Chapitre 13 : MARZEL ET FLAMEL

Il restèrent à Sian pendant dix jours. 

Un jour venu, Leno Tampiar décida qu'il était temps de partir. Lorsqu'il annonça la nouvelle à Soska, celui-ci dit :

— Il vaut mieux que l'on vous raccompagne ou sinon vous risquez d'aller passer des séjours à Sheelagh, ou autre part, et jamais vous ne finirez votre voyage. 

— Tu as raison, approuva M. Tampiar. Allons demander son avis à Shan. 

Tous deux partirent pour le palais du Seigneur, accompagné de Karel. 

Lorsqu'ils annoncèrent leur requête à Shan, celui-ci accepta. 

— Et c'est Sozuk qui vous accompagnera ! scanda-t-il en accrochant une aquarelle sur le mur. 

— Q... quoi ?! s'exclama Soska. Je m'appelle Soska ! Et puis, j'ai des soldats, moi, et tu m'as déjà dit d'aller patrouiller dans le nord-ouest de la Forêt ! Je peux pas faire les deux en même temps, moi !

— Cool ! s'écria Shan. N'empêche que t'y iras quand même parce que c'est moi qui l'ai décidé. Et tes soldats, ils peuvent se débrouiller tous seuls, ils ont plus quatre ans ! À moins qu'il y ait des children dans tes rangs ?

— Hé, Shan ! s'exclama Karel. Vous...

— Non mais en fait avec moi c'est « tu », très clairement, coupa Shan. 

— D'acc' ! Mais du coup t'es sûr que t'es un bon Seigneur ?

— Karel ! le rabroua M. Tampiar. 

— Laisse, laisse, Leno, fit Shan. Et toi, Karel; j'en sais rien si je suis un bon Seigneur. Tout ce qui m'importe, c'est le fric ! Comme ça tu peux t'acheter des trucs pour draw. Ça me fait penser que je n'ai pas le paquet de fusains dernier cri. Je crois que c'est assez cher... Au pire je le commande à la Noël... De toute façon j'ai juste à faire hocus pocus et ça marche... je ne dois pas être les pire Seigneur qui soit, sinon je serais dead depuis a very long time, ha ha !

Il fit une pause. 

— Il est où crénom de Solen ? SOLEN !

Le majordome ouvrit la porte. 

— Oui ?

— Un sixième de concombre tranché en rondelles d'un nombre pair, deux tranches de pain à l'origan, sept tranches de saumon fumé de cinq par cinq virgule cinq (et tu enlèves tout le gris, c'est pas bon), neuf petites pommes de terre sautées, un thé vert avec de l'eau bouillie à soixante-dix-neuf degrés Celsius, et un verre de dix-sept centilitres où tu mettras quinze centilitres de citronnade.

— C'est bien mais... l'eau ça ne bout pas à soixante-dix-neuf degrés, dit Solen. 

— On s'en fiche, fit Shan. 

— Beh oui mais du coup je fais quoi ? L'eau doit bouillir ou être à soixante-dix-neuf degrés ? demanda Solen. 

— Mais tu fais bouillir cette crénom de water ! s'exclama Shan. Non mais le thé ça se fait avec de l'eau bouillante, tu tourne pas le robinet sur « eau chaude » !Et tu mets pas non plus de l'ice tea dans le micro-ondes. 

— D'accord, d'accord ! s'écria Solen Nice, comme qui dirait. 

Il s'en alla en faisant un petit signe de la main. 

— Bon, on en était où, god ? demanda Shan. Ah oui ! Au fait, si vous ne savez pas quoi m'offrir à Noël, il y a la boîte de fusains dernière génération. 

— C'est quoi, Noël ? demanda Soska. Et c'est quand ?

— C'est le 25 décembre, expliqua Shan. 

— On est un peu le 15 janvier, dit Soska. 

— À mon birthday, alors, dit Shan. 

— C'est dans cinq mois, fit remarquer Soska. 

— On s'en fiche ! claironna Shan. 

