Chapitre 3 : Prise de conscience

Eirin se prélassait tranquillement parmi les draps légers de son lit. Le matin commençait doucement à se montrer et la plupart des paladins et apprenties c'était déjà levé, mais pas elle. Non, le matin était son moment, l'instant où elle pouvait être ce qu'elle voulait avoir les cheveux de la gorgone elle-même et un teint à rendre jaloux les résident du royaume des morts eux-mêmes. Elle s'étira doucement profitant du rayon de soleil qui venait éclairer doucement son visage et prit une bouffée d'oxygène bienfaitrice. Décidément, ce moment de tranquillité était son préféré. C'était à se demander si elle commençait à développer une phobie des relations humaines.

« Une phobie pas suffisamment développée pour ne pas refuser l'enlaçade d'Ethan d'Ozeron »

Cette pensée aussi furtive qu'implacable la fit se lever en sursaut.

Elle se prit la tête dans ses mains et commença à s'ébouriffer les cheveux réfléchissant bien trop rapidement.

Pourquoi ce geste ? Pourquoi l'a-t-elle acceptée ? Pourquoi s'est-elle s'enfuit après ? Pourquoi ? Comment se fait-il que la colère de Frigg ne se soit pas déjà abattue sur moi ? Pourquoi Ethan ? Pourquoi lui ? Pourquoi se poser autant de questions alors que c'est juste une enlaçade ?

Eirin se frotta l'arête du nez comprenant lentement au même rythme que sa pensée émergeait d'un profond sommeil dans quelle situation elle se trouvait.

Je suis l'héritière d'une des familles les plus puissantes à la tête d'un territoire vaste, je me dois de représenter cette famille et d'entreprendre des relations même amicale uniquement qu'avec ceux qui peuvent se révéler utiles au pays.

Mon père m'a très bien fait comprendre qu'entretenir une amitié avec une orpheline n'était pas envisageable .. et qu'est-ce que je fais ? J'entreprends une relation amicale avec un bâtard bien sûr !

Elle se tapa le front ne s'étant jamais sentie aussi bête de sa vie.

Et puis ... qu'est-ce qui lui disait qu'elle était amie avec Ethan ? Après tout, ce n'était qu'un enlaçade rien d'autre ... en plus la journée avait été éprouvante et elle s'était retrouvée fragile...

Mais alors pourquoi ?

Elle se leva et commença à faire les cent pas à côté de son lit encore simplement vêtu d'une tunique légère.

Il ne fallait pas que ça se sache... un bâtard... Oui, elle savait que cela entrait en parfaite opposition avec ce qu'elle lui avait dit avant. À cette pensée, elle rougit violemment. Comment allait-elle s'en sortir ?

Une servante entra dans le dortoir en voyant la jeune fille légèrement dénudée, elle se cacha immédiatement les yeux.

— Oh par Lorkhan ! Je suis navrée Mademoiselle ! Je ne pensais pas qu'il y aurait encore des personnes dans le dortoir et je pensais y faire le ménage.

Eirin qui s'était abritée derrière un paravent entreprit de se changer rapidement et lui répondit d'un air distrait.

— Ce n'est pas grave... de toute manière je dois y aller... oui je dois y aller. Je ne peux pas me réfugier dans le sommeil de manière permanente.

— Mademoiselle est trop conciliante ..., souffla de soulagement la servante qui commença à passer de léger coup de balai en quête de la poussière qui s'accumulait très vite à cette hauteur de l'académie. Vous savez, on dit parfois que lorsqu'on se réfugie dans le sommeil c'est pour éviter une situation désagréable.

— Ou une personne, laissa échapper Eirin.

Elle regretta immédiatement ses paroles et se massa doucement les yeux agacée de sa propre stupidité qui semblait soudainement prendre de l'ampleur dans sa vie.

— Une personne ? interrogea la servante à qui apparremment l'information n'avait pas échappée. Peut-être que discuter permettrait de déjouer le problème ?

— Discuter est justement l'approche qui m'a mise dans cette situation, souffla Eirin en sortant de derrière le paravant habillée.

Elle remercia d'un hochement de tête la femme qui lui offrit un large sourire.

Eirin allait ouvrir la porte quand elle entendit dans son dos :

— Si c'est discuter qui vous a mis dans cette situation c'est que cette dernière ne doit pas être aussi terrible que vous le pensez.

À ces mots, elle commença à chanter une douce mélodie chantant les louanges du dieu Lorthan pour qui elle semblait porter le culte.

Embrouillée et embarrassée par les paroles de cette femme, Eirin décida de sortir de sa chambre. Elle suivit les longs couloirs encore plongés dans la pénombre qui s'affaiblissait à mesure que le soleil se levait. Les couloirs étaient vides, les apprenties étaient déjà en cours pratique profitant des faibles températures pour s'entraîner aux combats et la plupart des paladins étaient partis en mission.

