𝑪𝑯𝑨𝑷𝑰𝑻𝑹𝑬 𝑻𝑹𝑬𝑰𝒁𝑬

Un nouveau jour, une nouvelle soirée triste et pleine de fatigue et de haine. Après la dure journée comme les autres, une où il avait rencontré sept japonais, dont une fois le chef et une fois l'homme à la cicatrice sur toute la joue, Taehyung se sentait complètement lessivé.

Ils avaient été particulièrement violents et le bas de son dos le lançait affreusement, il se demandait même comment le premier avait réussi à entrer en lui avec tant de violence et le peu de préparation dont le brunet avait bénéficié.

D'ailleurs il avait remarqué que le premier était systématiquement le chef, le seul à vouloir, pire, il avait les yeux si brillants de désir qu'il devait adorer ça -chose qui donnait à Taehyung une folle envie de vomir à chaque fois qu'il s'en souvenait-, préparer l'antre de Taehyung pour s'y glisser. De toute façon quelqu'un devait le faire, sinon il était physiquement impossible de passer. Mais lui, le chef, adorait ça. Il demandait toujours des choses en japonais pendant cette partie de l'acte, alors que Taehyung soit debout les mains contre le mur soit à quatre pattes sur le lit, fermait le plus possible les yeux pour ne rien voir. Il demandait des choses qui le mettaient encore plus mal à l'aise, si c'était possible de le faire. Puis il y allait en lui tirant les cheveux, il en avait même arraché une poignée un jour à force de tirer, détruisant à petit feu la colonne vertébrale du jeune garçon qui  sentait ses pauvres os souffrir dans des positions qu'il n'aurait jamais dû faire. Il le prenait plus sévèrement que les autres -sauf celui avec la cicatrice, ils étaient environ au même niveau de sadisme pendant l'acte- espérant sans doute des réactions positives qui satisferaient ses fantasmes tout droits dirigés vers le brun.

Mais jamais, ô grand jamais il ne montrait un quelconque plaisir. Ça aurait été impossible. Il ne bandait même pas, quasi-jamais. Il souffrait juste, on abusait de lui sans vergogne, violemment, on abusait comme si on était abstinent à chaque fois. Taehyung avait la sensation que ces gens n'avaient que ça pour lâcher leurs nerfs, chose mauvaise pour lui, et les autres de la maison de réconfort, puisqu'ils n'étaient de ce fait jamais un minimum au repos.

D'autant plus que baiser des coréens n'avait pas l'air de leur poser un quelconque problème.

Alors que ça le devrait.

Ils avaient tant de mépris pour leur langue, leur histoire, leur architecture, leur peuple. Ils les voyaient comme des objets manipulables à leur guise, des esclaves, des choses vivantes sur lesquelles tester de monstrueuses choses dans des laboratoires morbides et perdus dans les campagnes, des esclaves sexuels là pour satisfaire leurs désirs.

Même les plus inavouables, puisque Taehyung était là.

Taehyung sentait bien ce besoin de les détruire de l'intérieur, de les terrasser, de leur montrer qu'ils avaient raison. Il le voyait bien surtout chez ceux qui le forçaient à le sucer, ce qui était de plus en plus courant et de plus en plus dégradant. Ils allaient trop loin dans sa gorge et il manquait de régurgiter le repas que monsieur Jeon lui apportait tous les soirs, ils prenaient ses cheveux et appuyaient et tiraient à une vitesse pas possible. Il n'arrivait plus à respirer, il pleurait, mais s'ils le voyaient pleurer ils arrêtaient pour le frapper avant de le forcer à les reprendre en bouche.

C'était immonde, immonde, immonde.

Tellement dégueulasse et inhumain qu'au bout d'un certain temps, il gardait les linges que monsieur Jeon lui donnaient le soir et il se frottait tout le corps avec, du moins ce qu'il pouvait atteindre. Il frottait sa peau jusqu'au sang, jusqu'à que la crasse s'en aille. Mais celle-ci s'accrochait.

Monsieur Jeon était venu ce soir, avait récupéré le linge sale de la veille, avait frotté le dos de Taehyung avec le propre, remarquant alors encore plus de traces de frottement sur sa peau, qui semblaient peu à peu se transformer pour devenir plus profondes, plus ancrées en lui. Il devrait bientôt désinfecter tout ça à l'alcool pur et il savait déjà que le jeune homme n'apprécierait pas.

Il sentait qu'il ne pouvait même plus parler, sa gorge pouvait très bien avoir été abusée aussi, même boire de l'eau avait été difficile, il avait eu une grimace de douleur en avalant, sa mâchoire visiblement endolorie.

Jungkook savait que c'était normal ici, mais en même temps, se trouver face à la douleur tous les soirs en apportant le strict minimum au jeune homme lui rappelait encore et toujours qu'il était là bien par sa faute.

Il était aussi dégoûté à l'idée d'imaginer les kempetais lui baiser la bouche, il était déjà assez immonde de violer un jeune homme mais ils le voyaient et... qui savait ce qu'ils pouvaient bien penser. C'était peu glorieux, vraiment. Rien à voir avec les valeurs de l'empire.

