Il faisait nuit. Il faisait froid. La buée s'échappait d'entre ses lèvres gercées. Ses pas étaient rapides. Il avait merdé. 

Et, en beauté en plus. 

Ses doigts étaient crispés mais il refusait de les mettre dans la poche de son sweat. Ses cheveux lui collaient à la peau. Son jean retombait négligemment sur ses converses couvertes de boue ... et de sang. 

Il avait vraiment merdé. 
Encore. 

Les ruelles autour de lui étaient désertes, légèrement éclairées par les réverbères gelés. Il croisa sur son chemin un homme plus âgé, titubant à chaque nouveau pas qu'il entamait. 

Pauvre type. Il finirait sûrement comme ça. 

Il secoua la tête et accéléra le pas. Son souffle s'emballait, son pouls ne tenait pas la route. Il devait retourner en cours le lendemain. Il ne pouvait pas. 

Il ne pouvait, vraiment pas. 

Il dégagea quelques mèches corbeau de son visage.

- Putain de cheveux. 

Il devait les couper, mais n'avait jamais eu le temps d'aller voir qui que ce soit pour le faire. Il cogna dans un caillou qui valdingua quelques mètres plus loin. Il grogna. Les plis de sa converse droite venaient de lâcher et il avait désormais un trou de part et d'autre de sa basket. Il leva les yeux, une jeune femme allait le croiser dans une trentaine de mètres. 

Il la fixa. 

"Ne sois pas flippant Jeffrey." 

Il était couvert de sang, comment ne pas être flippant ? 

Il avança. La fille le remarqua au loin. Elle portait une jupe. Elle tira dessus pour la baisser. Il baissa la tête, fixant ses pieds. Il changea de trottoir avant qu'ils ne se croisent. Il la sentie accélérer le pas pour le dépasser le plus vite possible, malgré la chaussée qui les séparaient. 

Il se mit à courir, vite. Son corps eu du mal à prendre le rythme. Il toussa à plusieurs reprises. Ses yeux le brulait et ses chevilles encaissaient mal les chocs imposés par la chaussée sous ses pieds. Il commençait à avoir chaud, et ses poumons se crispaient à force de recevoir l'air gelé qu'il inspirait. 

Il s'arrêta devant une porte ordinaire, enfoncée dans un mur sur la gauche. Il sorti les clefs en tremblant, cherchant a reprendre son souffle. Le sang commençait a sécher sur ses vêtements. Il enfonça la poignée dès qu'il pu et s'engouffra dans l'ouverture. Il claqua la porte derrière lui et s'effondra au sol. Sa poitrine se soulevait rapidement, et sa bouche restait entre-ouverte. 

Bordel. 

Tout était allé vite. Trop vite. Le mec en face venait pour lui casser la gueule. Encore. Il ne s'était pas laissé faire. 

Il avait décidé qu'il ne se laisserai plus faire. 

Il avait changé. 

Tout ce sang sur lui l'avait changé. Et il n'en avait encore aucune idée. 

Les traumatismes mènent a la folie. 

C'était ainsi.