9. Ninth bullet

Jimin entra dans la suite et déposa le bagage de Jungkook sur le lit avant de se retourner vers lui.

Son regard engloba sa silhouette habillée d'un jogging, qu'il portait bas sur ses hanches, et d'un t-shirt large. Sa démarche était encore hésitante et son corps légèrement déstabilisé à cause de son bras en écharpe.

Ses yeux remontèrent jusqu'à son visage qui portait les marques de sa souffrance et de sa fatigue.

Il serra les poings en le voyant avancer d'un air las et prendre place dans un fauteuil club.

Après avoir détourné son regard du garde du corps, il ouvrit le sac qu'il venait de poser pour en sortir plusieurs boîtes de pilules. Il les posa sur le plateau du guéridon près d'une carafe d'eau, puis se dirigea vers la porte.

- Repose-toi. On se retrouve dans le salon du premier étage dans deux heures.

- Et c'est tout ? demanda Jungkook.

Jimin, qui avait déjà la main sur la poignée de la porte, répondit sans se retourner.

- Je n'ai pas de nouvelles informations. Woosik nous dira ce qu'il a appris tout à l'heure.

- Je ne te parle pas de ça, Jimin. Je sais très bien que si tu avais eu des nouvelles de Taehyung, tu me l'aurais dit.

- Alors quoi ?

Jungkook se leva difficilement du fauteuil en prenant appui sur son bras valide.

- Je te parle de nous. Je suis resté à l'hôpital pendant une semaine et je t'ai à peine vu. Tu te moques de ce qu'il peut m'arriver ?

Jimin eut un soupir et lâcha la poignée pour se retourner. Il mit les mains dans les poches de son pantalon et planta son regard dans celui de son amant.

- Je n'ai pas le temps pour une énième crise de ta part, Jungkook. Je te rappelle que mon frère a disparu et que j'ai autre chose à foutre que de gérer tes états d'âme. J'ai une entreprise à faire tourner, des actionnaires à rassurer, des gens sous ma responsabilité.

- Tu crois que je ne le sais pas ? Tu me penses assez idiot pour ne pas réaliser le cataclysme qu'à provoquer la disparition de ton frère ? Je ne te parle pas de tes responsabilités de vice-président, je te parle de nous. Je faillis crever et tu as l'air de t'en foutre.

- Mais tu es vivant que je sache, alors arrête de pleurnicher.

- Tu n'es qu'un salopard sans cœur et je te déteste, cracha Jungkook avec fureur.

Jimin s'avança vers lui et sortit une de ses mains de ses poches pour l'attraper par le col de son t-shirt et le tirer vers lui.

- Si tu me détestais, je ne sentirais pas ton corps se tendre à chaque fois que je t'approche, murmura-t-il près de son oreille avant de passer la langue sur son lobe, lui tirant des frissons.

Ses lèvres se posèrent sur sa gorge et y tracèrent un chemin de feu.

Jungkook émit un soupir malgré sa colère et posa sa main valide sur le torse de Jimin qui eut un sourire contre sa peau. Il se recula légèrement et approcha ses lèvres de la bouche légèrement entrouverte du garde du corps.

Il lécha sa lippe inférieure et sentit avec satisfaction les tremblements qui l'agitaient puis se recula avec un claquement de langue désapprobateur quand le jeune homme essaya de lui voler un baiser.

Il relâcha le tissu qu'il avait froissé dans sa main et se détourna en ignorant le regard implorant de son amant.

- Deux heures, répéta-t-il avant de sortir.

Jungkook regarda la porte close et se laissa retomber dans le fauteuil avec un gémissement de douleur.

Il souffrait physiquement comme psychologiquement.

Cela faisait une semaine aujourd'hui que Taehyung avait disparu, une semaine que son corps avait été meurtri dans sa chair, une semaine que Jimin l'ignorait royalement.

