Le soleil était à peine levé, le matin d'après, quand elle fut réveillée par Alby, qui se penchait de façon inquiétante au dessus d'elle.

La veille, Minho lui avait présenté tous les blocards. Elle n'avait retenu que le nom de certains d'entre eux, mais elle n'avait pas pu oublier Alby, le chef apparemment, avec sa peau noire comme l'ébène et son regard d'aigle.

Elle voulut crier en voyant ce dernier, peu adepte des réveils forcés, mais une main se posa vivement sur sa bouche.

- Chut, c'est juste moi. Si tu réveilles les autres, je donne pas cher de ta peau.

Kalee attendit que la main s'enlève pour lui répondre à voix basse.

- Qu'est-ce qu'il se passe ? Pourquoi tu me réveilles aussi tôt ?

- Suis moi.

Elle se releva lentement, étirant son corps courbaturé, et suivit Alby qui était déjà parti vers un des murs. Elle se rappelait encore sa surprise, hier soir, quand ils s'étaient refermés, même si on l'avait prévenue que c'était tout à fait habituel.

- Qu'est-ce qu'on fait là ? Demanda-t-elle sèchement.

- C'est le mur des blocards. On grave tous nos noms, pour laisser une trace.

Kalee observa le bout de mur qu'il lui indiquait. Il était gravé d'une vingtaine de noms. Elle prit le temps de les lire, et fronça les sourcils en voyant que trois d'entre eux étaient barrés.

- Qu'est-ce qui est arrivé à ces trois là ?

Alby soupira.

- J'ai vraiment besoin de te l'expliquer ?

Kalee frissonna et seccoua la tête, ne posant plus de question.

Il y eut un silence presque religieux, puis Alby lui tendit un couteau.
La brune le prit, et commença à graver également son nom dans un espace vide.
Elle écrit chaque lettre avec soin.

《 KALEE 》

Elle se recula pour juger de la netteté du mot, et grimaça en voyant que le "E" final penchait vers la droite, comme s'il avait voulu s'enfuir.

- C'est bien. Tu es une blocarde, maintenant.

- Et... quand est-ce qu'on trouvera la sortie ?

- Bientôt, je pense. Les coureurs viennent de s'apercevoir que les murs bougent pendant la nuit, et leur schéma change toutes les semaines, pour se répéter chaque mois indéfiniment.

- Et qu'est-ce que ça prouve ? C'est un indice ?

Le garçon soupira. Kalee remarqua que son visage semblait ridé d'inquiétude, et même s'il n'avait sûrement qu'un an de plus qu'elle, il semblait en avoir trente.

- Rien du tout. Mais c'est déjà ça. Bon, assez parlé de cette connerie de Labyrinthe, aujourd'hui tu vas tester sarcleuse, le maton c'est Zart, va te changer.

Et Alby la planta là, sans lui expliquer ce qu'était un maton, ou une sarcleuse.
Elle se dépêcha néanmoins d'aller se changer dans les douches, avec la caisse de vêtements que Newt lui avait sorti la veille de la Boîte.

Même si elle ne contenait que quelques vêtements de rechange et des affaires de toilettes, au moins Kalee ne serait pas obligée de garder indéfiniment les vêtements avec lesquels elle s'était réveillée dans la Boîte.

Elle troqua sa chemise de nuit contre des habits plus pratiques, et retourna à la prairie en cherchant Zart.

- Eh, toi là ! Cria soudain quelqu'un sur sa droite.

Kalee se retourna vivement, faisait voler ses cheveux bruns, et cligna des yeux, se demandant ce qu'elle regardait exactement.
Un arbre semblait s'approcher d'elle.

- Eh, oh ! Je te parle ! Dit une voix, venant de l'arbre.

- Un arbre me parle, tout va bien. Je vais m'éloigner, hein. Je crois que cet endroit rempli de sauvages ne réussi pas à ma santé mentale. Marmonna Kalee.

- J'hallucine, c'est complètement con une fille.

