Chapitre 15 : Ryan
Chapitre 15 : Ryan
Je me doutais qu'au premier abord, l'idée du lac lui déplairait mais j'étais loin d'imaginer qu'elle refuserait d'un coup sans réfléchir pour changer d'avis quelques heures après. Je pense que Scarlett a un rôle à jouer dans tout ça. Évidemment, c'est sa meilleure amie. Quand Nina a refusé, je pensais qu'elle ne changerait pas d'avis et qu'elle préférerait me demander autre chose comme simplement des discussions par téléphone comme l'autre fois. Ou pire, une part de moi pensait qu'elle allait tout annuler, me demander de plus jamais lui parler et couper les ponts.
Et courir se réfugier sous sa couette ou en Alaska.
Et maintenant, elle est devant moi et je vais devoir réparer tout ce que j'ai fait. Je vais devoir tout réparer par les mots car les mots qui ont du pouvoir, à condition de bien savoir les utiliser, de bien savoir parler, et de ne pas commettre d'erreurs. Je ne sais même pas où tout cela va me mener mais j'ai peur. Peur d'aggraver les choses au point qu'elle veuille me détester encore plus. Après, elle me déteste déjà beaucoup.
On dit souvent que dans un couple, la meilleure façon de réparer les disputes et de communiquer.
Putain, Ryan tu es en train d'imaginer Nina en tant que ta partenaire. C'est insensé.
Le cadre est agréable et Nina est devant moi.
Putain. Je vais craquer.
Elle est si belle. Si belle, avec ses cheveux bruns qui ondulent dans le vent comme des rubans de soie. Si belle avec ce visage si fragile, ce corps magnifique...
Je déraille.
Elle est immobile dans le vent et semble attendre que je fasse le premier pas pour la rejoindre. Dans ma tête, je me fais le scénario de tout ce que je dois lui dire pour tenter de la convaincre. Je sais que ce n'est pas aujourd'hui que les choses vont changer mais j'espère qu'à long terme il y aura du mieux. Après tout, c'est le but du jeu : je dois parler elle doit m'écouter. Elle doit me pardonner si je le mérite.
Toute ma vie ou presque, je l'ai passé dans le noir. Dans le noir, à cacher mes démons, à cacher mes défaites, à cacher le fait que ma famille s'est autodétruite, à cacher le fait que je devais améliorer qui j'étais. Mais comment l'expliquer à Nina sans qu'elle ne prenne peur ? Elle me voit déjà comme un monstre. Elle est la Belle et je suis la Bête. Elle est la Belle et je suis le clochard. Elle est la Belle dans tous les cas et moi je suis le monstre.
Je suis tout cassé de l'intérieur.
Un flashback me revient en mémoire alors que j'avance vers elle, réduisant le vide qui nous sépare.
La bibliothèque est silencieuse, les murmures des étudiants se transformant en un fond apaisant. Nina est plongée dans ses livres, essayant de se concentrer sur ses devoirs. Je n'aime pas particulièrement la bibliothèque mais il faut dire que l'ambiance est agréable. Presque pas un bruit.
Alors que Nina est absorbée par ses notes, je m'approche d'elle avec un sourire narquois, perturbant sa quiétude. Nina lève les yeux, rencontrant mon regard provocateur.
— Oh, regardez qui nous avons ici, la fille dont la mère est morte à cause d'elle.
Nina fronce les sourcils, essayant de contenir la colère qui monte en elle tandis que mon sourire s'agrandit, nourrit par une satisfaction toute particulière.
— Lai... Laisse-moi tranquille, Ryan. Je... je ne veux pas de tes provocations, lâche-t-elle avec une grande timidité.
— Tu sais, Nina, ta mère serait probablement encore en vie si tu avais insisté pour qu'elle ne parte pas chercher ça. Elle est morte juste pour t'apporter un stupide gâteau d'anniversaire.
Nina, les poings serrées, me regarde avec des larmes qui montent à ses yeux. Les souvenirs douloureux refont surface et je les utilise comme une arme cruelle. Je suis un gosse cruel, après tout. Mes potes me le disent tout le temps. Et j'en suis fier. Pour une fois que je suis bon pour quelque chose.
— Tu n'as aucune idée de ce que tu racontes. Arrête ça, Ryan, tente de dire Nina.
— C'est toi qui l'as tuée, Nina, continué-je. Elle a fini par mourir à cause de toi.
Nina se lève brusquement, incapable de tolérer davantage mes paroles cruelles. Elle essaie de retenir ses larmes mais n'y parvient pas.
— Ma mère est morte dans un accident, et ce n'est en aucun cas de ma faute. Arrête de m'embêter, tu es méchant !
La tension dans la bibliothèque augmente, attirant l'attention de la bibliothécaire. Mais je m'en fous, je veux juste faire ce qui me fait déjà un bien fou. Me sentir moins seul. Je veux que quelqu'un d'autre se sente coupable comme moi. Et faire du mal me fait du bien.
— Ne te cache pas derrière tes excuses. Tu sais que c'est de ta faute, et tu le porteras toujours avec toi. Ce n'est qu'une question de temps avec que tu ne le réalises.
Nina, submergée par la colère et la tristesse, quitte la bibliothèque. Je ne la lâche des yeux que quand elle disparaît de mon champs de vision.
Plus tard, notamment dans la cafétéria, je lui ai encore rabâché ça tandis que les regards curieux des autres élèves se tournaient vers Nina, qui se sentait de plus en plus accablée et humiliée.