Il fit une nouvelle pause. 

— De quoi on parlait, déjà ? 

— Vous vouliez que j'accompagne Leno tampiar et ses amis dans leur voyage, grommela Soska. 

— Ah ! Oui. Bon, du coup, le départ est prévu pour quand ?

— Demain, répondit Leno Tampiar. 

— Okay, acquiesça Shan. Vous pouvez partir, maintenant ? Je suis en train de faire un dessin V. I. P. 

— C'est quoi un dessin « vieille pie » ? demanda Karel. 

— Ça suffit, dit Leno, arrête de poser des questions. 

— Ça veut dire Very Important Person, expliqua Shan. 

— Mais comment un dessin peut-il être « vieille pie » ? interrogea Karel. 

— Venez, dit Soska. 

Et ils s'en allèrent. Quand ils arrivèrent à leur auberge, Le Porcelet Flamboyant, Pjotr leur sauta dessus. 

— Alors ? Vous avez eu son aval ? demanda-t-il. 

— Arrête d'utiliser des mots qu'on connaît pas, dit Angela. 

— C'est quoi un aval ? s'enquit Karel. 

— C'est comme un accord, expliqua Irwin. 

— C'est quoi un accord ?

— Tais-toi, Karel, fit Leno. 

— Pourquoi ? Vous préférez d'autres questions ? Qu'est-ce qui est jaune et qui attend ?

— Jonathan, répliqua Angela. 

— Tes dents ! Ha ha !

— Arrête de rigoler tout seul, Karel, dit Pjotr. 

— Vous pouvez parler moins fort ? demanda Leno. 

— Oui oui ! s'écria Karel.

*

Le lendemain, ils partirent vers midi. Soska était accompagné de deux soldats, Sohol et Saaim. Le soir, ils établirent leur campement dans une clairière. Soska prit le premier tour de garde. 

Irwin se coucha en dernier. Juste avant, il alluma un feu. Il se souvenait de comment ses parents faisaient dans le poêle. Il fabriqua une montagne de petit bois et logea un morceau de champignon à l'intérieur. Il craqua une allumette et le bois s'embrasa. Les flammes montèrent en crépitant, projetant des étincelles qu'Irwin éteignait en marchant dessus. 

Soudain, son regard fut attiré par les flammes. Il distinguait quelque chose. C'était comme si elles formaient des yeux. 

Irwin respira profondément l'agréable senteur que dégageait le bois brûlé. Il reconnaissait à présent ces yeux oranges. 

Il entendit soudain un mot, un seul. 

VIENS !

*

Le lendemain, ils arrivèrent à Héphaïst en milieu d'après-midi. 

Héphaïst était un énorme château fort gris anthracite entouré de campagnes. Les murs de la ville semblaient avoir été construits dans du métal. 

Il y avait des échelles de bois ainsi que des échafaudages à l'intérieur de grands fossés où l'on apercevait que la lave tout au fond. Des êtres petits aux oreilles en pointes forgeaient des armes faîtes dans le métal que celui des bâtiments. 

— Bienvenue en Isengard ! s'écria Karel en écartant les bras.

— Tais-toi Kar..., commença Angela.

— Arrête, coupa Pjotr, il a raison. 

— Bientôt on va voir des Uruk-Hai naître à partir de vomi,  continua Karel. 

— Beurk, Karel, tu me dégoûtes ! s'exclama Irwin.

Ils avancèrent un peu plus près d'Héphaïst. Du haut de la barbacane, un homme banda son arc vers eux en s'écriant :

— Qui va là ?

— C'est moi, Leno Tampiar !

L'homme abaissa son arc et plaça ses mains en porte-voix. 

— Levez la herse ! hurla-t-il. 

M. Tampiar, Irwin, Karel, Angela et Pjotr purent ainsi pénétrer dans la ville. En passant sur le pont-levis, ils aperçurent les forgerons tout en bas dans les fosses.

