Chapitre 5
Harry et Drago se regardèrent, dépités. C’était bien la première fois qu’ils partageaient quelque chose, et il avait fallu que ce soit un espace réduit en dessous d’une branche de gui ensorcelée. Ils redoutaient la suite des évènements, et leur dernier espoir était qu’une seconde personne passant dans le couloir leur vienne en aide. Malheureusement, pas même le moindre elfe de maison n’était en vue pour le moment.
« Bon… On fait quoi maintenant ? » Souffla Drago, les yeux dans le vague.
« J’imagine qu’on a pas d’autres choix que d’attendre. » Répondit Harry de la même manière.
Après quelques minutes de silence complet, durant lequel les deux sorciers avaient pu entendre les lointains bruits des différents endroits de Poudlard, Harry lança la conversation.
« J’ai remarqué que ces derniers jours… Enfin dis moi si tu n’as pas envie d’en parler, je comprendrais mais… Tu ne vas pas très bien, je me trompe ? »
Le blond arqua un sourire en coin et hocha distraitement la tête vers le haut.
« Tu dois être le seul à l’avoir remarqué, Potter. T’es bien gentil, mais tu ne peux rien y faire. »
« Dis toujours. »
« Pourquoi ? Tu vas pas me dire que ça t’intéresse ? » S’étonna le Serpentard en fixant Harry dans les yeux.
« Bah si, ça m’intéresse. Je sais pas grand-chose sur toi, et de toute façon, qu’est ce que tu veux qu’on fasse d’autre dans notre situation ? Après, a toi de voir si tu veux me confier ça à moi. »
« Te confier ça à toi ? » Rit nerveusement Malefoy. « S’il y a bien une seule personne à qui je peux me confier, c’est bien toi. » Avoua le blond, les joues légèrement roses.
Harry n’en revint pas ses oreilles.
« Quoi ? Moi ? Mais pourquoi ? Je veux dire… On se supporte pas depuis la première année, alors pourquoi tu voudrais me parler de tes problèmes alors que tu pourrais le faire avec tes amis ? »
« Quels amis ? » Répondit le serpentard. « Les gens avec qui je traîne ne sont pas mes amis. Ils m’écoutent parce qu’ils s’imaginent que je suis surpuissant grâce à mon rang et à ma famille, grâce à mon père. Mais je ne suis rien. Je suis un lâche, un traître. »
Harry fronça les sourcils, l’incitant à continuer.
« Ils sont tous des esclaves. Ils écoutent leurs parents idolâtrer le Seigneur des Ténèbres, et font de même parce qu’ils pensent que c’est la bonne chose à faire. Ils n’arrivent pas à se faire leur propre avis sur la question, et je les comprends. Avant, j’étais comme ça. J’étais un prétentieux petit gamin ambitieux, prisonnier sous la cloche que son papa maintenait hermétiquement fermée au-dessus de sa tête, et je n’arrivais pas à m’en rendre compte. Je t’ai beaucoup admiré Potter. Je ne savais pas pourquoi je te jalousais. Ces derniers temps, je t’ai beaucoup observé, et j’ai compris. J'envie ta relation avec tes amis, mais je n’envie pas ta liberté, car tu n’es pas libre. La menace de … Voldemort pèse depuis ta naissance sur tes épaules. En réalité, je trouve que nos situations se ressemblent un peu. Nous sommes des opposés, mais nous sommes tout de même liés. On a mis dès notre naissance des étiquettes sur nos fronts : toi, le camp du bien, moi le camp du mal. Mais tous les deux, nous nous détâchons de ces étiquettes, car nous ne voulons pas être des pions qui suivent ce qu’on leur disent. Au fond, on aimerait bien être des rebelles, des gens à part, qui veulent tout simplement vivre leur vie sans qu’on la leur dicte en permanence. Mais on ne peut pas. On est destinés à faire des choses différentes, à se battre pour des causes différentes, et c’est ce qui nous a empêchés
de nous côtoyer toute notre vie. C’est comme ça. On doit faire ce qu’on est destinés à faire, sans broncher, parce que les grands de ce monde en ont décidé ainsi. »
Une dizaine de secondes passèrent sans que Harry ne dise quoi que ce soit. Il était en état de choc. Malefoy venait de dire tout haut ce que lui pensait tout bas. Cela lui faisait un bien fou de savoir qu’il n’était pas un cas isolé, et il était seulement en train de s’en rendre compte. Malefoy restait lui aussi silencieux, la tête baissée. Il semblait attendre la réaction du brun.
« Malefoy… » Commença lentement Harry, faisant se lever le regard du blond vers lui. « Tu viens de résumer parfaitement l’histoire de ma vie. »
Le blond sourit faiblement et tristement.
« C’est notre point commun. » Dit Harry en lui souriant en retour. »
« Ouais, et quel point commun ! »
Les deux garçons rirent tristement, tout retournés par le discours véridique de Drago.
