– Whah... ça fait beaucoup à avaler, là.

     Jay avait écouté en silence les explications de sa mère, de Maya et de sensei Wu. Il avait du mal à y croire. Une partie de lui voulait rester dans cette pièce à discuter de ces dernières années et des Energeantes, créatures dont il n'avait jusque-là presque jamais entendu parler, si ce n'est dans un livre à la bibliothèque.

    Une autre partie voulait sortir et trouver Nya. Pourquoi avait-elle réagi comme cela ? Ne rêvait-elle pas de revoir sa mère ? Comment allait-elle ?

    – Je la comprends, déclara Maya. Nya. Je sais que tu penses à elle.

    Jay eu un mouvement de recul, presque malgré lui.

    – Je ne suis pas télépathe, rassure toi, ria-t-elle doucement. Ton regard ne cessait de se diriger vers la porte. Tu sembles très préoccupé. Tu es visiblement plus qu'un ami, pour ma fille.

    Cela se voyait tant ? Jay devait apprendre à masquer un peu plus ses émotions, si n'importe qu'elle inconnue pouvait lire en lui comme dans un livre ouvert...

    Ce n'est pas n'importe qui, idiot ! C'est sa mère !

    – Quand Laya va être au courant, elle va être folle de joie... murmura-t-il.

    Les yeux de sa mère se mirent à briller. De larmes ? De joie ? De larmes de joie ? Jay n'arrivait pas à le déterminer.

    – En parlant de Laya... elle à... vieilli, non ? demanda-t-elle. Comment ça se fait ?

     Jay sentit ses yeux le picoter tandis qu'une nuée de mauvais souvenir commençaient à revenir.

     – Elle à réveiller son vrai potentiel et... c'était vraiment beaucoup demander à son corps. On a dû la soigner avec ce qu'on avait sous la main et... il y a eu un petit effet secondaire. Mais elle le vit bien. Je crois. On n'en parle pas trop, en fait. On n'aime pas.

    – Et toi ? Tu le vis bien ?

    Jay soupira en riant.

    – Disons que j'ai du me faire à l'idée que ma petite sœur faisait dix centimètres de plus que moi et avait soudainement mon âge. Mais sinon, c'est cool. Et puis ça a vraiment déterminé l'issu du... d'un combat assez euh... important.

    Des coups assez violents furent frappés à la porte, coupant Lia, qui avait la bouche ouverte, prête à poser une nouvelle question, et soulagea Jay, qui ne voulait pas répondre à cette fameuse question.

    – Jay ! cria la voix de Kai tandis que ce dernier entrait. Je sais que t'es là-dedans ! J'te jure que si c'est toi qui a fait chialer ma sœur je te...

    Il ne finit pas sa phrase. Il resta planté là, la bouche ouverte, le regard incrédule, les yeux rivés sur Maya.

*****

    Zane n'arrivait pas à se concentrer. Pourtant, il n'avait jamais failli lors de ses séances de méditation !

    Mais, avant, tu ne savais pas...

    Devait-il s'inquiéter de cette soi-disant conscience ? Il ne devait pas en avoir, normalement.

    Il se leva dans un silence total et ouvrit son sac de cours. Kai et Lloyd n'étant pas là, il pouvait sortir ces fichues feuilles.

    Il les trouva rapidement. Plus qu'il ne l'aurait espéré, à vrai dire. Il avait envie de tout sauf de revoir ces plans. Mais il devait le faire.

    Il devait être sûr de comprendre.

    Il retourna les feuilles bleues qu'il avait trouvées en triant ses affaires. Que faisait-elle là, il n'en avait aucune idée.

    Toujours les mêmes dessins. Ceux d'un droïde. Mieux, ceux d'un androïde. Pas la version d'un appareil, hein, comme ios ou Android, mais un robot humain, avec toutes les fonctionnalités utiles. Même l'aptitude à cuisiner, à danser, ou à reproduire tout les paramètres d'un véritable humain.