Lui reprochait-il ce qu'il s'était passé ou n'était-il qu'un monstre sans cœur qui n'en avait rien à faire de lui ?

Il ne savait jamais que penser de son comportement. Il refusait toutes ses marques de tendresse, tous ses mots d'amour et pourtant il le sentait si proche parfois quand ses mains caressaient son corps et qu'il le prenait encore et encore jusqu'à briser tout ce qui n'était pas lui.

Park Jimin portait deux masques, celui de la tendresse de ses gestes et celui de la froideur de ses paroles.

Il se laissa aller contre le dossier du fauteuil et ferma les yeux.

Qui était réellement l'homme dont il était tombé amoureux ?

Le salon dans lequel ils se trouvaient était décoré dans un style art déco qui était en complet décalage avec l'image de l'hôtel.

Jimin avait pris place dans le canapé de cuir brun, les jambes croisées, alors que Jungkook s'était enfoncé dans un fauteuil.

Ils n'avaient pas échangé une parole depuis leur arrivée.

Ils regardaient Woosik qui faisait les cent pas dans la pièce et qui ne semblait pas conscient de la tension qui régnait entre eux.

- J'ai enfin réussi à rencontrer le chef de la Police locale, à croire qu'il s'était planqué toute la semaine pour ne pas me recevoir.

- Qu'est-ce que tu as appris ? demanda Jimin.

- Le laïus classique sur les exactions du Cartel du Cardo dont le chef n'a jamais pu être identifié à ce jour. Il nous présente toutes ses excuses pour le désagrément que nous avons subi, mais ne peut rien faire. Il n'a pas les ressources policières nécessaires pour intervenir. D'après lui, la majorité des membres de la Police locale sont à la botte de cet illustre inconnu qui dirige le Cartel.

- Et Alvares ?

- Même chose, je me suis pointé au ministère et à force de faire le pied de grue devant la porte, j'ai pu être reçu. Même rengaine, excuses et tout le tralala. Le type a changé de couleur quand je lui ai demandé où était Alvares. Il m'a dit qu'il n'était réapparu depuis le jour de l'enlèvement.

- Tu penses qu'il ment ? interrogea Jungkook.

Woosik attrapa un verre sur le guéridon et se servit une rasade de whisky qu'il but cul sec.

- Aucune idée, mais de toute façon, pour l'image du ministère, le mec n'allait pas me dire que Alvares est en cheville avec le Cartel. À l'heure qu'il est, on ne sait pas si c'était un traître qui a vendu l'itinéraire ou s'il gît dans un fossé quelconque avec une balle dans la tête.

Jimin se redressa et posa ses coudes sur ses cuisses.

- Donc en clair, on ne sait rien ? Pas moyen de savoir qui a enlevé Taehyung et où ils l'ont emmené.

Woosik acquiesça.

- Ce que je ne comprends pas, c'est pourquoi on n'a pas encore reçu de demande de rançon. Ça fait déjà une semaine, PUTAIN ! hurla-t-il avant de balancer son verre dans la cheminée, à bout de nerfs.
Répète-moi ce qu'il s'est passé, demanda-t-il à Jungkook en se retournant vers lui.

Le garde du corps soupira et se leva pour ramasser les débris de verre qui jonchaient le sol de sa main valide.

- Je vous l'ai déjà raconté une dizaine de fois.

- Et bien répète-le encore ! On est peut-être passé à côté de quelque chose.

Jungkook se redressa, après avoir poussé du pied tous les éclats dans l'âtre, et retourna s'asseoir.

- Nous étions en train de discuter avec Taehyung. Je me souviens m'être fait la réflexion qu'on ne voyait plus les phares de votre voiture, mais pris dans la conversation, je n'y ai plus prêté attention.

- Cela devait être particulièrement prenant comme conversation, commenta Jimin, sarcastique.

Jungkook lui jeta un regard noir et continua.