« Je ne sais pas où j’en suis. » Repris le blondinet. « Je n’ai plus la conviction de suivre le Seigneur des Ténèbres, et c’est ma faiblesse. J’ai peur qu’il la découvre et qu’il me le fasse payer à moi ou à mes parents. Mais je suis obligé de faire semblant, au moins. Dans quelques semaines, c’est les vacances de Noël, et comme à chaque fois, je vais devoir rentrer au manoir et passer deux semaines en compagnie de mes parents et des fidèles de Voldemort. Il n’y aura pas de réveillon, pas de festivités, pas de Cadeaux. Toujours la même ambiance froide et lugubre dans de manoir et les mangemorts qui vont et qui viennent pour mettre en place je ne sais quels plans machiavéliques avec mon père. J’ai même peur qu’il soit là, lui. Voldemort. Je ne sais pas quand j’aurais la marque, mais c’est une étape à laquelle je n’échapperais pas, je le sais. A moins de mourir avant. »
C’était horrible, mais terriblement vrai. Harry le savait. Drago semblait détaché de ce qu’il racontait, comme ne ressentant plus aucunes émotions, mais ses yeux humides le trahissaient. Harry, sans réfléchir, pris la soudaine initiative de le serrer dans ses bras. C’était étrange, c’était fou. À peine trois quart d'heure plus tôt, Harry et Drago vivaient leur vie chacun de leur côté, voyant une haine viscérale l'un pour l'autre. Malgré cela, Drago se laissa faire, et les deux némésis de toujours s’étreignirent longtemps au milieu de ce couloir toujours aussi désert. Le gryffondor était conscient de ce qu’il faisait, et c’était la meilleure chose à faire. Après tout, ils étaient dans la même merde, alors autant se soutenir plutôt que de faire les choses séparément comme ils l’avaient toujours fait. Ce moment passé ensemble sous le gui leur avait fait comprendre qu'ils n'étaient pas seuls, qu'ils étaient deux à être dans la même situation, et ces deux personnes venaient enfin de se trouver. Après tout ce temps. Ils avaient découvert la raison pour laquelle ils vouaient une obsession déguisée en rage l'un pour l'autre depuis la première fois qu'ils s'étaient rencontrés. Mais leurs ressemblances et leurs différences mêlées qui faisaient d'eux des êtres uniques étaient-elles vraiment la seule cause de leur rapprochement ?
Après de longues minutes, Drago relâcha le brun et se remplaça face à lui. Ses larmes avaient séché, et il avait un regard étonnement déterminé qui intrigua Harry, jusqu'à ce qu'il en comprenne la raison. Il vit les yeux du blond dériver sur ses yeux, ses cheveux, ses joues, ses lèvres. Le cœur du jeune homme commença à battre la chamade, et à réchauffer son corps tout en lui envoyant des frissons. Il ne put s'empêcher de regarder avec attention les orbes de Drago. Les deux sorciers, sans même se parler, comprirent ce qui allait se passer, et pourtant, aucun des deux ne bougea. La tristesse avait laissé place à une tension et a une étrange attraction entre eux. C'était aussi improbable qu'inévitable. La seconde d'après, ils s'attrapèrent mutuellement à l'arrière du coup et rapprochèrent leurs visages et leurs lèvres, et ils s’embrassèrent jusqu'à en perdre haleine, comme si leurs vies en dépendaient. L'instant dura longtemps, durant lequel ils avaient attirés leurs corps de plus en plus l'un vers l'autre et étaient à présent collés, comme deux personnes qui avaient fusionnées et qui n'en formaient à présent plus qu'une seule. Leur baiser dura jusqu'au moment où Harry sentit la paroi invisible contre laquelle il était appuyé céder brusquement, les faisant basculer et s'allonger par terre l'un sur l'autre pour la seconde fois de la journée.
Surpris, leurs lèvres se séparèrent dans la chute et ils pouffèrent de rire, couchés de tout leur long sur le sol froid de Poudlard. Harry et Drago n'eurent pas le temps de réfléchir à ce qui venait de se passer. La sonnerie retentit bruillamment dans leurs oreilles, comme les douze coups de minuit qui seraient venus briser la magie du moment, les faisant revenir à la réalité. Les deux garçons sursautèrent, et le serpentard se hâta de se relever et de tendre la main au gryffondor afin de le remettre sur pied. Puis, ils purent finalement ramasser l'ensemble de leurs livres sans contraintes, et chose faite, ils se regardèrent une dernière fois, se souriant, les joues rouges, des étoiles dans les yeux. A contre cœur, ils se tournèrent le dos et partirent chacun de leur côté à l'entente du brouhaha des premiers élèves qui traversaient le couloir afin de rejoindre la salle de leur cours suivant. Harry, repartit vers la salle de botanique d'où devaient sortir Ron et Hermione, se figea au milieu du chemin et fit demi tour, voulant vérifier quelque chose. Il s'arrêta en dessous du lieu de rencontre entre Drago et lui, et leva les yeux au plafond. Le gui avait disparut. C'est parce qu'ils s'étaient embrassés que le sort avait été brisé et qu'ils avaient regagné leur liberté. Mais lorsqu'Harry avait posé ses lèvres sur celles de son ancien ennemi, c'était de manière complètement spontanée, et il était persuadé, avec raison, que c'était réciproque. Harry venait de se rappeler à l'instant que c'était ce qu'il fallait faire pour annuler les effets du gui magique.
Lorsque Drago et lui s'étaient embrassés, il avait complètement oublié.
Harry n'avait aucune idée de ce qui allait se passer ensuite, mais il semblerait qu'en fin de compte, il avait bien fait de sortir de son lit aujourd'hui.
À suivre…
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