Chapitre 4
Je me suis retourné dans mon lit encore et encore jusqu'au matin pour trouver une solution. Je pourrais parler autant que je veux à mon père, jamais il me laissera sur Terre en m'abandonnant. Il ne m'aime peut être pas tout à fait autant que dans les livres ou l'amour paternel est très présent, mais assez pour ne pas me laisser ici et partir sans moi. Et puis il a trop de dignité pour ne pas faire la une des journaux " Welvove laisse sa fille seule et s'échappe de la planète condamner ". Et puis au final, est-ce qu'il y aura encore des journaux dans deux mois? Un mois? La fin du monde, est-ce que ça passe vraiment aux écrans? Je m'imagine mal la planète au bord du gouffre, près de sa fin et des milliards de gens les yeux rivés sur l'émission du jour. "Aujourd'hui, il ne nous reste qu'un mois de vie. Évidemment, pas d'inquiétude !". Peut-être que l'Homme en serait capable au final. Ou alors peut-être que les scientifiques ne vont même pas avouer que la planète est condamnée. Ça serait trop la panique. Car pour l'instant, papa est au courant, mais je crois ne pas me tromper en disant que les médias gardent encore cela secret. Seulement voilà, papa est privilégié pour être au courant avant tout le monde. Notre motif : nous sommes milliardaire.
Alors mon plan est décidé. Je ferais semblant d'y aller, je ferais ma valise, je monterais dans la voiture qui m'amènera vers ce vaisseau. Mais juste avant de monter dans le vaisseau, je m'échaperais. Papa ne me rattrapera pas. Je le sais. Car sinon, la fusée partirait sans lui, et il ne raterait pas sa seule chance de vivre. Il tient peut-être à moi, mais plus encore à sa vie. Moi, je préfère vivre mes derniers mois libres et heureuse que de vivre toute une vie enfermée et malheureuse.
Oui, je ne peux pas partir maintenant, car mon père donnerait tout pour qu'on me retrouve ces trois prochains jours. Et j'ai peur qu'il me retrouve avant le grand départ et que je n'ai plus de chance de m'enfuir.
Je rejoins mon père, prête à m'excuser de mon comportement de cette nuit, et le remercier de m'emmener avec lui. Gagner sa confiance, c'est le mieux que je puisse faire pour l'instant. Je le retrouve dans la salle à manger, en train d'avaler ses habituels œufs au plat. Cette fois, je m'assois face au lasécran, comme pour dire que je suis fière de son invention. Papa ne dit rien. Je sais que c'est à moi d'engager la conversation.
— Je suis désolée pour cette nuit. Je me suis emporté. En plus, c'est toi qui avait raison. Dehors, c'est dangereux...J'aurais dû t'écouter depuis le début.
J'avale ma salive difficilement et continue.
— En plus, tu voulais juste me protéger, m'aider. Papa, je ne te remercierais jamais assez de me sauver la vie. Grâce à toi, je vais pouvoir partir sur une autre planète pour quitter le danger. Je suis consciente que très peu de gens ont cette chance. Merci papa...
Mes mensonges sonnent tellement faux. Je m'enfonce mes ongles dans ma peau sous la table pour garder le calme et à garder mon rôle. Mais papa ne remarque rien au mensonge. Lentement, il prend une serviette, s'essuie la bouche et me regarde dans un sourire hypocrite.
— Alizée, tu sais très bien que je ne t'en veux déjà plus. C'est une nouvelle vie qui va commencer pour nous.
Papa pose sa main sur la mienne. Ça à presque l'air vrai. Alors que toute la scène est artificiel et absurde. Mais j'ai réussi.
— Aller va, monte faire tes valises. Prend seulement le nécessaire ok? Pas besoin de vêtement.
— Pourquoi?
— Là-bas, on portera des combinaisons. Demain, nous avons une visio pour nous parler de notre nouveau mode de vie.
Je ne réponds pas et m'empresse de monter dans ma chambre, car je sens que je vais pleurer. Tout à coup, tout devient plus concret. Comme si je n'avait pas vraiment accepté jusque maintenant le fait que je passait les dernières heures de ma vie avec mon père. Les derniers mois de ma vie. Dire que le nombre d'inspiration que je suis en train de faire sont compté. Car la Terre à décider de s'arrêter de nous faire vivre des millions d'années plus tôt que prévu. Que tout ce que j'ai connu jusqu'à maintenant vont se perdre dans la grandeur de l'espace, perdu dans l'infini de l'univers.
Trois coups résonnent sur la porte. Je devine que c'est Marie, car il n'y a qu'elle qui entre dans ma chambre hormis moi.
— Entre...
Marie ouvre la porte et me voit dans mon lit. Elle n'a pas besoin d'être ma mère pour savoir que ça ne va pas. Elle s'assoit à côté de moi et caresse mes cheveux.
— Ton père t'as dit?
— Oui. Tu le savais toi?
— Je l'ai entendu au téléphone il y a quelques nuits.
— C'est tellement injuste, tellement!