- On a senti un choc latéral, un véhicule nous a foncé dessus. Taehyung et moi avons été projetés contre la vitre. Je me souviens qu'elle a explosé. J'étais à moitié dans le coaltar. Mon épaule était déboitée et j'avais la hanche qui pissait le sang. Il y avait pas mal de monde autour de nous, mais ils portaient des cagoules et ma vision était floue. Je me rappelle avoir entendu un bruit de tôle qui se déchirait.
Ils ont dû ouvrir la portière de Taehyung avec un appareil, peut-être des mâchoires pneumatiques. J'ai tourné la tête et j'ai sorti tant bien que mal mon arme.
Taehyung avait du sang sur le visage, les types ont ouvert la porte et l'ont extirpé de là avant de lui mettre une cagoule sur la tête. J'ai hurlé son nom et j'ai tiré. Je ne sais pas si j'en ai touché un. Après, j'ai beau fouiller ma mémoire, rien ne me revient à part mon réveil à l'hôpital.

- Donc, dit Woosik en recommençant à faire les cent pas. Ils ont bloqué notre voiture avec ce camion de ferme intentionnellement. Le but était de nous isoler pour qu'ils puissent intervenir sur le véhicule qui vous transportait.

- On a retrouvé les gardes armés qui étaient dans la voiture d'Alvares ? demanda Jimin.

- Rien, Nada, ils se sont volatilisés en même temps que lui. Les seuls que l'on a pu interroger étaient les deux qui étaient dans la voiture de Tae et Jungkook. Ils ont juré n'être au courant de rien, l'un est encore hospitalisé, car il a eu le bassin écrasé par la colonne de direction, l'autre a été relâché par la police.
On n'a rien, absolument rien et les autorités locales ont l'air plutôt frileuses à l'idée de nous aider.

- Et le Consulat ? intervint Jungkook, qui commençait à avoir mal à la tête.

- Ils disent qu'il faut qu'on attende, rien ne pourra être fait tant que nous n'aurons pas reçu une demande de rançon, si on la reçoit un jour et si c'est bien le but de tout cela. Le Consul m'a bien fait comprendre qu'il n'était pas question de lancer des recherches dans la jungle sans avoir ne serait qu'une idée de la région dans laquelle ils ont amené Taehyung. Il m'a laissé entendre qu'avec l'argent que possédait le groupe SPEAR, c'était plutôt à nous de financer une expédition. Il a bien insisté sur le fait qu'on devait s'attendre à ce genre de désagrément en voulant installer une usine dans cette partie du monde. Je l'aurais buté ce connard avec son ton condescendant.

- Et maintenant, qu'est-ce qu'on fait ? demanda Jungkook.

Les deux hommes se tournèrent vers Jimin.

Le vice-président se leva et se dirigea vers la console pour se servir un whisky à son tour.

- On attend.

- Comment ça on attend ? Ton frère est prisonnier quelque part et tu veux qu'on reste les bras croisés à siroter du whisky et à profiter de la piscine ? Hurla Woosik.

Jimin se tourna vers lui, une lueur dangereuse dans le regard.

- Tu vois une autre solution ? On ne sait pas où il est, on ne sait même pas s'il est encore vivant. Même si j'engage des mercenaires, je les envoie où ? Il y a des milliers de kilomètres carrés à couvrir dans cette jungle.

Il posa son verre brutalement sur le bois.

- Sur ce, j'ai une entreprise à diriger, dit-il en sortant de la pièce.

- Ce type a un sang-froid qui dépasse l'entendement, murmura Woosik avant de sortir à son tour.

Jungkook resta assis dans son fauteuil, pensif.

Les arguments de Jimin se tenaient, ils pouvaient difficilement lancer une opération de sauvetage dans ces conditions, pourtant la réponse de son amant ne lui plaisait guère.

Lui, Jeon Jungkook, n'avait jamais été homme à attendre sans rien faire.

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