    Bien sûr, ce fantastique projet, d'un certain Docteur Julien, avait un nom.

    ZANE.

    Quel indice supplémentaire, en plus d'une morphologie et de traits similaires ?

     Lui, Zane Julien, dix-huit ans d'âge humain, était un androïde depuis tout ce temps.

    Il prononça cette phrase à voix haute. Cette voix, qu'il écouta attentivement. Comme s'il s'attendait à ce que, brusquement, elle soit métallique et maladroite.

    Il attendit que quelque chose se passe, mais rien. Mais quoi, après tout ? Un bug, comme les Castafoltes du Visiteur du Futur ? Une soudaine envie de tuer tout le monde ? Un grésillement ?

    Si, quelque chose s'était passé. Maintenant, il savait. Maintenant, il fallait en parler aux autres. Maintenant, il avait encore plus de questions quant à son origine de création, son créateur. Pourquoi l'avoir construit ? A quoi devait-il servir, à la base ? Pourquoi l'avoir délaissé ?

    Mais surtout, d'où tirait-il son pouvoir élémentaire ?

*****

    – Pourquoi on ne pourrait pas s'enfuir ? Ce n'est qu'une... grotte.

    Ray secoua la tête, las, en se levant.

    – Avant, peut-être. Et encore, cela demanderai un sacré courage. Non. On ne peut pas. On ne peut plus...

    – Pourq...

    – Le Pacte Elémentaire, déclara Ray.

    Lloyd fronça les sourcils.

    – Le quoi ?

    – Le Pacte Elémentaire, répéta le maître du feu. C'est comme ça qu'on appelle ce que... enfin... Tu vois, quand elles se servent de toi, la première fois, tu es soumis à elles par le Pacte Elémentaire. Tu es lié à ces monstres par ton pouvoir élémentaire. Après, tu ne peux plus leur échapper. Elles savent où tu es, ce que tu fais... elles peuvent même te retirer ton pouvoir élémentaire.

    Le garçon soupira et s'assit sur un rocher.

    – Alors il n'y a vraiment aucune chance... fit-il d'une petite voix.

    Ray acquiesça et s'assit lui aussi, comme s'il venait de prendre compte de l'ampleur de la situation.

    – Et si elles meurent... commença Lloyd.

    – On ne peut pas les tuer.

    – Oui mais, je veux dire...

    – Non. On ne peut pas, coupa Ray. Elles sont trop puissantes.

    – Alors c'est foutu ? C'est ça ? Il n'y a aucune solution ?

    – Alors c'est foutu. Il n'y a aucune solution.

*****

    Jusqu'à ce moment, Laya avait passé la meilleure des journées. Et pour cause ! Elle avait appris que sa mère était toujours en vie.

    Aucun mot ne pouvait décrire ce qu'elle avait ressenti en la voyant. De la joie ? Dérisoire. Du bonheur ? Moindre.

    Elle avait mis des heures à se faire à l'idée.

    Nya, elle, avait passé la journée enfermée. Elle ne laissait personne entrer, pas même Jay.

    Lloyd n'était toujours pas revenu. Et, bien qu'ayant essayé à maintes reprise, Laya n'était pas parvenu à le localiser.

    Et c'est seulement au dîner que Maya émit la terrible hypothèse qui plongea la pièce dans un silence effrayant, avant que les questions et suppositions émergent et explosent.

    « Il a peut-être été pris par les Energeantes. »

    Tout le monde aurait voulu la contredire.

    Mais personne n'en fut capable.

    Quand Laya proposa d'essayer de regarder, sa mère l'arrêta vite.

    – Non ! Elles sont très puissantes ; c'est trop dangereux pour toi !

    – Alors on fait quoi ? demanda Cole.

    Les deux femmes se regardèrent, comme si elles se demandaient l'accord de parler.

    Finalement, ce fut Maya qui prit la parole.

    – On y va. On va retrouver Ray et votre ami.