En y repensant, je me demande encore comment j'ai osé dire et faire tout ça. Mais je le sais. Je voulais que quelqu'un ressente ce que je ressentais. Nina était juste le reflet de tout ça.
Le mal me faisait du bien. Il faut dire que j'étais totalement possédé par je ne sais quel enfoiré de démon.
La tension entre Nina et moi est palpable. Les vagues douces du lac et le reflet du clair de lune ajoutent une atmosphère mystique à la scène. Nous nous tenons là, face à face, chacun portant probablement le poids de son passé. La rencontre s'annonce comme un moment crucial, où les vérités enfouies pourraient enfin émerger.
Ou bien juste un moment où je risque de faire une grosse connerie. Pour changer.
Nina me dévisage avec une réserve teintée de méfiance, ses yeux exprimant un mélange complexe d'émotions. Colère. Incompréhension. Tristesse.
Je me refais encore le scénario quelques fois dans ma tête avant de me lancer un peu maladroitement dans la discussion.
— Nina, je... Je sais que les mots ne suffisent pas pour effacer tout ce que j'ai fait. Mais je veux que tu saches que je regrette vraiment. Je regrette chaque insulte, chaque moment où je t'ai fait du mal.
Nina reste silencieuse, me fixant comme si elle évaluait la vérité de mes paroles. Ou comme si elle s'apprêtait à préparer un dossier sur moi. Peut-être que Scarlett lui a demandé d'observer chacun de mes gestes ? C'est typique des meilleures amies.
J'ai regardé trop de films.
— Pourquoi, Ryan ? Pourquoi as-tu fait ça ? Pourquoi as-tu cherché à me détruire à ce point ?
Je détourne le regard, luttant avec mes propres démons intérieurs.
— J'étais perdu, Nina. Perdu dans ma propre culpabilité, dans ma douleur. Et je ne savais pas comment la gérer. Je suppose que... je t'ai utilisée comme exutoire.
— Utilisée comme exutoire ? Alors j'étais un jouet, c'est ça ? Tu as détruit mon adolescence au passage, Ryan. Maintenant, quand je pense à ma mère, je me rappelle qu'elle est morte par ma faute, chose que je n'aurais jamais pensé auparavant.
— Je sais, et je m'en veux chaque jour. J'ai cherché à te faire ressentir ce que je ressentais, comme si ça pouvait réparer quelque chose.
Nina soupire, une lueur de vulnérabilité traversant son regard.
— Qu'est-ce que tu ressentais ? Tu ne peux pas réparer le passé, Ryan, tu le sais. Les cicatrices restent. Même en m'expliquant tout.
— Je ne prétends pas que je peux tout réparer. Mais je veux essayer, essayer de faire en sorte que tu comprennes que je ne suis plus la personne que j'étais.
Nina reste silencieuse pendant un moment, laissant les vagues du lac rythmer les battements violents de mon cœur, en proie à son habitude agitation.
— Même si tu as changé, cela ne changera pas le passé. Tu ne peux pas effacer tout ce que tu as fait.
J'acquiesce, reconnaissant la validité de mes paroles.
— Je sais que je ne peux pas changer le passé, mais peut-être qu'on peut trouver un moyen de faire face à ce qui s'est passé et de trouver un moyen de vivre avec ça.
— C'est peut-être trop tôt pour dire que je te pardonne, Ryan. Mais peut-être que, avec le temps, je pourrais essayer de comprendre.
La tension persiste et une lueur d'espoir passe dans les yeux de Nina. J'ai la sensation qu'elle est plus détendue, plus sereine. Peut-être a-t-elle vraiment compris que j'ai changé ? Que je ne lui ferais plus du mal, chose qu'elle devait sûrement encore penser quelques heures plutôt ? Et pense-t-elle sincèrement ce qu'elle a dit ?
— Qu'est-ce que tu ressentais ? m'interroge-t-elle soudainement, sa voix reprenant le dessus sur le bruit de l'eau.
— De la culpabilité. Comme toi après tout ce que je t'ai balancé à la figure.
Je suis un garçon. Les garçons, on dit que ça ne pleure jamais. Pourtant, je lutte actuellement contre la rage. Contre moi-même. Contre les larmes. Ce qui pourrait me rendre vulnérable aux yeux de Nina.
— De la culpabilité ? Comment ça ? D'avoir peut-être causé la mort de quelqu'un ? D'un parent ?
Nina penche la tête, ne voyant pas où je veux en venir dans tout ça.
— Oui.
— Je ne comprends pas, enchaîne-t-elle, haussant ses sourcils interrogateurs. Un de tes parents est mort ? Pourtant, on t'as toujours connu avec tes deux parents.
Je pince les lèvres et désormais, j'ai l'impression que plus aucun mot ne veut franchir la barrière de mes lèvres. Pourtant, il le faut. Nina mérite de savoir.
— J'ai été adopté par ma tante et mon oncle. Je ne l'ai jamais avoué à personne au collège et j'ai fait croire que c'était mes parents.
La bouche de Nina s'entrouvre pour former le O de la surprise. Je ne tarde pas et enchaîne avec le deuxième coup de théâtre.
— Mon père a tué ma mère devant mes yeux. Et je n'ai rien fait pour la sauver.
Je n'ajoute plus rien d'autre et laisse la surprise l'envahir.
Au même moment, le ciel se teinte d'une étrange couleur et des gouttes de pluie font leur apparition.
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