— Ce sont des gnomes, expliqua Leno Tampiar. Héphaïst est la seule ville du monde où les gnomes sont plus nombreux que les humains, à part peut-être à Laetoria, une ville du Royaume des Elfes où quatre-vingt pour cent de la population est représentée par des gnomes. 

Ils entrèrent alors dans la ville. Il y avait en effet beaucoup de gnomes. Ils semblaient mesurer en moyenne un mètre cinquante, et ils arboraient tous des oreilles pointues. 

— Ils ressemblent beaucoup à des nains, ce qui n'a rien à voir avec un quelconque croisement, expliqua Leno Tampiar. 

— Les nains ? s'enthousiasma Karel. 

— Ils ont disparu, dit Leno, ne rêve pas trop. Mais avant, c'étaient des forgerons dans les fosses devant les remparts. 

Soudain, ils croisèrent un gnome, plutôt grand, qui portait un mégaphone et un parchemin enroulé dans ses mains. 

— Bonjour ! dit Leno. 

Le gnome le regarda d'un air suspicieux. 

— Bonjour ? répéta-t-il. Trouvez-vous sincèrement que ce soit un bon jour ? Regardez le temps. Oh ! À moins que vous ne me souhaitiez un bon jour ?

— Euh... oui, c'est cela, répondit M. Tampiar, comme pris au dépourvu. 

— Bien ! reprit le gnome en esquissant un sourire. On m'appelle Denoël, et moi j'aime à m'appeler « je ». Je suis un héraut. Et vous ?

— Je suis Leno Tampiar, et voici Irwin, Karel, Angela et Pjotr. 

— Ah ! Leno Tampiar, j'ai entendu parler de vous ! Auriez-vous besoin d'aide ?

— Nous souhaiterions parler à Marzel et Flamel. 

— Parfait ! Suivez-moi, ce doit être bigrement important. 

Ils se dirigèrent vers le donjon. Des soldats se tenaient devant l'entrée. Denoël s'approcha.

— Je vous souhaite le bonjour ! dit le héraut. Voici Leno Tampiar et ses amis. Ils souhaitent voir Marzel et Flamel. 

L'un des soldats acquiesça et hurla :

— Rréphléchitocamanus !

Aussitôt, un homme arriva. 

— Mais genre Rréphléchitocamanus c'est un prénom ? demanda Karel.

— Annonce la présence de ces étrange gens à Flamel, dit le soldat. 

Rréphléchitocamanus opina et s'éclipsa. Il revint deux secondes plus tard. 

— Ils peuvent entrer céant, par Rwamanakachouët, dit Rréphléchitocamanus. 

— C'est qui, Rwamanakatruc ? s'enquit Karel. 

— Ce type vient de Grebua, expliqua Denoël. Ils vénéraient des dieux bizarres, tels que Akayamotolakouëtmichoulett. 

— On dit Akahayamatolakouïtmichoulatt, rétorqua Rréphléchitocamanus, par Zarbanoulatchiya.  

— Oui, bon, bref, j'ai attaché des syllabes entre elles et ça a donné ça, fit Denoël. 

Rréphléchitocamanus l'ignora. 

— Suivez-moi, dit-il. 

Il pénétra dans le donjon et Leno Tampiar, Irwin Illif, Karel, Angela et Pjotr lui emboîtèrent le pas.
Rréphléchitocamanus était un homme d'environ trente ans, très brun, avec le visage couvert de tâches de son.

Soudain, il ouvrit une porte et s'effaça pour laisser passer Irwin et les autres. 

À l'intérieur de la salle, un homme et une femme étaient penchés sur une carte. Ils levèrent la tête aussitôt à l'entrée des visiteurs. 

Marzel était longue, fine, élancée et musclée. Ses yeux étaient bleu-gris clair, et ses cheveux... Ce n'étaient pas des cheveux, mais de l'eau. De l'eau, de la vraie, pure et naturelle qui descendait tel une cascade dans son dos. 

Flamel avait les yeux pareils à des braises, et sur son crâne s'élevaient des flammes. Son visage était jeune et cordial. 

— Bienvenue, dit-il.

*

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