En descendant le large escalier elle atteignit finalement les lourds battants de la porte du réfectoire. Ses derniers étaient déjà ouverts et offrait à la vue d'Eirin une immense pièce où se présentait différentes tables d'une dizaine de places ou s'installaient différents groupes. Parmi ces derniers, elle vit assez rapidement la table qui l'intéressait. Y était assis mais déjà plongée dans d'épais livres de magie sûrement interdites, Lize, Kristoff décuvant en buvant un large verre de ce qui semblait être une bière, Isaak qui arborait de larges cernes, Kevin rigolant et Joshua qui semblait encore plus pâle que d'habitude et qui était en pleine discussion houleuse avec la dernière personne présente...

Ethan.

Eirin prit une profonde inspiration et se lança. Elle eut tôt fait de traverser la grande salle et alors qu'elle s'apprêtait à s'assoira une main saisit son bras.

Elle se tourna et vie Joshua qui l'a fusillait littéralement du regard.

— Qu'est-ce que...

— Faut qu'on parle.

Il appuya sa pression sur son bras l'incitant à le suivre.

Décidément, elle aurait mieux fait de rester dans sa chambre...

Le jeune homme de la maison Freymïr ne relâcha pas sa pression quand il emmena sa cousine loin des regards et des oreilles curieuses. Leurs frères et sœurs d'armes les regardèrent ainsi partir, Lyze poussant un soupir triste avant de regarder Ethan.

— Je suis sincèrement désolée Ethan, j'ignorai que cela devait être un secret. Je ne voulais pas vous mettre vous deux dans l'embarras, souffla-t-elle dépitée. J'étais simplement heureuse que vous vus soyez pardonnés...

Le fils illégitime du seigneur d'Ozeron fit un léger sourire à sa sœur d'armes.

— Ce n'est rien Lyze, tu ne pouvais pas savoir.

— Néanmoins, bien que Lyze soit notre sœur d'arme - commença Kevin- en tant que ton frère de sang, j'aurais voulu être moi aussi au courant.

— La dernière fois que je t'ai parlé de mes histoires, tu étais rouge comme une pivoine et tu me suppliais en bafouillant que je cesse, lui répondit son frère, d'un ton moqueur.

— Parce ce que je m'en moque de tes histoires d'un soir avec les prostituées d'Eblington, abrutis ! Et j'ose espérer que ça n'a rien à voir !

— Tu vois, tu deviens déjà tout rouge ...

— Tu es vraiment stupide quand tu t'y mets !

— C'est vous qui en faites toutes une histoire. N'exagérez rien, c'était une simple discussion et remise en question...

***

Joshua emmena sa cousine jusqu'à ce qu'ils n'entendent plus Kevin engueuler son frère dans le réfectoire. Assez éloigné, il relâcha enfin le poignet d'Eirin et se tourna vers elle.


— Dis-moi que tout ça ne soit qu'une invention de ce fanfaron de bâtard !


Le silence de sa cousine lui donna la réponse, Joshua se frotta le front, cherchant à garder son calme.

— Tu te rends compte de ce que tu as fait ? Tu as une réputation à préserver ! Si ça devait se savoir, des nobles intéressé par une alliance avec notre famille refuserait de t'épouser ! Déjà que tu as fâché ton père, c'est désormais de ta mère que tu vas chercher le courroux ?! Avec lui en plus ! À l'Académie, tu vas devenir son nouveau trophée, et à Frey, tu seras celle qui aura fréquenté un bâtard ! Tu te rends compte au moins ?! C'est à croire que désormais tu cherches à nuire la famille !

— C'était une simple embrassade ! Je n'ai rien dis ni fait le moindre geste déplacé !

— Arrête de mentir ! Tu sais que le moindre geste peut être mal interprété dans notre monde. C'est comme ça ! La moindre rumeur peut anéantir ta fierté !

Eirin se tût ne sachant que répondre. Elle savait qu'il avait raison. Elle savait qu'elle n'aurait jamais dû faire cela. Elle savait. Elle finit par souffler presque de manière inaudible cette pensée qui l'a harcelait

— Tu as raison.

À l'entente de ces mots, Joshua lui lança un regard désespéré.

— J'ai raison ? il rigola doucement. Àh ça va me faire une belle jambe ! Mais de toute façon toi, tu t'en fou hein ? T'as demandé l'asile donc de la famille t'en a rien à faire !

— Je n'ai pas demandé l'asile pour ça ! Tu sais très bien ce qui se serait passé là-bas ! Et tu m'as pourtant dit que tu étais heureux que je reste ici !

— Mais pas de cette manière !

— Alors dis-moi ! Dis-moi comment j'aurais pu faire autrement !

Le ton montait de plus en plus entre les deux Freymïr qui avait la chance de se trouver dans un couloir désert en cette heure matinale.

Joshua se frotta les yeux sentant qu'il perdait peu à peu son calme chose qui n'arrivait jamais à l'encontre de sa cousine en temps normal.

— Pourquoi vouloir son pardon ? À lui ? Pourquoi te rapprocher de ce bâtard ?

— Ethan.

— Non un bâtard, il aura beau s'appeler Ryït ou Ktyan ça restera un bâtard ! En l'enlaçant et en t'excusant auprès de lui, tu craches sur ta famille !

