Emergence et aurore
Je n'ai pas de nom.
On aura beau dire ce que l'on veut, je n'ai pas de nom.
Pas de visage.
Pas d'identité.
On aura beau dire ce que l'on veut, je ne suis qu'un esprit parmi des milliards.
Pas de distinction.
Pas de pouvoir ou de célébrité.
Mais on aura beau dire ce que l'on veut, aujourd'hui, je vis.
Je vis.
Mon cœur bat. Je l'entends résonner, pour la toute première fois. Je vois le jaune éclatant des sourires, j'entends le rire perçant du soleil. Je sens le froid humide du matin glisser sur mes joues, sur mes lèvres, sur mes paupières ouvertes. La vie court dans mes veines écarlates, elle trace de son souffle les battements irréguliers de mon cœur.
Je sens l'harmonie.
Où suis-je ?
La lumière me perce les paupières.
Qu'avez-vous donc ?
Déjà, mon souffle est trop court, mes pensées s'emballent. Je ne sais les retenir.
Qu'est-ce ?
La rosée me colore les joues. Mes bras sont racines et mon cœur est sève. La vie me ronge, me dévore. Mon cœur déborde de fleurs courbées, fanées, pliées. Mon corps est tapis de mousse sur lequel les rayons du soleil s'endorment.
Je m'arrache à la terre. Doucement. Sans bruits, sans mots, sans pensées.
Je m'arrache à la terre.
Et je viens à la vie.
Le premier battement de cœur s'envole au vent,
Un souffle qui s'éveille, dans un instant d'amour,
Une force de vie qui se prête à son tour
Aux espoirs éphémères et aux cris du printemps.
On dit que je suis né un jour de printemps, sous la brise soleil et la chaleur de la vie. Ce jour de hasard, j'ai ouvert mes yeux et mon cœur à la lumière. Le premier battement de mon cœur s'est perdu dans l'immensité du monde, dont je ne verrais jamais qu'une infime partie.
On me demande parfois comment ce jour est arrivé. Pourquoi ce qui fut à cet instant le fut ainsi. Je ne sais pas. Ne cherchez pas de réponses, je ne l'ai jamais fait. C'est si simple...
On m'a donné une chance de croire en l'amour.
Je l'ai saisie.
« Chaque matin est une naissance qu'il faut découvrir et aimer »
Roger Fournier
J'ai parcouru la terre. J'ai éveillé mon cœur et j'ai soufflé les nuages. J'ai rampé sur les feuilles de vie, j'ai glissé le long des chênes des bois. En équilibre sur les tracés de vie, funambule de ma destinée, j'ai déroulé dans mon dos la ficelle courbe de mon chemin.
J'ai goûté aux mystères de l'ombre. J'ai vécu les nuits noires et les jours soleils, les pluies au goût de sel et les oiseaux chanteurs. J'ai pris des forces, j'ai appris, j'ai grandi, mais je ne savais pas encore pourquoi. Je me contentais d'avancer, de voir, d'entendre, de sentir, d'explorer. J'étais enfant, jeune, explorateur, gourmand, ivre d'amour et de découvertes. J'étais oisillon, poussin, nouveau-né, chenille et vivant. Je me laissais porter par des courants de vie, par les souffles d'espoir aux carrefours des mondes.
Sous les torrents d'amour et les forêts de joie,
J'ai tracé mon chemin.
Par les plaines de vie et les rochers d'espoir,
J'ai tracé mon chemin.
J'ai vécu sur ces routes, et mon cœur en cavale
S'est repu des torrents et du chant des étoiles.
Je ne savais rien de ce qui était. J'ai tout appris. Appris à tout aimer. Rien n'était sûr, rien n'était constant. C'était comme des sables mouvants, un torrent de questions qui rongeait la branche sur laquelle je m'efforçais de grimper. J'ai croisé d'autres hommes, d'autres êtres enfants, d'autres êtres chenilles. Je n'y ai vu que mon propre reflet, aveuglé par nos ressemblances, là où j'aurais dû m'extasier sur nos différences.
Non, je ne savais rien.
Mais je sentais, tout au fond de moi, quelque chose trembler, quelque chose bouillir. C'était doux, vif et cela semblait tout droit sortir d'un autre monde. Un sentiment, un espoir, un morceau de moi que je ne pouvais pas comprendre. C'était ce battement de mon cœur, bien trop virevoltant, bien trop irrégulier, qui me donnait toujours cette sensation de vouloir me porter à travers le monde.
Mon cœur résonnait pour plus libre que mes pas sur la terre, enchaînés au sol. Il résonnait pour un monde sans frontières, sans limites et sans contraintes. Il résonnait pour faire vibrer mon être, pour faire battre quelque chose d'insaisissable.
Déjà, j'avais des ailes au cœur et le cœur à mes rêves.
Déjà...
Je me savais papillon.
« L'enfance est un voyage oublié »
Jean Mallard
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