Chapitre XII

Je me pince les lèvres quelques instants, continuant sur ses pensées. Il est le seul coordinateur de cette branche, et comme je le sait déjà, jamais personne d'autre que lui ne voudrait s'en occuper, les autres ont trop peur de se retrouver sous le feu des projecteurs. Personne sauf moi. Je lève les yeux au ciel en comprenant tout à coup mieux la raison pour laquelle William est revenu me voir, pour la simple raison qu'il a besoin d'un formateur. Je n'en crois pas mes yeux, il veut un remplaçant au cas où il lui arrive malheur, et s'il y pense maintenant, c'est que ça devrait bientôt arriver. Ils veulent me recruter à nouveau, et comme ils me connaissent ils l'envoient lui, parce qu'ils savent que c'est peut-être l'une des seules personnes au monde capable de me faire changer d'avis.

- Pourquoi? finis-je par dire, sans contexte avec le reste, mais à en croire le regard de mon ami, il a rapidement fait le rapprochement.

- Pourquoi quoi ? demande rapidement Beth, dans l'incompréhension la plus totale.

- Pourquoi est-ce que ce n'est pas de son fait ? Parce que les ordres viennent d'en haut, tout simplement, se moque Nolan, pensant que ma question était en rapport avec ça, ce qui me fait lever les yeux au ciel

- Pourquoi tu as accepté ? demandais-je enfin en m'approchant de William.

Rapidement, je le vois détourné le regard, il fuit ce qui est en train de se passer, parce qu'il a tout compris, et il sait que ce qu'il va dire pourrait changer ma vision des choses. Mais il sait aussi que, d'un autre côté, c'est trop tard. Trop tard, parce que j'ai déjà accepté de l'aider, parce que j'ai déjà accepté de me remettre dans ces histoires, bien que je n'ai pas clairement accepté pour le moment, ils savent que je me suis déjà suffisamment mise dans le pétrin pour ne pas pouvoir renoncer.

- Répond moi, et ne me ment pas s'il te plaît, ordonne-je en soupirant légèrement, déjà agacée par ce qu'il va me répondre.

Il finit par soutenir mon regard, un regard désolé et rempli de désespoir avant de secouer la tête.

- Les choses ont beaucoup changées depuis que tu es partie...J'ai beaucoup changé à vrai dire. C'était mon seul moyen pour qu'ils regagnent confiance en moi, et leur seul moyen pour avoir un oeil sur moi, ils savaient que si tu étais là, tu reprendrais tout en main, tu reprendrais le contrôle de ta branche, et tout reviendrait à la normale. dit-il enfin avant de baisser les yeux ce qui commence à m'énerver d'ailleurs

- Qu'est-ce que tu entends par "j'ai beaucoup changé"? Qu'est-ce que tu as fait ? continuais-je, mais ça n'a aucun effet. Il ne me répond pas et continue de baisser le regard, ce qui me fait grogner. Regarde moi dans les yeux et assume, ou dégage de chez moi. Ne joue pas au plus têtu sous mon toit, parce que tu perdras.

Je le vois relever la tête, les larmes lui montent au yeux, mais il ne veut pas perdre la face, ce que je comprends, mais ce n'est pas moi qui l'aiderai à rester calme. Je le vois hésiter avant de soupirer longuement, comme pour se donner du courage, il sait que je le dégagerait vraiment de chez moi, peu importe les conséquences.

- Quand tu es partie, tu m'as laissé seul, avec tous les gens qui nous haïssaient sur le dos. Je n'avais plus personne pour leur faire face, alors j'ai dû prendre mes dispositions pour rester en sécurité, explique-t-il sans vraiment me donner plus de détails.

- Quelles dispositions ? grognais-je

- Je les ai tués. annonce-t-il après un grand silence, laissant après lui un blanc pesant, et lourd de sens.

Je comprends mieux maintenant. Tuer l'un des nôtres est passible de l'exclusion de l'entreprise, ou selon le contexte, de la peine de mort. William n'a jamais eu personne, cette industrie est tout ce qu'il a, et ce depuis toujours, alors je comprends pourquoi est-ce qu'il a essayé de redorer son blason. Je me pince les lèvres et secoue longuement la tête, avant de passer ma main sur mon visage. Je n'ai pas besoin de tourner mon regard vers les jeunes pour comprendre qu'ils sont choqués, et aussi, je pense, qu'ils ont peur, en effet, s'il est capable de tuer l'un des nôtres, c'est qu'il est capable de tout.

- Et tu ne t'es pas dit que les tuer te fera te faire détester par ceux qui nous appréciaient ? dis-je enfin en soupirant longuement

- Je n'ai pas réfléchi jusque là, avoue-t-il en baissant la tête

- Évidemment que non, tu n'as pas réfléchi jusque là, tu ne réfléchis jamais plus que ce qu'il est nécessaire ! râlais-je en me retournant pour aller me servir un peu plus de vin, j'en aurais besoin

- Eh ! Je te ferais dire que c'est toi qui m'a laissé seul avec eux ! C'est toi qui est parti sans régler tes histoires parce que tu ne pouvais, je cite, "plus continuer comme ça" ! Tu m'as laissé dans cette merde alors c'est aussi de ta faute je te ferais dire! crie-t-il alors que je me retourne vers lui

- Ma faute ? Non mais t'es sérieux là ?

- Oui, ta faute ! C'est toi qui t'est mis à dos toutes ses personnes ! C'est contre toi qu'ils en avaient, pas contre moi ! C'est parce que j'étais ton ami que je suis devenu leur cible quand tu es parti ! C'est même entièrement ta faute si j'ai dû en arriver là! continue-t-il

- Tu te souviens de ce que j'ai dit avant de partir ? Je t'ai demandé si tu voulais venir avec moi, pour t'éloigner de toute la merde que représente cette entreprise, et tout ce que tu as décidé de faire, c'est de rester, pour te faire bien voir à leurs yeux. Tu t'es mis tout seul dans cette merde. Rien ne te forçait à être mon ami, rien ne te forçait à les tuer. On n'a jamais eu besoin d'arriver à cette extrême là si tu te souviens bien, et pourquoi ? Parce qu'on faisait notre job, et ça nous valait la protection du patron !

- Tu vois, c'est là où tu te trompes Amélia, la protection du patron ne concernait que toi, moi il ne m'a jamais aimé, mais il me supportait, parce que tu étais là et qu'il avait confiance en toi. Personne ne m'a jamais respecté là-bas, pas autant que quand j'étais avec toi. Alors non, quand tu es parti, tu m'as laissé avec tes problèmes et j'ai dû m'en débarrasser, c'est tout. Si tu ne voulais pas que je me mette dans une telle merde, tu n'avais qu'à régler tes problèmes, ou même mieux, tu n'aurais jamais dû partir.

- Je dois dire que, pour une fois, je suis d'accord avec lui, nous coupe une voix sortie de nulle part.

Rapidement, je tourne ma tête vers cette personne et souffle en voyant qui c'est. Je vois les jeunes se tendre légèrement, je ne sais pas s'ils savent qui c'est, mais une chose est sûre, c'est qu'ils n'essayent pas de l'arrêter. Je vois la tête de William se décomposer alors que je lève les yeux au ciel.

- Amélia, tes 36h sont écoulées.

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