45 • DOUBT
davia sters
Le diable. Il est là, tout près. Il me scrute de ses yeux saignants. Il me nargue, encore, me montrant ses griffes acérées prêtes à me trancher la gorge. Je suis paralysée, debout en plein milieu de cette pièce, j'ai peur. Le diable est accroupi à côté d'un corps inerte à terre, osant toucher son visage avec sa griffe empoisonnée.
- Ne le touche pas, soufflé-je en faisant un pas tremblant.
Comment ose t-il ? Le diable aborde un sourire malsain et continue son petit manège sous mon nez, alors que je tremble de plus en plus.
- Ne le touche pas ! hurlé-je alors que les premières larmes roulent sur mes joues pales.
Personne ne touche à mon grand-père. Alors que j'allais avancer, en une demie-seconde effrayante, le diable est près de moi, ses orbes rouges sang me fixant intensément. Ses deux grandes ailes se déploient alors et j'essaie de me débattre, criant, hurlant de peur et d'effroi, mais il m'emprisonne fermement et refuse de me laisser partir. Le lac, les vagues sombres, je coule, encore, encore. Il m'entraîne avec lui. Je dois respirer, oh mon dieu, faites que quelqu'un m'aide, faites que...
- Davia !
Je me réveille en sursaut, le corps en nage et l'esprit tourmenté. J'ai du mal à respirer, jamais je n'ai fais un cauchemar de ce genre, je suis terrifiée. Ça me rappelle étant petite, quand je faisais un mauvais rêve et que papa venait dans ma chambre pour me lire une histoire. Je tourne la tête et tombe nez à nez avec Chris, l'air inquiet.
- C'est rien, juste un cauchemar chérie, chuchote t-il.
- Pourquoi tu abordes toujours ce triste air quand tu es avec moi ? Tu es toujours inquiet pour moi, c'est mal, soufflé-je en le regardant tristement. Je ne veux pas que tu sois triste ou inquiet.
Il se contente de me sourire et embrasse mon front.
- Je ne suis pas triste quand je suis avec toi Davia. Essaie de te rendormir, ce n'était qu'un sale rêve, je suis là. Tout va bien.
- Ce n'est pas juste pour toi, tu n'arrêtes pas de me réconforter mais moi je suis incapable de faire quelque chose pour toi à part t'attirer des ennuis, je suis désolée Chris...
Alors que je me recouche dans ce lit inconfortable de ce motel pourri aux côtés de Chris, celui-ci soupire, s'appuyant sur son coude gauche.
- Tu es fatiguée, c'est normal, après ce qu'on a fait tout à l'heure, ricane t-il.
J'arrive à distinguer un petit sourire malicieux au coin de ses lèvres mais je n'ai vraiment pas la tête à rire.
- Je ne plaisante pas Chris. Je n'ai même pas été foutue de deviner que c'était ton père qui t'avait frappé quand tu es revenu couvert de bleus la dernière fois.
Les sourcils de Chris se froncent lentement, puis il tourne la tête vers moi, abordant désormais un air plus que sérieux. Le mien est toujours triste.
- C'est normal, tu ne pouvais pas savoir. Je t'ai menti, je mens à tout le monde à propos de ça. Arrête de dire des conneries pareilles, je crois que tu es sonnée par ton cauchemar. Je vais bien et toi aussi, dormons Davia.
Son ton est mi-protecteur mi-dur. Je ne juge pas utile d'argumenter d'avantage et soupire simplement, me levant du lit.
- Tu vas où ? demande le brun.
- Fumer, t'en veux une ?
- Non merci. Tu devrais dor...
- Je sais, je sais.
Je m'éclipse sur le balcon et observe la vue que m'offre l'autoroute, soufflant la fumée de ma clope. La fraîcheur nocturne me fait un bien fou et je ferme les yeux, tentant de calmer mes sombres pensées. Pourquoi est-ce que je refais ce rêve ? Il est tellement... terrifiant. Avec ce diable... Je rouvre les yeux, me fixant un point imaginaire. Si je ferme les paupières, les brides du cauchemar affluent dans mon cerveau et menacent de me faire chialer. J'ai quatre messages non-lus de Solveig, trois d'Eva, et six appels manqués avec message vocal de ma mère.