— Qui j'excuse, j'enlace et pardonne ne regarde ni ma famille ni toi.

— Mais bien sûr que si ! Et tu le sais ! Tu crois qu'il va réagir comment ton père quand il va apprendre la nouvelle ?

À cette remarque, Eirin blêmit soudainement comme si au fond, elle aurait aimé ne plus jamais parler de son père. Son assurance quant à sa décision disparue immédiatement.

— Alors déjà j'ose espérer qu'il ne l'apprendra pas.

Elle fixa Joshua dans les yeux laissant le silence planer entre eux quelques instants.

— Pas de toi en tous cas et ensuite il ne peut rien faire, je suis dorénavant sous la tutelle du directeur.

Joshua prit une profonde inspiration tremblant légèrement des mains.

— Tu sais Eirin, je crois qu'au fond, tu te trompes d'ennemis. La famille a toujours agi pour ton bien et celui de notre patrie.

— Comment peux-tu le savoir ? Tu n'as jamais été à ma place.

— Oui, je n'ai jamais pu être considéré comme l'héritier de la famille ! Après tout, je ne suis qu'un membre de la branche secondaire. Moi, j'aurais aimé ! J'aurais aimé être comme toi ! Avoir tout ce que je souhaite et représenter la famille !

— Tu aurais aimé être comme moi ? répéter Eirin d'un ton moqueur.

- Bien sûr que oui ! Lorsque tu as parlé de ta jeunesse à Aldane, tu n'as parlé que de souffrances et combien tu étais malheureuse. C'est donc seulement ça que tu retiens ?

— C'est facile pour toi, tu es un homme ! Si tu avais été l'héritier mâle de la famille tout aurait été différent. Ma mère passe son temps à prier Frigg de la pardonner pour n'avoir enfanté qu'une fille et mon père quoi que je fasse mettra mon comportement sur le dos de ma faiblesse féminine.

— Est-ce une raison pour tourner le dos à ta famille ? À ta patrie ? Par égoïsme ?

— Tu appelles ça de l'égoïsme ? Remarque, te mettre à la place d'autrui n'a jamais été ton point fort... alors te mettre dans la peau du sexe opposé...

Eirin se mordit légèrement les lèvres sentant que le sujet tournait en rond et que jamais Joshua ne l'écouterait.

— Écoute, je pense que tu puisses comprendre que j'ai la possibilité de me faire des amis sans que cela ne représente une trahison.

— La trahison tu l'avais déjà commise avant par simple peur. Et si je peux te demander, tu es en train de me dire que tu aimes plus Ethan à qui t'as adressé pour la première fois la parole à l'examen que ta propre famille qui t'a élevé et aimé ?

— Ils ne m'ont jamais aimé.

— C'est mal de mentir. Tu es juste trop bornée pour le voir dans cette vision manichéenne saupoudrée de bon sentiments que tu tiens de cette Académie.

— Mon père est un monstre ! En connaissant ce qu'il a fait et continue de faire comment tu peux le défendre à ce point ?

— Un monstre ?! Mais tu entends ce que tu dis ? Réfléchie et reviens à la raison, je t'en supplie. J'étais heureux que tu restes à l'Académie car ton père veut que je reste là bas et ça me permet de rester avec toi... mais si c'est à ce prix...

Joshua s'approcha de sa cousine et sortie un bout de parchemin de son pantalon en toile légère qu'il lui tendit.

- Écoute, ma sœur, Anna m'a écrit une lettre, elle devait savoir qu'elle n'aurait pas l'occasion de rester suffisamment de temps pour tout nous dire. Dedans, elle dit qu'elle s'inquiète pour toi et de l'influence qu'à l'Académie sur toi.

— Qu'est-ce qui te dit que cette influence est négative ?

— Qu'est-ce qui te dit qu'elle est positive ?

Joshua se tut et leva ses mains en signes d'abandon.

— Je suis lasse d'en parler, je te laisse face à toi-même. Tout ce que je veux te dire, mais tu le liras dans la lettre, c'est qu'elle a été choisie.

— Quoi ?

— Anna a été choisie.

Le visage d'Eirin blêmit immédiatement.

— elle... elle a été choisie ?

— elle est heureuse de l'avoir été, c'est le meilleur rôle qu'elle puisse jouer en tant que femme de la branche secondaire. Son ascension est dans un an et elle aurait souhaité que toute la famille y assiste pour l'accompagner. Ça te laisse le temps de réfléchir si tu veux toujours faire partie de notre famille.

Sur ces mots, Joshua ne laissa pas à Eirin la possibilité de répondre et fit demi-tour en la laissant seule dans le couloir avec la lettre d'Anna dans ses mains.

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Comme promis un second chapitre pour cette semaine ! J'ai souvent du retard mais je peux (de très rares fois) avoir des élans de rapidité hein ^^'

J'espère que le chapitre vous plait et même si le début de ce tome n'est pas marqué par l'action tôt ou tard vous finirez par regretter cette période d'Accalmie.

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