Où était donc l'honneur ?

Jungkook attendait juste qu'on le laisse retourner au Japon, récupérer un grade, évoluer, rendre plus riche que tous les autres le patriarche du clan avec des placements intelligents, et puis c'était tout. Il voulait ce qu'il méritait pour son travail et sa dévotion, pour son aide importante à l'épanouissement du clan et tout le reste.

Mais bon, il faisait ce qu'il devait faire, et là c'était regarder sans pouvoir rien faire un jeune homme brillant de bonheur à l'origine être détruit de l'intérieur

Il le quitta ce soir-là comme de plus en plus souvent avec un tout petit léger pincement au coeur, un rien du tout mais qui prouvait quand même qu'il était humain. Avec le recul, il aurait sûrement dû l'écouter un peu plus.

Taehyung attendit un peu, assis sur le sol comme souvent tant les draps même changés récemment donc plus propres le dégoûtaient.

Cela faisait quelques jours qu'il sortait pour discuter ou regarder le ciel avec Jangmi, et parfois Eunbi se joignait à eux.  Eunbi était vraiment très jeune, Taehyung la soupçonnait d'être mineure, mais les japonais avaient semblait-il le droit de kidnapper même des mineures pour en faire des esclaves sexuels, ce qui était le summum de la cruauté aux yeux de Taehyung. Il pensait tout le temps à son petit frère et que s'il avait eu quelques années de plus, il aurait pu, si lui était là, être à la place de cette jeune fille. Ça le révulsait. 

-Comment te portes-tu Eunbi ?, avait questionné Taehyung, le regard désireux de connaître l'état de son amie. Il était inquiet car celle-ci n'avait pipé un seul mot depuis qu'ils s'étaient assis tous les trois sur le sol terreux. 

Eunbi, de ses longs cheveux de jais, se contenta de jeter un coup d'œil au garçon avant de relever son regard vers la lune. Celle-ci les observait tous les trois dans le plus grand des calmes, ne se doutant sûrement pas de ce qui se tramait ici-bas, les malheurs de chacun enfouis dans les petits appartements en bois. Ses orbes paraissaient froids, noirs comme ses mèches et sombres comme le ciel.

Elle souffrait, et ça Taehyung ne pouvait rien y faire.

Comme pour ne pas se terrer dans le silence, l'attention de ses deux amis portée sur sa personne, la jeune fille fit pivoter son être vers eux et sourit de toutes ses dents.

-Je me porte à merveille.

Jangmi avait les yeux brillants, et ce qu'il devait arriver arriva. Des larmes entamèrent leur chemin le long de ses joues creusées tandis que chacune de ses mains vinrent se loger autour de la nuque de ses amis, comme pour rapprocher leur être du sien. Comme pour leur faire comprendre qu'elle les aimait et qu'elle serait toujours présente à leurs côtés pour les faire se sentir bien. 

L'amour manquait ici-bas, et c'était ceux qui souffraient qui devaient s'occuper de le préserver.

Taehyung était ému, tellement ému que les mots ne pouvaient pas sortir. Ses mots n'auraient jamais eu assez de puissance pour exprimer les émotions qui le submergeaient en ce moment même. La main de son amie posée sur la base de son cou et celle de l'autre lui tenant fermement la cuisse comme pour lui confirmer que, 

Tout allait bien se passer.

Ils ne bougèrent pas de cette position durant les quelques minutes qui suivirent. Floutés par l'obscurité et trahis en quelques sortes par les quelques flammes enfermées dans des lanternes de verre, ils profitaient. 

Ils rechargeaient leurs batteries comme les voitures reprenant de l'essence, ces machins puants roulants et rutilants. Celles qui étaient à peine au fond du réservoir, complètement vides quand leurs draps venaient d'être tachés de sang.

Celle qui était à plat quand les événements se mettaient à tourner en boucle dans leurs esprits. 

-Restez en vie., chuchota le brunet à l'attention des deux jeunes filles avant de s'en détacher.

Il s'était fait des amies, de réelles amies. Des amies dignes de confiance et de paroles. Il n'était plus seul, plus obligé d'affronter ça à la seule force de ses bras en tout cas. Désormais des personnes étaient prêtes à l'écouter, prête à encaisser ses plaintes et sa souffrance, prêtes à penser ses blessures que ce soit physique ou bien enfouies au fond de son être.

Il avait trouvé ses médicaments, sa médecine. 

Et il espérait être la médecine de ses deux amies désormais.

Taehyung trouvait cette nuit plutôt calme par rapport à d'habitude. 

Aucun agissement, aucun bruit, même les oiseaux et le vent s'étaient éclipsés. Une nuit bien sombre couverte par la lueur de la lune et les pleurs des trois malheureux.

Son regard se dirigea vers un coin bien spécifique de l'endroit dans lequel il se trouvait. Un coin sombre, l'entrée des appartements spéciaux sûrement. Ce coin était sombre et opaque, pourtant, 

Taehyung y aperçut une ombre s'éclipser.