30 - Une leçon de choses
Letemps s'est arrêté, tandis que je me statufie lentement sous leregard des Darken comme sous celui de mes compagnons de l'Agathos.Puis, à ma grande surprise, je vois le visage de Tsaris sedétendre ; le chef du clan Darken sourit :
« J'avaisoublié que vous veniez droit d'Ether, jeune fille. Je comprendsvotre surprise. Mais vous avez raison, quelques explications sont demise. Elwen ? »
L'Aïrinacquiesce ; ses traits se détendent pour reprendre leurhabituelle expression bienveillante :
« Ceque nous appelons actuellement les abscura rassemblait par le passédeux genres de personnes. Les premières s'apparentaient à ce quenous appelons aujourd'hui les limbians, comme Atina ou Ertala. Lesseconds sont des technomanciens. Ils combinaient la magie des limbesavec la technologie. C'est un savoir en très grande partie perdu –heureusement, en un sens...
— Commentpeut-on perdre... un savoir ? »
Jefrémis à la naïveté de ma propre question, mais tout le mondeautour de moi semble plutôt tolérant.
«Lors de la catastrophe, explique Atina, les principales victimes ontété les mages abscura eux-mêmes, et leur entourage. Pendant unlong moment, le monde s'est retrouvé en proie au chaos. Chacuns'est contenté de survivre et notre monde a beaucoup régressé auniveau technologique... à l'exception des enclaves scientifiquesqui sont à l'origine des cités d'Ether pour les unes, et descroiseurs métamens pour les autres. Là où magie et sciencepouvaient se rejoindre, elles ont pris des directions divergentes...La plupart des abscura qui ont survécu donnaient dans des pratiquesofficieuses, qui prenaient d'autres voies que la technomancie ou lelimbisme classique. Comme les différents types de conjuration... »
Jehoche la tête en signe de compréhension :
« Etles Ulradiants... D'où viennent-ils ?
—Iln'y a que des hypothèses sur leur origine, répond Elwengravement. Certains pensent que leurs pouvoirs viennent de capacitéslatentes qui ont été scientifiquement développées. D'autres,que c'est une transformation qui est survenue après lacatastrophe. Une sorte de mutation humaine qui a permis à leursporteurs de produire et manipuler de puissantes énergies. Lesenclaves scientifiques se sont intéressées à eux en pensant qu'ilspourraient peut-être contrer les abscura. Certains racontent mêmeque ce serait les scientifiques des enclaves qui auraient créé lespremiers d'entre eux. À présent, c'est un état héréditaire,mais très rare.
— C'estpour cela que je n'en ai pas croisé à Ether ? »
L'aïrinpasse une main sur sa nuque, puis tourne un regard hésitant versEïdo, qui acquiesce gravement.
« Ily a des Ulradiants à Ether, mais il existe une raison pour laquelletu ne les voies pas... et tu ne les verras jamais ! »
Ilbaisse pensivement la tête, avant de poursuivre :
« LesUlradiants sont précieux. Sans eux, Ether cesserait d'exister.C'est pourquoi on les... tient à l'abri. »
Jeplisse les yeux, surprise... Tenus à l'abri ? J'ai du mal àcomprendre.
« Maistoi... »
Eïdose redresse et me toise du regard. Un silence de plomb règne dans lasalle. Ai-je dit quelque chose de mal ? Je serre les poings surmes genoux, soudain nerveuse.
« Moncas est un peu différent », déclare-t-il enfin, d'une voixétrangement neutre.
Visiblement,il n'a aucune envie d'en révéler plus. Je sens la curiosité medévorer, mais il est hors de question d'y céder... Peut-être,plus tard ?
Elwense tourne vers moi avec un sourire :
« Nousavons presque terminé nos échanges. Prismè, si tu visitaisl'enclave ? Tu devrais profiter de cette occasion ! »
Est-cequ'on essaye de m'éloigner ? Je fronce légèrement lessourcils, avant de lancer un coup d'œil vers Eïdo. Il m'adresseun petit signe de tête, comme pour me rassurer sur ce point.
« Jevais l'accompagner ! » propose Varany.
Jen'ai pas tellement envie de me faire baby-sitter par la capitaineaux cheveux roux, mais on ne me laisse pas choisir !
« Moiaussi », déclare Izel en se levant, titubant sur ses jambesengourdies par une longue position inhabituelle.
Ils'étire avant de nous emboîter le pas vers la sortie de l'abri.Je lui en suis profondément reconnaissante. Les regards que me lancela femme rousse restent suspicieux. Le fait qu'Eïdo se soit montréun peu sociable avec moi ne lui a pas plu. Est-ce qu'elle éprouvequelque chose pour lui ? Je ne saisis même pas comment c'estpossible. Certes, il est bel homme... Très grand, avec unemusculature élancée, un teint clair qui contraste agréablementavec sa chevelure sombre, éveillée par la touche colorée de cesdeux bizarres mèches bleues et rouge et ses prunelles pourpres...Sans oublier ce visage ovale et ces traits ciselés, à la foissévère et... doux ?
Carvoilà une véritable énigme : comment est-il possible de trouverune telle douceur chez quelqu'un d'aussi fermé qu'Eïdo ?Les fois où je l'ai vu sourire se comptent sur les doigts d'uneseule main !
« Prismè ? »
Jem'aperçois que je suis toujours en train de fixer Eïdo. Izelm'attend à côté de la porte, arborant un sourire amusé, tandisque Varany croise les bras d'un air impatient. Je me sens un peugênée et, connaissant Izel, il est capable de faire des remarquesembarrassantes s'il me voit ainsi. Ses yeux brillent déjà un peutrop à mon goût... Je me hâte de le rejoindre, avant dem'engouffrer à sa suite dans l'escalier qui monte versl'extérieur.
Encoreune fois, je me retrouve dans cette étrange aire vallonnée, occupéepar diverses cultures qui la teintent de toutes sortes de couleursaux nuances douces. C'est très différent des serres danslesquelles pousse notre subsistance dans les villes d'Ether. Lesplantes semblent plus... vivantes peut-être.
Mêmesi ma combinaison régule la température, je sens un air tiède surmon visage. Dans les cités d'altitude, il fait tout le tempsfrais... Même quand le soleil brille. Nous y sommes habitués, maisje dois bien avouer que cette douceur est très agréable. Je fermelégèrement les yeux, respirant une symphonie d'odeurs trèsdifférentes de celles, un peu trop uniformes, des villes aériennes.C'est... légèrement intoxicant. On m'a toujours dit que lasurface ressemblait à un véritable enfer, mais cet endroit meparaît si serein que je ne peux m'empêcher de sourire.
Desvoix aiguës résonnent de l'autre côté de la butte. Surprise, jeme tourne pour voir déboucher cinq... non six garçons et filles quidoivent avoir entre six et dix ans... Avant même d'avoir eu letemps de compter jusqu'à trois, je me retrouve encerclée par lesenfants, qui parlent tous à la fois.
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