- Assez fumer princesse, allons dormir, j'suis crevé.
- Ça tient pas le coup Schistad ? ricané-je pour détendre l'atmosphère. Et après ça me supplie de faire un second round, qu'est-ce que ça aurait été si j'avais accepté !
- Encore une fois, tu parles trop Sters.
ONSDAG
09:02
Je me réveille dans les bras réconfortants de Chris, un léger sourire aux lèvres. Il est déjà réveillé et m'observe dormir, alors je lève les yeux au ciel et il éclate de rire.
- Tu continues dans le gros cliché Schistad, soupiré-je amusée par la situation.
- C'est de ma faute si je te trouve belle quand tu dors ?
Je ne réponds rien et me lève.
- Que fait-on aujourd'hui ? demandé-je.
- Hum... Je voudrais bien rester encore longtemps loin d'Oslo mais je dois y retourner, parce que... parce que ma mère vient me voir ce soir.
Je fronce les sourcils et m'assois sur le lit.
- Tu ne voudrais pas me parler un peu de tes parents ? Sauf si tu ne veux pas évidemment, je veux surtout pas te forcer.
- Tout va bien, sourit-il simplement. Je suis fils unique, et mes parents se sont séparés quand j'avais huit ans, je suis resté avec mon père mais il est devenu alcoolique. Il... il a prit une habitude assez, comment dire ça... étrange ? Dès que quelque chose n'allait pas il me frappait en fait.
- Oh mon Dieu, soufflé-je la bouche entrouverte.
Et après je me plains seulement parce que je suis en conflit avec ma mère... Elle au moins, ne m'a jamais frappé !
- C'est rien, vraiment, sourit Chris.
- Ton sourire est fissuré. Tu n'es pas obligé de faire semblant Chris, soufflé-je en me rapprochant de lui.
Ses yeux sondent les miens un petit moment et il finit par soupirer en fermant les paupières.
- À seize ans je suis parti en collocation et depuis l'année dernière j'ai mon appart'. Mon père vient de temps en temps, quand il a besoin d'un service le plus souvent. Et certaines fois, comme aujourd'hui, c'est ma mère qui vient, alors je suis content. Elle n'est pas au courant pour mon père.
- Tu devrais lui dire, peut-être qu'elle pourrait y faire quelque chose...
- C'est hors de question, elle doit rester en dehors de tout ça. Je suis désolé de ne pas pouvoir rester plus Davia, mais on doit rentrer, ça fait huit mois que je ne l'ai pas vu, sourit-il tristement.
Même si je n'ai pas envie de revoir ma mère et de tout expliquer à mes amies, je souris gentiment à Chris.
- Ne t'en fais pas, c'est normal, j'aurais fait la même chose. Partons après le déjeuner okay ?
- D'accord.
Alors que je vais pour me lever, Chris me retient par la taille et mon dos finit contre son torse encore dénudé. Ses lèvres se posent sur la peau brûlante de mon cou et je souris.
- Tes paroles sont sincères mais ton sourire est fissuré, je croyais que nous ne devions pas faire semblant ? chuchote Chris.
- Arrête, je ne suis pas une petite fille, je ne vais faire aucun caprice, dis-je en me retournant face au brun. J'ai juste fuit Oslo pour un enterrement, ça va mieux maintenant. Le plus important c'est ta famille à toi, tu dois revoir ta mère et je ne vais en aucun cas t'en empêcher pour une petite histoire sans importance comme la mienne.
- Tu es sûre ?
- Bien sûr, je ne suis pas égoïste, surtout pas avec toi.
Chris émet un petit rire et pose rapidement ses lèvres sur les miennes.
- Et bien moi oui, parce que maintenant tu m'appartiens rien qu'à moi, little Davia.
« Je t'ai menti. Cet enterrement n'est pas juste une petite histoire sans importance. Il hante mes rêves et les transforme en terrifiants cauchemars. Mais tu as déjà bien assez de problèmes, alors je vais bien. Je vais bien Chris, ne t'en fais pas. »
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