élémentaire.

— Bon, on y va ?

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Installées au bar de la salle de concert, nous attendons l'arrivée du groupe à l'affiche de la soirée, les Curly Hype, en sirotant tranquillement nos mojitos.

Les lumières s'éteignent et l'effervescence de la foule proche de la scène commence à monter en puissance.

Des bruits de pas résonnent sur le bois creux de l'estrade, quelques coups mat contre un fût de batterie, pareil à un battement de cœur, quelques notes de guitare et tout prend enfin vie.

Sur la scène quatre personnes : un petit gringalet au cheveux court, derrière la batterie, un autre légèrement plus musclé, la peau assombrie de nombreux tatouages derrière les claviers, une jeune femme au look presque grunge, son visage à moitié dissimulé derrière une imposante mèche rose bonbon et une basse aux reflets métalliques.

Et enfin au centre du groupe, tournant le dos au public et grattant les cordes de sa guitare électrique, le chanteur, dont je ne distingue que le dos sous un t-shirt sombre et un skinny mettant, il faut le reconnaître, divinement bien son postérieur en valeur.

La tension monte, le rythme de la musique s'accélère et il se retourne.

Et là, c'est le choc. Une main posée sur mon cœur qui a subitement oublié comment faire son job, puis reprends du service de façon désordonnée comme pour rattraper son retard.

Je jette un rapide regard vers Siobhan juste à côté de moi, prenant plaisir à écouter ce groupe, et complètement hermétique au malaise qui me terrasse sur place.

Je me tourne de nouveau vers la scène, persuadée d'avoir fait une erreur, ça ne peut pas être lui, ce n'est pas possible.

Les dernières notes de la première chanson résonnent et les applaudissements de la foule m'explosent les tympans alors que je tente de reprendre mon souffle.

Mon amie se penche vers mon oreille alors que je scrute toujours le chanteur avec attention essayant de me convaincre que ce n'est pas celui que je pense.

— Tu es toute blanche, ça va ?

Alors que j'allais lui répondre, la voix légèrement rauque du leader du groupe profite de l'accalmie momentanée de la foule pour se présenter.

— Bonsoir à tous, je suis Lloyd et nous sommes les Curly Hype.

D'un geste lasse il repousse ses cheveux bouclés vers l'arrière et entame la chanson suivante. Ils sont bien plus longs qu'avant, mais tout aussi magnifiquement indomptable. Je pensais qu'il aurait fini par les couper.

Sa voix suave, sur ce rythme rock, m'emmène bien loin de cette salle de concert, dans un petit appartement de Greenwich Village.


L'oreille collée contre son torse, je m'éveille doucement au rythme apaisant des battement de son cœur. Mes yeux papillonnent, légèrement éblouis par le soleil matinal et je me redresse lentement pour pouvoir contempler sa bouille d'ange.

J'aime le regarder dormir, redessiner de mes yeux les courbes fines de son visage et voir le soleil jouer dans ses boucles. Du bout des doigts, je dégage une mèche rebelle qui s'est invité sur son front, le faisant froncer le nez de façon adorable et ne peux retenir un rire léger.

— Tu es encore en train de me regarder ?! Tu sais que c'est un peu flippant ?

Une main glissée dans ses cheveux, je me redresse sur mon avant-bras pour venir cueillir les lèvres de mon beau au bois dormant, qui n'a toujours pas daigné ouvrir les yeux.

— Pas du tout.

Il pivote sur le côté, sa paume se faufilant naturellement dans le creux de mes reins pour rapprocher nos corps, son autre bras se resserrant autour de mes épaules alors que sa bouche retrouve la mienne.

Ses mains se font plus aventureuses, mais je le stoppe récoltant un grognement de sa part.

— J'ai devoir de Socio ce matin, je peux pas me permettre d'être en retard et comme tu habites loin de la fac, je vais devoir me lever.

— Tu es une horrible tentatrice. Tu ne peux pas dormir si près de moi et me priver de ces courbes magnifiques au réveil.

— Je sais, mais c'est pourtant ce que je vais faire.


Ma jambe tressaute nerveusement et c'est la main de Siobhan posée sur mon genou qui me ramène au temps présent. Elle se penche vers moi parle suffisamment fort contre mon oreille pour surpasser le bruit du concert.

— Qu'est-ce qu'il se passe Alexa ?

Ne décrochant pas les yeux du chanteur, je me contente de secouer négativement la tête ne sachant pas quoi lui dire. Je me contente de murmurer pour moi-même.

— C'est pas possible.

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