— Je sais...la vie est injuste. J'ai bien compris que j'allais mourir et que je n'avais pas d'issue. Moi, il ne me reste que sept mois, mais je les vivrais heureuse avec ma fille. Toi, tu as encore toute ta vie devant toi. C'est drôle, car petite, je revais 'être astronaute, me dit-elle, L'espace, ça à toujours été mon rêve. Tu ne sais pas combien ça me fait plaisir que ce soit toi qui y aille. Je n'ai pas réalisé mon rêve, mais c'est comme ma fille qui le réalise.
Mon cœur se réchauffe un peu quand elle me dit que je suis comme sa fille. Mais je crois qu'au fond, j'espérais qu'elle me dise que c'était des conneries et que mon père m'avait raconté n'importe quoi, même si c'était faux. Juste histoire de réussir à dormir un peu la nuit.
— Mais je ne veux pas y aller! Prends ma place avec ta fille, je te la laisse. Vous la méritez tellement plus que moi!
— Tu sais très bien que ce n'est pas possible. Alizée, regarde moi. C'est ta seule chance. Ne fais pas de bêtises veux-tu? Envole toi encore plus haut que je m'envolerais. Je serais près de toi dans sept mois, quand je mourrais. Il vaut mieux souffrir de regret pour quelque chose qu'on a fait que de remords pour quelques chose qu'on n'a pas fait. Si tu ne monte pas dans ce vaisseau, qui te dis que dans trois mois tu ne te mordras pas les doigts pour ne pas avoir monter dans ce vaisseau? J'ai le triple de ton age, et j'ai vécu des tas de chose. La mort ne me fait pas peur, mais la tienne et celle de ma fille me fait terriblement mort. Je ne pas vous sauver toute les deux, mais je peux au moins te sauver toi. Moi, je passerais mes derniers mois avec ma fille.
La simple idée que Marie ne soit plus là un jour sur cette Terre à veiller sur les gens me donne la nausée. Mais aussi, je ne peux pas m'empêcher de lui en vouloir de ne pas me comprendre. J'aurais voulu qu'au moins une personne sache que je suis pas la fille qui va lacher sa détermination pour vivre une vie qu'elle ne veut pas.
Marie cherche au fond de mon regard pour voir à quoi je pense, elle soupire puis me demande :
— Tu sais Alizée, je te connais trop bien pour savoir que tu vas tout faire pour ne pas y aller. Vas-y, pour moi. C'est la dernière faveur que je demande avant de mourir. Dis au revoir à celui que tu vois la nuit, et monte dans ce vaisseau.
Je ne sais pas quoi dire. Je ne veux pas faire de peine à Marie, jamais.
— Comme tu sais que je vois quelqu'un? dis-je en essayant de détourner la conversation.
— Je te vois faire des allers retours le nuit. Maintenant promet moi.
— Je...je te le promet.
J'ai encore menti. Encore.
— Merci Alizée. Maintenant va voir ce garçon et dit lui au revoir, il comprendra s' il t'aime. Ça ira, soit forte. Je te couvre, mais dépêche toi avant que ton père décide de venir te voir.
Non, Loïs ne comprendra pas. Car Marie ne sait pas que je cache mon identité à la personne que j'aime le plus au monde. Qu'il ne connais rien de moi, et que si je lui dit qui je suis réellement, non, il ne comprendra pas. Mais je n'en dit rien, remercie la seule femme présente dans ma vie et m'éclipse.
C'est la première fois que je sors en secret en plein jour. Tout est si différent. Ce ne sont plus des groupes de jeunes qui sortent s'éclater que je vois dans la rue. Il y a aussi des couples, des enfants qui courent sous l'œil inquiet de leurs parents. Mais même si je vois plus de gens que d'habitude, je devine que pour un été, les rues sont plus vides que d'habitude. A cause de cette seconde de moins.
J'arrive devant chez Loïs, mais je ne vais pas lui dire au revoir, non. Je vais lui dire qu'on pourra s'installer ensemble dans trois jours. Quand mon père sera dans l'espace et moi sur Terre. Je lui dirais seulement que je pars de ma colocation pour m'installer avec lui. Oui, c'est bien, ça! Je resterais avec lui sept mois, juste avant que... que se soit la fin.
Loïs dort encore quand j'entre dans la chambre. Il émerge doucement du sommeil.
— Alizée ? Qu'est-ce que tu fais ici à cette heure là ? Tu m'as fait peur!
— Désolé, je sais que c'est la première fois que je viens le jour. Mais j''ai repensé à ce qu'on s'était dit hier. J'ai envie d'emménager avec toi.
Je prends sur moi pour ne pas tout avouer, ça serait tellement plus simple, tellement mieux que d'avoir constamment peur de me perdre dans mes mensonges.
— Et ta coloc?
— On s'est mis d'accord, elle garde l'appartement et je...j'ai acheté une maison grâce à mon travail. Je veux vivre avec toi.
— Putain Alizé, qu'est-ce que je ferais sans toi ? Merci beaucoup. Je peux venir m'installer quand?
— Dans trois jours. Fais tes valises!
— Pourquoi pas maintenant, ça ne serait pas génial?
