🔹Chapitre 13

J'avance à reculons pour rejoindre ma demeure. Lorsque j'arrive, ma mère est devant la porte à m'attendre. Moi qui ne voulais pas rentrer, je sens que d'ici trente secondes, j'en aurai encore moins envie.

- Dépêche-toi ! Nous devons parler ! dit-elle bien trop fort.

Je pénètre dans la maison sans insister ou demander ce qu'il se passe encore. Elle a toujours une bonne raison de me crier dessus. Tout a changé il y a deux ans et demi, sans que je ne sache pourquoi, ma mère ne me supportait plus. Je suis partie en vacances et en revenant, elle était différente. Je repense avec amertume à mon enfance.

Tout n'était pas tout rose, loin de là. J'ai perdu tellement de proches que je me suis longtemps interdit de m'attacher aux gens. Pourquoi aimer si c'est pour qu'ils meurent ? Mais j'avais mes parents, ils m'aimaient d'un amour inconditionnel et faisaient tout pour me rendre heureuse. Ça n'a jamais suffit hélas, et quand ils ont arrêté je me suis sentie si seule.

J'ai fait la seule chose qui me semblait logique à cette époque. J'ai pris une plaquette de comprimé qui appartenait à ma mère et les ai avalés. Elle a appelé les urgences après que je sois descendue en pleurant et en m'excusant. Je m'étais rendue compte que ce n'était pas une chose à faire. Le psychiatre qui était venu me parler avait dit à mes parents que j'étais fragile. Mais qu'est ce qui a fait de moi un être si sensible ?

- Assieds-toi ! m'ordonne t-elle me sortant de mes pensées

- Il y a un problème ? tenté-je innocemment

- Le Proviseur m'a appelée ! commence t-elle

Et merde ! Si jamais il lui a expliqué ce qui s'est passé aujourd'hui je suis foutue. Alors que je me dis ça, elle poursuit :

- C'est quoi cette histoire de photo sur facebook ?

- J'en sais rien ! Je...

- Tu ? Rien du tout ! m'interrompt-elle avant de continuer sa tirade. Tu te dois de faire attention à ton image...

Ça y'est elle recommence avec ses discours de bonne fille...

- ... Si tu te fais insulter par tout le monde c'est peut-être qu'il y a une raison...

Elle est sérieuse ?

- ... Et cette histoire en est la preuve, cette image vient bien de quelque part ! Tu crois que c'est le genre de photo qu'une gamine doit mettre sur internet ? ...

Elle y est depuis deux ans mais elle s'en préoccupe que maintenant ? C'est pas à elle qu'on va décerner la médaille de la mère de l'année !

- ... Tu ne sais pas qui peut voir ce que tu mets sur tous ces trucs ! N'importe quel pervers peut y avoir accès ! Plus besoin de se demander comment sont repérés les enfants kidnappés ! finit-elle en hurlant

Je comprends pas trop le rapport entre le post sur la page du lycée et le fait de se faire enlever. Bon, après faut pas chercher trop loin, elle est comme ça.

- Tu compte au moins me donner une explication ? me demande-t-elle

Que veut-elle que je lui dise ? Dans tous les cas elle ne m'écoutera pas, alors à quoi bon ? Devant mon mutisme elle souffle bruyamment et me fixe avec un regard noir.

- Pour quoi faire ? demandé-je en regrettant aussitôt mes paroles

Elle fronce les sourcils et lorsqu'elle bouge j'ai un mouvement de recul.

- Parce que je te le demande ! ordonne t-elle en se mettant à quelques centimètres de moi

- Hollis, il t'a dit quoi ?

- Qu'une camarade t'avait fait une blague et mit une photo de toi en bikini sur la page du lycée.

- Pfff... Bah bien sûr !

- Tu t'expliques ?

- Ce n'est pas une blague ! Elle a fait ça pour m'humilier ! Elle a marqué que je voulais baiser pour avoir de meilleures notes !

-Surveille ton langage ! Je vais devoir te le dire combien de fois ? ...

C'est tout ce qu'elle voit là ? Elle se fout de moi ?

-... Et c'est quoi cette histoire ?

Je n'ai plus la force de répondre. Je lui tends mon portable et quitte la pièce.

- Ingrid ! Reviens ici ! hurle ma mère à travers la maison et rejoins ma chambre.

En regardant dans ma messagerie, elle comprendra que tout ça n'est pas une vaste blague. Elle verra que cette fille ne veut pas juste rigoler, qu'elle cherche à me détruire psychologiquement. Et j'ai bien peur que si elle continue et que tous les autres l'aident, elle y arrive.

Je ne suis pas assez forte pour supporter ça. Je ne suis pas glaciale comme certains peuvent le penser. Loin de là ! Mais pour être populaire, je devais me forger une carapace, alors j'ai enfilé un costume tous les jours et j'ai eu du mal à le quitter. Aujourd'hui il me porte préjudice.

Au fond je suis comme les autres avec mes peines, je dirais bien aussi avec mes joies mais il y en a peu. Mon seul rayon de soleil est Sarah, ma meilleure amie. Je crois que sans elle, j'aurais sombré si profondément que personne n'aurait pu m'en sortir. Sauf qu'elle n'est pas ici avec moi, et rien ne me retient de cette chute sans fin.

Je claque la porte et allume ma télé pour couvrir le son de la voix de ma mère. Je zappe et tombe sur l'épisode quatre de la saison deux de DC's Legend of Tomorrow * sur CSTAR. Cette série est comme ma vie, ça devient n'importe quoi. Il y a des zombies, un des membres de leur équipe en devient un d'ailleurs. Si j'en devenais un, peut-être ressentirais-je moins cette douleur, ce poids qui m'oppresse en permanence ?

*****

* DC's Legend of Tomorrow : série spin off de Arrow et The Flash.

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