Voilà qu'un arbre se mettait à l'insulter ! La brune s'apprêtait à partir quand l'arbre se décala, laissant voir un garçon derrière le feuillage épais.
Une vague de honte prit la jeune fille, qui rougit jusqu'à la racine de ses cheveux.

- Bon, tu te décides à m'aider ou tu restes plantée là jusqu'à ce qu'il neige ?! Ça pèse lourd ce truc, et il faut qu'on le replante à l'autre bout du Bloc ! S'énerva le garçon.

- Tu.. tu es Zart ?

Kalee s'empressa de l'aider en portant le tronc. Il ne répondit même pas, lui lançant un regard furibond.
Vexée, elle l'aida à transporter l'arbre jusqu'à la petite forêt. Là, il creusa un trou profond pendant qu'elle retenait l'arbre tant bien que mal.

Et il en mettait, du temps, à creuser son trou ! Elle n'avait pas une force infinie, et l'écorce lui éraflait la paume des mains à chaque mouvement.
Le soleil atteignait presque le haut du ciel quand il finit enfin.
Pendant ce temps, les portes avaient eu le temps de se rouvrir, les blocards s'étaient tous mis au travail, et elle écumait de rage, transpirant sous le soleil cuisant.

- Passes moi l'arbre, je vais le mettre en terre. Tu peux aller manger. Lui dit-il, depuis son trou.

Sans réfléchir, elle lui jetta l'arbre dessus et s'en alla à grands pas.
Elle prit une assiette à la cuisine, évita les regards curieux des autres garçons et s'assit avec humeur à une table vide.

Quand elle eut fini de manger, sa colère se transforma à culpabilité et elle décida de présenter des excuses à Zart. De plus, si elle ne trouvait aucun autre job, il fallait bien qu'elle ai une solution de repli, alors autant faire bonne impression, juste au cas où.
Mais quand elle se retrouva devant lui, reprenant le travail, ce fut lui qui s'excusa le premier.

- Eh, la Bleue... je suis désolé pour ce matin. C'était pas génial de te laisser poireauter sous le soleil pendant plusieurs heures.

Surprise, elle hocha simplement la tête, passant outre le surnom. L'après-midi passa plus tranquillement, elle planta des graines et arracha quelques touffes d'herbes.
Ça ne lui plaisait pas, mais c'était déjà mieux que ce matin, et les autres sarcleurs étaient plutôt sympa.

Quand Zart lui annonça qu'elle avait finie pour aujourd'hui, elle alla directement dans les douches pour se débarrasser de toute la terre qu'elle avait dans les cheveux et sur le corps.

Après s'être lavée et changée, elle retourna dans le pré, juste à temps pour voir arriver Newt, Minho et les autres coureurs.

- Alors miss, ce premier jour ? Lui demanda Minho, rouge et couvert de sueur.

Newt se laissa tomber dans l'herbe et reprit son souffle, le regard vers le ciel.

- Pas terrible.. je ne pense pas devenir Sarcleuse. Je ne suis vraiment pas douée.

- Moi j'aime bien ce métier. Si j'avais pas été coureur, je pense que c'est ça que j'aurais fait. Intervient Newt d'un ton penseur.

Kalee haussa les épaules et l'aida à se remettre debout.
Il attacha ses cheveux humides de transpiration en un chignon lâche, et donna un cou de coude à Minho.

- Oublie pas que tu dois aider Alby pour le feu de camps. Moi je vais aller cartographier ma section et prendre une douche.

Sur ces mots, ils s'en alla. Minho grogna, et lui emboita le pas en entraînant Kalee par le bras. Il lui chuchota à toute allure :

- Sauve moi et va aider Alby à ma place, je suis crevé et il faut absolument je dorme une heure avant la fête. Bon courage !

- Attend ! Quelle fête ?

Mais il la planta là en s'enfuyant vers la salle des cartes.
Maintenant, elle n'avait pas d'autres choix que de retrouver Alby.

La soirée promettait d'être longue...