— Pas... Pour l'instant je peux pas mais dans trois jour je viens te chercher et on y va.
— Aller, pourquoi tu ne peux pas maintenant? J'ai à peine d'affaires à prendre et on s'y installe!
— Je n'ai pas encore fait mes cartons .
— Amène-moi dans ton appartement, je vais t'aider.
— Non, vraiment. Je ne peux pas maintenant.
Loïs lève la voix d'un coup, sans que je m'y attende.
— Mais qu'est ce qui cloche chez toi Alizé?! Qu'est ce que tu me cache?! Tu viens chez moi que la nuit, tu ne veux pas me dire où tu habites!
Je cherche mes mots, mais je n'ai aucune excuse. Aucune. J'ai trop menti. C'est ce que je croyais faire de mieux. Et là encore, j'ai échoué.
— Calme toi, je, c'est juste que je n'ai pas le temps le jour, je travaille beaucoup. Et ma colocataire n'est vraiment pas sympa. J'ai pas envie que tu la vois...
— Je ne te crois plus! Dis moi la vérité, merde! Je vaux mieux que ça!
Je cherche autour de moi, comme si quelque chose ou quelqu'un ou quelque chose allait me donner une réponse à ma galère. Mais évidemment, il n'y a que moi dans cette merde. C'est pourquoi je lâche la vérité, car je ne me sens plus capable d'ajouter une couche de mensonge.
— Je suis la fille de Monsieur Welvove.
Un moment de silence interminable remplit la pièce. Loïs me regarde figé. Ses yeux passent de la colère à la haine.
— PUTAIN ALIZEE !! TU ES LA FILLE DE CE CONNARD! COMMENT J'AI PU TE FAIRE CONFIANCE! TU M'AS MENTIS TOUT CE TEMPS!
Je n'aurais jamais cru qu'il aurait réagi comme ça. Certes, qu'il soit fâché, oui. Mais de là à me balancer ces mots de cette façon...Les larmes montent, mais je les ravale. Je regarde mes pieds, car c'est tout ce que je peux faire pour le moment.
— Désolé...
— DÉSOLÉ?? MAIS C'EST AVANT QU'IL FALLAIT ÊTRE DÉSOLÉ ALIZEE!
Je reste muette. Si je parle ? Il se fâchera. Je pense attendre qu'il se calme. Quoi que sera le temps que ça prendra. Il commence à marcher de long en large dans la pièce et à marmonner. Je suis ses pas du regard, priant pour qu'il s'excuse, me prenne dans ses bras et qu'il me dise que ce n'est pas grave. Qu'il m'aime pour ce que je suis et pas pour mon mon entourage. Il s'arrête enfin de ruminer et plante son regard dans le mien.
— Pourquoi tu ne me l'as pas dit avant?
— Je pense que je ne voulais pas que tu me vois comme la fille d'un connard. Je voulais juste que tu sois là pour moi, et pas pour mon fric ou mon parcours.
— Pourquoi dans trois jours? Pourquoi dans trois jours tu vas t'installer avec moi et pas avant?
— Parce que mon père s'en va dans trois jours. Moi je reste.
— S'en aller où ?
— Il fuit cette planète. Il prend un vaisseau pour un voyage d'une dizaine de mois pour une planète habitable pour l'homme. Il est trop lâche pour rester ici parce que...parce que cette planète aura tellement de catastrophes naturelles que, que dans sept mois environ, dis-je en cherchant mes mots, on sera tous morts.
C'est la première fois que je le dit réellement à voix haute. Mon souffle se coupe, comme il se coupera dans sept mois, et attend une réaction de Loïs.
— QUOI ? C'est pas vrai,tu crois à ces conneries?!
— Loïs calme toi... ce ne sont pas des conneries, je le crains. Moi aussi j'aurais voulu que ce soit faux, sincèrement.
Loïs se décompose. Son regard se perd dans le vide. Il a peur.
— Et, et toi? Tu ne pars pas avec ton connard de père?
— Non. Je veux rester avec toi.
En ce moment même, cette foutu seconde de moins ne m'importe le moins du monde. Je veux juste que Loïs me pardonne et accepte de rester avec moi. Mais il me laisse avec cette réponse:
— Bon, écoute Alizée. Je, j'ai besoin de remettre de l'ordre dans ma tête tu comprends? Parce que là, il y a des choses que je n'arrive pas à comprendre. Tu es en train de me dire que le président laisse aux gros connards de riches la vie en leurs proposant un exil sur une autre planète, alors qu'il devrait donner le choix de la vie à des gens honnêtes. Sans compter que le monde cache notre propre mort alors que ça nous concerne, et qu'il préfère tout dire aux riches car ils sont privilégiés? Tu viens de m'avouer qu'il ne me restait même pas un an à vivre, que tu es la fille de...enfin bref. J'ai besoin de temps. Reviens dans trois jours, ok?
Je n'ai rien dit. J'ai accepté sa demande et fait demi-tour. La dernière image que j'eu en refermant la porte, c'est Loïs laisser couler une larme sur sa joue.
Même si c'est seulement sept mois, je me promet que ça sera les meilleurs de ma vie.
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