❤

J'ouvre avec rapidité la porte d'un joli bois verni, essoufflé après cette course folle. Le grondement sourd d'une moto fait écho aux petits tintements que font les carillons, accrochés près de l'entrée.

— Je suis encore en retard ! m'écris-je, affolé. Je suis désolé !

Le doux et habituel rire du vendeur m'accueille, avant que ce dernier ne soulève un grand sac en papier blanc.

— Ce n'est pas grave, c'est une habitude à prendre, pouffe-t-il. J'ai mis six croissants de côté. Ils sont encore tout chauds.

— Oh mon Dieu, merci ! Vous êtes un ange tombé du ciel !

Je m'avance, le sourire bloqué jusqu'aux oreilles, et attrape le paquet, tout en lui donnant la monnaie exacte.

Il ne cesse de rire doucement et j'en viens à me demander s'il est réellement comme ça avec tous ses clients, ou si c'est grâce à moi qu'il réagit avec autant d'entrain. Il semble être né pour ce travail, alors j'imagine que la première réponse est sans doute la plus plausible.

— Je vous ai également ajouté deux pains au chocolat. J'espère que vous aimez ça tous les deux.

La première fois que je suis venu acheter des croissants dans cette belle boulangerie, je me rappelle lui avoir fait la conversation, alors que j'attendais ma commande. Je lui ai bien évidemment parlé de ma magnifique maman. Je suis donc heureux de voir qu'il m'écoutait avec sincérité et attention. Ça me fait chaud au coeur. Cet homme est vraiment quelqu'un de bien.

— Oh ? C'est très gentil ! Oui, bien sûr, on n'est pas difficile, soufflé-je du nez. Mais pourquoi avoir fait ça ?

— C'est parfait, je suis content. Vous venez toutes les semaines depuis maintenant quelques mois, alors c'est un cadeau, pour vous remercier de votre fidélité.

Si seulement il savait que ce n'était pas totalement pour elle que je viens ici, chaque dimanche.

Je suis certain d'ailleurs qu'elle l'adorerait...

Et bien sûr, comme d'habitude, je pousse mon imagination bien trop loin.

— C'est vraiment très gentil de votre part, merci beaucoup ! m'enquis-je. J'aimerais également vous remercier pour votre gentillesse et votre dur travail, mais à part vous inviter au restaurant, je ne sais pas trop ce que je pourrais faire, ris-je, d'un air distrait.

Oh mon Dieu, mais qu'est-ce que je viens de dire ?

Il faut vraiment que j'apprenne à contrôler mes actes et paroles !

Je suis si gêné maintenant !

Ça m'apprendra...

Cet adorable vendeur penche la tête légèrement sur le côté, un sourcil arqué et un petit sourire en coin. Oh c'est pas vrai, mais je suis vraiment trop gênant !

Bien évidemment qu'il me plaît. Je ne peux pas me mentir à moi-même, c'est impossible... Mais je ne pensais pas que mon subconscient me ferait un coup pareil !

Quel abruti je fais !

— Est-ce une réelle invitation ?

Vite, une cachette ! Je veux disparaître !

— Oh ! ris-je nerveusement. Eh bien, o-oui, enfin, sauf si vous trouvez ça trop déplacé. Dans ce cas, nous dirons que c'était pour plaisanter !

— C'est la première fois que ça m'arrive, pour être honnête, plaisante-t-il, sans aucune moquerie dans la voix.

Mon visage doit être brûlant, tant je me sens honteux. Et je sais que ça ne m'aide pas du tout.

Il pourrait prendre cette invitation pour une simple sortie entre futurs amis, mais vu mon état horriblement gênant, il doit certainement se douter que je le drague, même si ce n'est pas voulu.

Oh mon Dieu, c'est vraiment très, mais alors là, très gênant !

— C'est simplement que pour moi, tout est toujours une bonne excuse pour manger de délicieuses choses, pouffé-je, maladroit.

— Et je ne peux qu'être du même avis, rit-il.

— Ah oui ? ris-je à mon tour. C'est donc un oui ?

Je suis complètement inconscient. Ça me perdra un jour.

— C'est un oui, sourit-il.

Oh bon sang !

Manifestement, ce n'est pas aujourd'hui que ça me perdra !

Je ne sais pas qui je dois remercier pour ça, mais en tout cas, mes remerciements sont sincères ! Merci infiniment aux personnes qui veillent secrètement sur moi !

Merci mille fois !

— Eh bien, c'est parfait ! m'enquis-je, le coeur battant d'une façon plus légère. Je ne sais pas quand vous êtes disponible...

— Je ferme la boulangerie à dix-huit heures, si jamais vous n'avez rien de prévu en soirée... propose-t-il.

C'est adorable, il semble aussi impatient que moi !

— Oh ! Non, je n'ai rien de prévu. Ce sera avec plaisir.

— Vous n'êtes pas vraiment du coin, si j'ai bien compris, place-t-il alors, entre deux clients. Il y a un restaurant végan à quelques rues d'ici. J'ai toujours voulu tester. Ça vous tente ?

— Ce serait une première pour moi aussi, alors oui, ça me convient parfaitement ! J'adore découvrir de nouvelles choses, surtout en matière de nourriture !

Mon enjouement semble l'amuser. Il pouffe pour la énième fois, tout en remettant de l'ordre dans la vitrine de son comptoir.

— Super. Est-ce que ça vous irait de revenir ici vers dix-huit heures ?

— Ça me va, je serai là !

— Très bien, alors, à ce soir, conclut-il, d'un beau sourire.

— Oui, à ce soir ! Et encore merci pour les pains au chocolat !

Sois fier de toi, conscience... Pour une fois, je te remercie d'avoir pris les choses en main.

Oui... Tu as fait du très bon travail.

J'ai hâte d'être ce soir !

Il faut que je retourne chez moi pour trouver de quoi me changer !

Je suis tellement stressé et en même temps, tellement euphorique !

Cet homme est si adorable... J'ai vraiment hâte d'apprendre à mieux le connaître.

Comment je vais pouvoir tenir jusqu'à ce soir ?

Ma mère va me trouver insupportable, la pauvre.

Il faut que j'appelle Kihyun ! Je dois absolument lui raconter ce qui vient de se passer !

Lui qui insistait tous les jours pour que je tente une approche avec ce beau vendeur.

Il va être fier de moi.

Cette soirée s'annonce vraiment très agréable, je suis trop impatient !

❤